seance du 29 aout 1836. Analyse du memoire de M. Ehrenberg sur sa curieuse decouverte d'infusoires fossiles dans le tripoli: dont M. Brongniart a deja donne connaissance a l'Academie. Un observateur zele, M. Chretien Fischer, proprietaire de la manufacture de porcelaine de Pirrhen-Lammer, pres de Carslbad, avait decouvert qu'un depot siliceux renferme dans les tourbieres de Franzensbad, en Boheme, est compose presqu'en entier de carapaces de quelques especes de navicula. Il croyait que ce depot etait dau a l'effet des feux souterrains sur le fond ancien de la mer. Ayant envoye un fragment de depot siliceux de deux pouces de long et d'un ponce de haut, pour determiner les especes animales dont il presente les carapaces, ce naturaliste ne confirma pas seulement l'observation curieuse de M. Fischer, mais il reconnut de plus que des bacillaires etaient melees aux navicules, et que les carapaces siliceuses transparentes et striees appartenaient au navicula viridis, qui est tres commun dans les caux douces des environs de Berlin. Le feu souterrain a sans doute agi sur ces animalcules et detruit toute matiere organique. Le depot s'est forme, non au fond de l'Ocean, mais dans des lacs ou des sources. Deja, en 1834, M. Ehrenberg avait communique a l'Academie l'observation importante de M. Kützing, d'apres laquelle la carapace, qui cache la partie molle du corps des bacillaires, est de la silice pure. M. Henri Rose avait, conjointement avec M. Ehrenberg, constate l'existence de la silice dans plusieurs especes vivantes. Le cabinet de mineralogie confie a la direction de Veiss renferme les masses siliceuses de Santa-Fiore en Toscane et de l'Ile de France, que Klaproth a analysees. Les echantillons proviennent de la collection de ce celebre chimiste. M. Ehrenberg a reconnu sous le microscope de Pistor et Schieg que ces echantillons sont entierement composes de carapaces d'infusories de la famille des bacillaroides et de quelques brins siliceux d'eponge, les uns d'eau douce, les autres d'eau de mer. Ces especes fossiles ont presque toutes encore leurs analogues dans le monde actuel. Des navicules etaient aussi reconnaissables dans des masses de tourbes de Franzensbad provenant des memes tourbieres dans lesquelles M. Fischer avait decouvert les depots siliceux a anciennes carapaces d'infusoires. Depuis plusieurs annees, M. Ehrenberg avait remarque que la matiere jaune mucilagineuse qui couvre quelquefois les ruisseaux et les eaux stagnautes, et que l'on a prise par erreur pour du fer oxide, offre les carapaces siliceuses d'un gallionella (gallionella ferruginea). Ces carapaces sont ferrugineuses, et rougissent au feu. Il est assez probable que ce meme gallionella a joue un role dans l'origine du fer limoneux lerreux, dans lequel M. Ehrenberg a reconnu des fils articules, transparents et siliceux. Le meme savant a determine plus de 40 especes des genres navicula, gamphonema, gallionella, synedra, bacillaria et spongia, dans les substances minerales soumises a l'analyse microscopique. La majeure partie des infusoires fossiles se trouvent a l'etat vivant, soit dans les eaux douces de Berlin, soit dans les eaux salees de la Baltique, pres de Veimar. Beaucoup d'especes sont si bien conservees qu'on peut en reconnaeitre l'organisation avec la plus grande certitude. On reconnaeit les stries et les six ouvertures de la carapace du navicula viridis, les quatre ouvertures du gallionella, les deux du gomphonema. Il est possible que les especes dont les analognes nous sont inconnus dans la creation actuelle soient decouvertes un jour. M. Ehrenberg remarque que, dans les eaux stagnantes actuelles que l'on examine, on trouve reunies et melees un grand nombre d'especes vivantes diverses, entourant des vegetaux dont elles tirent leur nourriture, tandis que parmi les infusoires fossiles il y a une predominance absolue de certaines especes. Le depot siliceux de Franzensbad, en Boheme, est caracterise par le navicula viridis; le depot siliceux de l'Ile de France par le bacillaria vulgaris; celui de Santa-Fiore par le synedra capitata; la couche minerale de l'Ile de France abonde en especes oceaniques. M. Ehrenberg a examine les matieres minerales servant a polir, et il a reconnu que le tripoli schisteux (polir schiefer) de Bilni, dans lequel on trouve quelquefois des empreintes de plantes et d'un poisson de l'ancien monde (leuciseus d'Agassiz) est entierement compose d'un gallionella qu'il nomme gallionella distors. Quelques individus de Podosphenia nana, navicula scalprum et bacillaria vulgaris (les deux derniers infusoires appartenant a l'eau salee) s'y trouvent meles. On decouvre a peine une trace de ciment terreux pour reunir les carapaces. Les individus out [Formel] de ligne de long, et l'on peut admettre d'apres les evaluations micrometriques comparatives qu'un pouce cube de tripoli schisteux de Bilni renferme environ 41,000 millions d'animalcules individus de gallionella distots. Le polisschiefer, qui forme des couches minerales au Habichts-Wald, pres de Cassel, et offre des empreintes de poissons, est aussi compose d'infusoires fossiles, mais d'infusoires dont on connaeit les analogues vivants.