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Alexander von Humboldt: „Letter from Baron Alexander von Humboldt to the Earl of Minto / Additions fragmentaires aux ‚Instructions for the Scientific Expedition to the Antarctic Regions‘“, in: ders., Sämtliche Schriften digital, herausgegeben von Oliver Lubrich und Thomas Nehrlich, Universität Bern 2021. URL: <https://humboldt.unibe.ch/text/1840-Letter_from_Baron-1> [abgerufen am 24.04.2024].

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Permalink:
https://humboldt.unibe.ch/text/1840-Letter_from_Baron-1
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Titel Letter from Baron Alexander von Humboldt to the Earl of Minto / Additions fragmentaires aux ‚Instructions for the Scientific Expedition to the Antarctic Regions‘
Jahr 1840
Ort London
Nachweis
in: Report of the Committee of Physics and Meteorology of the Royal Society Relative to the Observations to Be Made in the Antarctic Expedition and in the Magnetic Observatories, London: Richard and John E. Taylor 1840, S. 87–98. Satzidentisch erneut in: Royal Society. Report of the Committee of Physics, Including Meteorology, on the Objects of Scientific Inquiry in Those Sciences, London: Richard and John E. Taylor 1840, S. 91–102.
Sprache Englisch; Französisch
Deutsche Übersetzung dieses Textes
Typografischer Befund Antiqua; Auszeichnung: Kursivierung, Kapitälchen; Fußnoten mit Asterisken; Tabellensatz.
Identifikation
Textnummer Druckausgabe: VI.5
Dateiname: 1840-Letter_from_Baron-1
Statistiken
Seitenanzahl: 12
Zeichenanzahl: 33819

Weitere Fassungen
Letter from Baron Alexander von Humboldt to the Earl of Minto / Additions fragmentaires aux ‚Instructions for the Scientific Expedition to the Antarctic Regions‘ (London, 1840, Englisch; Französisch)
Lettre du baron de Humboldt au comte de Minto et lettre du professeur Erman au major Sabine (Paris, 1840, Französisch)
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The following letters from Baron Von Humboldt to the Earl ofMinto, and from Professor Erman to Major Sabine, having beencommunicated to the Royal Society, the Committee have deemed itdesirable that they should form a part of this publication, with thepermission of the respective parties.

Letter from the Baron Alexander von Humboldt to the Earl ofMinto.

Milord:

Lorsq’au printems de l’année 1836, j’adressai une lettre à S. A. R.Mgr. le Duc de Sussex sur les moyens propres à perfectionner laconnoissance du magnétisme terrestre par l’établissement de sta-tions magnétiques et d’observations correspondantes, je sollicitai leconcours puissant de la Société Royale de Londres en faveur de tra-vaux qui, émanant à la fois de plusieurs grands centres scientifiquesde l’Europe, pourroient conduire progressivement à la connoissanceprécise des lois de la nature. Ma démarche fut accueillie avec bien-veillance, et la Société Royale daigna recommander à la protectionspéciale du Gouvernement de Sa Majesté l’établissement de plusieursstations permanentes dans les régions tropicales, et dans les partiestempérées de l’hémisphère austral. Cette protection du Gouvernement a été accordée avec une mu-nificence qui dépasse de bien loin l’espoir des hommes le plus ar-demment occupés des variations du magnétisme terrestre, selon lestrois coordonnées de déclinaison, d’inclinaison, et d’intensité absolue.Ce ne sont pas seulement des stations magnétiques qui seront fon-dées dans les lieux les plus propres à la manifestation des change-mens que subit la distribution des forces; c’est une grande expé-dition antarctique qui a été ordonnée sous le commandement d’unsavant et intrépide navigateur, le Capitaine James Clark Ross; ex-pédition qui embrassera dans des travaux sagement preparés tousles problêmes du magnétisme terrestre, de la configuration du globe,de la distribution de la chaleur, du mouvement des eaux de l’océan,de la constitution géologique du sol, de la géographie des plantes etdes animaux. Je crois remplir un devoir sacré en offrant au Premier Lord del’Amirauté, à Monsieur le Comte de Minto, l’hommage respectueuxde la plus vive reconnoissance dont sont pénétrés tous ceux qui cul-tivent les sciences, et leur ont voué une vie laborieuse. Cette re- |88| connoissance est due au Ministre qui, dans des vues élevées et sifavorables aux progrès de l’intelligence, a réalisé l’exécution du voy-age antarctique. La bienveillance personnelle dont votre Excel-lence m’a honoré, pendant Son séjour à Paris et à la Cour de monSouverain, me donne le courage de Lui communiquer en même-temsquelques considérations qui se rattachent au but principal d’unevaste et noble entreprise. Ma franchise ne sera pas mal interprétée. La variabilité des phénomènes est ce qui caractérise le plus lemagnétisme terrestre: variabilité selon une marche lente et pério-dique, quelquefois intermittente aussi, comme effet de perturbationsbrusques et instantanées. Il en résulte que pour approfondir leslois du magnétisme terrestre, il est d’une haute importance de con-noître l’état magnétique du Globe à une même époque donnée: ou,du moins, selon des observations faites à des époques très rap-prochées. Il y a presque déjà trente ans que, dans le Recueil demes Observations astronomiques, j’ai indiqué combien il serait pré-cieux pour la Physique du globe, si plusieurs bâtimens munis d’ex-cellens instrumens, parcouraient simultanément l’équateur magnéti-que et les lignes sans déclinaison, pour fixer à la même époque, dansle vaste bassin des mers, la déclinaison, l’inclinaison, et l’intensité desforces magnétiques. J’insistai aussi, (malgré l’imperfection des in-strumens et des méthodes d’alors,) d’après ma propre expérience, surla possibilité de déterminer sur mer, et avec une précision suffisante,les variations de ces deux derniers élémens. (Rel. hist. T. 1. p. 262.)Je montrai combien ces déterminations océaniques sembloient offrird’avantages, là, où les couches d’eau sont assez épaisses pour que l’onait moins à craindre les perturbations locales dues à la constitutionminéralogique du fond. Guidé par des considérations analogues, j’ose exprimer le désir,que pour rendre plus fructueux encore l’immense travail qui seraexécuté en trois années, soit par l’expédition du Capitaine Ross,soit dans les nombreuses stations magnétiques répandues sur lasurface des continens et des iles, Votre Excellence voulût bienordonner simultanément quelques expéditions partielles et supplé-mentaires. Deux savans, auxquels nous devons des travaux im-portans sur la connoissance des variations du magnétisme terrestre,M. le Major Sabine et M. Lloyd, professeur à Dublin, m’ont déjàdonné l’heureuse nouvelle que le Gouvernement de Sa Majesté en-verroit à Otaheité, à cette métropole de l’Océan pacifique, illustréepar d’anciens travaux astronomiques, un officier très-instruit et munid’appareils magnétiques. Le grand nombre de bâtimens de la ma-rine royale qui se trouvent le plus souvent en station sur les côtesoccidentales de l’Amérique du sud, et dans les mers de l’Inde, faci-literont peut-être les moyens de multiplier les investigations quej’appelle supplementaires, et dont, pour le moment, le but principalseroit la connoissance expérimentale de l’équateur magnétique, etdes lignes sans déclinaison. I. Un bâtiment muni d’instrumens propres à mesurer l’inclinaison,la déclinaison, et l’intensité, pourroit, en partant des côtes du Pérou,suivre l’équateur magnétique, ou la courbe d’inclinaison zéro, jusqu’ |89| aux côtes de la péninsule de Malacca, et, si le vent le permet,jusq’au détroit de Bab-el-Mandel. Un second bâtiment pour-roit parcourir l’équateur magnétique depuis le Golfe de Guinéejusqu’aux côtes du Brésil. On détermineroit avec une grande pré-cision astronomique les points du littoral où la courbe d’inclinaisonzéro, qui n’est pas un grand cercle de la Sphère, coupe les continens et les iles: on apprendroit à connoître les changemens de sinuosité etle mouvement des nœuds (points d’intersection des équateurs mag-nétique et terrestre) qui ont eu lieu depuis les époques des voyagesantérieurs. Comme les lignes isodynamiques et isoclines ne sontaucunement parallèles, il seroit à désirer que les intensités fussentaussi déterminées le long de l’équateur magnétique, ou dans saproximité la plus immédiate. II. Quant aux parties des lignes sans déclinaison qui deviennentaccessibles aux navigateurs, j’oserai, Monsieur le Comte, les indiquertoutes, non dans le vain espoir que des observations simultanéespuissent les embrasser dans leur ensemble pendant la durée du séjourdu Capt. Ross dans les hautes régions antarctiques, mais seulementpour faciliter le choix à Votre Excellence selon les combinaisonsfortuites que peuvent offrir des traversées ou les stations éphémèresde bâtimens de la marine royale. Je n’ignore pas que d’après lesgrandes vues sur les véritables fondemens d’une Théorie générale dumagnétisme terrestre qui sont dues à M. Gauss, soit la connoissance ap-profondie de l’intensité horizontale, soit la multiplicité et la sage répar-tition des points dans lesquels les trois élémens de déclinaison, d’in-clinaison et d’intensité ont éte simultanément mesurés, pour trouverla valeur de V (§. 4 et 27), et par conséquent aussi de \( \frac{V}{R} \), sont lespoints vitaux du problême qu’a résolu l’illustre Géomètre: mais lesbesoins actuels du Pilotage, les corrections habituelles du rumb, et deschemins parcourus, donnent encore une importance speciale et pra-tique à l’élément de la déclinaison. On apprécieroit une déterminationexpérimentale, c. à. d. par observation immédiate, avant que l’édificethéorique ait pu être complété et terminé dans son ensemble; onl’apprécieroit d’autant plus que les lignes isogones ont un mouve-ment très-inégal dans les différentes portions de leurs traces, et quel’action combinée des petites attractions magnétiques locales cause desdéviations partielles de la direction moyenne des lignes d’égale dé-clinaison, déviations qui intéressent la sécurité des routes, et quiresteront long-temps hors de l’atteinte de la théorie générale la plussolidement établie. Je signale ici de préférence la direction deslignes sans déclinaison, auxquelles des considérations de Géogra-phie physique doivent conserver une partie de leur ancienne impor-tance. (a.) L’expédition antarctique, en arrivant, par l’ouest, de la TerreKerguelen à celle de Van Diemen, aura traversé la ligne sans déclinai-son qui remonte au nord vers la Terre de Nuyts (Australie). Il seroitimportant de fixer astronomiquement, comme je l’ai fait observer pourl’équateur magnétique, les points méridionaux et septentrionauxdu littoral de la Nouvelle Hollande, où la ligne de déclinaison zéro |90| traverse le continent australien, et de poursuivre cette courbe,d’abord vers l’O. N. O, et ensuite vers le nord, depuis la Baie deVansittart, ou le Cap Bougainville, jusq’aux iles Maldives, et lesattérrages de Surate dans l’Inde. Les connoissances acquises par lesbeaux travaux de Hansteen, d’Adolphe Erman et de George Fuss surla grande sinuosité des lignes isogones de la Sibérie rendent très-difficile de se former aujourd’hui une idée exacte de la liaison de ces lignesavec les lignes correspondantes dans les Mers de l’Inde et de la Chine.D’après les cartes intéressantes qui accompagnent l’exposé de la Théorie générale par M. Gauss, la ligne de déclinaison zéro ne coupele continent asiatique que près de l’entrée du Golfe Persique; elleremonte directement de là vers le nord à la Mer Caspienne et à laMer Blanche. D’après M. Barlow elle se replie du Golfe de Cam-baye vers le N.E. et reparoît dans les Mers de la Chine et du Japon,entre l’extrémité septentrionale de l’Ile Formose et la péninsuleSeghalienne. Ce seroit jeter une vive lumière sur un des points les plus obscursdu magnétisme terrestre que de lever les doutes qui enveloppent leprolongement de cette ligne de déclinaison zéro de la mer desIndes, et de faire connoître par des observations précises la directionet la distribution des forces à l’ouest de l’Indus entre Candahar,Balkh, Koundouz, et le Pendjab (la Pentapotamie). Il est probableque la marche victorieuse des armées de S. M. vers Caboul, et le sé-jour des troupes dans l’Afghanistan pourront donner lieu à des re-cherches de ce genre, au moyen des petits appareils magnétiquesque l’on destine pour l’Inde. Il resteroit à examiner pour la mêmeépoque la position de la ligne zéro dans les mers du Japon au nordde l’Isle Formose, comme dans l’Océan Glacial dans la partie très-accessible entre Spitzberg et la Mer Blanche. Suivre les traces de l’équateur magnétique, ou celles des lignes sansdéclinaison, c’est gouverner (diriger la route du vaisseau) demanière à couper les lignes zéro dans les intervalles les plus petits,en changeant de rumb chaque fois que les observations d’inclinai-son ou de déclinaison prouvent qu’on a dévié. (b.) Si du système oriental, ou de l’ancien continent, nouspassons au système magnétique americain et atlantique, nous aurionsà désirer la détermination simultanée des portions de la ligne sansdéclinaison qui remonte à l’est de la Géorgie du sud vers St. Sal-vador du Brésil, quitte le continent près de Maranham, et sedirige au N. O. vers le Cap Charles et la Baye de Chesapeak. Lesmers que traverse cette ligne sont si fréquentées que de nombreusesobservations magnétiques y ont été faites, et se trouvent conservéesdans les archives du Dépôt de la Marine Royale; mais il ne suffit pasd’avoir coupé souvent et à différentes époques la ligne zéro, il s’agitde la poursuivre, autant que les vents le permettent, dans toute sonétendue. Je devrais hésiter, M. le Comte, à faire mention duprolongement le plus boréal de la ligne atlantique à travers leCanada et la Baie d’Hudson, mais je dois considérer la surfacedu globe dans son ensemble, et fixer l’attention des navigateurs surles changemens qui peuvent être survenus dans les dernières années. |91| (c.) La Mer du Sud, si l’on en excepte les côtes du Japon n’a denos jours pas de variation zéro. Le nœud circulaire qui renfermel’archipel des Marquesas près du minimum des variations orientales(5°) mérite de nouvelles investigations dont pourroit se charger lebâtiment qui suivrait l’équateur magnétique du Pérou vers l’Inde.La forme de ce nœud circulaire c. à d. l’espacement variable descourbes isogones qui le constituent, et le déplacement progressifdu nœud entier, sont des phénomènes également remarquables etqui contrastent avec le grand nœud circulaire de l’Asie orientale,auquel, selon le mémoire de M. Gauss, appartient la courbe dedéclinaison zéro des mers du Japon et de la Chine. Je compte sur votre ancienne bienveillance, Milord, en osantvous importuner si longuement de considérations sur l’utilité quepourraient offrir des observations simultanées, par l’emploi d’instru-mens et de méthodes semblables, dans les différentes régions des deuxhémisphères. J’ai touché aux moyens de compléter les resultatsde la grande expédition antarctique, et d’en augmenter la valeur.Votre Excellence choisèra dans sa sagesse, de ce qui, parmi tant d’ob-jets importans pour l’art nautique et pour la Géographie physique, pourra lui paroître d’une exécution facile. Je sais borner mesespérances. Je supplie V. E. de jetter les yeux sur quelques additions auxinstructions scientifiques que j’ose Lui adresser. C’est presque êtreprésomptueux que de vouloir ajouter à un excellent travail, rédigéen partie par Sir J. Herschel. J’ai cédé aux instances amicales deMM. Sabine et Lloyd, et je vous supplie, Milord, de vouloir bienfaire mettre entre les mains de Sir J. Herschel un écrit fragmentairedans lequel ce grand astronome et savant physicien effacera libre-ment tout ce qui lui paroîtra peu exact, ou moins digne de l’at-tention des voyageurs.

Je suis, &c., &c. A. DE HUMBOLDT.


Additions fragmentaires aux “Instructions for the Scientific Expe-dition to the Antarctic Regions.” Les personnes qui sont chargées des observations scientifiques,ayant des connoissances très-variées, il suffit de leur rappeler avecla plus grande concision les points qui paroissent de quelque im-portance dans le cours de leurs travaux. I. Forme de la Surface Continentale. Mouvemens des terres par soulèvement ou par dépression, soitlents et progressifs, soit brusques et instantanés, toujours commeeffet de la réaction de l’intérieur fluide d’une planète vers sa croûteplus ou moins consolidée. Il seroit important de placer des marques sur les côtes des con-tinens et des iles, à une élévation rigoureusement déterminée au |92| dessus des plus hautes marées. Je préférerois des barres de cuivrepréparées d’avance en Angleterre, ayant une inscription de la dateet le nom du Capitaine Ross. Un trait ou sillon creusé dans lerocher, réuniroit deux marques métalliques éloignées l’une de l’autreau moins de 15 pieds. Le sillon doit être très-exactement horizontal.Pour chaque endroit on aura vérifié l’élévation moyenne des maréesd’une manière approximative. Des marques semblables, mais de feret de 2 pieds de long, ont été placées (à ma prière, après mon retourde Sibérie) par M. Lenz, membre de l’Académie de St. Petersbourg,sur les côtes rocheuses de la Mer Caspienne près de Bakou (voyezPoggendorf, Annalen, t. xxvi. p. 364.). Les barres sont scellées pardu plomb fondu. II. Magnétisme Terrestre. Tout ce qui a rapport à l’importance de la simultanéité des dé-terminations d’inclinaison, de déclinaison et d’intensité magnètiquesa été consigné dans la lettre que j’ai eu l’honneur d’adresser à M. leComte de Minto, Premier Lord de l’Amirauté. J’ai rappelé ce quiest relatif à la forme, et aux directions actuelles de l’équateur mag-nétique (courbe d’inclinaison zéro) et des lignes sans déclinaison. Jen’ajoute ici que le désir que l’on puisse observer en outre des époquesprescrites par M. Gauss, aux époques astronomiquement importantesdes solstices et des équinoxes, comme je l’ai fait conjointement avecM. Oltmanns en 1806 et 1807, pendant 5 et 6 jours et autant de nuits.A cause de la plus grande précision des instrumens actuels, 24 ou 36heures suffiroient. Je signale aussi les points suivans:—Examiner lesinfluences lunaires d’après les indications de M. Kreil, astronome deMilan, aujourd’hui à Prague; faire attention aux orages, auxgrandes chutes de grêle ou de neige, aux jours couverts ou sereins;voir si des changemens atmosphériques modifient les phénomènesmagnétiques d’une manière sensible et stable; examiner si sur merou sur les glaces polaires, on remarque quelque influence de la consti-tution minéralogique du fond; si des perturbations locales se fontsentir sur mer, là l’on peut supposer que les eaux ne sont pas très-profondes. L’intensité des forces se trouvoit diminuée à la hauteurque M. Gay Lussac a atteinte en ballon: on reconnoit cette dimi-nution, lorsqu’on corrige les observations de ce savant par la tem-pérature des couches d’air qu’il a parcourues. La position dans unvaisseau à la surface des mers est une position semblable; moinspar rapport à la surface moyenne de la terre, que par rapport à l’in-dépendance relative aux attractions locales. Les observations faitessur de hautes montagnes, au dessus de 2500 toises, (observations d’in-clinaison et d’intensité recueillies soit par moi, soit tout récemmentpar d’autres voyageurs) donnent des résultats peu concordans à causedes perturbations dues aux couches soulevées de la croûte terrestre.Ces considérations sur le décroissement très-lent des forces magné-tiques dans le rapport hypsométrique, et sur la petitesse de la profon-deur moyenne de l’océan, méritent l’attention des physiciens. Mêmesur le sol volcanique de Rome, nous n’avons pas trouvé M. Gay Lus-sac et moi, de différence sensible dans l’intensité de la force horizon- |93| tale au Monte Pincio, à la Villa Borghese, et à Tivoli. Ces expéri-ences seront très-aisées à répéter sur la glace, où l’on peut s’éloig-ner à de grandes distances du navire, et où les influences du fond dela mer, si elles existent, doivent se manifester au milieu de la marcheuniforme des phénomènes d’intensité ou d’inclinaison. Les tremblemens de terre m’ont paru agir quelquefois sur l’in-clinaison. Multiplier les observations d’inclinaison horaire là oules secousses sont fréquentes. Les aurores boréales changent-elles parfois la force horizontalesans influer sur l’inclinaison? Y a-t-il quelque aspect particulier àcette classe d’aurores boréales ou australes, qui affectent peu les dé-clinaisons horaires de l’aiguille? Observer de préférence les variations magnétiques aux époquesoù beaucoup d’étoiles filantes entrent dans l’atmosphère. Examinersi de grandes perturbations (les orages magnétiques) se répétentpendant plusieurs jours aux mêmes heures; si en général cesorages magnétiques ne sont pas beaucoup plus fréquens de nuit,lorsque le soleil ne règle et ne tempère plus par son séjour au dessusde l’horizon la marche de l’aiguille. Il est d’un vif intérêt de dé-couvrir les rapports du magnétisme terrestre (et de ses manifesta-tions variables) avec d’autres phénomènes physiques, soit dans lesmouvemens qui dépendent du tems vrai (du passage du soleil par leméridien de chaque lieu), soit dans les mouvemens isochrones, c. à d. dans ceux dont on peut déduire la différence de longitude avec undegré de précision inattendue. III. Mers. Observer les différences de température dans la haute et la bassemer, comme l’influence que la pente plus ou moins rapide des accoresproduit sur le refroidissement des bas-fonds; mésurer la distance àlaquelle les bancs de glace agissent sur la température des eaux dela surface. Les températures des couches inférieures de la mer ontacquis un nouvel intérêt depuis que dans le voyage de Kotzebue,M. Lenz, muni d’excellens instrumens, a trouvé souvent sous les tro-piques (par 7° et par 21° de latitude, à 600 et 900 toises de profon-deur) 2·21 et 2·44 du thermomètre centigrade, (Poggendorf, t. xx.p. 73,) et que l’on sait que le maximum de densité de l’eau puren’est pas applicable à l’eau de mer. Le Capitaine Bérard, avecune ligne de sonde d’un millimètre de diamètre, est parvenu àsonder jusqu’à 1334 toises de profondeur (Bérard, Descriptiondes Côtes d’Alger, 1837, p. 41). Les thermomètres à minimum età maximum de M. Magnus et de M. Walferdin sont d’un emploitrès-précis comme l’ont prouvé les belles expériences de M. Aragodans les puits artésiens. C’est dans les courans océaniques d’unehaute température que les sondes thermométriques seroient surtoutd’un grand intérêt. Examiner si le courant d’eaux froides quilonge les côtes du Pérou jusqu’au Cap Pariña, où il dévie vers lesGalapagos, et dans lequel j’ai trouvé par les 12° de latitude sudl’eau de la surface seulement à 12·4 Réaumur, quand hors du cou-rant, la mer étoit à 22 R., prend sa source 75° à l’ouest du méridien |94| du Cap Horn par les 60° et 65° de latitude sud. Ce mouvement deseaux froides est il d’abord dirigé vers le nord-nord-est, et puis (surle parallèle de 35° sud) vers l’ouest, en frappant contre les côtes duChili, et se divisant sur ces côtes en deux courans vers le nord et lesud? Examiner la température de ce fleuve pélagique loin du lit-toral à l’ouest du Chili. (Voyez l’intéressante Carte du mouvementdes eaux dans le Grand Océan Austral, par le Capitaine Duperrey, 1831, et l’Atlas Physique de Berghaus, Cahier I. No. 4.) Employer différens moyens, ou de nivellement optique le longdes mâts, ou de dépression d’horizon (si le soleil est visible), ou deprivation du vent par les vagues en mesurant en même tems l’incli-naison de la mâture, pour déterminer, dans une tempête, loin descôtes, le maximum si souvent contesté de la hauteur des vagues.J’ai cru trouver ce maximum, par le moyen dela dépression de l’horizon, dans la Mer du Sud, pendant une de cestempètes désignées sous le nom de Papagayos, à l’ouest des côtesde Guatimala de 43 piés français. D’autres voyageurs croyent ce resultat de beaucouptrop grand. IV. Atmosphère. Si la pression moyenne de l’air au niveau des mers diminue dansl’hémisphère boréal, depuis le parallèle de 55° vers les tropiques etvers l’équateur, elle paroît, par de certaines longitudes, diminueraussi, entre les 55° et 68°, et puis augmenter de nouveau. D’aprèsles recherches de M. Schouw, on trouve à zéro de température et enappliquant avec M. Poggendorf la correction relative à la pesanteur,pour
Nord. Lignes *.
Christianborg .. 5\( \frac{1}{2} \)° . Bar. 336·09
La Guayra .... 10 .... 6·16
Palermo ..... 38 .... 8·00?
Naples ...... 41 .... 7·82
Londres ..... 51\( \frac{1}{2} \) .... 7·53
Altona ...... 53\( \frac{1}{2} \) .... 7·35
Danzig ...... 54\( \frac{1}{2} \) .... 7·24
Edinburgh .... 56 .... 6·46
Christiania .... 60 .... 6·74
Bergen ...... 60 .... 6·02
Reikiavik ..... 64 .... 3·89
Godthaab ..... 64 .... 3·86
Upermaviz .... 73 .... 5·49
L’Ile Melville ... 74\( \frac{1}{2} \) .... 6·35
Spitzbergen ..... 75\( \frac{1}{2} \) .... 6·23
En faisant abstraction de la correction relative à la pesanteur, onauroit, pour La Guayra 336·98, pour Londres 337·33, pour Reikia-vik 333·36, pour l’Ile Melville 335·61. (Poggendorf, t. xxvi. p.241 et 475.) Il est important d’avoir ces chiffres sous les yeuxpour les comparer avec les hauteurs moyennes du baromètre que
* Ancienne mesure de France.
|95| l’on obtiendra, réduites à zéro de température, par lesdifférentes latitudes et longitudes de l’hemisphère austral.
On comparera aussi la direction moyenne des vents de l’année etdes saisons avec la pression atmosphérique. Quant à la direction du tournoiement du vent dans les deux hémi-sphères, effet de la rotation du Globe et de la vitesse des moléculesd’air correspondant à chaque parallèle, je recommande les ingé-nieuses recherches de M. Dove dans les Meteorologische Untersu-chungen, 1837, pp. 124—138. Déjà Bacon de Verulam a dit, dansle chapitre De successione ventorum: “Si ventus se mutet conformi-ter ad motum solis, non revertitur plerumque.” La direction dutournoiement est opposée dans les deux hémisphères (Churucca,Viage al Magellanes, 1793, p. 15); mais ce fait, connu depuislong-tems des marins, n’avoit pas été examiné sous le rapport deces importantes influences météorologiques. Examiner les températures des plages et la comparer à la tempé-rature de l’air. Placer des thermomètres dans le sol à différentesprofondeurs, sous différentes latitudes. L’observation des réfractions par un froid très-intense seroitsurtout très-importante, si par l’ascension à quelque montagne voisine etd’une élévation considérable, on pouvoit déterminer en même-temsle décroissement du calorique. Dans le voyage de la corvette La Re-cherche au Spitzberg et aux côtes de Laponie, on a voulu se servir de ballonscaptifs et de thermomètrographes, mais des expériences de ce genresont d’une exécution peu facile. Le décroissement de la chaleur estsi lent pendant de grands abaissemens du thermomètre, que les ob-servations de réfraction de M. Svanberg faites en Laponie par 29°centésimaux audessous du point de la congélation donnent, d’aprèsles formules de M. Laplace, un décroissement de 243 mètres pardegré centésimal. L’Ephéméride des étoiles filantes, publiée par M. Quetelet, sera in-dispensable aux voyageurs, pour fixer leur attention sur d’autres joursque ceux d’Août et de Novembre. Examiner si les jours des grandeschutes d’étoiles filantes il y a simultanément des traces d’auroresaustrales. L’Amiral Wrangel assure avoir observé souvent, dansson expédition aux iles des Ours et de Kolioutchin dans la Merglaciale, que pendant les aurores boréales, certaines régions duciel ne sont devenues lumineuses que lorsque des étoiles filantesles ont traversées. Les aurores australes laissent-elles des tracespendant le jour: ces traces se manifestent-elles par une certainedisposition linéaire de nuages, (cumulito-stratus du journal de M. leCapitaine Fitz-Roy,) également espacés? Ces rangées de petitsnuages ou bandes polaires m’ont paru le plus souvent dirigées dansle méridien magnétique, p. e. sur le plateau de Mexico, quelquefois,surtout dans le nord de l’Asie, je les ai vues tourner progressivementpendant des nuits très-calmes du N. par l’E. N. E. à l’Est. Cesapparences ne seroient-elles que des effets de perspective, des con-vergences de stries parallèles, causées par des vents supérieurs?—Cette explication me paroît douteuse. |96| V. Zoologie. Les mémorables travaux de mon ami et compagnon de voyage,M. Ehrenberg, et les rapports importans de ces travaux, soit avec laconnoissance intime de l’organisation d’animaux que l’on croyoitjadis d’une structure infiniment simple, soit avec la phosphorescencede l’océan, et les grandes questions de la Géologie moderne, invitentles naturalistes voyageurs à diriger leurs recherches sur les pointssuivans: Recueillir de l’eau de mer partout où l’on aperçoit à la surface deschangemens de couleur et de densité, en forme de pellicules, de strieset de taches huileuses. Dans ces parages il y a abon-dance d’animaux microscopiques, et comme il est prouvé par l’expé-rience que ces petits êtres, même les infusoires pélagiques, peuvent,soit à cause de leurs carapaces siliceuses, soit à cause de la consis-tance de leurs membranes ou tissus organiques, être examinés sous lemicroscope, après avoir été conservés pendant plusieurs années, ontâchera, j’espère, de les recueillir de deux manières. Là où l’onvoit les stries de différentes couleurs, l’on enlèvera une portion deces stries, en enfonçant dans l’eau de mer des lames très-minces demica, ou du papier bien fort. Ces lames de mica, ou ces feuilles depapier seront soulevées horizontalement; on les séchera et les con-servera dans un livre, les animaux restant attachés aux mêmes lamesde mica ou feuilles de papier, au moyen desquelles on les a recueil-lis. Dans les parages où l’eau de la mer paroît entièrement pure etpresque incolore, elle renferme souvent des acalèphes, des crustacées,et des infusoires microscopiques. Il s’agit seulement de pouvoirexaminer ces eaux dans un état pour ainsi dire concentré, d’enfermerles êtres vivans dans un moindre volume du fluide. À cet effet, M.Ehrenberg a l’habitude de faire puiser de l’eau à la surface de lamer dans un seau, et de la faire filtrer ou passer à travers un lingetrès fin, de manière que chaque fois on sépare la portion concen-trée qui n’a pas encore pénetré entièrement à travers le filtre. Cesportions concentrées (plus riches en animaux invisibles à l’œil nu)sont conservées dans de petits flacons de 2 ou 3 pouces de haut.On laisse quelques bulles d’air entre le bouchon et l’eau. Si pen-dant l’opération de la filtration, on découvre quelques acalèphes visi-bles à l’œil nu, il faudra les séparer et les placer dans l’esprit de vin,afin que ces petites masses gélatineuses n’altèrent pas l’eau de merconcentrée. Comme ces opérations sont extrêmement faciles, il est à désirerque pendant toute l’expédition, par différens degrés de latitude et delongitude, on recueille de l’eau de mer surtout là où les algues ma-rines abondent. Par les moyens qu’on vient de proposer, on par-viendroit à étendre d’une manière inattendue la connaissance de lanature intime des petites organisations et de leur distribution géo-graphique sur le globe. Il ne faut pas oublier que les estomacsremplis de carmin et d’indigo dans tous les Polygastres, que lesyeux dans les Rotifères et l’Eudorina elegans, et les dents des Hy-datines, se conservent pendant de longues années, lorsque ces êtres |97| microscopiques sont préparés entre des lames de mica d’après laméthode de M. Ehrenberg. Recueillir les animaux qui causent la phosphorescence de l’océan,phosphorescence dans laquelle le Mammaria scintillans semble jouerle rôle principal, avec d’autres acalèphes et des infusoires pélagiques(especes de Peridinium, de Synchæta et de Prorocentrum). Obser-ver si la phosphorescence n’est pas plus générale et plus fréquentepar un ciel couvert et d’apparence orageuse: examiner si pendantla phosphorescence générale de l’Océan l’Æquorea forskoeliana,A. phosphorfera, le Pelagia cyanella, P. noctiluca et P. panopyra, luisent par scintillation c. à. d. non d’une manière continue, mais endonnant des étincelles par la décharge spontanée de certains organesélectriques cellulaires; conserver ces acalèphes et les béroés phos-phoriques dans l’esprit de vin; examiner si certaines espèces depoissons, Chimæra arctica, Clupea erythræa, Coryphæna hippuris et Scomber pelamys, sont phosphorescentes par elles-mêmes, ou si cen’est pas plutôt par l’adhérence d’infusoires phosphorescens. Recueillir partout celles des substances minérales qui selon les dé-couvertes de M. Ehrenberg, sont composées d’infusoires fossilescomme le tripoli, les schistes à polir, les semi-opales, les minérais defer limoneux riches en Galionella ferruginea, les dépôts colorés dessources salées ou ferrugineuses, les craies, les silex pyromaques, lesmarnes alternant avec la craie, les dépôts siliceux, les terres quemangent quelques peuples, par goût ou par besoin. Quoique lesinfusoires à carapaces siliceuses, plus indifférens aux variations deslatitudes et des climats, ayent manifesté généralement plus d’aptitudeà résister aux grands cataclysmes géologiques, plusieurs des bryozoacalcaires ou polythalames de la craie existent cependant aussi vivansdans la mer actuelle. M. Ehrenberg en a récemment trouvé devivans dans la mer Baltique, identiques avec des polythalames en-fouies dans les craies et leurs marnes. Cette circonstance d’identitédonne, à cause de l’âge des formations craieuses, un vif intérêt gé-ologique à ce genre d’investigations. Recueillir et conserver avec soin, à cause des petites organisationsqu’ils renferment, les sables des dunes, les sables de toutes les côtesque l’on visite, les sables rejetés par les hautes marées, les sablesqui s’attachent à la sonde et à l’ancre des vaisseaux; recueillir deséchantillons des terres qui composent les marais et des endroitsinondés et desséchés. Les plus petites quantités suffisent, enmarquant bien exactement les localités où elles ont été receuillies. VI. Botanique. Plantes marines qui vivent en société. Il reste des doutes, si dans certains parages (comme au bancd’algues anciennement connu près des Iles Azores) le Fucus natans (Sargassum vulgare et S. bacciferum, Agardh) continue à végétersans racines, en flottant à la surface de l’Océan au gré des vents etdes courans, ou si le Fucus, récemment arraché à des rochers donton suppose l’existence et la proximité, ne peut conserver son état de |98| fraîcheur que pendant un très court espace de tems. Les ingéni-euses considérations de M. Charles Darwin (Journal, pp. 303—305),ont répandu un nouvel intérêt sur ces “great aquatic forests.”L’analogie des Vaucheries et du Polysperma glomerata, la facilitémême avec laquelle, dans l’eau douce, des plantes phanérogames(l’Aldrovanda vesiculosa, et des branches du Najas major) con-tinuent à végéter, lorsqu’elles nagent dépourvues de racines, ontfait croire à un voyageur d’une instruction très-variée, M. Meyen,que le Fucus natans peut pousser des feuilles (frondes), sans racineset sans adhérence au fond, mais que dans ce cas, le Fucus natans flottant ne porte jamais de fruits. Recueillir les échantillons deFucus qui se sont développés en forme arrondie, les branches s’éten-dant comme par rayons. Mesurer la température de l’eau la plusfroide dans laquelle végètent ces plantes sociales.

(Signé) ALEXANDRE DE HUMBOLDT.