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Alexander von Humboldt, Jean-Michel Provençal: „Recherches sur la respiration des poissons“, in: ders., Sämtliche Schriften digital, herausgegeben von Oliver Lubrich und Thomas Nehrlich, Universität Bern 2021. URL: <https://humboldt.unibe.ch/text/1809-Recherches_sur_la-1> [abgerufen am 27.04.2024].

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Titel Recherches sur la respiration des poissons
Jahr 1809
Ort Paris
Nachweis
in: Journal de physique, de chimie, d’histoire naturelle et des arts 69:4 (Oktober 1809), S. 261–286.
Beteiligte Jean-Michel Provençal
Sprache Französisch
Typografischer Befund Antiqua; Auszeichnung: Kursivierung; Fußnoten mit Ziffern; Schmuck: Kapitälchen; Tabellensatz.
Identifikation
Textnummer Druckausgabe: II.73
Dateiname: 1809-Recherches_sur_la-1
Statistiken
Seitenanzahl: 26
Zeichenanzahl: 53548

Weitere Fassungen
Recherches sur la respiration des poissons (Paris, 1809, Französisch)
Recherches Sur la respiration des poissons (Paris, 1809, Französisch)
Untersuchungen über die Respiration der Fische von Provençal und Humboldt (Nürnberg, 1811, Deutsch)
|261|

RECHERCHESSURLA RESPIRATION DES POISSONS; Par MM. PROVENÇAL et HUMBOLDT.

La respiration des animaux qui vivent habituellementsous l’eau, appartient aux problèmes les plus intéressansde la Physiologie. On a reconnu l’appareil respiratoire, dé-signé sous le nom de branchies, non-seulement dans lesanimaux vertébrés, mais encore dans les mollusques cépha-lopodes et acéphales, dans les gastéropodes à coquilles, dansplusieurs crustacés (les écrevisses, les homars et les mantesde mer), dans quelques vers à sang rouge (les néréides,les serpules, les sabelles). Il paroît même, d’après les re-cherches de M. Cuvier, que les petits tubes charnus que l’onvoit sortir sous l’eau, en forme de houppe, autour des épinesdes astéries, servent à pomper l’eau, et qu’ils font partiedes organes de la respiration des zoophytes échinodermes. |262| Les jeunes reptiles batraciens, avant leur métamorphose,respirent par des branchies libres qui ne sont pas persis-tantes. Dans la famille des urodèles, on trouve deux genres,la sirène bipède et le protée qui, en vrais amphibies, sontpendant toute leur vie munis à la fois de branchies et depoumons. Des huit classes d’animaux à vertèbres et d’animaux in-vertébrés dans lesquels les anatomistes ont reconnu desvaisseaux, il y en a, par conséquent, six qui ont des ap-pareils respiratoires, propres à mettre l’eau en contact avecle sang veineux. Si, d’un côté, les animaux dont le volumeest le plus considérable, les quadrupèdes pachydermes etles mammifères cétacés, sont aériens et respirent par despoumons; d’un autre côté, les animaux qui respirent parl’intermède de l’eau, sont les plus nombreux et surtout lesplus variés, soit dans leur forme extérieure, soit dans letype de leur organisation interne. Plus grand est le rôle que jouent dans l’économie de lanature, les animaux aquatiques dépourvus de poumons,et plus il est important d’examiner avec soin, quel est lemode d’action chimique qu’exerce l’eau sur le sang veineuxdans les branchies des poissons, des mollusques, des versmarins et des crustacés astacoïdes. Depuis que Boyle et Mairan ont reconnu la dissolutionde l’air dans l’eau, les physiologistes ont considéré cet airdissous, comme l’agent principal dans la respiration despoissons. Cette opinion a été générale jusqu’à l’époque dela grande découverte de la décomposition de l’eau. Dès-lorsplusieurs naturalistes ont avancé que les branchies avoientla faculté de séparer les deux principes constituans de celiquide. L’abondance de matière huileuse et adipeuse trouvéedans quelques familles de poissons, leur a même paru unepreuve directe de la décomposition de l’eau dans l’acte dela respiration. D’autres physiciens ont cru que les poissonsmunis à la fois de branchies et de vessies natatoires, res-piroient d’une double manière, en décomposant l’eau dansles branchies et en s’appropriant l’air dissous dans l’eaupar la voie du système vasculaire, dont les dernières rami-fications s’épanouissent sur la vessie aérienne. Les expériences de Priestley et de Spallanzani ont affoiblices hypothèses fondées sur l’idée d’une décomposition de |263| l’eau dans les organes respiratoires. Le travail du célèbrephysicien italien est le plus étendu que l’on ait, jusqu’àce jour, sur cet objet important. Spallanzani observa queles poissons exposés à l’air, absorbent de l’oxigène et pro-duisent l’acide carbonique. Il trouva qu’une couche de gazoxigène, placée sur la surface de l’eau dans laquelle vivoientdes tanches, diminua sensiblement en volume; que les pois-sons meurent après quelques heures, si l’eau n’est pas encontact avec l’air extérieur, et que de l’air atmosphérique,placé au-dessus d’un petit volume d’eau de rivière reposantsur du mercure, et contenant des poissons vivans, est peuà peu dépourvu de son oxigène. Il remarqua aussi qu’unetanche, renfermée dans un flacon plein d’eau distillée,périt au bout de dix-huit heures, tandis qu’une autre,renfermée dans un flacon rempli d’eau commune, n’expiraqu’après trente heures. Il conclut de ces expériences faitesdans l’eau de chaux, que les tanches produisent de l’acidecarbonique, non-seulement par l’action de leurs branchies,mais par toute la surface de leur corps (1). Dans le cours de ce travail sur la respiration des poissons, Spallanzani ne retira jamais, par l’ébullition, l’air contenudans l’eau sur laquelle les branchies avoient agi. Il ne put,par conséquent, pas examiner le changement que ce mé-lange gazeux avoit éprouvé. Il n’aborda pas cette questionimportante, savoir, si les poissons, outre l’oxigène, ab-sorbent aussi de l’azote dissous dans l’eau. M. Sylvestre a fait plusieurs expériences qui tendent àprouver que les poissons respirent l’air contenu dans l’eau,et qu’ils viennent, lorsqu’ils le peuvent, respirer l’air at-mosphérique à sa surface. Les résultats de ces dernières ex-périences sont consignés dans le premier volume du Bul-letin de la Société Philomatique, pag. 17, et dans les Leçonsd’anatomie comparée de Cuvier. M. Sylvestre a observé quedes poissons vivent très-peu de temps dans des récipiensentièrement pleins d’eau, plus long-temps lorsqu’une couched’air atmosphérique couvre l’eau, encore plus long-tempslorsque l’air atmosphérique est remplacé par du gaz oxigène.
(1) Rapport de l’air avec les êtres organisés, par Jean Senebier, tom. I, pag. 130—187.
|264| Il a reconnu que l’eau dans laquelle les poissons avoientrespiré, contenoit beaucoup moins d’air que la même eauqui n’avoit pas servi à cet usage, et que les poissons périssentau bout de très-peu de temps, si, par un diaphragme placétrès-près de la surface de l’eau, on les empêche d’y venirprendre de l’air atmosphérique.
Les observations que nous venons de rapporter, surtoutle travail étendu de Spallanzani, n’ont pas laissé de répandredu jour sur la respiration des animaux munis de branchies.Il restoit cependant un grand nombre de questions impor-tantes à résoudre. Le savant physicien de Pavie avoit faitses recherches à une époque où l’on ne connoissoit pas, àsept centièmes près, la quantité d’oxigène contenue dansl’atmosphère; il ignoroit les moyens d’évaluer de très-petitesquantités d’hydrogène dans l’azote, et d’azote dans l’hydro-gène; il employa une méthode eudiométrique très-impar-faite; il ne tenta pas d’examiner la nature de l’air contenudans l’eau qui renferme des poissons vivans; il ne put dé-terminer rigoureusement les changemens de proportions quesubissent, par l’action vitale des branchies, des mélangesgazeux d’azote et d’oxigène, ou d’oxigène, d’azote et d’hy-drogène absorbés par de l’eau distillée. Ces considérations nous ont engagés, M. Provençal et moi,à nous livrer à des recherches sur la respiration des poissonset sur la vessie natatoire qui est contenue dans leur cavitéabdominale. Nous ne nous sommes pas flattés de l’espoir defaire des découvertes importantes sur des objets qui ont déjàfixé l’attention de plusieurs physiciens, mais nous avonspensé que notre travail seroit utile aux progrès de la Phy-siologie, lors même que nous ne parviendrions qu’à un petitnombre de résultats certains, liés entre eux et fondés surles méthodes que présente l’état actuel de la Chimie pneu-matique. Nous nous sommes occupés de ces recherches pen-dant l’espace de sept mois. Mais les expériences qui nousrestent à faire n’étant point encore terminées, nous nepouvons pas rédiger notre travail en entier. Nous nous bor-nons, par conséquent, à réunir dans ce Mémoire les faitsprincipaux que nous croyons suffisamment éclaircis. Nous considérerons d’abord les poissons dans leur étatnaturel, respirant dans l’eau de rivière; nous examineronsl’action des branchies sur l’eau ambiante, imprégnée d’oxi- |265| gène et d’azote, d’acide carbonique, ou d’un mélange d’hy-drogène et d’oxigène; nous traiterons dans la suite des chan-gemens que produisent les poissons sur différens fluidesaériformes dans lesquels on les plonge; nous rapporteronsà la fin de ce Mémoire quelques expériences chimiques etphysiologiques, tentées sur l’organe que les naturalistes dé-signent sous le nom de vessie natatoire, organe dont l’usageest très-problématique. L’exactitude d’un travail sur la respiration dépend engrande partie des méthodes eudiométriques employées pourreconnoître la nature des mélanges gazeux soumis à l’actionpulmonaire. Pour éviter des détails minutieux, et pour nepas répéter le type uniforme des calculs eudiométriques, nousobserverons ici que toutes nos expériences ont été faites dansl’eudiomètre de Volta, en suivant la méthode et les règlesprescrites dans le Mémoire (1) qu’un de nous a publié con-jointement avec M. Gay-Lussac. Chaque expérience a étérépétée trois fois, on n’a regardé comme exactes que cellesdont les écarts n’excédoient pas cinq ou six millièmes. Onn’a jamais négligé d’évaluer la petite quantité d’oxigène quise trouve accidentellement dans le gaz hydrogène, employépour l’analyse de l’air. On a aussi déterminé rigoureusementl’azote contenu dans ce même gaz employé, chaque foisqu’il s’agissoit de découvrir de l’hydrogène dans un mélanged’azote et d’oxigène. Ce n’est que vers la fin de notre travail,que nous avons souvent analysé les gaz obtenus par deuxméthodes différentes, savoir par le gaz hydrogène et parle gaz nitreux. Ce dernier a été employé, d’après le pro-cédé eudiométrique indiqué récemment par M. Gay-Lus-sac (2), procédé qui réunit l’exactitude à la plus grandesimplicité, et par lequel on reconnoît la quantité d’oxigènecontenue dans un mélange gazeux, presque aussi prompte-ment que l’on en détermine la température. Pour apprécier les changemens que les poissons produisent,par leur respiration, sur l’eau dans laquelle ils sont plongés,il a été indispensable d’évaluer plus exactement qu’on nel’a fait jusqu’ici, la quantité et la nature de l’air contenu
(1) Journal de Physique, tom. lx, pag. 145.(2) Mémoires d’Arcueil, tom. ii, pag. 235.
|266| dans un volume donné d’eau de rivière. Sans cette évalua-tion, il auroit été impossible d’apprécier l’effet qui doit êtreattribué à l’action vitale des organes respiratoires des poissons.
On a mesuré, par le poids de l’eau distillée, la capacitéde trois ballons de différente grandeur. Le premier A con-tenoit 2582 grammes, le second B, 2378 gr., le troisième C, 857 gr. L’air retiré par l’ébullition a été constamment me-suré dans un tube gradué, dont 300 divisions représententun poids d’eau distillée de 40,730 gr. Ces déterminationsont été faites, au moyen d’une balance de Fortin, à unetempérature de 10° centigrades. Or, en exprimant les vo-lumes en centimètres cubes, on trouve, par dix expériencesréunies dans le tableau suivant, que l’eau de la Seine con-tient 0,0275, ou un peu moins d’un trente-sixième de sonvolume en air dissous. L’accord qu’offrent ces expériencesest si remarquable que, dans les trois mois de février, demars et d’avril, les plus grands écarts n’ont pas excédé deuxmillièmes du volume total de l’eau.
Ballons. Volume expriméen centimètres cubes. Volume d’aircontenu dans100 partiesd’eaude rivière. Oxigènecontenudans l’airretiréde l’eau.
Eauemployée. Airobtenu.
A 2582,70 72,65 0,0281 0,309
A 2582,70 69,72 0,0270 0,313
B 2378,22 64,59 0,0272 0,314
B 2373,22 66,13 0,0279 0,311
B 2378,22 62,94 0,0264 0,311
C 857,62 23,88 0,0278 0,309
B 2378,22 65,86 0,0277 0,307
A 2582,70 74,21 0,0287 0,306
B 2378,22 63,26 0,0266 0,311
B 2378,22 67,26 0,0283 0,314
|267| En retirant l’air de l’eau par l’ébullition, il faut fairepasser les vapeurs ou à travers du mercure, ou à traversde l’eau distillée récemment bouillie. Car en remplissantd’eau aérée la cloche dans laquelle on reçoit l’air, les va-peurs qui se dégagent privent cette dernière eau d’une partiede son air dissous, de sorte que, dans ce cas, on obtientplus d’air et un air moins riche en oxigène, que celui quefournit réellement le volume d’eau contenu dans le ballon. Il faut aussi éviter que l’eau qui se condense dans la clocheremplie de mercure, n’absorbe pas de nouveau une partiede l’air dégagé. On pourroit être tenté de laisser l’air, pen-dant plusieurs jours, en contact avec la couche d’eau quirepose sur le mercure. On pourroit croire que cette eaureprend exactement la même quantité d’air qu’elle a donnée;et qu’en défalquant le volume de cette eau, fournie par lesvapeurs condensées du volume total du ballon, on obtien-droit, pour résidu, l’air appartenant au volume de l’eauresté dans le ballon. Mais cette supposition n’est pointexacte. L’eau privée d’air ne reprend le mélange gazeux donton vient de la priver, que lorsque sa surface est baignée parun courant d’air atmosphérique qui se renouvelle à chaqueinstant. Elle ne se chargera (et l’expérience directe nous l’aprouvé) ni du même volume d’air, ni d’un air qui a lesmêmes proportions d’oxigène et d’azote, si l’absorption sefait sous une cloche sans contact de l’air atmosphérique libre.La nature du mélange gazeux que contiennent les eaux estmodifiée par les plus légers changemens du fluide aériformeambiant. C’est cette circonstance qui rend impraticable uneméthode proposée par quelques chimistes, savoir, celle dedéterminer la quantité d’air contenue dans l’eau, en obser-vant dans des vases fermés la diminution de volume qu’é-prouve l’air atmosphérique mis en contact avec de l’eaurécemment distillée. Dans ce procédé, d’après les calculs deM. Dalton, l’eau ne reprend que 0,019 de son volumetotal (1). La nature de l’air contenu dans l’eau de nos rivières, estaussi constante que la proportion des élémens qui consti-tuent l’air atmosphérique. Aussi ces deux phénomènes sont
(1) Système de Chimie de Thomson, tom. v, pag. 421.
|268| dépendans l’un de l’autre, et si la quantité d’oxigène con-tenue dans l’air atmosphérique éprouvoit des changemensde quelques millièmes, la pureté de l’air dissous dans l’eau,seroit fonction de la pureté moyenne de l’atmosphère, à peuprès comme la température des lieux souterrains, celle deseaux des puits, et dans la région équinoxiale, la tempé-rature de la mer dépendent de la température moyenne ap-partenante à telle ou telle latitude. Dans toutes nos expé-riences, pendant l’espace de plusieurs mois, par des tempssecs ou pendant la fonte des neiges et des glaces, l’air re-tiré par l’ébullition de l’eau de Seine, n’a varié que de 0,309à 0,314 d’oxigène. Ces résultats sont conformes aux expé-riences que nous avons faites, M. Gay-Lussac et moi, surla pureté de l’air contenu dans l’eau distillée, dans la glace,dans l’eau de pluie et dans la neige fondue. On pourroitêtre surpris au premier abord, de la quantité d’acide car-bonique retirée de l’eau de rivière. Elle va souvent jusqu’à 0,06,quelquefois jusqu’à onze centièmes du volume de l’air re-tiré; mais cet air n’étant qu’un trente-sixième du volumede l’eau, l’acide carbonique n’est au plus qu’un trois-centièmede ce dernier volume. Il provient sans doute, moins de ladécomposition de quelques atômes de carbonate de chauxet de magnésie, que de la décomposition de la matière ex-tractive, qui s’annonce surtout par l’écume que l’on observependant la distillation, dans l’eau qui passe avec l’air. Cettematière extractive et mucilagineuse, due aux détritus descorps organisés, joue peut-être un rôle important dans l’éco-nomie des poissons qui paroissent vivre sans nourriture dansl’eau des rivières ou dans celle de l’océan.
Ayant déterminé la quantité et la nature de l’air contenudans un volume d’eau connu, il nous a été facile de trouverpar une voie directe les changemens que les poissons pro-duisent dans le mélange gazeux dissous dans l’eau de rivière.Nous avons rempli de cette eau des cloches dans lesquellesétoient renfermés des poissons. Nous avons choisi les indi-vidus les plus vigoureux. On a eu soin de ne pas les laisserpérir dans les cloches, de peur qu’ils n’agissent sur l’eauaprès leur mort, bien autrement qu’ils n’agissoient pendantleur vie. L’eau qui remplissoit entièrement les cloches a étépréservée du contact de l’air extérieur par une couche demercure. Le mercure n’a généralement pas touché le corpsdes tanches. D’ailleurs, ces animaux en introduisent dans |269| leur bouche de petites quantités, sans en éprouver aucun effetnuisible. Des expériences directes nous ont prouvé que lespoissons vivent pendant huit à dix heures, reposant sur dumercure et ayant les branchies à demi plongées dans cemétal. On a laissé agir les poissons sur l’eau pendant plusieursheures. Quelquefois on a placé jusqu’à sept tanches en-semble sous des cloches très-petites. On les a retirées quandelles donnoient des marques de souffrances qui faisoientcraindre l’approche de la mort. L’eau dans laquelle lespoissons avoient respiré, a été tout de suite renfermée dansdes ballons pour en retirer l’air. Nous avons évité en trans-vasant cette eau, autant que possible, le contact de l’airextérieur, quoique nous nous fussions assurés, par desexpériences qui seront détaillées plus bas, que l’eau nereprend que très-lentement l’oxigène que les poissons lui ontenlevé. La nature du mélange gazeux retiré par l’ébullition del’eau mise en expérience, dépend naturellement du vo-lume des cloches, du nombre des poissons qui y ont respiré,du degré de leur force vitale et de la durée du contact deleurs branchies avec l’eau. Une seule tanche placée dansun volume d’eau de près de 2400 centimètres cubes, a prisen dix-sept heures tout l’oxigène dissous, moins deux cen-tièmes, du volume de l’air retiré. Dans d’autres expériences,cet air a été réduit à sept, à neuf ou treize centièmes d’oxi-gène. Nous avons réuni dans un tableau les résultats d’unepartie de nos expériences. La première colonne de ce tableau indique la quantitéd’oxigène, d’azote et d’acide carbonique trouvée dans unvolume d’eau de rivière, égal à celui dans lequel les pois-sons ont respiré. La seconde colonne représente les résultats de l’analysede l’air retiré par l’ébullition de l’eau qui a été mise encontact avec les poissons. La troisième colonne donne la différence du volume d’aircontenu dans l’eau de rivière, avant que les poissons y aientété placés, et du volume d’air retiré de cette eau, aprèsqu’elle a été soumise à l’action des organes respiratoiresdes tanches. La quatrième et la cinquième colonne indiquent l’oxi- |270| gène et l’azote que les poissons ont absorbés, et l’acide car-bonique qu’ils ont produit. La sixième et la septième colonne contiennent les pro-portions qui résultent de chaque expérience entre les quan-tités d’oxigène et d’azote absorbés, et d’acide carboniqueproduit par l’acte de la respiration des poissons. La quantité d’air que l’on retire par l’ébullition de l’eaudans laquelle les poissons ont vécu, ne sert pas à mesurerl’action plus ou moins grande que ces animaux ont exercéesur le liquide ambiant. L’intensité de cette action vitale n’estpas en raison inverse du volume de l’air qui reste dissousdans l’eau. Si l’azote n’étoit pas absorbé par les poissons,et si l’oxigène disparu étoit représenté par l’acide carboni-que produit, on retireroit par l’ébullition exactement lamême quantité d’air de l’eau de rivière pure, et de celle danslaquelle les poissons ont été renfermés. Mais nous verronsbientôt que l’absorption de l’oxigène et de l’azote n’est mar-quée qu’en partie, et très-foiblement, par l’acide carboniquequ’expirent les poissons. Pour ne point fatiguer le lecteur par le détail d’un grandnombre de calculs uniformes, je me bornerai à exposerdans un seul exemple, la marche que nous avons constam-ment suivie. Le 7 mars, on a placé sept tanches sous unecloche remplie d’eau de rivière. La cloche contenoit plus de4000 centimètres cubes. Les poissons y ont respiré pendanthuit heures et demie. On a rempli de cette eau, sur laquelleles poissons avoient agi, un ballon dont le volume étoit de2682 centimètres cubes. L’air retiré par l’ébullition, et me-suré à la température de dix degrés centigrades, a été de453 parties. Un volume d’eau de rivière pure auroit fourni524 parties d’air, ou 71 parties de plus que l’eau qui avoitservi aux poissons. Les 453 parties lavées avec de l’eau dechaux, ont été réduites à 300, ce qui a indiqué 153 partiesd’acide carbonique. On a déterminé l’oxigène du résidu del’air par l’eudiomètre à gaz hydrogène et par le gaz nitreuxdans l’appareil de M. Gay-Lussac. Trois expériences ontdonné les résultats suivans:
    • 0,036
    • 0,037
    • 0,031
    oxigène.
|271| Les 453 parties d’air retiré de l’eau qui a été en contactavec les organes respiratoires des poissons, contenoient parconséquent
  • 10,5 oxigène,
  • 289,5 azote,
  • 153,0 acide carbonique.
Or, nos expériences antérieures nous avoient appris qu’unvolume d’eau de Seine pure de 2582 centimètres cubes,contient en gaz dissous:
  • 155,9 oxigène,
  • 347,1 azote,
  • 21,0 acide carbonique.
  • 524
Par conséquent les sept tanches ont absorbé en huitheures de temps, 145,4 d’oxigène, 57,6 d’azote, et elles ontproduit, dans le même espace de temps, 132 d’acide car-bonique. Il en résulte que, par la respiration des poissonssoumis à cette expérience, le volume de l’oxigène absorbéexcédoit seulement de deux tiers le volume de l’azote dis-paru, et que plus d’un huitième du premier n’avoit pas étéconverti en acide carbonique. L’oxigène absorbé étoit àl’azote absorbé = 100:40, et à l’acide carbonique pro-duit = 100 : 91. |272|
NaturedesGaz. Air avant l’expérience. Air après l’expérience. Différence. Les poissonsont Oxigène absorbéà l’azote absorbé. Oxigène absorbéà l’ac. carbon. produit. REMARQUES.
Absorbé. Produit.

Total........ 175,0 135,1 39,9 Le 28 février. 3 tanchespendant 5 heures 15minutes de temps. Bal-lon C.
Oxigène...... 52,1 5,6 ...... 46,5 ...... 100:43
Azote........ 115,9 95,8 ...... 20,1 ......
Acide carbon.. 7,0 33,7 ...... ...... 26,7 ...... 100:57

Total........ 524,0 404,4 119,6 Le 3 mars. 7 tanchespendant 6 heures detemps. Ballon A.
Oxigène...... 155,9 44,0 ...... 111,9 ...... 100:87
Azote........ 347,1 249,5 ..... 97,6 ......
Acide carbon.. 21,0 110,9 ...... ...... 89,9 ...... 100:80

Total........ 483,0 524,0 71,0 Le 7 mars. 7 tanchespendant 8 heures \( \frac{1}{2} \) detemps. Ballon A.
Oxigène...... 155,9 10,5 ...... 145,4 ...... 100:40
Azote........ 347,1 289,5 ...... 57,6 ......
Acide carbon.. 21,0 153,0 ...... ...... 132,0 ...... 100:91

Total........ 483,0 345,5 137,5 Le 11 mars. 1 tanchependant 17 heures detemps. Ballon B.
Oxigène...... 143,7 4,2 ...... 139,5 ...... 100:19
Azote........ 320,0 294,1 ...... 25,9 ......
Acide carbon.. 19,3 47,2 ...... ...... 27,9 ...... 100:20

Total........ 483,0 408,0 75,0 Le 24 février. 3 tanchespendant 7 heures \( \frac{1}{2} \) detemps. Ballon B.
Oxigène...... 143,7 62,6 ...... 81,1 ...... 100:43
Azote........ 320,0 285,4 ...... 34,6 ......
Acide carbon.. 19,3 60,0 ...... ...... 40,7 ...... 100:50

Total........ 483,0 398,6 84,4 Le 14 février. 3 tanchespendant 5 heures detemps. Ballon B.
Oxigène...... 143,7 40,0 ...... 103,7 ...... 100:71
Azote........ 320,0 246,6 ...... 73,4 ......
Acide carbon.. 19,3 112,0 ...... ...... 92,7 ...... 100:89

Total........ 483,0 372,5 110,5 Le 20 février. 2 tanchespendant 7 heures detemps. Ballon B.
Oxigène...... 143,7 37,8 ...... 105,9 ...... 100:63
Azote........ 320,0 252,9 ...... 67,1 ......
Acide carbon.. 19,3 81,8 ...... ...... 62,5 ...... 100:59
|273| Malgré les différences apparentes que présentent les nombresréunis dans le tableau précédent, toutes nos expériencesconduisent aux mêmes résultats généraux. Les poissons quihabitent les rivières se trouvent, sous le rapport de l’oxi-gène contenu dans le liquide ambiant, dans la même situa-tion qu’un animal respirant dans un mélange gazeux, quicontient moins d’un centième d’oxigène. Car l’air dissousdans l’eau, ne s’élève qu’à \( \frac{27}{1000} \) du volume de ce liquide,et \( \frac{31}{100} \) de l’air dissous, sont de l’oxigène pur. La foible con-densation de l’oxigène contenu dans l’eau qui traverse lesfeuillets des branchies, pourroit faire supposer peu d’énergiedans les organes respiratoires des poissons; on pourroit re-garder la respiration de ces animaux comme peu importantepour la conservation de leur vie. Mais un très-grand nombrede phénomènes prouve, au contraire, que les poissons souf-frent par la moindre suspension de leur respiration. Ilsdonnent des marques sensibles de malaise et d’angoisses,lorsqu’ils se trouvent plusieurs enfermés dans un volumed’eau peu considérable, et privé du contact de l’air extérieur.Ces souffrances semblent dues, bien plus à la diminutionrapide qu’éprouve l’oxigène dissous, qu’à l’acide carboniqueproduit. Sans doute ce dernier acide (comme nous le prou-verons plus bas) agit fortement sur le système nerveux despoissons, soit qu’ils le respirent à l’état élastique, soit queleurs branchies touchent l’eau chargée d’acide carbonique.Mais ces effets funestes ne sont bien marqués, que lorsquel’eau contient plus d’un huitième de son volume en acidecarbonique. Or un grand nombre de poissons que l’on ren-ferme sous des cloches étroites remplies d’eau et sans contactavec l’air, ne donnent à cette eau tout au plus qu’un cen-tième de son volume d’acide carbonique. Le plus souventle dégagement de cet acide est bien au-dessous de la quan-tité que nous venons d’indiquer. Une tanche, par exemple,a été retirée d’un volume d’eau de 2400 centimètres cubes,la quantité d’acide carbonique dont cette eau se trouvoitchargée à la fin de l’expérience, ne s’élevoit pas à deuxmillièmes du volume total. Par conséquent l’état asthéniquene pouvoit être attribué qu’à la petite quantité d’oxigènequi étoit restée dissoute dans l’eau. En effet cette quantitén’étoit qu’un cinq-millième du volume total du liquide, etnous avons vu respirer des poissons dans des eaux danslesquelles la densité de l’oxigène dissous étoit moindre |274| encore. Ils s’y trouvoient dans un état de langueur extrême;mais le mouvement régulier de leurs opercules et de leurmembrane branchyostége annonçoit que, malgré leur foi-blesse, ils savoient encore soustraire de l’oxigène à l’eau.Alors ce dernier liquide pouvoit être comparé à une atmo-sphère qui ne contiendroit que 0,0002 d’oxigène. Cette con-sidération prouve sans doute l’admirable perfection des or-ganes respiratoires des poissons. C’est par les nombreusesramifications de l’artère pulmonaire que leur sang entre dansle contact le plus intime avec l’eau, qui, par le jeu desmuscles, est chassée à travers les feuillets des branchies. Nous citerons une expérience qui, plus que toute autre,paroît prouver que les poissons souffrent dans l’eau où ilsont respiré long-temps, bien moins par l’accumulation del’acide carbonique produit, que par le manque d’oxigènenécessaire aux fonctions animales. Spallanzani avoit seule-ment observé que des tanches mises dans des flacons ren-versés et pleins d’eau distillée périssent dans un espace detemps, qui est d’un tiers plus court que celui dans lequelelles se trouvent suffoquées dans de l’eau commune ou aérée.Dans ses expériences les poissons vécurent jusqu’à dix-huitheures dans de l’eau bouillie. Mais il paroît que ce célèbrephysicien n’a pas employé assez de précaution pour priverl’eau de tout l’air qu’elle contenoit. Ce soin est d’autant plus important que l’eau exerce uneaction très-inégale sur l’oxigène et sur l’azote qu’elle dis-sout. Retenant le premier avec beaucoup plus de force quele dernier, la densité de l’oxigène contenu dans l’eau, nediminue pas en raison du volume de l’air chassé, soit parl’ébullition, soit par la dissolution d’un sel, soit enfin parun prompt refroidissement. Il est probable que les derniersatômes d’air que l’eau abandonne, sont de l’oxigène presquepur, et c’est à cause de cette grande affinité de l’eau pourl’oxigène que quelquefois, dans des eaux que l’on croitavoir privées de tout air, les poissons trouvent encore l’élé-ment qui est indispensablement nécessaire pour la conser-vation de leur vie. Dans le cours de nos expériences nous avons aisément dis-tingué les eaux entièrement privées d’air, de celles auxquellesles branchies des poissons enlevoient encore de très-petitesquantités d’oxigène. Ce n’est qu’en faisant bouillir de l’eau |275| fraîchement distillée dans des matras dont l’ouverture plongedans un vase rempli d’eau bouillante, ce n’est qu’en em-pêchant que l’air pût s’introduire dans le col du matrasrenversé sur du mercure, que nous avons obtenu de l’eautellement privée d’air après son refroidissement, qu’elle agis-soit comme un fluide délétère sur les poissons. On a faitpasser dans cette eau distillée, à travers le mercure, depetits poissons rouges (Cyprinus auratus), qui sont extrê-mement vivaces: dans quelques individus, l’effet de l’eaudistillée a été des plus frappans. Après quatre à cinq mi-nutes de temps, ils sont tombés de côté; après dix minutes,ils se sont fortement agités. Ce mouvement convulsif a étésuivi d’une prostration totale des forces. Après vingt mi-nutes, les petits poissons ont été trouvés au fond de lacloche presque sans mouvement, et comme s’ils alloientmourir. Ils sont revenus à la vie en les plongeant dans del’eau de rivière, ou en introduisant une petite portion decette eau sous la cloche. D’autres individus de la mêmeespèce ont paru pouvoir suspendre leur respiration pluslong-temps. Ils n’ont paru souffrir qu’après une heure etdix minutes de temps: on les a trouvés presque morts aprèsune heure et quarante minutes. Une petite anguille, ex-trêmement vivace, a expiré, au bout de deux heures unquart, dans de l’eau soigneusement distillée. Elle a eu defortes convulsions avant d’expirer. Ces effets de l’eau dis-tillée sont d’autant plus remarquables, que les souffrancesdes poissons paroissent commencer bien plus lentement,lorsqu’on les place sur du mercure dans un gaz azote si pur,que les expériences eudiométriques n’y font pas connoîtreun millième d’oxigène. Nous n’insistons pas ici davantagesur ces différences que présente l’action des fluides irres-pirables liquides ou gazeux, il nous reste encore plusieursexpériences à faire sur cet objet délicat. Il suffit de rappelerque la distribution des vaisseaux elle-même prouve qu’unerespiration suspendue est bien plus dangereuse pour lespoissons que pour les reptiles. Les premiers ont une circu-lation double, comme les mammifères et les oiseaux. Toutle sang veineux qui retourne au tronc artériel, doit passerpar les branchies qui sont l’organe pulmonaire des poissons.Au contraire, dans les batraciens et dans les autres reptiles aériens, la circulation pulmonaire n’est qu’une fraction plusou moins considérable de la grande. Par conséquent les |276| animaux de cette dernière classe, même à l’époque où ilsne sont pas dans un état léthargique, peuvent exister long-temps privés du contact de l’air. Nous venons de voir que la quantité d’oxigène absorbéepar les poissons est très-petite, qu’ils respirent encore dansune eau qui ne contient que 0,0002 de son volume en oxi-gène dissous, et que, malgré la foiblesse et la lenteur de cetterespiration, l’action non interrompue des organes respira-toires est indispensablement nécessaire pour la conservationde leur vie. Maintenant, d’après l’examen rigoureux quenous avons fait des mélanges gazeux, trouvés dans l’eauqui a été en contact avec les branchies des tanches, il noussera facile de déterminer, pour chaque poisson, quelles sontles quantités d’oxigène et d’azote absorbées, ou d’acide car-bonique produit dans une heure de temps. Nous réunis-sons ces nombres dans le tableau suivant:
ÉPOQUES. Oxigènede l’airretiré del’eau aprèsl’expér. Nombredes tanchesqui ontvécu dansl’eau. Heuresque l’expér.a duré. Absorptiondans 1 heure de temps;centimètres cubes. Acidecarboniqueproduit. Grandeurdesballons.
en oxigène. en azote.
28 février.. 0,056 3 5 \( \frac{1}{4} \) 0,401 0,174 0,230 C
3 mars.... 0,151 7 6 0,362 0,315 0,291 A
7 mars.... 0,034 7 8 \( \frac{1}{2} \) ..... 0,131 0,303 A
11 mars.... 0,017 1 17 1,114 0,207 0,223 B
28 février.. 0,178 3 7 \( \frac{1}{2} \) 0,489 0,201 0,246 B
24 février.. 0,141 3 5 0,942 0,664 0,840 B
20 février.. 0,130 2 7 1,041 0,651 0,606 B
Ces résultats offriront plus d’intérêt encore lorsqu’onpourra les comparer avec les quantités d’oxigène absorbé,dans un même espace de temps, par des animaux de classesdifférentes. Nous sommes occupés d’une série d’expériencespar lesquelles nous déterminons les volumes d’oxigène ab- |277| sorbé par les plus petits mammifères, par les oiseaux, lesreptiles et les poissons. Nous comparerons nos résultats au poids de l’animal, auvolume de son cœur et au nombre de contractions de cetorgane. Il nous a paru qu’un travail de ce genre pouvoit de-venir intéressant par là même que les analyses de l’air,qui en sont la base principale, seront toutes faites d’aprèsune méthode uniforme et certaine. Suivant le tableau quenous venons de présenter, une tanche n’épuiseroit un mètrecube d’eau de rivière que dans l’espace de vingt-un mois.Suivant l’expérience de Lavoisier, un homme consume l’oxi-gène contenu dans un mètre cube d’air atmosphérique, dansl’espace de six heures. Par conséquent un homme absorbe,dans le même temps, 50,000 fois plus d’oxigène qu’unetanche. L’oxigène que les poissons enlèvent à l’eau, n’est jamaisentièrement représenté par la quantité d’acide carboniqueproduit; on observe que ce dernier ne s’élève au plus qu’àquatre cinquièmes du premier. Souvent l’oxigène consuméest le double de l’acide carbonique formé. Ce phénomène in-dique une différence frappante entre la respiration des pois-sons et celle des mammifères. Or que devient cette grande quantité d’oxigène absorbéeet non reproduite dans l’acide carbonique dégagé? Les pois-sons plongés dans de l’eau, respirant au moyen de l’eau quitraverse leurs branchies, produisent peut être de l’eau eux-mêmes. Nous sommes privés de moyens pour résoudre ceproblème. En réfléchissant sur la désoxigénation d’une grandemasse de sang (1) dans le cerveau des mammifères, et surles rapports qui se manifestent dans toutes les classes d’a-nimaux entre le système nerveux et le système vasculaire,on seroit tenté de croire que la grande irritabilité des pois-sons, la vivacité de leurs mouvemens, et l’énorme forcemusculaire qu’ils déploient dans un fluide, qui leur offreune grande résistance, dépendent en partie de l’accumu-lation d’un principe qui vivifie les fonctions vitales desêtres organisés.
(1) Recueil d’observations de zoologie et d’anatomie comparée, par Humboldt et Bonpland, pag. 107.
|278| Une autre différence importante qu’offrent les poissonset les mammifères dans leur respiration, se trouve dansl’absorption de l’azote. Cette absorption est à celle de l’oxi-gène comme 1:2, quelquefois comme 5:4. Elle est si con-sidérable, que pour l’attribuer à de simples erreurs d’ex-périence, il faudroit supposer qu’on s’est trompé de 60,quelquefois de plus de 100 parties d’un eudiomètre, dontles résultats s’accordent généralement à deux ou trois parties.On connoît la quantité d’azote qui est dissoute dans un vo-lume donné d’eau de rivière, et cependant le volume totalde l’air retiré par l’ébullition de cette même quantité d’eau,sur laquelle les poissons ont agi, est (après l’avoir mis encontact avec l’eau de chaux) souvent plus petit que l’azotepréexistant. En retranchant de ce volume lavé l’oxigèneque les poissons n’ont pas consumé, on aura isolémentla petite partie d’azote qui est restée dans l’eau. Priestley, Davy, Henderson et Thomson ont cru aussi observer uneabsorption d’azote dans la respiration des animaux à sangchaud. Davy jugea même que dans l’homme le volume del’azote absorbé étoit à celui de l’oxigène absorbé, en pro-portion de 100 à 10. Mais les nouvelles expériences deMM. Allen et Pepys, et celles que M. Berthollet vient defaire en se servant de son manomètre et de l’eudiomètreà gaz hydrogène, sont contraires à l’idée d’une absorptiond’azote dans la respiration des mammifères. Nous ne l’avonspas non plus observé dans nos expériences sur les grenouillesque nous avons fait mourir dans des volumes d’air atmos-phérique exactement mesurés et contenus dans des flaconsbouchés à l’émeri. Les grenouilles y ont vécu tantôt quatre,tantôt six jours. Elles ont réduit un volume d’air de 212 cen-timètres cubes à 202; et pendant ce temps, l’acide carbo-nique produit a été de plus d’un tiers moindre que l’oxigèneabsorbé. Les résultats de deux expériences ont été si uni-formes, que dans l’une l’air restant contenoit 0,039; dansl’autre 0,033 d’oxigène. En supposant que l’absorption del’oxigène eût été proportionnelle au temps, ce qui n’estpas tout-à-fait probable dans un animal qui meurt asphyxié,chaque grenouille avoit consumé dans une heure 0,23 cen-timètres cubes, ce qui est deux tiers de moins qu’une tanche.Cette différence entre un batracien et un autre animalvertébré muni de branchies, est un phénomène physiologique |279| très-curieux et dans lequel se manifeste encore la grandeactivité des organes respiratoires des poissons. Dans les animaux à sang chaud, la respiration tend àaugmenter les proportions de l’azote, parce qu’elle enlèveau corps de l’hydrogène et du carbone. L’accumulation del’azote n’y est due qu’à la nutrition. Dans les poissons, aucontraire, qui peuvent être soumis à un jeûne prolongé,la masse de l’azote augmente par la respiration même. Aussila chair musculaire des poissons est singulièrement putres-cible, elle manifeste, pour ainsi dire, le plus haut degréd’animalisation, et fournit, en se décomposant, une grandequantité d’ammoniaque. Ce sont principalement les expériences faites avec deseaux privées d’air, et artificiellement imprégnées d’hydro-gène et d’oxigène, qui prouvent que l’absorption de l’azotedans la respiration des poissons, loin d’être accidentelle,tient réellement à une assimilation organique. Nous avonsmis de l’eau récemment bouillie, en contact avec des mé-langes de deux cents parties d’hydrogène et de cent partiesd’oxigène. La présence du dernier gaz détermine alors uneforte absorption de l’hydrogène, qui, par lui-même, nemanifeste que peu d’affinité pour l’eau. Les poissons placésdans un liquide qui contenoit de l’oxigène, de l’hydrogène etde l’azote, parurent souffrans dès qu’ils furent placés sous lacloche qui étoit renversée sur du mercure. On les retirapresque morts après trois heures de temps; on distilla deuxportions d’un volume égal de l’eau imprégnée d’hydrogène:l’air retiré de la portion qui avoit été conservée bouchéedonna sensiblement la même quantité d’hydrogène que l’airfourni par l’eau dans laquelle les poissons avoient respiré.Ces animaux avoient consumé une grande quantité d’oxigèneen le séparant de l’hydrogène dissous. Les organes douésde vitalité n’exercent pas d’action sur les élémens qui nedoivent pas être assimilés. Il n’en est pas des animaux commedes plantes qui entraînent, par l’ascension de leur sève, plu-sieurs sels accidentellement mêlés au sol dans lequel leursracines sont fixées. Des eaux que nous avons chargées d’acide carboniquejusqu’à saturation, ont agi comme un poison actif sur lestanches et les poissons rouges. Les premières y sont mortesen peu de minutes, dans un état convulsif. L’action de l’acide |280| muriatique oxigéné est à peine plus prompte: ces deux acidesdoivent être considérés comme agissant plus directement surle système nerveux. D’ailleurs l’acide carbonique, en secombinant avec l’eau, n’en chasse pas tout l’oxigène. Nousavons évalué le mélange d’oxigène et d’azote que contiennentles eaux chargées de leur volume d’acide carbonique. Laproportion de ce mélange obtenu par l’ébullition, étoit de30 d’oxigène à 70 d’azote. Mais le volume total de ces deuxgaz n’étoit que le tiers de celui que l’on retire ordinairementde l’eau de rivière. Les poissons ne respirent-ils que par leurs branchies, ou lecorps et la queue de ces animaux ont-ils aussi la propriétéd’absorber l’oxigène et l’azote, et de produire de l’acidecarbonique? Après plusieurs tentatives infructueuses, nousavons réussi à résoudre cette question d’une manière quine laisse aucun doute. On a fait passer la tête de tanchestrès-vivaces dans des colliers de liége doublés en toile cirée.Le poisson a été placé dans un vase cylindrique, de ma-nière que le collier en formoit le couvercle, et que la têten’étoit point en contact avec l’eau de Seine contenue dansle vase; le tout a été mastiqué par dehors. Pour être plussûr que l’eau du baquet, dans lequel a été plongé l’appareil,ne communiquoit pas à travers la toile cirée ou par quelquespores des bouchons de liége, avec l’eau qui entouroit lecorps de la tanche, le bouchon a été couvert intérieure-ment d’une couche de mercure de sept ou huit millimètresde haut que l’on a fait entrer d’avance dans le vase cylin-drique renversé. Malgré leur position gênée, les tanchesont vécu dans cet état pendant cinq heures; on les a retiréespeu souffrantes; on a distillé de suite l’eau que renfermoitle vase, et l’on a comparé l’air obtenu à celui donné parl’eau du grand baquet dans lequel se trouvoit la tête dupoisson. Cette expérience curieuse a été répétée quatre fois;elle prouve que le corps des tanches agit sur l’eau commeles branchies, et que la différence ne consiste que dansl’énergie de l’action vitale, et surtout dans la proportiondes quantités d’oxigène et d’azote absorbés, et d’acide car-bonique produit. Nous n’ignorons pas que Spallanzani avoitdéjà annoncé que les poissons respirent par les écailles,mais son assertion ne se fonde sur aucune expérience analogueà celle que nous venons de décrire. Il s’étoit contenté deplacer le corps des tanches dans de l’eau de chaux, qui les |281| met dans un état maladif, et d’examiner l’action de la peaudes poissons récemment morts sur le gaz oxigène. D’après toutes les expériences que nous avons réunies dans ceMémoire, il est presque superflu de parler de celles danslesquelles des poissons ont été placés sous des cloches dansde très-petites quantités d’eau de rivière, entre une couchede mercure et une couche d’air exactement mesuré. Lespoissons enlèvent l’oxigène à l’eau, celle-ci l’enlève à sontour à l’air qui couvre la surface de l’eau. Mais comme l’étatprimitif de saturation ne se rétablit pas complètement, lespoissons viennent à la surface pour y respirer l’air élastique. La même chose arrive lorsque de grands poissons sontforcés de vivre dans des vases qui ne contiennent que très-peud’eau. Il est certain que leurs branchies sont plus propresà séparer l’oxigène dissous dans l’eau, qu’à soustraire l’oxi-gène à l’air. Cependant les poissons aiment mieux éleverla tête au-dessus de l’eau, que respirer dans un liquidequi est presque privé d’oxigène et qui retient, avec unecertaine force, les dernières portions de cet élément. Sil’air atmosphérique rendoit promptement à l’eau ce que lespoissons lui enlèvent par leur respiration, il ne seroit pasnécessaire de leur donner de temps en temps de l’eau surlaquelle les branchies n’ont pas encore agi. Nous avons exa-miné, à différentes reprises, ces eaux contenues dans desvases ouverts. Deux tanches ont vécu pendant vingt-troisheures dans un volume d’eau de Seine de près de cinq millecentimètres cubes. On les a retirées bien affoiblies. L’airqu’a donné cette eau étoit réduit à 0,073 d’oxigène, et ilcontenoit 0,11 d’acide carbonique. Les diaphragmes placés dans des vases ouverts à dix cen-timètres au-dessous de la surface de l’eau, ne font souffrirles poissons que parce qu’ils les empêchent de venir respirerl’air élastique, et de chercher dans l’atmosphère ce qu’ilsne trouvent presque plus dans l’eau qui les entoure. Eneffet les couches d’eau supérieures, celles qui sont le plusvoisines de l’air, reprennent plus promptement l’oxigèneperdu que les couches inférieures. Par conséquent le poissonse trouve déjà mieux lorsque, sans élever la bouche au-dessus de l’eau, il s’approche de cette région dans laquellepénètre l’oxigène de l’atmosphère. Nous avons cru devoir faire des expériences directes sur |282| la propagation progressive de l’oxigène et de l’azote atmos-phérique dans l’eau récemment privée d’air. Nous avonsobservé que ces élémens passent assez lentement d’une mo-lécule d’eau à une autre. De grandes masses d’eau bouilliessont restées exposées à l’air libre pendant deux jours dansdes matras de plus d’un mètre de hauteur, et dont l’ou-verture étoit très-étroite. Nous avons enlevé par un siphon,les couches d’eau supérieures et inférieures. Les dernièresont constamment donné moins d’air, et un air moins purque les premières. En répétant cette expérience avec untriple mélange de gaz, on remarquera sans doute que chaquebase descend avec une vîtesse qui lui est propre, et quidépend de son affinité pour l’eau. C’est un privilége que la nature a accordé à la plupartdes animaux munis de branchies, de pouvoir respirer à-la-fois dans l’eau et dans l’air. Ils ne suspendent pas leurrespiration, lorsque sortant de l’eau on les expose à l’air.Ils absorbent l’oxigène gazeux comme fait un reptile munide poumons. Il est connu que l’on engraisse des carpes enles nourrissant suspendues dans l’air, et en leur mouillantde temps en temps les ouies avec de la mousse humidepour empêcher qu’elles ne se dessèchent. Nous avons examiné l’action des poissons sur les différensgaz. Ces expériences ont été faites avec le barbeau (Cyprinusbarbus); la tanche (C. tinca); le goujon (C. gobio); l’an-guille (Muræna anguilla); et le petit poisson rouge (C.auratus). Les poissons placés dans l’air atmosphérique oudans le gaz oxigène, écartent leurs opercules bien plus quedans l’eau. Ils se trouvent, dans l’air atmosphérique, en-tourés d’un fluide dans lequel l’oxigène est vingt fois pluscondensé que dans l’eau. Ils absorbent, en temps égal, toutautant d’oxigène de l’air que de l’eau. Cependant ce modede respiration doit fatiguer des organes destinés à s’ap-proprier de l’oxigène qui n’est pas à l’état élastique. Onpourroit croire que les poissons périssent dans l’air, parcequ’en dégageant du calorique, ils échauffent leur sang. Maissi cet échauffement du sang étoit la suite de leur respi-ration dans l’air, ils devroient mourir bien plus promp-tement dans le gaz oxigène que dans un mélange gazeuxde 90 parties d’azote, et de 10 d’oxigène. Cependant nosexpériences nous ont prouvé le contraire. Les poissons fer-meroient leurs opercules au lieu de les écarter avec force, |283| s’ils sentoient que l’absorption de l’air augmente leur tem-pérature. Nous avons introduit des thermomètres dans l’in-térieur des poissons qui respiroient dans l’eau, dans l’oxigène,dans l’air atmosphérique et dans l’azote pur, sans apper-cevoir que la température de ces animaux différât sensible-ment de celle des milieux ambians. Des tanches qui ontrespiré pendant vingt-quatre ou vingt-cinq heures dans le gazoxigène, n’ont pas eu l’air de souffrir beaucoup; et cepen-dant, en répétant les expériences de Broussonnet sur l’effetde l’eau chaude sur les poissons, nous avons observé qu’unchangement rapide de 5 à 6 degrés centigrades met ces ani-maux dans un état convulsif. Les tanches par leur corps seul n’agissent pas sensible-ment sur l’air atmosphérique ou sur le gaz oxigène. Nousavons adapté des colliers de liége au col des poissons. L’ap-pareil a été le même que celui décrit plus haut. La queuede la tanche et son corps se trouvoient dans l’air, la têteplongeoit dans l’eau. Nous nous sommes assurés qu’il n’yavoit pas d’absorption d’oxigène lorsqu’il n’existoit aucunecommunication entre l’air et l’eau. Nous ne rapporterons qu’une expérience du grand nombreque nous avons faites sur les gaz. Une tanche, par la res-piration de ses branchies, a réduit en dix-neuf heures etdemie de temps, un volume d’air atmosphérique de 133,9 cen-timètres cubes à 122,9. Ce résidu après avoir été lavé avecde l’eau de chaux, contenoit 0,132 d’oxigène. Par conséquentla tanche dans une heure de temps avoit absorbé 0,52 cen-timètres cubes d’oxigène. Dans deux expériences faites surle gaz oxigène, l’absorption a été dans l’une de 0,54, dansl’autre de 0,40 centimètres cubes par heure. Les poissons, comme nous l’avons observé plus haut, ex-pirent en peu de minutes dans du gaz acide carbonique. Ilssouffrent plus dans l’hydrogène que dans l’azote. Ils sontdans un état de mort apparente si on les y enferme pendantquatre ou cinq heures. On remarque généralement, que dansles gaz azote et hydrogène, ils ferment leurs opercules commepour garantir leurs branchies du contact de ces deux gaz.Un azote qui ne contenoit pas un millième d’oxigène estresté pur, quoique des poissons rouges y aient séjournélong-temps. On trouve quelquefois un peu d’acide carbo-nique dans l’azote et dans l’hydrogène employés. Comme |284| ces gaz étoient purs, il faut supposer que cet acide carbo-nique est sorti de l’intérieur du poisson, peut-être de savessie natatoire. Il nous resteroit à exposer à la fin de ce Mémoire lesnombreuses expériences que nous avons tentées sur cet organeextraordinaire. Mais comme notre travail n’est point encoreterminé, et que nous avons cru devoir éviter ici des détailsphysiologiques, nous nous bornerons à citer quelques faitsisolés. Depuis que M. Biot a fait l’observation intéressante queles poissons de mer qui habitent de grandes profondeurs,ont plus d’oxigène dans leurs vessies natatoires que les pois-sons qui vivent à la surface, et qu’il a vu dans les premierscette quantité d’oxigène s’élever à 0,87; il étoit importantd’examiner de nouveau l’air contenu dans la vessie des pois-sons de rivières. Nous avons trouvé que la nature de cet airest très-variable dans la même espèce. Les différences n’ontpas paru dépendre des saisons et de la température des eaux.On n’a jamais trouvé moins d’un centième d’oxigène. Lesanguilles dont la vessie natatoire est pourvue d’un corpsglanduleux, ne donnent généralement que très-peu d’air,et cet air ne contient que 0,013 à 0,024 d’oxigène. Le termemoyen d’un grand nombre d’expériences faites sur les carpesa été de 0,071 d’oxigène, 0,052 d’acide carbonique, et 0,877d’azote. La vessie d’une carpe qui pèse 2 kilogrammes con-tient un volume d’air de 103 centimètres cubes. Elle renferme,par conséquent, une quantité d’oxigène qui pourroit servirà la respiration de ce poisson pendant l’espace de huit àdix heures. Nous avons trouvé des carpes dans lesquellesla pureté de l’air de la vessie s’élevoit à 0,107 d’oxigène. On a fait respirer des tanches non-seulement dans du gazhydrogène, mais aussi dans des eaux chargées d’un mé-lange d’hydrogène et d’oxigène. Pas un atôme d’hydrogènen’est entré dans la vessie natatoire des poissons soumis àces expériences. Il a paru que l’oxigène augmentoit un peudans la vessie des tanches renfermées dans du gaz oxigène;on y a trouvé 0,125 d’oxigène, tandis que plusieurs autresvessies de tanches donnoient constamment 0,092 et 0,096.Comme il est impossible de faire deux expériences sur lemême individu avant et après son contact avec le gaz oxigène,les résultats restent incertains. On a enlevé, par une incision |285| latérale, la vessie natatoire à plusieurs tanches. Elles ontvécu dans cet état pendant trois jours; elles ont pu s’éleverà la surface de l’eau. Quelques-unes ont nagé dans toutesles directions, sans que l’équilibre de leur corps ait parudérangé. Une d’elles a paru si peu souffrante, qu’il eûtété difficile de la distinguer des tanches qui n’avoient pointété opérées. Cependant le plus grand nombre est resté aufond du vase, souffrant et penché vers le côté. Il nous a paru important de vérifier, par une expériencedirecte, si les tanches auxquelles on a enlevé la vessie na-tatoire depuis trois jours, respiroient de la même manièreque celles qui en sont pourvues. Une de ces tanches opéréesresta pendant six heures et demie dans un volume d’airatmosphérique d’environ 700 centimètres cubes. Le résidune contenoit que 0,10 d’oxigène. On n’y trouva que 0,02d’acide carbonique. Cette expérience prouve directementque sans la présence de la vessie natatoire les poissonsabsorbent de l’oxigène, et que ce sont leurs branchies quiont la double propriété de soustraire à l’eau l’oxigène dis-sous, et d’assimiler l’oxigène contenu dans un mélangeaériforme. On a placé deux autres tanches sans vessie dansun volume d’eau de 857 centimètres cubes, elles y ont res-piré pendant deux heures et demie. Le tableau suivant paroîtprouver que l’extirpation de la vessie a altéré les fonctionsdes branchies. L’absorption de l’oxigène et de l’azote a ététrès-considérable, mais la production de l’acide carboniquea été nulle.
Air contenu dans l’eau,
Avant l’expérience. Après l’expérience.
Total.......... 175 Total ........... 107
Oxigène........... 52 Oxigène........... 15
Azote............. 116 Azote.............. 86
Acide carbonique.. 7 Acide carbonique... 7
Dans cette expérience l’oxigène absorbé a été à l’azoteabsorbé, comme 100:62. Les poissons auxquels on a extirpéla vessie n’ont pas produit un centième d’acide carbonique.Ce phénomène est-il l’effet de l’absence d’un organe, ou |286| ne doit-il être attribué qu’à l’état de foiblesse dans lequelse trouvent les poissons? Une grande analogie s’observe entreles poumons du Protée et la vessie natatoire des poissons.Mais de simples analogies de forme ne peuvent pas nousguider dans des recherches, dans lesquelles chaque assertiondoit être soumise à l’expérience.