MEMOIRE SUR LES CHAINES DES MONTAGNES ET SUR LES VOLCANS DE L'ASIE INTERIEURE, ET SUR UNE NOUVELLE ERUPTION VOLCANIQUE DANS LA CHAINE DES ANDES. Par M. de HUMBOLDT . On trouvera, a la fin de ce memoire, les notes et additions de M. Klaproth, auxquelles s'appliquent les renvois en chiffres arabes dans le texte. Les volcans qui indiquent une communication continuelle entre l'interieur de la terre qui est fluide ou en fusion, et l'atmosphere entourant sa surface durcie et oxidee, sont par leur connexion avec la cause des bancs de sel gemme, avec les salses, petits tertres coniques qui dans leurs eruptions vomissent de la vase, de la naphte, des gaz non respirables, et quelquefois meme, mais seulement pour peu de temps, des flammes, des vapeurs et des blocs, avec les sources thermales, les tremblemens de terre et le soulevement de masses de montagnes, un objet d'une importance si grande pour tout ce qui tient a l'observation de la nature, qu'ils interessent nonseulement les geognostes, mais aussi les physiciens dans le sens general de ce mot. M. Leopold de Buch a deja, dans son grand ouvrage sur les eiles Canaries, developpe avec beaucoup de talent des idees lumineuses sur la disposition des volcans qui se trouvent tantot en groupes isoles autour d'un volcan central, tantot ranges longitudinalement par serie. Le memoire que je presente aujourd'hui sur les phenomenes volcaniques situes a un grand eloignement de la mer, est certainement beaucoup moins important: il s'agit de phenomenes locaux de l'Asie centrale et de l'interieur de l'Amerique meridionale, sur lesquels j'ai eu l'occasion de rassembler quelques renseignemens peu connus jusqu'a present. Nous savons encore si peu de chose sur le genre des rapports mysterieux des volcans en activite avec le voisinage de la mer, que tout ce qui concerne un volcan dont on apprend l'existence bien inattendue dans l'interieur d'un continent, donne un tres haut interet, meme a un phenomene local. Durant le voyage que je fis dans l'ete de 1829 avec mes amis, MM. Ehrenberg et Gustave Rose, dans l'Asie septentrionale jusqu'au-dela de l'Ob, je passai a peu pres sept semaines sur les frontieres de la Dzoungarie chinoise, entre les forts d'Oust-Kamenogorsk et de Boukhtarminsk et Khoni-mailakhou , avant-poste chinois, au nord du lac Dzaisang; sur la ligne des Cosaques du step des Kirghiz , et sur les cotes de la mer Caspienne. Dans les entrepots importans de Semipolatinsk, Petropavlovski, Troitzkaia, Orenbourg et Astrakhan, je me suis efforce d'obtenir des Tatares qui voyagent tant, et par Tatares j'entends, comme les Russes, non des Mongols, mais des hommes de famille turque, des Boukhars et des Tachkendis, des informations sur les contrees de l'Asie interieure voisines de leur pays. Les voyages a Thourfan (Tourfan), Akhsou, Khotan, Ierkend et Kachemir ont tres rarement lieu; mais Kachghar, le pays situe entre l'Altai et la pente septentrionale des monts Celestes (Thian-chan, Moussour ou Bokda oola), ou se trouvent Tchougoultchak (1), Korgos, et Gouldja ou Koura, a cinq verst des rives de l'Ili, le khanat de Khokhand, Boukhara, Tachkend, et Chersaves (Chehr-Sebs) au sud de Samarkand, sont visites frequemment. A Orenbourg ou arrivent annuellement des caravanes de plusieurs milliers de chameaux, et ou la cour destinee aux echanges reunit les nations les plus differentes, un homme instruit, M. de Gens, directeur de l'ecole asiatique et de la commission du contentieux des frontieres avec les Kirghiz de la petite horde, a reuni depuis vingt ans, avec discernement, une masse de materiaux tres importans sur la geographie de l'Asie interieure. Parmi les nombreux itineraires que M. de Gens m'a communiques, j'ai trouve la remarque suivante: "En allant de Semipolatinsk a Ierkend, quand nous faumes arrives au lac Ala-koull (2) ou Ala-dinghis un peu au nord-est du grand lac Balkachi , qui recoit les eaux de l'Ile (Ili), nous veimes une tres haute montagne qui a autrefois vomi du feu. Presentement encore, ce mont qui s'eleve dans le lac comme une petite eile, occasionne des tempetes violentes qui incommodent les caravanes: c'est pourquoi on sacrifie en passant quelques moutons a cet ancien volcan." En kirghiz, on nomme Koch-touba, cet avant-poste des Chinois sur l'Irtyche. Proprement le step des Khazak ou Kaizak. Je possede plusieurs itineraires a ces differens lieux; ils feront une addition importante au petit nombre de ceux qui ont ete publies, par MM. Volkov et Senkovski, dans le Journal asiatique, et par M. le baron de Meyendorff, dans son voyage d'Orenbourg a Bokhara. D'Anville nomme Palcati-nor (3) ce lac auquel la carte de Pansner donne une longueur d'un degre et trois quarts. Sur les bords de l'Irtyche, je l'ai entendu nommer Tenghiz, par les marchands asiatiques; c'etait par signe de preeminence, car, chez les tribus qui parlent le turc, tenghiz ou denghiz, veut dire en general mer: ainsi, Aktenghiz, (mer blanche). Voyage a Astrakhan, du comte Jean Potocki. -- 1829, t. I, p. 240; Tenghiz, la mer Caspienne qui recoit le Volga. Klaproth, Memoires relatifs a l'Asie, t. I, p. 108: Ala Tenghiz (mer bariolee.) Ce renseignement recueilli de la bouche d'un Tatare qui voyageait au commencement de ce siecle, peut-etre de celle de Seyfoulla Seyfoullin qui depuis le mois de decembre 1829, est de retour a Semipolatinsk et a ete plusieurs fois a Kachghar et a Ierkend, excita chez moi un interet d'autant plus vif qu'il me rappela les volcans braulans de l'Asie interieure que nous connaissons par les recherches savantes que MM. Abel Remusat et Klaproth ont faites dans les livres chinois et dont la position, a une grande distance de la mer, causa tant d'etonnement. Peu de temps avant mon depart de St.-Petersbourg, je recus, graces a l'extreme complaisance de M. de Klosterman, directeur imperial de police a Semipolatinsk, les informations suivantes qu'il tenait des Boukhars et des Tachkendis. "La route de Semipolatinsk a Kouldja (Gouldja) est de vingt-cinq journees; on passe par les monts Alachan et Kondegatay, dans le step des Kirghiz de la horde moyenne, les bords du lac Savande-koull, les monts Tarbagatai dans la Dzoungarie et la riviere Emyl; quand on l'a traversee, le chemin se reunit a celui qui conduit de Tchougoultchak a la province d'Ili. Des rives de l'Emyl au lac Ala-koull, on parcourt 60 verst. Les Tatares estiment que ce lac est eloigne de Semipolatinsk de 455 verst . Il est a la droite de la route; son etendue est de 100 verst de l'est a l'ouest. Au milieu de ce lac s'eleve une montagne tres haute, nommee Aral-toube. De la jusqu'au poste chinois place entre le petit lac Ianalache-koull et la riviere Baratara (4), sur les bords de laquelle demeurent les Kalmuks, on compte 55 verst." 104. [Formel] verst correspondent a un degre de latitude. En comparant l'itineraire d'Orenbourg avec celui de Semipolatinsk, il ne reste aucun doute que la montagne qui selon la tradition des indigenes, par consequent dans les temps historiques, a vomi du feu, ne soit l'eile conique d'Aral-toube. Le point le plus important dans ces informations, concernant la position geographique de l'eile de forme conique et sa situation relativement a des volcans decouverts par MM. Klaproth et Abel Remusat, non dans des relations de voyages faits par des Europeens, mais dans des ouvrages chinois tres anciens, comme existant encore dans l'interieur de l'Asie au nord et au sud du mont Thian-chan, il ne sera pas hors de propos de presenter ici quelques developpemens sur la geographie de cette region. Ils me semblent d'autant plus necessaires, que les cartes qui ont paru jusqu'a present representent encore d'une maniere incomplete la position relative des chaeines de montagne et des lacs dans la Dzoungarie et le pays des Ouigours de Bich-balik, entre le Tarbagatai, les rives de l'Ili, et le grand Thian-chan au nord d'Aksou. En attendant la publication de l'excellente carte de l'Asie centrale de M. Klaproth, qui servira de continuation et de complement a l'Atlas de d'Anville, je conseille de jeter les yeux, non sur celles d'Arrowsmith, tres fautives pour les systemes de montagnes, mais sur celle gravee par Berthe (1829), de Brue et surtout sur celles de l' Asia polyglotta, et des Tableaux historiques de l' Asie de M. Klaproth, quoiqu'elles soient a petits points; et principalement sur une petite carte intitulee Asie centrale, dans les Memoires relatifs a l' Asie, du meme auteur. T. II, p. 362. Ce nom signifie, dans le dialecte turc-kirghiz, colline insulaire, et derive de toube, colline, et d'aral, eile. En mongol, on dirait Aral-dobo. C'est ainsi qu'en mongol-kalmuk, Aral-noor signifie le lac des eiles; et que le groupe d'eiles du Volga pres d'Ienotaievsk, s'appelle Tabounaral, les cinq eiles. Dans le dialecte khalkha-mongol, au lieu d'oola qui est le mot mongol pur, on emploie dybe qui ressemble au tube des Turcs, pour signifier montagne, colline. On peut consulter a ce sujet, le vocabulaire kirghiz et mongol, insere par M. Klaproth, dans ses Memoires relatifs a l' Asie, t. III, p. 350-355: l' Asia polyglotta, du meme auteur p. 276, et l'atlas, p. XXX; les Voyages du comte J. Potocki, t. I, p. 33. La partie moyenne et interieure de l'Asie qui ne forme ni un immense noeud de montagnes ni un plateau continu, est coupee de l'est a l'ouest par quatre grands systemes de montagnes qui ont influe manifestement sur les mouvemens des peuples; ce sont: l'Altai qui a l'ouest se termine par les monts des Kirghiz; le Thian-chan, le Kuen-lun et la chaeine de l'Himalaya. Entre l'Altai et le Thian-chan on trouve la Dzoungarie et le bassin de l'Ili; entre le Thian-chan et le Kuen-lun, la petite ou plutot haute Boukharie, ou Kachghar, Ierkend Khotan (ou Yu-thian), le grand desert (Gobi ou Cha-mo), le Thourfan, Khamil (Hami) et le Tangout, c'est-a-dire le Tangout septentrional des Chinois, qu'il ne faut pas confondre, comme les Mongols, avec le Tubet ou le Si-fan: enfin, entre le Kuen-lun et l'Himalaya, le Tubet oriental et occidental ou sont H'lassa et Ladak. Si l'on veut indiquer simplement les trois plateaux situes entre l'Altai, le Thian-chan, le Kuen-lun et l'Himalaya par la position de trois lacs alpins, on peut choisir a cet effet ceux de Balkachi, Lop et Tengri (Terkiri nor de d'Anville); ils correspondent aux plateaux de la Dzoungarie, du Tangout et du Tubet. I Systeme de l' Altai. Il entoure les sources de l'Irtyche et du Ienisei ou Kem: a l'est, il prend le nom de Tangnou; celui de monts Sayaniens entre les lacs Kossogol (Kousoukoul) et Baikal; plus loin celui de haut Kentai et de monts de Daourie; enfin au nordest, il se rattache au Iablonnoi-khrebet (chaeine des Pommes), au Khingkhan et aux monts Aldan, qui s'avancent le long de la mer d'Okhotsk. La latitude moyenne de son prolongement de l'est a l'ouest, est entre 50 et 51° 30'. Nous aurons bientot sur la geographie de la partie nord-est de ce systeme, entre le Baikal, Yakoutsk et Okhotsk, des notions satisfaisantes que nous devrons au talent et au zele de M. le docteur Erman, qui a recemment parcouru ces contrees. L'Altai, proprement dit, occupe a peine un espace de sept degres de longitude, mais nous donnons a la partie la plus septentrionale des montagnes entourant la grande masse des terres hautes de l'Asie interieure, et occupant l'espace compris entre les 48 et 51°, le nom de Systeme de l' Altai (5), parce que les noms simples se gravent plus aisement dans la memoire, et que celui d'Altai est le plus connu des Europeens, par la grande richesse metallique de ces monts qui, maintenant, produisent annuellement 70,000 marcs d'argent et 1,900 marcs d'or. L'Altai, en turc, et en mongol le mont d'Or (Alta-in oola ), n'est pas une chaeine de montagnes formant la limite d'un pays comme celles de l'Himalaya, qui bornent le plateau du Tubet, et par consequent ne s'abaissent brusquement que du cote de l'Inde, contree plus basse que l'autre. Les plaines voisines du lac Dzaisang, et surtout les steps voisins du lac Balkachi, ne sont certainement pas elevees plus de 300 toises au-dessus du niveau de la mer. Avec la forme du genitif, qui en mongol est in. Klaproth, Memoires relatifs a l' Asie, t. II, p. 582. J'evite a dessein, dans cet expose, conformement aux renseignemens que j'ai recueillis dans l'ouest et le sud de l'Altai, et dans la ville de Zmeinogorsk, a Ridderski et a Zyrianovski, d'employer le nom de petit Altai, si, par cette denomination, (suivant en cela l'usage des geographes, et nullement celui des Asiatiques et des Russes habitant ces regions), on designe la puissante masse de montagnes situee entre le cours du Narym, les sources de la Boukhtorma, de la Tchouia, le lac Teletskoi, la Bia, le mont aux Serpens et l'Irtyche au-dessus d'Oust-kamenogorsk; par consequent le territoire de la Siberie russe, entre les 79 et 86° de longitude a l'est de Paris, et entre les paralleles des 49° 30', et 52° 30'; ce petit Altai a l'extremite duquel, dans ce qu'on appelle le promontoire de Kolyvano-Voskrestsensk, se montrent du granit, du porphyre, des roches trachytiques et des metaux nobles, est probablement, par son etendue et par sa hauteur absolue, beaucoup plus considerable que le grand Altai, dont la position et l'existence, comme chaeine de montagnes neigeuses, sont egalement a peu pres problematiques. Arrowsmith et plusieurs geographes modernes qui ont suivi le type qu'il a choisi arbitrairement, nomment Grand-Altai une continuation imaginaire du Thian-chan qui se prolonge a l'est de Khamil (Hami), pays celebre par ses vignes, et de Barkoul , ville nandchoue, et file au nord-est vers les sources orientales du Ienisei et le mont Tangnou. La direction de la ligne de separation des eaux entre les affluens de l'Orkhon et ceux de l'Aral-noor, lac du step , enfin la malheureuse habitude de marquer de hautes chaeines partout ou des systemes d'eau se separent, ont cause cette erreur. Si l'on veut conserver sur nos cartes le nom de Grand-Altai, il faut le donner a la suite de hautes montagnes rangees dans une direction absolument opposee , ou du nord-ouest au sud-est, entre la rive droite de l'Irtyche superieur, et le Ieke- Aral-noor, ou Lac de la grande Ile, pres de Goldo-khoto. Lebedours, Reise; t. I, p. 271, et t. II, p. 114. Tchin-si fou. A Gobdo-khoto, pres de Tchoung-ngan szu, temple de Bouddha, Parallelement a la chaeine du Khangai (6), qui passe entre le Ieke-Aral-noor de la Dzoungarie et les monts Tangnou, toujours couverts de neige, et se dirige au sud-est vers l'ancienne ville mongole de Kara Khoroum. (Klaproth, Asia polyglotta, p. 146.) C'est la, par consequent, au sud du Narym et de la Boukhtorma, qui bornent ce qu'on nomme le Petit-Altai russe, qu'est la demeure primitive des tribus turques; le lieu ou Dizaboul, grand-khan des Thou-khiu, a la fin du sixieme siecle, recut un ambassadeur de l'empereur de Constantinople . Ce mont d'Or des Turcs, Kin-chan des Chinois, nom qui a la meme signification, portait jadis aussi ceux d'Ek-tagh et Ektel, qui probablement ont tous deux un sens analogue. On dit que plus au sud, sous les 46° de latitude, presque sous le meridien de Pidjan et de Tourfan, une haute cime est encore nommee en mongol Altain-niro (sommet de l'Altai). Si a quelques degres plus au sud, ce grand Altai se reunit aux monts Naiman-oola, nous trouvons la un dos transversal qui, filant du nord-ouest au sud-est, joint l'Altai russe au Thian chan au nord de Barkoul et de Hami. Ce n'est pas ici le lieu de developper comment le systeme de la direction du nord-ouest si generalement repandu dans notre hemisphere, se montre dans les couches des roches , dans la ligne des Alpes d'Alghin, du haut step du Tchouya, de la chaeine de l'Iyiktou qui est le point culminant , de l'Altai russe, et dans les fentes des vallees etroites ou coulent le Tchoulychman, le Tchouya, la Katounia et le Tcharyche superieur; enfin dans tout le cours de l'Irtyche de Krasnoiarskoi (Krasnaia Iarki) a Tobolsk. Klaproth, Tableaux historiques de l' Asie, p. 117. Memoires relatifs a l' Asie, t. II, p. 388. On ne sait pas encore positivement si le nom de Mont d'Or, donne dans l'ancien turc et en chinois a l'Altai au sud des rives du Narym, et de la frontiere russe actuelle, doit son origine aux tombeaux contenant de l'or que les Kalmuks trouvent encore dans les vallees dont les eaux vont grossir l'Irtyche superieur, ou si l'abondance de l'or de la partie septentrionale de ce qu'on appelle le petit Altai a son extremite sud-ouest entre Zyrianovski et le mont aux Serpens, abondance d'or qui etait surtout considerable dans les portions superieures des filons d'argent, a donne, a ce qu'on nomme le grand Altai, sa renommee d'etre riche en or. La connexion des deux masses de montagnes ne pouvait echapper meme aux peuples les plus grossiers. Le petit Altai traverse l'Irtyche a Oust-Kamenogorsk. Cette riviere sur laquelle nous avons navigue, remplit, pour ainsi dire, une immense fissure (un filon ouvert) entre des montagnes, et entre Boukhtarminsk et Oust- Kamenogorsk. C'est dans cette vallee longitudinale extremement etroite que nous avons trouve le granit repandu sur le schiste argileux. Les indigenes ont raconte au docteur Meyer que dans le sud-est, les monts Narym tiennent au grand Altai par le Kourtchoum, le Dolenkara et le Saratau. Au milieu du mois d'aoaut, etant a Krasnoiarskoi, avant-poste de Cosaques, occupe a prendre les azimuths des montagnes environnantes, j'apercus distinctement au sud-est, entre les sommets jumeaux de Tsouloutchoko, le Tagtau, couvert de neiges perpetuelles dans la Mongolie chinoise, par consequent dans la direction du grand Altai. Lebedour, Meyer et Bunge. Voyage dans les monts Altai, t. I, p. 422. Cette relation est tres interessante. Ce point, dont nous devons la connaissance aux excursions hardies de M. Bunge dans les monts Altai, est vraisemblablement plus haut que le pic Nethou (1787 toises), la cime la plus elevee des Pyrenees. Un des sommets de l'Altai, l'Iyiktou (mont de Dieu), ou Alas-tau (mont chauve en kalmuk), est situe sur la rive gauche de la Tchouia et separe par l'Argoul des colonnes gigantesques de Katounia. La plus haute station de l'Altai russe, mesuree au barometre, mais non encore calculee d'apres des observations correspondantes, est, jusqu'a present, une source qui se trouve dans le petit mont Koksoun, a 1615 toises au-dessus du niveau de la mer. Entre les meridiens d'Oust-Kamenogorsk et de Semipolatinsk, le systeme des monts Altai se prolonge de l'est a l'ouest sous les paralleles de 59 et 50 degres, par une chaeine de coteaux et de montagnes basses, sur une etendue de 160 lieues geographiques , jusque dans le step des Kirghiz. Ce prolongement tres peu important par sa largeur et son elevation, offre un grand interet a la geognosie. Il n'existe pas une chaeine de monts Kirghiz continue qui, ainsi que le representent les cartes, sous les noms d' Alghidin tsano (7) ou Alghydin chamo, unisse l'Oural et l'Altai. Des collines isolees hautes de cinq a six cents pieds, des groupes de petites montagnes qui, comme le Semi-tau pres de Semipolatinsk, s'elevent brusquement a 1,000 ou 1,200 pieds au-dessus des plaines, trompent le voyageur qui n'est pas accoutume a mesurer les inegalites du terrain; mais il n'est pas moins remarquable que ces groupes de collines et de petites montagnes ont ete soulevees a travers une fissure qui forme la ligne de partage d'eaux entre les affluens du Saras, ou au sud dans le step, et ceux de l'Irtyche au nord , fissure qui jusqu'au meridien de Sverinagolovskoi, suit constamment la meme direction dans une etendue de 16 degres de longitude: c'est de cette fissure que sont sortis les memes granits disposes en couche qui ne sont pas meles, et ne font pas meme passage a cette roche, les memes schistes argileux et traumatiques (grauwache), en contact avec des diabases, renfermant des pyroxenes de porphyre, et des couches de jaspe, des roches calcaires compactes de transition et devenues grenues; enfin une partie de ces memes substances metalliques que l'on trouve dans le Petit-Altai, duquel part cette fissure. De 15 au degre cette mesure est employee dans tout le memoire. A proprement parler, seulement un petit nombre de rivieres, telles que la Tchaganka, le Toundouk et l'Ichim, arrivent a l'Irtyche; les autres cours d'eau, par exemple, l'Oulenta et la Grande-Noura, qui se dirigent au nord, se perdent dans les lacs du step; et le Tchoui, et le Sourasou, qui coulent au sud, ne parviennent pas au Sihoun ou Syr daria. Je me bornerai a nommer parmi ces metaux, a un demi degre a l'est du meridien d'Omsk, 1° la galene tenant argent du Kourgan-tagh, la malachite et le minerai de cuivre rouge, avec de la dioptase (achirite) de l'Altyn-toube (colline d'Or), montagne du step; 2° a l'ouest du meridien de Petropavlovski, mais sous le meme parallele que l'Altyn-toube, le minerai de plomb tenant argent, des sources du Kara Tourgai, ou plus exactement du Kantcha Boulgane Tourgai qui, en 1814, fut le but d'une expedition commandee par M. Theofilatiev, lieutenant-colonel, et de M. de Gens, officier du genie . On reconnaeit dans la ligne du partage des eaux entre l'Altai et l'Oural, sous les 49 et 50 degres de latitude, un effort de la nature, une sorte d'essai des forces souterraines pour exhausser une chaeine de montagnes, et ce fait rappelle vivement les lignes d'exhaussemens, seuils, aretes de partage, lignes de faeites que j'ai indiquees dans le nouveau continent, et qui joignent les Andes avec la Sierra de Parime et les montagnes du Bresil, et qui, sous les 2° jusque aux 3° de latitude nord, et sous les 16 jusqu'aux 18° de latitude sud, traversent les steps ou llanos de ces regions . Les cartes manuscrites dont je dois la communication a l'obligeance de M. de Speranski, ancien gouverneur general de la Siberie, placent sous les 49° 10' de latitude, Karkarali, nouvel etablissement russe, a l'est de cette montagne metallique. La dioptase, qui rend ce canton celebre et qui a ete egalement decouverte sur le versant occidental de l'Oural, a recu le nom d'achirite, sous lequel on la designe en Russie, non d'un cosaque, mais d'Achirka, natif de Tachkend. C'est a M. le docteur Meyer que nous sommes redevables des premieres recherches geognostiques, faites dans le step des Kirghiz entre Semipolatinsk, Karkarali et l'Altyn-toube. Ces officiers avaient avec eux M. Menchenin, ingenieur des mines, aujourd'hui administrateur superieur des usines, et que le gouvernement avait charge de nous accompagner a l'Altai et a l'Oural. Le canton ou est cette mine de plomb, a ete egalement examine par les expeditions de Nabokov et de Changhin, en 1816, d'Artioukhov et de Tafaiev, en 1821. Ce dernier, aujourd'hui capitaine au corps des ingenieurs a Orenbourg, a observe avec le sextant une suite de hauteurs circummeridiennes du soleil, pres de la mine de plomb (49° 12); je les publierai lorsqu'elles auront ete calculees de nouveau. C'est, jusqu'a present, le seul point de tout le step des Kirghiz, entre l'Irtyche, la ligne des Cosaques du Tobol et le parallele de l'embouchure du Sihoun, sur une surface de 24,000 lieues, egale par consequent a deux fois celle de l'Allemagne, qui ait ete determinee par des procedes astronomiques. Tableaux geognostiques de l' Amerique meridionale, dans le t. III de mon Voyage aux regions equinoxiales, p. 190, 240, edition in-4°. Mais la rangee non continue de montagnes basses et de collines de roches cristallisees par lesquelles le systeme de l'Altai se prolonge a l'ouest, n'atteint pas l'extremite meridionale de l'Oural, chaeine qui de meme que celle des Andes, offre un long mur qui va du nord au sud avec des mines metalliques sur son versant oriental; elle se termine brusquement sous le meridien de Sverinogovloskoi, ou les geographes ont l'habitude de placer les monts Alghiniques, dont le nom est entierement inconnu des Kirghiz de Troitsk et d'Orenbourg. La commence une region remarquable de lacs, et l'interruption des hauteurs continue jusqu'au meridien de Miask, ou l'Oural meridional envoie la chaeine de Moughodjar, a l'est dans la plaine des Kirghiz, sous les 49° de lat., la masse de collines nommee Boukanbli-tau . Cette region de petits lacs comprenant le groupe du Bale-koul (51° 30' lat.), et celui du Koum-koul (49° 45' lat.) indique, d'apres l'idee ingenieuse de M. de Gens, une ancienne communication d'une masse d'eau avec le lac Aksakal, qui recoit le Tourgai, et le Kamichloi Irghiz, ainsi qu'avec le lac Aral. C'est comme un sillon que l'on peut suivre au nord-est, au-dela d'Omsk, entre l'Ichim et l'Irtyche, a travers le step de Baraba, ou les lacs sont si nombreux , puis au nord au-dela de l'Ob a Sourgout, a travers le pays des Ostiaks de Berezov, jusqu'aux cotes marecageuses de la mer Glaciale. Les anciennes traditions que les Chinois conservent d'un grand lac amer dans l'interieur de la Siberie, lac que traversait le cours du Ienisei, se rapportent peut-etre au reste de cet antique epanchement du lac Aral et de la mer Caspienne au nord-est. Le dessechement du step de Baraba, que j'ai vu en allant de Tobolsk a Barnaoul, augmente constamment par la culture; et l'opinion que M. Klaproth a enoncee relativement a la mer amere des Chinois , est de plus en plus confirmee par les observations geognostiques faites sur les lieux. Comme s'ils eussent ete assez heureux pour deviner l'ancien etat de la surface de notre globe, lorsque les cours d'eau et l'evaporation ne presentaient pas les memes phenomenes qu'aujourd'hui, les geographes chinois nomment la plaine salee qui entoure l'oasis de Hami, au sud du Thian-chan, la mer Dessechee (Han hai). Cartes manuscrites des deux expeditions du colonel Berg, de 1823 a 1825, au step des Kirghiz et a la rive orientale du lac Aral; au depot de l'etat-major general imperial. Entre Tara et Kainsk. Asia polyglotta, p. 232. Tableaux historiques de l' Asie, p. 175. Memoires relatifs a l' Asie, p. 342. M. Klaproth y donne l'extrait d'une encyclopedie chinoise en 150 volumes publiee par l'ordre de l'empereur Khanghi. II Systeme du Thian-chan , ou mont Celeste (Tengri-tagh en turc, qui a le meme sens). Leur latitude moyenne est le 42e degre. Leur point culminant est peut-etre la masse de montagnes remarquable par ses trois cimes, couverte de neiges eternelles, et celebre sous le nom de Bokhda oola (en mongol-kalmuk, Montagne sainte), c'est ce qui a fait donner par Pallas a toute la chaeine, la denomination de Bogdo. Nous avons vu precedemment comment ce nom a, par ignorance, ete applique sur la mappemonde d'Arrowsmith , a une partie du Grand-Altai, c'est-a-dire a une chaeine imaginaire allant du sud-ouest au nord-est, de Hami aux sources du Ienisei. Du Bokhda-oola , nomme aussi Khatoun bokda (mont majestueux de la reine), le Thian chan se dirige a l'est vers Bar-koul ou au nord de Hami, il s'abaisse brusquement, et s'aplanit au niveau du desert eleve, nomme le Grand-Gobi ou Chamo, qui s'etend du sud-ouest au nord-est, de Koua-tcheou, ville de la Chine, aux sources de l'Argoun. Le mont Nomkhoun, au nord-ouest du Sogok et du Sobo, petits lacs du step, indique peut-etre par sa position, un leger exhaussement, une arete dans le desert; car apres une interruption d'au moins dix degres de longitude, paraeit un peu plus au sud que le Thian chan, et suivant mon opinion, comme une continuation de ce systeme, a la grande sinuosite du Houang ho, ou fleuve jaune, la chaeine neigeuse du Gadjar ou In-chan, qui file egalement de l'ouest a l'est . On le nomme aussi Siue chan (mont neigeux), Pe chan (mont blanc). J'evite volontiers dans cette indication generale des grandes chaeines de l'Asie interieure, ces noms vagues, quand il est possible de les echanger contre de meilleurs. Nos Alpes de Suisse et l'Himalaya, rappellent le Pe chan des Chinois et le Moussour ou le Mouz-tagh (mont neigeux ou plus exactement glace) des Tatares; mais qui serait assez ose pour enlever a ces chaeines si celebres, les noms qu'on a l'habitude de leur donner. Le Moussart de Pallas est une denomination qui vient d'une corruption du mot Moussour, et qui, sur les cartes recentes, est attribue arbitrairement tantot au Thian-chan, tantot au systeme du Kuen-lun, entre Ladak et Khoten. La carte d'Asie du meme auteur, qui par suite d'une ignorance extreme des langues, fourmille d'erreurs les plus extraordinaires, offre independamment du mont Bogdo, qui court au nord-est et devient le grand Altai, une autre petite chaeine qui se dirige au sud-est sous le nom d'Altai Alin Topa. Ces mots sont copies de l' Atlas de la Chine de d'Anville; carte 1re, qui presente ce pleonasme Altai Alin toube. Alin, en mandchou, signifie montagne; touba, est une colline, ainsi qu'on l'a vu plus haut, dans le nom de l'Altyn toube ou se trouve la dioptase. Au nord-ouest de Tourfan. Sous les 41 a 42° de latitude, par consequent au nord du pays d'Ordos. L'In-chan se rattache a 4 degres a l'ouest de Peking au Ta-hang-chan, mont neigeux, et au nord de cette ville, aux monts de la Mongolie qui se prolongent vers le Tchang pe chan (grande montagne neigeuse), dans la partie septentrionale de la presqu'eile de Coree. Asia polyglotta, p. 205; Memoires relatifs a l'Asie, t. I, p. 455. Maintenant retournons dans le voisinage de Tourfan et du Bokhda-oola, et suivons le prolongement occidental du second systeme de montagnes; nous verrons qu'il s'etend entre Goudja (Ili), lieu ou le gouvernement chinois exile les coupables, et Koutche; puis entre le Temourtou , grand lac dont le nom signifie eau ferrugineuse, et Aksou, au nord de Kachghar, et file vers Samarkand. Le pays compris entre le premier et le second systeme de montagnes, ou entre l'Altai et le Thian chan, est ferme a l'est, au-dela du meridien de Peking par le Khingkhan oola, crete montagneuse qui va du sud-sud-ouest au nord-nord-est; mais a l'ouest, il est entierement ouvert du cote du Tchoui, du Sarasou et du Sihoun inferieur. Il n'y a pas, dans cette partie, d'arete transversale, a moins qu'on ne veuille regarder comme telle la serie d'elevations qui, du nord au sud, s'etendent a l'ouest du lac Dzaisang, a travers le Targabatai jusqu'a l'extremite nord-est de l'Alatau , entre les lacs Balkach et Alak tougoul-noor, et ensuite au-dela du cours de l'Ili, a l'est du Temourtou nor (entre les 44 et 49° de lat.), et qui se presentent comme une muraille plusieurs fois interrompue du cote du step des Kirghiz. Ce lac, appele Temourtou en kalmuk-mongol, porte en kirghiz-turc les noms de Touz-koul (lac sale), et d'Issi koul (lac chaud). Les itineraires de Semipolatinsk qui sont en ma possession, donnent exclusivement a ce lac la denomination d'Issi-koul; son nom chinois Je hai, a la meme signification; Memoires relatifs a l'Asie, t. II, p. 358, 416. Ces memes itineraires lui attribuent une longueur de 180 verst, et une largeur de 50; evaluation qui peutetre n'est trop forte que d'un sixieme. Les voyageurs avaient vu deux fois la rive orientale de ce lac remarquable; la premiere, en se rendant des bords de l'Ili (Ile) a Ouch-Tourpan (6), a l'ouest d'Aksou; la seconde, apres avoir franchi le Tchoui, dans le pays des Kirghiz des rochers ou noirs, pour gagner les rives du Naryn et Kachghar, C'est un nom qui a occasionne beaucoup de confusion en orographie. Les Kirghiz, notamment ceux de la grande horde, nomment Ala-tagh (Ala-tau, monts tachetes), une suite de hauteurs qui s'etend de l'ouest a l'est, sous les 43°, 30' a 45° du haut Sihoun (Syr-deria ou Jaxartes) pres de Tonkat, vers les lacs Balkachi et Temourtou. Son nom derive des raies et des taches noires que l'on apercoit sur ses rochers escarpes, entre les couches de neige (Meyendorf, Voyage a Bokhara. p. 96. 786). La partie orientale de l'Ala-tau s'eleve beaucoup a la grande sinuosite que le Sihoun decrit au nord-ouest, et se rattache au Kara-tau (Mont noir), a Tharas ou Turkestan. La, sous les 45° 17' de lat. et presque sous le meridien de Petropavlovski, se trouvent, ainsi que je l'ai appris a Orenbourg, des sources chaudes, dans le territoire de Soussac ou les tigres sont nombreux. On voit par les itineraires de Semipolatinsk a Ili et a Kachghar, que les indigenes nomment egalement Ala-tau les montagnes au sud du Tarbagatai entre les lacs Ala-koul, Balkachi et Temourtou. Est-ce de ces denominations que des geographes ont pris l'habitude d'appeler Alak ou Alak-tau, tout le second systeme de montagnes, ou celui du Thian chan? Il ne faut pas confondre avec l'Ala-tau ou Ala-taghi l'Oulough-tagh ou grande montagne, nommee sur quelques cartes Oulouk-tag, Oulou-tau, Oulouk-tagh. Sa position dans le step des Kirghiz a ete, jusqu'a present, determinee aussi vaguement que celle des monts ou coteaux d'Alghin. Il en est tout autrement de la partie de l'Asie interieure qui est bornee par le second et le troisieme systeme de montagnes, l'Himalaya et le Kuen-lun. En effet, elle est fermee a l'ouest de la maniere la plus evidente par un dos transversal qui se prolonge du sud au nord, sous le nom de Bolor ou Belourtagh (montagnes du pays de Bolor, qui en est voisin). Cette chaeine separe la petite Boukharie de la grande, du pays de Kachghar, de Badakhchan et du Haut-Djihoun (Amou-deria). Sa partie meridionale, qui se rattache au systeme des Kuen-lun, forme d'apres la denomination employee par les Chinois, une partie du Thsoung ling. Au nord, elle se joint a la chaeine qui passe au nord-ouest de Kachgar, et porte le nom de col de Kachghar (Kachghar divan ou davan), selon le recit de M. Nasarov, qui, en 1813, est alle jusqu'a Khokand. Entre Khokand, Dervazeh et Hissar, par consequent entre les sources encore inconnues du Sihoun et de l'Amouderia, le Thian chan se releve avant de s'abaisser de nouveau dans le khanat de Boukhara, et offre un groupe de hautes montagnes dont plusieurs sommets, tels que le Thakt-i-Souleiman (trone de Salomon), la cime nommee Terek et d'autres, sont couverts de neige, meme en ete. Plus a l'est, sur le chemin qui va de la rive occidentale du lac Tomourtou a Kachghar, le Thian chan ne me paraeit pas atteindre a une aussi grande elevation, du moins il n'est pas fait mention de neige dans l'itineraire de Semipolatinsk a Kachghar, que je publierai. La route passe a l'est du lac Balkachi et a l'ouest du lac Issi-koul ou Temourtou, et traverse le Narun ou Narim, affluent du Sihoun. A 105 verst au sud du Narun, on franchit le mont Rovatt, qui est assez eleve, et large de quinze verst, il offre une grande caverne et est situe entre l'At-bache, petite riviere, et le petit lac de Tchater-koul. C'est le point culminant avant d'arriver au poste chinois place au sud de l'Aksou, petite riviere du step, au village d'Artuche, et a Kachghar; cette ville, batie sur les rives de l'Ara-tumen, a 15,000 maisons et 80,000 habitans, mais est cependant plus petite que Samarkand. Le Kachghar davan (8) paraeit ne pas former un mur continu, mais offrir un passage ouvert sur plusieurs points. M. Gens m'a deja temoigne son etonnement de ce qu'aucun des nombreux itineraires de Boukhars qu'il a rassembles, ne fait mention d'une haute chaeine de montagnes entre Khokand et Kachghar. Les grandes montagnes neigeuses semblent ne se montrer de nouveau qu'a l'est du meridien d'Aksou; car ces memes itineraires indiquent sur la route de Koura, sur les bords de l'Ili a Aksou, a peu pres a mi-chemin, entre les sources thermales d'Arachan au nord de Kandjeilao (Khan tsilao rocher du roi), poste chinois, et a l'avant-poste de Tamga tache, le Djeparle, glacier couvert de neiges perpetuelles (9). Suivant M. Klaproth, ce dos transversal se nomme en Ouigour Boulyt-tagh, mont des nuages, a cause des pluies extraordinaires qui sous cette latitude tombent sans interruption pendant trois mois. D'apres Bakoui, Extrait des manuscrits de la bibliotheque du roi, t. II. p. 472, les cristaux de roche qui sont tres beaux dans les monts Bolor (Po-lou-lo des cartes japonaises), en tirent, en persan et en turc, le nom de Belour. Dans cette derniere langue, Belouth-tagh signifierait mont des chenes. A l'ouest du dos transversal de Belour, se trouve la station de Pamir, presque sous le parallele de Kachghar, ainsi a peu pres sous les 39° 30' de latitude. Marco Polo a nomme, d'apres cette station, un plateau dont les geographes modernes ont fait tantot une chaeine de montagnes, tantot une province situee plus au sud. Ce canton conserve de l'interet pour le naturaliste parce que le celebre voyageur venitien y a observe le premier un fait qui s'est si frequemment renouvele devant moi sur les hauteurs considerables du nouveau monde, c'est qu'il est extremement difficile d'y allumer et d'y entretenir du feu. Le prolongement occidental du Thian chan ou Mouz tagh, comme l'appellent par preeminence les redacteurs des memoires du sultan Baber, merite un examen particulier. Au point ou le Bolor ou Belour-tagh se joint a angle droit au Mouz tagh, ou traverse meme comme un filon ce grand systeme, ce dernier continue a se diriger sans interruption de l'est a l'ouest sous le nom d'Asferah-tagh, au sud du Sihoun, vers Khodjend et Ourateppeh, dans le Ferghana. Cette chaeine de l'Asferah, couverte de neiges perpetuelles, et nommee a tort chaeine de Pamer , separe les sources du Sihoun (Iaxartes), de celles de l'Amou (Oxus); elle tourne au sudouest, a peu pres sous le meridien de Kodjend, et dans cette direction est nommee, jusque vers Samarkand, Ak-tagh (Mont-Blanc ou neigeux), ou Al-Botom. Plus a l'ouest, sur les bords rians et fertiles du Kohik, commence le grand abaissement de terrain comprenant la Grande-Boukharie, le pays de Mavaralnahar, qui est si bas, et ou la culture soignee de la terre et la richesse des villes attirent periodiquement les invasions des habitans de l'Iran, du Kandahar et de la Haute-Mongolie; mais au-dela de la mer Caspienne, presque sous la meme latitude et dans la meme direction que le Thian chan, se montre le Caucase avec ses porphyres et ses trachytes. On est donc enclin a le regarder comme une continuation de la fissure en forme de filon, sur laquelle s'eleve dans l'est le Thian chan, de meme qu'a l'ouest du grand noeud de montagnes de l'Adzarbaidjan et de l'Armenie, on reconnaeit dans le Taurus une continuation de l'action de la fissure de l'Himalaya et de l'Hindou kouch. C'est ainsi que, dans le sens geognostique, les membres disjoints des montagnes de l'Asie occidentale, comme M. Ritter les nomme dans son excellent Tableau de l'Asie, se rattachent aux formes des terrains de l'orient. La chaeine transversale du Belour, Bolor, Belouth ou Boulyt est si apre et si impraticable qu'il ne s'y trouve que deux cols qui, depuis les temps les plus anciens, ont ete frequentes par les armees et les caravanes: l'un au sud entre Badakchan et Tchitral, et un autre au nord a l'est d'Ouche aux sources du Sih oun. Ce dernier (Douan d'Akisik), est situe au nord du point d'intersection du Thian chan et du Belour tagh, a l'endroit ou ce dernier, pour me servir d'une autre expression empruntee a la theorie des transitions appliquee au soulevement des montagnes traverse sur une crevasse la rangee des monts Celestes. On peut en effet considerer comme une continuation du Belour, un petit rameau de montagnes qui s'etend du sud au nord sous les 40° 45' a 42° 45', et unit la chaeine de l'Asferah avec le Ming-boulak ou Ala-tagh (Memoirs of sultan Baber, p. XXVIII). L'aprete excessive du pays qui le rend impraticable entre Badakhchan, Karatighin et le versant meridional du Thianchan, suffit pour faire comprendre que les caravanes de Samarkand (38° 40' de lat.) et de Tachkend, pour arriver a Kachghar (59° 25'), passent l'Ili pres d'Almaligh (Gouldja 42° 49', comme le dit Erskine dans l'ouvrage cite p. XXXII). Gouldja, lieu de bannissement des grands personnages de la Chine, et le lac Temourtou ne seraientils pas plus a l'ouest, ou bien Kachghar ne serait-il pas plus a l'est que les missionnaires ne le marquent? Du reste, M. Erskine confirme, d'apres le temoignage d'un Ouzbek, l'opinion enoncee precedemment sur l'abaissement des montagnes ou plutot des cols entre Tachkend et Gouldja, de meme qu'entre ce lieu ou l'Ili et Kachghar (l. c. p. XXXIX. LXVII). Waddington. l. c. p. LXVII. Ces dernieres sont situees au point culminant du Belour tagh, sur le versant occidental du Pouchtikour (Erskine and Waddington. Memoires de Baber, p. XXVII, XXIX, XXXIV, LXVII.) La vallee du haut Sihoun est bornee au nord par le Ming-boulak-tagh (mont des mille Sources): c'est ainsi que l'on nomme une partie de l'Alak ou Alak-tagh au nord de Marghinan et de Khokand. Si le col de Kachghar ou Kachghar davan est situe sous le meridien de Khokand, comme le marque la carte de Lapie jointe au Voyage de Meyendorff, il doit se trouver dans la chaeine de l'Asferah. Mais il me paraeit plus vraisemblable qu'il est identique avec le col d'Akizik dont je parle dans l'avant-derniere note. III. Systeme du Kuen lun ou Koulkoun, ou Tartach-davan, entre Khotan (Ilitchi) , ou la civilisation hindoue et le culte de Bouddha ont penetre cinq cents ans avant de parvenir au Tubet et Ladak: entre le noeud de montagnes de Khoukhou-noor et du Tubet oriental, et la contree appelee Katchi. La position de Khotan est tres fautive sur toutes les cartes. Latitude d'apres les observations astronomiques des missionnaires Felix de Arocha, Espinha et Hallerstein, 37° 0', longitude 35° 52' a l'O. de Peking, par consequent 78° 15' a l'E. de Paris (Memoires relatifs a l'Asie, t. II, p. 283). Cette longitude determine la direction moyenne du Kuen-lun. Ce systeme de montagnes commence a l'ouest au Thsoung ling (Monts des Ognons ou Bleus), sur lequel M. Abel-Remusat a repandu tant de jour dans sa savante Histoire de Khotan . Ce systeme se rattache, comme on l'a observe plus haut, a la chaeine transversale de Bolor, et suivant les livres chinois, en forme la partie meridionale. Ce coin du globe entre le petit Tubet et le Badakchan, riche en rubis, en lazulite et en kalaite, est tres peu connu; et, suivant des renseignemens recens, le plateau du Khorassan qui se dirige vers Herat, et borne au nord l'Hindou kho , paraeit etre plutot une continuation du Thsoung ling et de tout le systeme du Kuen lun a l'ouest, qu'un prolongement de l'Himalaya, comme on le suppose communement. Du Thsoung ling, le Kuen lun ou Koulkoun, file de l'ouest a l'est, vers les sources du Houang ho (fleuve Jaune), et penetre, avec ses cimes neigeuses, dans le Chen si, province de la Chine. Presque sous le meridien de ces sources, s'eleve le grand noeud des montagnes du lac Khoukhou-noor, noeud qui s'appuie au nord sur la chaeine neigeuse des Nan chan ou Ki lian chan , s'avancant egalement de l'ouest a l'est. Entre le Nan chan et le Thian chan, du cote de Hami, les montagnes du Tangout bornent le bord du haut desert de Gobi ou Chamo, qui se prolonge du sud-ouest au nordest. La latitude de la partie moyenne du Kuen lun est par 35° 30'. Histoire de la ville de Khotan, p. VIII, etc. et 237, Klaproth, l. c. p. 295 et 415. Turquoise qui n'est pas d'origine organique ou animale. L'Hindou kouch. On peut consulter sur ses cols le Memoirs of Baber, p. 139. Le prolongement oriental du Ki lian chan, chaeine couverte de neiges perpetuelles, se nomme Ala chan. IV. Systeme de l'Himalaya. Il separe les vallees de Kachemir (Sirinagour) et de Nepal, du Boutan et du Tubet; a l'ouest, il s'elance, par le Djavahir, a 4,026 toises; a l'est, par le Dhavalaghiri , a 4,390 de hauteur absolue au-dessus du niveau de la mer; il se dirige generalement du nord-ouest au sud-est, et par consequent n'est nullement parallele au Kuen-lun; il s'en rapproche tellement sous le meridien d'Attok et de Djellal-abad qu'entre Kaboul, Kachemir, Ladak et Badakhchan, l'Himalaya semble ne former qu'une seule masse de montagnes avec l'Hindou kho et le Thsoung ling. De meme l'espace entre l'Himalaya et le Kuen-lun est plus resserre par des chaeines secondaires et des masses de monts isoles, que ne le sont les plateaux entre le premier, le second et le troisieme systeme de montagnes. Par consequent on ne peut proprement comparer le Tubet et le Katchi, d'apres leur construction geognostique avec les hautes vallees longitudinales , situees entre la chaeine des Andes orientales et occidentales, par exemple, avec le plateau qui renferme le lac de Titicaca, dont un observateur tres exact, M. Pentland, a trouve que l'elevation au-dessus de la mer etait de 1,986 toises. Cependant il ne faut pas se representer la hauteur du plateau entre le Kuen lun et l'Himalaya, de meme que dans tout le reste de l'Asie interieure, comme egale partout. La douceur des hivers et la culture de la vigne dans les jardins de H'lassa, sous les 29° 40' de latitude, circonstances connues par les relations publiees par M. Klaproth et l'archimandrite Hyacinthe, annoncent l'existence de vallees profondes, et d'affaissemens circulaires . Deux fleuves considerables, l'Indus et le Zzangbo (Tsampou) indiquent, dans le plateau du Tubet, au nord-ouest et au sud-est, un abaissement dont l'axe se trouve presque sous le meridien du gigantesque Djavahir, des deux lacs sacres le Manassoravara et le Ravana Hrada, et du mont Kailasa ou Kailas, en chinois O neou ta, en tubetain Gang dis-ri (mont couleur de neige; sur les cartes de d'Anville Kentaisse). De ce noyau sortent: la chaeine de Kara koroum padichah, qui se dirige au nord-ouest, par consequent au nord de Ladak, vers le Thsoung ling; les chaeines neigeuses de Hor (Khor), et de Zzang qui filent a l'est. Celle de Hor, a son extremite nord-ouest, se rattache au Kuen-lun; il court, du cote de l'est, vers le Tengri noor (lac du Ciel.) Le Zzang, plus meridional que la chaeine de Hor, borne la longue vallee du Zzangbo, et file de l'ouest a l'est vers le Nien tsin tangla gangri, tres haut sommet qui, entre H'lassa et le lac Tengri noor (mal-a-propos nomme Terkiri), se termine au mont Nomchoun oubachi . Entre les meridiens de Gorkha, de Khatmandou et de H'lassa, l'Himalaya envoie au nord vers la rive droite ou bord meridional de la vallee du Zzangbo, plusieurs rameaux couverts de neiges perpetuelles. Le plus haut est le Yarla Chamboi gangri, dont le nom en tubetain signifie la montagne neigeuse dans le pays du Dieu existant par luimeme. Cette cime est a l'ouest du lac Yamrouk youmdzo, que nos cartes nomment Palte , et qui ressemble a un anneau a cause d'une eile qui remplit presque toute son etendue. Humbolt, Sur quelques phenomenes geologiques qu'offre la Cordillere de Quito, et la partie occidentale de l' Himalaya, dans les Annales des Sciences naturelles, mars 1825. Dhavalaghiri, Mont-Blanc de l'Inde; son nom vient de dhavala blanc, et de ghiri montagne, en sanscrit. M. Bopp presume que dans Djavahir la finale hir remplace ghiri. Djava signifie vitesse. Pour que l'on puisse trouver des objets de comparaison aux deux colosses de l'Asie, je rappelle ici que parmi les sommets de la chaeine des Andes en Amerique, le Nevado de Sorata, mesure par M. Pentland, atteint 3948 toises, et le Chimborazo, que j'ai mesure, en a 3350. (Arago, dans l' Annuaire du Bureau des longitudes. 1830 et mon Memoire sur le Perou meridional dans la Hertha, 1829, janvier, pag. 14, et N. Annales des Voyages, T. XIV.) Dans les Andes, j'ai trouve que la hauteur moyenne de la vallee longitudinale entre la Cordillere orientale et l'occidentale, depuis le noeud de montagnes de Los Robles pres de Popayan jusqu'a celui de Pasco, ainsi des 2° 20' de lat. N. aux 10° 30' de lat. S. etait a peu pres de 1500 toises (Voyage aux regions equinoxiales. T. III, p. 207). Le plateau ou plutot la vallee longitudinale de Tiahuanaco, le long du lac de Titicaca, siege primitif de la civilisation peruvienne, est plus eleve que le pic de Teneriffe: toutefois on ne peut pas, d'apres mes experiences, dire en general que la hauteur absolue a laquelle le sol des vallees longitudinales paraeit avoir ete souleve par les forces souterraines, augmente avec la hauteur absolue des chaeines voisines. De meme, l'elevation des chaeines isolees au-dessus des vallees est tres diverse, suivant qu'au pied de la chaeine, la plaine soulevee s'est elevee en meme temps ou bien a conserve son ancien niveau. La culture des plantes dont la vie vegetante est presque bornee a la duree de l'ete, et qui depouillees de feuilles, restent engourdies pendant l'hiver, pourrait etre expliquee par l'influence que de vastes plateaux exercent sur le rayonnement de la chaleur; mais il n'en est pas de meme de la moindre rigueur des hivers quand il s'agit de hauteurs de 1800 a 2000 toises a 6° au nord de la zone equinoxiale. Je me rappelle la vallee etroite, mais charmante de Guallabamba, dans laquelle en sortant de Quito, je descendais souvent, en quelques instans, a une profondeur perpendiculaire de 500 toises, pour echanger un climat desagreable et froid contre la chaleur tropicale, a l'aspect des orangers, des palmiers et des bananiers. Les recherches de M. Klaproth ont prouve que ce fleuve entierement separe du systeme de Brahmapoutra, etait identique avec l'Iraouaddy de l'empire birman. Klaproth. Memoires relatifs a l'Asie. T. III, p. 291. Probablement par une meprise, causee par le nom de Peiti situe un peu au nord. D'Anville, Atlas de la Chine- Boutan. V. H. -- (La ville s'appelle en tubetain Bhaldhi; les Chinois ont estropie ce nom en Peiti ou Peti; il n'y a pas de doute que la denomination de Palte, qu'on donne au lac voisin, ne derive de Bhaldhi. Kl. Si, profitant des ecrits des Chinois que M. Klaproth a recueillis , nous suivons le systeme de l'Himalaya vers l'est au-dela du territoire anglais dans l'Hindoustan, nous voyons qu'il borne l'Assam au nord, contient les sources du Brahmapoutra, passe par la partie septentrionale de l'Ava, et penetre dans l'Yun nan, province de la Chine; il y montre, a l'ouest d'Young tchang, des cimes aigues et neigeuses; il tourne brusquement au nord-est sur les confins du Hou kouang, du Kiang si, et du Fou kian, et s'avance avec des sommets neigeux pres de l'Ocean, ou l'on trouve, comme prolongement de cette chaeine, une eile (Formose) dont les montagnes sont couvertes de neige pendant la plus grande partie de l'ete, ce qui indique une elevation d'au moins 1900 toises. Ainsi on peut suivre le systeme de l'Himalaya comme chaeine continue depuis l'Ocean oriental, ensuite par l'Hindou kho, a travers le Kandahar et le Khorassan, enfin jusqu'au-dela de la mer Caspienne dans l'Adzerbaidjan, dans une etendue de 73 degres de longitude, la moitie de celle des Andes. L'extremite occidentale, qui est volcanique (12), mais couverte egalement de neige au Demavend, perd le caractere particulier de chaeine dans le noeud des montagnes d'Armenie, qui se rattache au Sangalou, au Bingheul et au Kachmir dagh, hauts sommets du pachalik d'Erzeroum. La direction moyenne du systeme de l'Himalaya est au N. 55° O. Je possede deux pages d'un manuscrit intitule Apercu des hautes chaeines de montagnes de l'Asie centrale; que M. Klaproth a eu la complaisance de me communiquer en 1828, avant que je partisse pour mon voyage de Siberie. Voila les traits principaux d'un tableau geognostique de l'Asie interieure que j'ai trace d'apres de nombreux materiaux que j'ai rassembles pendant une longue suite d'annees . Ceux de ces materiaux dont nous sommes redevables aux voyageurs europeens modernes sont d'une mince importance, en comparaison de l'espace prodigieux qu'occupent la chaeine de l'Altai, les monts Himalaya et les dos transversaux du Bolor et du Khingkhan. Ce sont les savans verses dans la connaissance des litteratures chinoise, mandchoue et mongole qui, de nos jours, ont publie les notices les plus importantes et les plus completes sur ces sujets. Plus la culture des langues asiatiques deviendra generale, plus on appreciera pour l'etude de la constitution geognostique de l'Asie moyenne la connaissance de ces sources si long-temps negligees. En attendant le moment ou M. Klaproth repandra une nouvelle lumiere sur cette etude par un ouvrage special, le tableau que j'ai presente plus haut, des quatre systemes de montagnes qui se dirigent de l'est a l'ouest, et dont le savant que je viens de nommer a fourni une grande partie des materiaux, ne sera pas sans utilite. Pour reconnaeitre ce qu'il y a de caracteristique dans les inegalites de la surface du globe, pour decouvrir les lois qui suivent la disposition locale des masses de montagnes et des depressions, on peut avoir recours a l'analogie que peuvent offrir d'autres continens. Si une fois les grandes formes, les directions dominantes des chaeines sont bien determinees, on voit se rattacher a cette base, comme a un type commun, tout ce qui dans les phenomenes a paru d'abord isole, s'eloigner des regles, annoncer un autre age de formation. Cette methode que j'ai suivie dans mon tableau geognostique de l'Amerique meridionale, j'ai essaye de l'appliquer ici aux limites des grandes masses de l'Asie moyenne. J'ai deja publie deux essais sur ce sujet: Memoires sur les montagnes de l'Inde et la limite inferieure des neiges perpetuelles en Asie. (Voy. Annales de chimie et de physique. T. III, p. 297, et t. XIV, p. 5.) En jetant un dernier coup-d'oeil sur les quatre systemes de montagnes qui coupent le continent de l'Asie de l'est a l'ouest, nous voyons que le meridional a le plus d'etendue et de developpement en longueur. L'Altai atteint a peine, avec des sommets eleves au 78e degre, le Thian chan, la chaeine au pied de laquelle sont situes Hami, Aksou et Kachghar, arrive au moins au 69e 45'; si l'on place, comme les missionnaires, Kachghar a 71° 37' a l'est de Paris . Le troisieme et le quatrieme systeme sont comme fondus dans les grands noeuds de Badakhchan, du petit Tubet, et de Kachghar. Au-dela des 69e et 70e meridiens, il n'y a qu'une chaeine, celle de l'Hindou-kho qui s'abaisse vers Herat, mais qui ensuite, au sud d'Asterabad, s'eleve a une hauteur considerable vers le sommet volcanique et neigeux du Demavend. Le plateau de l'Iran qui, dans sa plus grande etendue de Tehran a Chyraz, paraeit avoir une hauteur moyenne de 650 toises , envoie vers l'Inde et le Tubet deux branches, l'Himalaya et la chaeine du Kuen lun, et forme une bifurcation de la fissure de laquelle les masses de montagnes se sont elevees. Ainsi le Kuen lun peut etre considere comme un debris saillant de l'Himalaya. L'espace intermediaire, comprenant le Tubet et le Katchi, est coupe par de nombreuses fentes dans toutes sortes de directions. Cette analogie avec les phenomenes les plus ordinaires de la formation des filons se montre de la maniere la plus evidente, comme je l'ai developpe ailleurs dans la suite longue et etroite des Cordilleres du Nouveau Monde. La geographie astronomique de l'Asie interieure est encore tres confuse, parce que l'on ignore les elemens des observations et que l'on ne connaeit que leurs resultats: par exemple: Tachkend, suivant la carte de Waddington, annexee aux Memoires du sultan Baber, est situe sous le 2e meridien de l'E. de Samarkand; tandis que la carte jointe au Voyage du baron de Meyendorff, dressee par M. Lapie, place cette ville sous le meridien meme de Samarkand. On manque toujours de mesures barometriques pour ces pays parcourus recemment par les Europeens, si frequemment et avec tant de facilite. Les determinations de Fraser pour le point d'ebullition (Narrative of a journey to Khorasan. Appendix, p. 135) donnent, suivant la formule de Meyer, pour Tehran 627 toises, pour Isfahan 688, pour Chyraz 692. La formule de Biot fournit des hauteurs plus basses de quelques toises. Les resultats offerts par le tableau contenu dans la Hertha, fevrier 1820, p. 172, se fondent, suivant le docteur Knorre, sur la supposition erronee que la force expansive du changement de temperature du point d'ebullition, reste absolument proportionnelle. Afin que l'on puisse comparer la hauteur du plateau de la Perse avec d'autres, je presente le tableau suivant. Interieur de la Russie autour de Moscou 76 toises et non 145, comme on l'a long-temps pretendu; plaines de la Lombardie 80; plateau de la Souabe 150, de l'Auvergne 174, de la Suisse 220, de la Baviere 260, de l'Espagne 350. Si le fond d'une vallee longitudinale, par exemple dans la chaeine des Andes, est souvent a une hauteur de 1500 a 2000, toises au dessus du niveau de la mer, c'est le resultat de l'elevation de toute la chaeine. Les plateaux de l'Espagne et de la Baviere se sont vraisemblablement exhausses lorsque toute la masse du continent se souleva. Les deux epoques sont tres differentes en geognosie. On peut suivre jusqu'au-dela de la mer Caspienne, sous les 45 degres de longitude , les systemes de montagnes de l'Himalaya et des Kuen lun, qui se sont prolonges en se joignant dans le noeud situe entre Kachemir et Fyzabad. Ainsi la chaeine de l'Himalaya reste au sud du Bolor, de l'Ak-tagh, du Mingboulak et de l'Ala-tau, entre Badakhchan, Samarkand et Turkestan; a l'est du Caucase elle se joint au plateau de l'Adzarbaidjan, et borne au sud le grand enfoncement ou affaissement dont la mer Caspienne et le lac d'Aral occupent le bassin le plus bas, et dans lequel une partie considerable de terrain, dont la surface est vraisemblablement de 18,000 lieues carrees et qui s'etend entre la Kouma, le Don, le Volga, le Iaik, l'Obtchey-syrt, le lac Aksakal, le Sihoun inferieur, et le khanat de Khiva, sur les rives de l'Amou-deria, est situee au-dessous du niveau de l'Ocean. L'existence de ce singulier affaissement a ete l'objet de penibles observations barometriques de nivellement entre la mer Caspienne et la mer Noire, par MM. de Parrot et Engelhardt; entre Orenbourg et Gouriev a l'embouchure du Iaik par MM. de Helmersen et Hoffmann. Ce pays si bas est rempli de formations tertiaires, d'ou sortent des melaphyres et des debris de roches scorifiees; il offre aux geognostes, par la constitution du terrain, un phenomene jusqu'a present unique sur notre planete. Au sud de Bakou et dans le golfe de Balkan, cet aspect est extremement modifie par les forces volcaniques. L'academie des sciences de S.-Petersbourg a recemment exauce mes voeux, de faire determiner par une suite de stations de nivellemens barometriques, sur la lisiere nord-est de ce bassin, sur le Volga entre Kamychin et Saratov, sur le Iaik entre l'Obtchey-syrt, Orenbourg et l'Ouralsk, sur l'Iemba et au-dela des coteaux de Mougodjar, par lesquels l'Oural se prolonge au sud, du cote du lac Aksakal et vers le Sarasou, la position d'une ligne geodesique qui reunisse tous les points situes au niveau de la surface de l'Ocean. Toujours a l'est du meridien de Paris. Une suite de nivellemens barometriques continuee par un hiver tres rigoureux, pendant l'expedition du colonel Berg, depuis la mer Caspienne jusqu'a la rive occidentale du lac Aral a la baie de Mertvoy Koultouk, par M. Duhamel et M. Anjou, capitaines de vaisseau, a montre que le niveau du lac Aral est de 117 pieds anglais au-dessus de celui de la mer Caspienne. Ligne de sonde. Il est question de ce travail dans le discours que j'ai prononce, dans la seance extraordinaire de l'academie des sciences de Saint-Petersbourg, le 16 novembre 1829. Il se trouve dans les Nouvelles Annales des Voyages (2e serie), t. 15, p. 86 et suiv. J'ai parle plus haut de la supposition suivant laquelle ce grand affaissement des terres de l'Asie occidentale, continuait autrefois jusqu'a l'embouchure de l'Ob et a la mer Glaciale par une vallee traversant le desert de Kara-koum, et les nombreux groupes d'oasis des steps des Kirghiz et de Baraba. Son origine me paraeit plus ancienne que celle des monts Oural, dont on peut suivre le prolongement meridional dans une direction non interrompue depuis le plateau de Gouberlinsk, jusqu'a Oustourt entre le lac Aral et la mer Caspienne. Une chaeine dont la hauteur est si peu considerable, ne serait-elle pas entierement disparue si la grande fissure de l'Oural ne s'etait pas formee posterieurement a cet affaissement. Par consequent, l'epoque de l'affaissement de l'Asie occidentale coincide plutot avec celle de l'exhaussement du plateau de l'Iran, du plateau de l'Asie centrale, de l'Himalaya, du Kuen lun, du Thian chan, et de tous les anciens systemes de montagnes diriges de l'est a l'ouest; peut-etre aussi avec celle de l'exhaussement du Caucase et du noeud de montagnes de l'Armenie et d'Erzeroum. Aucune partie du monde, sans meme en excepter l'Afrique meridionale, n'offre une masse de terre aussi etendue et soulevee a une si grande hauteur que dans l'Asie interieure. L'axe principal de cet exhaussement qui probablement preceda l'eruption des chaeines sorties des fentes allant de l'est a l'ouest, se dirige du sud-ouest au nord-est, depuis le noeud de montagnes entre Kachemir, Badakhchan, et le Thsoung ling, dans le Tubet, ou sont le Kaylasa et les lacs Sacres , jusqu'aux sommets neigeux de l'Inchan et du Khingkhan . Le soulevement d'une masse si enorme suffisait pour produire un affaissement dont peut-etre aujourd'hui la moitie n'est pas remplie par l'eau, et qui depuis qu'il existe a ete tellement modifie par l'action des forces souterraines, que selon les traditions des Tatares recueillies par M. le professeur Eichwald, le promontoire d'Abcheron, etait autrefois uni par un isthme avec la cote opposee de la mer Caspienne en Turcomanie. Les grands lacs qui se sont formes en Europe au pied des Alpes, sont un phenomene analogue a l'enfoncement ou est situee la mer Caspienne, et doivent egalement leur origine a un affaissement du sol. Nous verrons bientot que c'est principalement dans l'etendue de cet enfoncement, par consequent dans l'espace ou la resistance etait moindre, que des traces recentes de l'action volcanique se montrent. Les lacs Manasa et Ravan Hrad. Manasa en sanscrit signifie esprit: le Manasa-vara est le plus oriental de ces deux lacs; son nom veut dire, mot a mot, le plus parfait des lacs honorables. Le lac occidental est nomme Ravanah Hrad ou lac de Ravana; d'apres le celebre heros du Ramayana (Bopp). Cette direction de l'axe des exhaussemens du sudouest au nord-est, se retrouve aussi au dela du 55me degre de latitude, dans l'espace compris entre la Siberie occidentale, contree basse, et la Siberie orientale, pays rempli de chaeines de montagnes; cet espace est borne par le meridien d'Irkoutsk, la mer Glaciale et la mer d'Okhotsk. M. le docteur Erman a trouve dans les monts Aldan a Allakh-iouna une cime haute de 5000 pieds (Berghaus. Annalen. T. I, p. 599). Au nord du Kuen lun, chaeine du Tubet septentrional, et a l'ouest du meridien de Peking les parties de l'exhaussement du sol les plus importantes par leur etendue et leur hauteur sont: 1° a l'est du noeud du Khoukhou-noor, l'espace entre le Tourfan, le Tangout, la grande sinuosite du Hoang ho, le Gardjan (Klaproth. Tableaux historiques de l' Asie, p. 97) et la chaeine du Kingkhan, espace qui comprend le grand desert de Gobi. 2° Le plateau entre les monts neigeux de Khangai et de Tangnou, entre les sources du Ienisei, de la Selengga et de l'Amour. 3° A l'ouest du canton arrose par le cours superieur de l' Oxus (Amou) et du Iaxartes (Sihoun); entre Fyzabad, Balkh, Samarkand et l'Ala-tau pres du Tourkestan, a l'ouest du Bolor (Belout tagh). Le soulevement de ce dos transversal a produit dans le sol de la grande vallee longitudinale du Thian chan narlou entre le second et le troisieme systeme de montagnes de l'est a l'ouest, ou entre le Thian chan et le Kuen lun, une contre-pente de l'ouest a l'est, tandis que dans la vallee longitudinale du Thian chan-Pe lou en Dzoungarie, entre le Thian chan et l'Altai, on observe une pente generale de l'est a l'ouest. La position du mont Aral-toube, qui a autrefois jete du feu, et dont j'ai connu l'existence par les itineraires du colonel Gens, devient plus interessante quand on la compare avec celle des volcans du Pechan et du Ho tcheou, sur les pentes septentrionale et meridionale du Thian chan, avec celle de la solfatare d'Ouroumtsi, et avec celle de la crevasse voisine du lac Darlai, qui exhale des vapeurs ammoniacales. Les recherches de MM. Klaproth et Abel Remusat nous ont fait connaeitre ce dernier point depuis plus de six ans. Le volcan situe par 42° 25' ou 42° 35' de latitude, entre Korgos sur les bords de l'Ili, et Koutche dans la Petite-Boukharie, appartient a la chaeine du Thian chan: peut-etre se trouve-t-il sur son versant septentrional, a 3 degres a l'est du lac Issi-koul ou Temourtou. Les auteurs chinois le nomment Pe chan (Mont-Blanc), Ho chan et Aghie (montagne de feu) . On ne sait pas avec certitude, si le nom de Pe chan, veut dire que son sommet atteint a la ligne des neiges perpetuelles, ce que la hauteur de cette montagne determinerait au moins pour le minimum, ou s'il indique seulement la couleur eclatante d'une cime couverte de sels, de pierres-ponces et de cendres volcaniques en decomposition. Un ecrivain chinois du 7e siecle dit: A deux cents li, ou a 15 lieues au nord de la ville de Khouei tcheou (aujourd'hui Kou tche), par 41° 37' de lat. et 80° 35' de longit. E.; suivant les determinations astronomiques des missionnaires faites dans le pays des Eleuths, s'eleve le Pe chan qui vomit, sans interruption, du feu et de la fumee. C'est de la que vient le sel ammoniac; sur une des pentes du mont de Feu (Ho chan), toutes les pierres braulent, fondent et coulent a une distance de quelques dizaines de li. La masse en fusion durcit a mesure qu'elle se refroidit. Les habitans l'emploient comme medicament dans les maladies : on y trouve aussi du soufre. Klaproth. L. c. p. 110, et aussi Memoires relatifs a l' Asie. T. II, p. 358. Abel Remusat, dans le Journal asiatique, T. V, p. 45, et aussi Description de Khotan T. II, p. 9. Les notices donnees par M. Klaproth sont les plus completes, et tirees principalement de l'histoire de la dynastie des Ming. M. Abel Remusat a puise davantage dans la traduction japonaise de la grande encyclopedie chinoise. La racine ag qui se retrouve dans le mot Aghie signifie feu en hindoustani, suivant M. Klaproth. Au sud du Pe chan, dans les environs de Khotan qui appartient au Thian chan narlou, sans doute on parlait, avant notre ere, le sanscrit ou une langue ayant une grande analogie avec celle-la: mais en sanscrit une montagne enflammee se nommerait Agni ghiri. Selon M. Bopp Aghie n'est pas un mot sanscrit. (Note de M. Klaproth. La racine ag qui se trouve dans le mot aghie signifie feu dans toutes les langues de l'Hindoustan; cet element est nomme ag en hindoustani, agh en mahratte, et la forme d'agi s'est encore conservee dans la langue du Pendjab. Le mot agni, par lequel on designe ordinairement le feu en sanscrit, appartient a la meme racine, ainsi que agoun en bengali, ogon en russe et l'ignis des Latins.) L'histoire de la dynastie chinoise des Thang, en parlant de la lave du Pe chan, dit qu'elle coulait comme une graisse liquide. Kl. Non pas la lave, mais les particules salines qui font efflorescence a sa surface. M. Klaproth observe que cette montagne se nomme aujourd'hui Khalar (13), et que suivant le recit des Boukhars qui apportent en Siberie le sel ammoniac nomme nao cha en chinois et nouchader en persan, la montagne au sud de Korgos est si abondante en cette espece de sel, que souvent les habitans du pays l'emploient pour payer leur tribut a l'empereur de la Chine. Dans une nouvelle Description de l' Asie centrale publiee a Peking en 1777, on lit ces mots: "La province de Koutche produit du cuivre, du salpetre, du soufre et du sel ammoniac. Cette derniere substance vient d'une montagne d'ammoniac, au nord de la ville de Koutche, qui est remplie de cavernes et de crevasses. Au printemps, en ete et en automne, ces ouvertures sont remplies de feu, de sorte que pendant la nuit, la montagne paraeit comme illuminee par des milliers de lampes. Alors personne ne peut s'en approcher. Ce n'est qu'en hiver, lorsque la grande quantite de neige a amorti le feu, que les indigenes travaillent a ramasser le sel ammoniac, et pour cela ils se mettent tout nus. Ce sel se trouve dans des cavernes, sous forme de stalactites, ce qui le rend difficile a detacher." Le nom de sel tartare donne anciennement dans le commerce au sel ammoniac, aurait dau diriger depuis long-temps l'attention sur les phenomenes volcaniques de l'Asie interieure. M. Cordier dans sa lettre a M. Abel Remusat sur l'existence de deux volcans braulans dans la Tartarie centrale, nomme le Pe chan une solfatare analogue a celle de Pouzzoles . Dans l'etat ou l'ouvrage cite plus haut le decrit, le Pe chan pourrait bien ne meriter que le nom d'un volcan qui ne braule plus, quoique les phenomenes ignes manquent aux solfatares que j'ai vues, telles que celles de Pouzzoles, du cratere du pic de Tenerife, du Rucu pichincha, et du volcan de Jorullo; mais des passages d'historiens chinois plus anciens qui racontent la marche de l'armee des Hioung nou dans le premier siecle de notre ere, parlent de masses de pierres en fusion qui coulent a la distance de quelques milles; ainsi on ne peut, dans ces expressions, meconnaeitre des eruptions de lave. La montagne d'ammoniac entre Koutche et Korgos a aussi ete un volcan en activite, dans la plus stricte acception de ce mot: un volcan qui vomissait des torrens de lave, au centre de l'Asie; a 400 lieues geographiques de la mer Caspienne a l'ouest, a 433 de la mer Glaciale au nord, a 504 du Grand-Ocean a l'est, a 440 de la mer des Indes au sud. Ce n'est pas ici le lieu de discuter la question relative a l'influence du voisinage de la mer sur l'action des volcans; nous appelons seulement l'attention sur la position geographique des volcans de l'Asie interieure, et sur leurs rapports reciproques. Le Pe chan est eloigne de trois a quatre cents lieues de toutes les mers. Lorsque je revins du Mexique, de celebres geognostes me temoignerent leur etonnement en m'entendant parler de l'eruption volcanique de la plaine de Jorullo, et du volcan de Popocatepetl encore en activite; et cependant la premiere n'est qu'a 30 lieues de distance de la mer, et le second a 43 lieues. Le Djebel Koldaghi, montagne conique et fumante du Kordofan, dont on entretint M. Ruppel a Dongola, est a 150 lieues de la mer Rouge , et cette distance n'est que le tiers de celle a laquelle le Pe chan qui, depuis 1700 ans a vomi des torrens de lave, se trouve de la mer des Indes. A la fin de ce memoire, nous ferons mention d'une nouvelle eruption du pic de Tolima dans la chaeine des Andes de la Nouvelle-Grenade, eruption d'un sommet qui appartient aux volcans disposes en serie, et qui fait partie de la chaeine centrale a l'est du Cauca, la plus eloignee de la mer, et non de la chaeine occidentale qui borne le Choco si riche en or et en platine (l'Oural de la Colombie). L'opinion suivant laquelle les Andes n'offrent aucun volcan en activite, dans les parties ou cette chaeine s'eloigne de la mer, n'est nullement fondee. Le systeme des montagnes de Caracas qui se dirigent de l'est a l'ouest, ou la chaeine du littoral de Venezuela, est ebranle par de violens tremblemens de terre, mais n'a pas plus d'ouvertures qui soient en communication permanente avec l'interieur de la terre, et qui vomissent de la lave, que n'en a la chaeine de l'Himalaya, qui n'est guere a plus de cent lieues de distance du golfe de Bengale, ou que n'en ont les Ghats, que l'on peut presque appeler une chaeine cotiere. Lorsque le trachyte n'a pas pu penetrer a travers les chaeines quand elles ont ete soulevees, elles n'offrent pas de crevasses; il ne s'y est pas ouvert des conduits par lesquels les forces souterraines puissent agir d'une maniere permanente a la surface. La circonstance remarquable du voisinage de la mer partout ou des volcans sont encore en activite, circonstance que l'on ne peut nier en general, semble avoir pour cause moins l'action chimique de l'eau, que la configuration de la croaute du globe et le defaut de resistance que dans le voisinage des bassins maritimes, les masses de continent soulevees, opposent aux fluides elastiques, et a l'issue des matieres en fusion dans l'interieur de notre planete. De veritables phenomenes volcaniques peuvent se manifester, comme dans l'ancien pays des Eleuts, et a Tourfan au sud du Thian chan, partout ou par d'anciennes revolutions, une fissure dans la croaute du globe, s'est ouverte loin de la mer. Les volcans en activite ne sont plus rarement eloignes de la mer que parce que partout ou l'eruption n'a pas pu se faire sur la declivite des masses continentales vers un bassin maritime, il a fallu un concours de circonstances tres extraordinaire, pour permettre une communication permanente entre l'interieur du globe et l'atmosphere et pour former des ouvertures, qui comme les sources thermales intermittentes, epanchent, au lieu d'eau, des gaz et des terres oxidees en fusion, c'est-a-dire des laves. Journal asiatique. T. V (1824), p. 44 -- 50. La distance du Pe chan a la mer d'Aral est de 225 lieues, en adoptant pour la longitude de la cote orientale de ce lac 56° 8' 59" sous les 45° 38' 30" de latitude; determination fondee sur l'observation des differences d'ascension droite de la lune et des etoiles par M. Lemm, astronome de l'expedition de M. Berg. C'est la seule observation astronomique qui ait ete faite sur les bords du lac Aral. La position du Pe chan est rapportee a celle d'Aksou, ville que les missionnaires placent par 76° 47' de longitude. Nouvelles Annales des Voyages par Eyries et Malte- Brun, tome XXIV, p. 282. A l'est du Pe chan, le mont blanc du pays des Eleuts, toute la pente septentrionale du Thian-chan offre des phenomenes volcaniques: "on y voit des laves et des pierres-ponces, et meme de grandes solfatares que l'on nomme des lieux braulans. La solfatare d'Ou roumtsi a cinq lieues de circonference; en hiver elle n'est pas couverte de neige: on la croirait remplie de cendres. Si l'on jette une pierre dans ce bassin, il s'en eleve des flammes et une fumee noire qui dure long-temps. Les oiseaux ne se hasardent pas a voler au-dessus de ces lieux braulans." A l'ouest et a 60 lieues de Pe chan, il y a un lac d'une etendue assez considerable, et dont les differens noms en chinois, en kirghiz, en kalmuk signifient eau chaude, salee et ferrugineuse. Selon la carte de l'Asie interieure de Pansner, sa longueur est de 17 a 18 lieues, et sa largeur de 6 a 7; il s'appelle en kalmuk Temourtou (le ferrugineux), en kirghiz Touz koul, en chinois Yan hai (lac sale), ou Je hais, et en turc Issi-koul (lac chaud). Klaproth. Memoires relatifs a l' Asie. T. II, p. 358, 416, t. III, p. 299. M. Abel Remusat regarde le Balkachi comme le lac chaud des Chinois. (Journal asiatique. T. V, p. 45, note 2.) Si nous franchissons la chaeine volcanique du Thian chan, nous trouvons a l'est-sud-est du lac Issi-koul dont il est si souvent question dans les itineraires que j'ai recueillis, et du volcan du Pe chan, le volcan de Tourfan que l'on peut nommer aussi le volcan de Ho tcheou (ville de feu), car il est tres pres de cette ville . M. Abel Remusat a parle en detail de ce volcan dans son Histoire de Khoten, et dans sa lettre a M. Cordier . Il n'y est pas question de masses de pierres en fusion (torrens de laves) comme au Pe chan, mais "on en voit continuellement sortir une colonne de fumee; cette fumee est remplacee le soir par une flamme semblable a celle d'un flambeau. Les oiseaux et les autres animaux qui en sont eclaires, paraissent de couleur rouge. Pour y aller chercher le nao cha ou sel ammoniac, les habitans du pays mettent des sabots, car des semelles de cuir seraient trop vite braulees." Le sel ammoniac ne se recueille pas seulement au volcan de Ho tcheou, comme une croaute ou un sediment tel que les vapeurs qui s'exhalent l'ont depose; les livres chinois parlent aussi "d'un liquide verdatre que l'on ramasse dans des cavites; on le fait bouillir et evaporer, et l'on obtient le sel ammoniac sous la forme de petits pains de sucre d'une grande blancheur et d'une purete parfaite." Ho tcheou, ville aujourd'hui detruite etait a une lieue et demie a l'est de Tourfan. L. c. Description de Khotan. p. 19 -- 91. M. Abel Remusat nomme le volcan de Pe chan, au nord de Koutche, volcan de Bichbalik. Du temps des Mongols en Chine tout le pays entre la pente septentrionale du Thian chan et la petite chaeine du Tarbagatai s'appelait Bichbalik. Le Pe chan et le volcan de Ho tcheou ou Tourfan sont eloignes l'un de l'autre de 140 lieues dans la direction de l'est a l'ouest. A peu pres a 40 lieues a l'ouest du meridien de Ho tcheou, au pied du gigantesque Bokhda-oola, se trouve la grande solfatare d'Ouroumtsi. A 140 lieues au nord-ouest de celle-ci, dans une plaine voisine des rives du Khobok, qui s'ecoule dans le petit lac Darlai, s'eleve une colline "dont les fentes sont tres chaudes sans cependant exhaler de la fumee (des vapeurs visibles). L'ammoniac se sublime dans ces crevasses en une ecorce si solide que l'on est oblige de briser la pierre pour la recueillir." Ces quatre lieux connus jusqu'a present, Pe chan, Ho tcheou, Ouroumtsi et Khobok, qui offrent des phenomenes volcaniques averes dans l'interieur de l'Asie sont eloignes de 130 a 140 lieues au sud du point de la Dzoungarie chinoise ou je me trouvais au commencement de 1829. En jetant les yeux sur la carte jointe a ce memoire, on voit que l'Aral-toube, mont conique et insulaire du lac Ala-koul qui etait encore en ignition dans les temps historiques, et dont les itineraires recueillis a Semipolatinsk font mention, se trouve dans le territoire volcanique de Bichbalik. Cette montagne insulaire est situee a l'ouest de la caverne d'ammoniac de Khobok; au nord du Pe chan qui jette encore des lueurs et jadis vomit de la lave, et a une distance de 60 lieues de chacun de ces deux points. Du lac Ala-koul au lac Dzaisang ou les Cosaques russes de la ligne de l'Irtyche exercent le droit de pecher, grace a la connivence des Mandarins, on compte 51 lieues. Le Tarbagatai au pied duquel est situe Tchougoutchak ville de la Mongolie chinoise, et ou le docteur Meyer, docte et actif compagnon de M. Ledebour, essaya inutilement en 1825 de pousser ses recherches d'histoire naturelle, s'etend au sud-ouest du lac Dzaisang vers l'Ala-koul . Nous connaissons ainsi dans l'interieur de l'Asie un territoire volcanique dont la surface est de plus de 2,500 lieues carrees, et qui est eloigne de trois a quatre cents lieues de la mer; il remplit la moitie de la vallee longitudinale situee entre le premier et le second systeme de montagnes. Le siege principal de l'action volcanique paraeit etre dans le Thian chan. Peut-etre le colossal Bokhda oola est-il une montagne trachytique comme le Chimborazo. Du cote du nord du Tarbagatai et du lac Darlai l'action devient plus faible; cependant M. Rose et moi nous avons trouve du trachyte blanc, le long de la pente sud-ouest de l'Altai, sur une colline campaniforme, a Ridderski et pres du village de Boutatchikha. Je ne veux exprimer aucun doute sur la realite de l'Ala-koul et de l'Alaktougoul-noor, lacs voisins l'un de l'autre: mais il me semble singulier que les Tatares et les Mongols qui parcourent frequemment ces contrees, et que l'on a pu interroger a Semipolatinsk ne connaissent que l'Ala-koul, et pretendent que l'Alaktougoul-noor ne doit son existence qu'a une confusion de nom. M. Pansner dans sa carte russe de l'Asie interieure qui merite toute confiance pour les pays au nord du cours de l'Ili, fait communiquer l'Ala-koul, proprement Ala-ghoul (lac bariole), par cinq canaux avec l'Alaktougoul. Peut-etre l'isthme qui separe ces lacs est-il marecageux, ce qui a fait dire qu'il n'y a qu'un seul lac. M. Kasimbek, persan de naissance et professeur a Kazan, soutient que Toughoul est une negation tartaro-turque, et qu'ainsi Alak-tougoul signifie le lac non bariole, comme Ala tau-ghoul le lac au mont bariole. Peut-etre ces noms Alakoul et Ala-tougoul veulent-ils dire seulement lac voisin de l'Ala-tau, montagne qui s'etend du Turkestan a la Dzoungarie. Sur la petite carte publiee par les missionnaires anglais du Caucase, on ne voit pas l'Ala-koul; on y trouve seulement un groupe de trois lacs: le Balkachi, l'Alak-tougoul et le Kourghe. Au reste, l'opinion suivant laquelle le voisinage des lacs considerables produit dans l'interieur de l'Asie pour les volcans eloignes de la mer le meme effet que l'Ocean, est denuee de fondement. Le volcan de Tourfan n'est entoure que de lacs insignifians, et, ainsi qu'on l'a observe plus haut, le lac Temourtou ou Issi-koul, qui n'a pas deux fois l'etendue du lac de Geneve, est a 33 lieues du volcan de Pe chan. A. H. -- (Les cartes chinoises representent les deux lacs comme un seul, ayant une montagne au milieu. Ce lac s'apelle Ala-koul, sa partie orientale porte le nom d' Alak-tougoul-nor et son golfe occidental, celui de Chibartou kholai. Voyez la lettre de M. Kazim bek, a la fin de ce memoire. Kl.) Des deux cotes, au nord et au sud du Thian chan, on ressent de violens tremblemens de terre. La ville d'Aksou fut entierement detruite au commencement du 18e siecle par une commotion de ce genre. M. Eversman, professeur a Kazan, dont les voyages repetes ont fait connaeitre la Boukharie, entendit raconter par un Tatare qui le servait et qui connaissait bien le pays entre les lacs Balkachi et Ala-koul que les tremblemens de terre y etaient tres frequens. Dans la Siberie orientale, au nord du parallele du 50e degre, lecentre du cercle des secousses paraeit etre a Irkoutsk, et dans le profond bassin du lac Baikal, ou sur le chemin de Kiakhta, surtout sur les bords du Djida et du Tchikoi, on remarque du basalte avec de l'olivine, de l'amygdaloide cellulaire, de la chabasie et de l'apophyllite . Au mois de fevrier 1829, Irkoutsk souffrit beaucoup de la violence des tremblemens de terre; au mois d'avril suivant, on ressentit aussi a Ridderski des commotions que l'on observa dans la profondeur des mines ou elles furent tres vives. Mais ce point de l'Altai est la limite extreme du cercle des secousses; plus a l'ouest, dans les plaines de la Siberie, entre l'Altai et l'Oural, ainsi que dans toute la longue chaeine de l'Oural, on n'a ressenti jusqu'a present aucun ebranlement. Le volcan du Pe chan, l'Aral-toube, a l'ouest des cavernes de sel ammoniac de Khobok, Ridderski et la partie du petit Altai riche en metaux sont situes pour la plupart dans une direction qui devie peu de celle du meridien. Peut-etre l'Altai est-il compris dans le cercle des commotions du Thian chan, et les secousses de l'Altai au lieu de venir seulement de l'est, ou du bassin de Baikal, arrivent egalement du territoire volcanique de Bichbalik. Sur plusieurs points du nouveau continent il est evident que les cercles de secousses se coupent, c'est-a-dire que le meme territoire recoit la commotion terrestre, periodiquement de deux cotes differens. Le docteur Hess, adjoint de l'academie des sciences de Saint-Petersbourg, qui de 1826 a 1828 a sejourne sur les bords du Baikal et au sud de ce lac, nous fait esperer une description geognostique d'une partie du pays remarquable qu'il a parcouru. Il a souvent vu a Verkhnei- Oudinsk le granit alterner plusieurs fois avec des conglomerats. Le territoire volcanique de Bichbalik est a l'est du grand affaissement de l'ancien monde. Des voyageurs qui sont alles d'Orenbourg en Boukharie racontent qu'a Soussac dans le Kara-tau qui forme avec l'Ala-tau un promontoire au nord de la ville de Tharaz ou Turkestan, sur le bord de l'affaissement, des sources thermales jaillissent. Au sud et a l'ouest du bassin interieur nous trouvons deux volcans encore en activite; le Demavend, visible de Tehran et le Seiban de l'Ararat couvert de laves vitreuses. Les trachytes, les porphyres et les sources thermales du Caucase sont connues. Des deux cotes de l'isthme entre la mer Caspienne et la mer Noire les sources de naphte et les salses ou volcans de boue sont nombreux. Le volcan boueux de Taman dont Pallas et MM. Engelhard et Parrot ont decrit la derniere eruption ignee de 1794, d'apres le recit des Tatares est, suivant la remarque tres judicieuse de M. Eichwald, "un pendant de Bakou et de toute la presqu'eile d'Abcheron." Les eruptions ont lieu dans les endroits ou les forces volcaniques rencontrent le moins d'opposition. Le 27 novembre 1827, des craquemens et des ebranlemens terrestres tres violens furent suivis au village de Gokmali, dans la province de Bakou a trois lieues de la cote occidentale de la mer Caspienne, d'une eruption de flammes et de pierres. Un emplacement long de 200 toises et large de 150 braula pendant vingt-sept heures sans interruption, et s'eleva au-dessus du niveau du terrain voisin. Apres que les flammes se furent eteintes, on vit jaillir des colonnes d'eau qui coulent encore aujourd'hui, comme des puits artesiens . Je me rejouis de pouvoir remarquer ici que le periple de la mer Caspienne de M. Eichwald qui doit bientot paraeitre contient des observations physiques et geognostiques tres importantes, notamment sur la connexion des eruptions ignees avec l'apparition des sources de naphte et les couches de sel gemme, sur les blocs de roche calcaire lances a de grandes distances, sur l'exhaussement et l'affaissement du fond de la mer Caspienne qui durent encore, sur le passage du porphyre noir en partie vitrifie et contenant des grenats (melapyre) a travers le granit, le porphyre quartzeux rougeatre, la syenite tres noire et le calcaire, dans les monts Krasnovodsk baignes par la baie du Balkhan, au nord de l'ancienne embouchure de l'Oxus (Amou-deria). Nous apprendrons par le tableau geognostique de la cote orientale de la mer Caspienne, ou l'eile Tchabekan offre des sources de naphte de meme que Bakou et que les eiles entre cette ville et Salian, quelles especes de roches cristallisees sont cachees sous les roches a couches horizontales de la presqu'eile d'Abcheron, ou l'action du feu interieur se fait toujours sentir, et ou elles n'ont pu encore se soulever assez pour paraeitre au jour. Les porphyres du Caucase qui se prolongent de l'ouest-nord-ouest a l'est-sud-est, position et direction que j'ai mentionnees plus haut a cause de la connexion presumee de cette chaeine avec la fente du Thian chan; ces porphyres, dis-je, se montrent de nouveau, traversant toutes les roches presqu'au milieu du grand affaissement de l'ancien monde, a l'est de la mer Caspienne, dans les montagnes de Krasnovodsk et de Kourreh. De nouvelles recherches et les traditions des Tatares apprennent que l'existence des sources de naphte a ete precedee d'eruptions ignees. Plusieurs lacs sales des deux cotes opposees de la mer Caspienne ont une temperature elevee; et des blocs de sel gemme traverses par de l'asphalte se forment, ainsi que M. le Dr Eichwald le dit avec beaucoup de sagacite, "par l'effet d'une action volcanique soudaine, comme au Vesuve , dans les Cordilleres de l'Amerique meridionale et dans l'Adzarbaidjan, ou egalement sous nos yeux par celui de l'action lentement prolongee de la chaleur. M. Leopold de Buch a depuis long-temps fixe l'attention sur la connexion des forces volcaniques avec les masses de sel gemme enhydre, qui traversent tant et de si diverses formations a couches horizontales. La hauteur de l'Ararat est, selon Parrot, de 2700 toises, celle de l'Elbrouz, d'apres Kuppfer, de 2560 au-dessus du niveau de l'Ocean. Abeille du Nord 1828. N° 12. Je dois rappeler l'excellente description du melapyre de Friedrichsroda dans les montagnes de Thuringe qui se trouve dans les Geognostische Briefe de M. de Buch, p. 205. Le sommet du cone de Potosi, si riche en argent, est egalement un porphyre avec des grenats; j'ai aussi trouve ces derniers dans les trachytes d'Itzmiguitzan, sur le plateau du Mexique et dans les trachytes noirs et semblables a des scories d'Yana Urcu, au pied du Chimborasso. Annales du musee d'histoire naturelle (cinquieme annee n° 12, p. 436). Dans une eruption de ce volcan, en 1805, nous avons trouve, M. Gay-Lussac et moi, de petits fragmens de sel gemme dans la lave qui venait de se refroidir. Mes itineraires tatares parlent egalement de sel gemme dans le voisinage d'un mont volcanique du Thian chan au nord d'Aksou, entre le poste de Tourpa-gad et le mont Arbab. Tous ces phenomenes donnent quelque importance a une observation que j'ai eu occasion de faire sur les bords du grand Ocean a Huaura entre Lima et Santa . Des porphyres trachytiques tres ressemblans a la phonolithe, y percent en groupes de rochers des masses immenses de sel gemme qui de meme que dans le desert d'Afrique et dans le step des Kirghiz a Iletzki-Satchita sont exploitees a ciel ouvert comme des carrieres de pierres. Comme resultats constans des phenomenes volcaniques, des formations metalliques accompagnent la production du sel gemme, en petite quantite, il est vrai, mais avec une grande diversite; par exemple du soufre et des pyrites cuivreuses, du fer spathique et de la galene, cette derniere en masses considerables et tenant un peu d'argent: dans l'Amerique meridionale, au Perou dans la province de Chachapoyas, sur la pente occidentale de la Cordillere, a l'endroit ou les eaux du Pilluana et du Guallaga traversent dans l'etendue d'une lieue une couche de sel gemme. Ces considerations n'excluent pas un autre genre de production de bancs de sel par la vaporisation ordinaire dans l'atmosphere, par exemple dans les grands lacs sales a saturation, du step interieur entre le Iaik et le Volga. Humboldt. -- Essai geognostique sur le gisement des roches dans les deux hemispheres. Nous avons vu precedemment que les cercles des commotions terrestres dont le lac Baikal ou les volcans du Thian chan sont le centre, ne s'etendent dans la Siberie occidentale que jusqu'a la pente ouest de l'Altai, et ne franchissent pas l'Irtyche ou le meridien de Semipolatinsk. Dans la chaeine de l'Oural, on ne ressent pas de secousses de tremblemens de terre; aussi malgre la richesse des roches en metaux , n'y trouve-t-on ni basalte a olivine, ni trachytes proprement dits, ni sources minerales. Le cercle des phenomenes de l'Adzarbaidjan qui renferme la presqu'eile d'Abcheron ou le Caucase, s'etend souvent jusqu'a Kizlar et Astrakhan. Au contraire, la pente meridionale du petit Altai a une source chaude dans le voisinage du village Fykaelka, a 10 verst de la source du Katounia. (Ledebour. -- T. II, p. 521.) Il en est de meme du bord du grand enfoncement dans l'ouest. Si nous portons nos regards de l'isthme caucasien au nord et au nord-ouest, nous arrivons dans le territoire des grandes formations a couches horizontales et tertiaires qui remplissent la Russie meridionale et la Pologne. Dans cette region, les roches de pyroxene percant le gres rouge de Iekaterinoslav , l'asphalte et les sources impregnees de gaz sulfureux, indiquent d'autres masses cachees sous la formation de sediment. On peut egalement citer comme un fait important, que dans la chaeine de l'Oural, si abondante en serpentine et en amphibole, et qui sert de limite entre l'Europe et l'Asie, une veritable formation amygdaloidale se montre a Griasnouchinskaia vers son extremite meridionale. Les regions des crateres de la lune , rappellent l'affaissement de l'Asie occidentale. Un si grand phenomene ne peut avoir ete produit que par une cause tres puissante agissant dans l'interieur de la terre. Cette meme cause en formant la croaute du globe par des soulevemens et des affaissemens brusques, a probablement, par une action laterale continuee graduellement, rempli de metaux les fentes de l'Oural et de l'Altai. L'abondance de l'or dans les parois des fissures, sur le mur et le toit du filon, est peutetre devenue plus considerable par des influences atmospheriques , ou par la moindre pression qu'eprouvaient les vapeurs elastiques vers l'affleurement des filons a de moindres profondeurs, de sorte que la destruction des couches superieures, et des masses de filons appartenant aux affleuremens, ont pu fournir plus d'or aux terrains de rapport, qu'on ne pourrait le supposer d'apres l'exploitation actuelle des filons encore existans. Les alluvions fragmentaires d'or, de platine, de cuivre et de cinabre, sont melees sur les hauteurs de l'Oural avec les memes ossemens fossiles des grands animaux terrestres du monde primitif, que l'on trouve dans les plaines basses de la Siberie, sur les rives de l'Irtyche et du Tobol. L'objet de ce memoire ne peut etre de rechercher comment ce melange d'ossemens de rhinoceros des plaines, indique l'epoque du soulevement de la chaeine de l'Oural, et de la destruction des masses superieures de filons auriferes. Nous nous bornerons ici a observer par rapport aux idees ingenieuses que M. Elie de Beaumont a developpees recemment sur l'age relatif et le parallelisme des systemes de montagnes contemporains, que dans l'interieur de l'Asie aussi, les quatre grandes chaeines qui courent de l'est a l'ouest sont d'une origine totalement differente de celle des chaeines qui se dirigent du nord au sud, ou du nord 30° ouest au sud 30° est. La chaeine de l'Oural, le Bolor ou Belour tagh , les Ghats du Malabar et le Kingkhan sont vraisemblablement plus modernes que les chaeines de l'Himalaya et du Thian chan. Les systemes d'epoques diverses ne sont pas toujours separes les uns des autres par des distances considerables, comme en Allemagne et dans la plus grande partie du nouveau continent. Souvent des chaeines de montagnes, ou des axes d'exhaussement, de direction dissemblable et d'epoques totalement differentes, sont tres rapprochees par la nature, semblables en cela aux caracteres d'un monument qui, se croisant dans divers sens, ont ete graves dans des temps differens, et portent en eux-memes les traces de leur age. C'est ainsi que l'on voit dans la France meridionale des chaeines et des exhaussemens ondules dont les uns sont paralleles aux Pyrenees et les autres aux Alpes occidentales . La meme diversite des phenomenes geognostiques se manifeste dans les terres hautes de l'Asie interieure, ou des parties isolees paraissent comme entourees et fermees par la repartition en forme de gril des systemes de montagne. J'en parle d'apres la belle collection de M. Kovalevski, ingenieur en chef des mines. On doit distinguer les montagnes, comme Conon et Aratus, des pays de crateres tels que Mare Crisium, Hipparque et Archimedes, qui sont beaucoup plus grands que la Boheme. Voyez mon Essai politique sur la Nouvelle Espagne (2e edition), t. III, p. 195, sur une influence semblable de l'atmosphere pour ennoblir les couches metalliques de Guanaxuato qui, au commencement du 19e siecle, fournissaient plus d'un million de marcs d'argent. A l'ouest du Belour-tagh, dans la continuation du Thian chan, c'est-a-dire, dans l'Ak tagh, ou al Botom, qui par la chaeine de l'Asferah se rattache au Thian chan proprement dit, et se prolonge au sud-ouest de Khojend vers Samarcand, le geographe arabe Ibn al Ouardi parle d'une montagne qu'il nomme Tim (faute de copiste pour (Btm ou Botom), qui fume pendant le jour, est lumineuse pendant la nuit et produit du sel ammoniac et du zadj, probablement de l'alun. Dans le voisinage, il y a des mines d'or et d'argent. (V. Operis cosmographici Ibn el Wardi caput primum; ex codice upsaliensi edidit Andreas Hylander (Lond. 1823, p. 552). Il n'est pas question, dans cet auteur, d'eruption de lave comme au Pe chan; cependant je doute que ces phenomenes appartiennent simplement a des couches de houille braulante, comme a Saint-Etienne dans le Forez ou l'on ramasse aussi du sel ammoniac. La montagne lumineuse de Botom rappelle davantage les eruptions de la cote orientale de la mer Caspienne; par exemple de l'Abitche, montagne fumante pres de la baie de Manghichlak, ou les pierres qui entourent le cratere sont toutes noires et scoriacees. (Journal Asiatique, t. IV, p. 295.) Elie de Beaumont: Recherches sur les revolutions de la surface du globe. 1830, p. 29, 282. Apres avoir donne ces notices sur un volcan de l'ancien continent encore inconnu, je vais y ajouter quelques mots sur un autre qui vient de paraeitre ou plutot de se reveiller, ou de redevenir actif; il se trouve dans la chaeine des Andes du nouveau continent. Lorsqu'etant a Ibague dans la plaine de Carjaval, je dessinai et je mesurai trigonometriquement ce volcan qui forme un cone tronque, haut et couvert de neiges perpetuelles , je ne prevoyais pas que de mes jours il se ranimerait. Je croyais alors qu'il n'avait jete des flammes que dans les temps qui avaient precede les epoques historiques, et que pas plus que les collines trachytiques de l'Auvergne, il reprendrait de nouveau son activite. Le 22 septembre 1801. Parmi tous les sommets trachytiques de la chaeine des Andes et des montagnes du Mexique que j'ai vus, le Cotopaxi est le seul dont la forme ressemble a celle du pic de Teneriffe. Ils sont representes tous deux dans Vues des Cordilleres et monumens des peuples indigenes de l' Amerique, pl. III et IX. Au nord du grand noeud des montagnes des sources du Rio-Magdalena, sous le 1 degre 50' de lat. nord, les Andes se partagent en trois branches, dont l'occidentale, celle qui se rapproche le plus de la mer (Cordillera del Choco), contient sur sa pente occidentale, des couches de debris d'or et de platine; la centrale (Cordillera de Quindiu), separe la vallee du Cauca de celle du Rio-Magdalena; l'orientale (Cordillera de Suma paz y de Merida), file au nord entre le plateau de Bogota et les affluens du Meta et de l'Orenoque . De ces trois branches puissantes, la centrale est la plus haute et la seule qui soit couverte de neiges perpetuelles jusqu'au parallele de 5° 30' N. Au point ou elle diminue de hauteur vers le noeud d'Antioquia, la Cordillere orientale, celle de Bogota, commence a s'elever jusqu'a la hauteur des neiges eternelles, par exemple dans le Paramo de Chita, et dans la Sierra nevada de Merida. Cette elevation alternative, ce rapport entre les branches d'une meme souche, indiquent peut-etre l'effet des forces souterraines des fluides elastiques qui ont agi par deux crevasses (filons accompagnant), soit en soulevant seulement le sol, soit en produisant des volcans trachytiques dans les endroits ou la resistance etait moindre. Voyez mon Tableau geognostique de l' Amerique meridionale: dans Voyage aux regions equinoxiales. T. III, p. 203, 204, 207. J'ai represente cette division et cette ramification d'un immense systeme de montagnes, le plus etendu du globe dans une carte encore inedite et intitulee Esquisse hypsometrique des noeuds des montagnes et des ramifications des Andes depuis le cap de Horn jusqu'a l'isthme de Panama et a la chaeine littorale de Venezuela. La gravure de cette carte est terminee depuis 1827. Vus de Santa-Fe de Bogota, et mieux encore de deux chapelles placees contre un mur de rocher audessus de la ville a 1688 et 1650 toises de hauteur , les paramos de Tolima, Ruiz et Herveo (Erve), offrent au lever et au coucher du soleil un spectacle magnifique. Leur aspect rappelle celui des Alpes suisses, quand on les contemple des hauteurs du Jura. Malheureusement ce plaisir n'est generalement que d'une tres courte duree, et en determinant des angles de montagnes et des azimuths, je fus souvent trompe, les sommets neigeux qui, a une distance de 30 lieues sont separes de la Cordillere orientale par le cours du Magdalena, ayant ete caches par les nuages, avant que j'eusse pu mettre mes instrumens en ordre. Pres de la pyramide tronquee de Tolima , on voit d'abord un groupe de petits cones (Paramo de Ruiz), et plus au nord, le dos prolonge de la mesa de Herveo, qui atteint a la region des neiges perpetuelles. Jusqu'a present le volcan de Purace pres de Popoyan (2° 19' N.), etait le dernier en activite que l'on connaut dans la chaeine des Andes de l'Amerique meridionale, en allant du sud au nord, et a l'epoque de mon voyage, ce mont trachytique, situe vis-a-vis de l'ancien volcan de Sotara riche en obsidienne et qui est au nord-est, n'offrait pas un cratere proprement dit: on n'y voyait que de petites ouvertures dans lesquelles l'eau impregnee d'hydrogene exhalait des vapeurs avec un bruit terrible . Si du groupe des volcans de Popayan, le Purace et le Sotara, nous suivons au nord la chaeine centrale, nous trouvons successivement dans la direction du nord 20° ouest, les sommets neigeux et les paramos de Guanacas, de Huila, de Baraguan et de Quindiu. Ce dernier paramo, situe sous les 4° 35' N., est un passage fameux pour aller de la vallee de la Madeleine dans celle de Cauca, ou d'Ibague a Carthago. Au nord-est de ce passage, s'eleve le groupe des paramos de Tolima et de Ruiz, groupe dans lequel au sud-ouest de la ville de Honda, par consequent a 42 lieues du volcan de Popayan, presque a moitie chemin de Popayan au golfe de Darien ou au commencement de l'isthme de Panama, le feu volcanique a trouve recemment une nouvelle communication avec l'atmosphere. En 1826, dans un temps ou Bogota, Honda et la province d'Antioquia etaient ravagees par d'epouvantables tremblemens de terre, un excellent observateur, le docteur Roulin, compagnon du docteur Boussingault, vit, tous les matins de Santana , la fumee s'elever en colonne verticale du pic de Tolima. Ce savant s'exprime ainsi dans une lettre adressee de Paris, le 4 mai 1829, a l'academie des sciences de cette ville : "Les habitans n'avaient observe, avant le tremblement de terre de 1826, rien de semblable a cette colonne de fumee. Elle a donc ete comme le signal de l'inflammation, ou plutot de la manifestation de l'action volcanique a la surface de la terre." Peut-etre doiton considerer le groupe des deux paramos de Tolima et de Ruiz, comme le centre du cercle des secousses dans lequel sont situes a l'ouest, la Vega de Supia, a l'est Honda, et meme a une plus grande distance, Santa Fe de Bogota, capitale de la Colombie. Mais Honda, tant sont diverses et changeantes les communications souterraines le long de la longue fissure sur laquelle s'eleva la chaeine des Andes, souffre quelquefois, au temps des eruptions du Cotopaxi , eloigne de 102 lieues dans le sud; et le volcan de Pasto perdit sa colonne de fumee au moment meme ou, le 4 fevrier 1797, le plus terrible tremblement de terre des temps modernes detruisit Riobamba, situe a 75 lieues plus au sud. J'ai mesure trigonometriquement la pyramide de Tolima, et j'ai trouve son elevation de 1865 toises au-dessus du niveau de la mer. Cette montagne est par consequent plus haute que les nevados du Mexique, et peut-etre la plus elevee de toutes celles de l'hemisphere septentrional du nouveau continent, comme le Sorate, l'Ilimani et le Chimborazo sont les plus hautes cimes de son hemisphere meridional. Nuestra Senora de la Guadeloupe et Na. Sa. de Monserrate. L'elevation de ces chapelles est calculee au-dessus du niveau de la mer. (Bogota 365 toises. Cette mesure que j'ai donnee a ete confirmee par celle de M. Boussingault.) Tolima, d'apres mes observations, est situe par 4° 46' de latit. et 77 ° 56' de longit. a l'ouest de Paris; ayant place Santa-Fe de Bogota par 76° 34' 8". (Humboldt. Recueil d'observations astronomiques. T. II, p. 250 -- 261.) Le Purace et le Sotara sont tres pres du noeud de los Robles, ou commence la triple ramification de la chaeine, indiquee plus haut (V. ma carte du cours de la Madeleine Atlas geographique. Pl. 24): toutefois dans l'acception propre des termes, ils appartiennent a la chaeine centrale, tout comme les paramos de Ruiz et de Tolima. Loin de la pente orientale de la Cordillere orientale, au-sud est du volcan du Purace et vers les rives du Rio Fragua (1° 45' N.), le feu souterrain a trouve dans une plaine une issue par une colline que les missionnaires du Rio Caqueta ont vu fumer en allant de Timana a leurs missions. Mine d'argent au sud de Mariquita, sur la pente orientale de la chaeine centrale. Annales de chimie et de physique, 1829. Decembre, p. 515. Voyez mon Voyage aux regions equinoxiales. T. II, p. 15. M. Roulin a trouve, et ce fait est tres remarquable, dans une Historia de la conquista de Nueva Grenada composee en 1623 et encore inedite, que, "le 12 mars 1595, le paramo de Tolima eut une grande eruption. Elle s'annonca par trois violentes detonations. On vit fondre tout a coup toute la neige du sommet de la montagne (comme cela arrive souvent avant les eruptions qui echauffent le cone du Cotopaxi). Deux petites rivieres qui prennent leur source sur la pente du Tolima, se gonflerent prodigieusement, furent arretees un moment dans leur cours par l'eboulement des masses de rochers, renverserent brusquement cet obstacle, et occasionnerent une grande inondation, en entraeinant avec elles des pierres-ponces et des quartiers de rocs enormes. Les eaux furent empestees, de sorte que pendant long-temps on n'y trouva pas de poisson en vie." Etaient-elles impregnees de gaz nuisibles, ou de soufre et d'acide muriatique, comme celles du Rio Vinagre a Popayan? "Je fixe, ajoute M. Roulin, l'attention sur l'existence de ce volcan, parce qu'il est eloigne au moins de 40 lieues de la mer, et par consequent de tous les volcans en activite, celui qui en est le plus distant." Je ne puis acquiescer entierement a cette derniere assertion: le Cotopaxi et le Popacatepetl, pour ne citer que des volcans d'Amerique, sont plus eloignes de la cote. A la verite la longitude du point de la cote du Choco, situe sous le parallele de Tolima entre les caps Charambira et Corrientes, n'a pas ete determinee avec exactitude; cependant on peut, d'apres plusieurs combinaisons, adopter l'opinion que la cote la plus proche se trouve a peu pres par 79° 42' de longit. E., par consequent la difference des meridiens qui exprime en meme temps la distance entre le volcan de Tolima et la cote maritime, est de 1° 46' . A peine a deux milles au nord du pic de Tolima, s'eleve le Paramo de Ruiz. Mon ami M. Boussingault m'ecrit, le 18 juin 1829, de Marmato a son retour du Choco, ou il avait examine les alluvions de platine, ce qui m'a procure des points importans de comparaison avec l'Oural: "Dites a M. Arago qu'il peut hardiment placer le Paramo de Ruiz au nombre des volcans encore braulans en activite, qu'il note tous les ans dans l'Annuaire du bureau des longitudes; ce volcan jette constamment de la fumee, et au moment ou je vous ecris ces lignes, j'apercois tres distinctement la colonne de fumee." Le Paramo de Ruiz, comme on peut le voir sur ma carte du cours du Rio-Magdalena, est a peine eloigne de deux lieues du Paramo de Tolima. M. Boussingault a-t-il ecrit Ruiz pour Tolima, ou bien a-t-il de Marmato, confondu les deux cimes voisines? D'apres des recherches que j'ai faites pour ma carte deja gravee, mais encore inedite: Carte hydrographique du Choco, depuis les 3° 30' jusqu'aux 8° 30' de latitude, je place provisoirement Novita par 79 ° 4' de longit. O. parce que j'ai trouve pour Carthago 78 ° 26' 39". Dans la province d'Antioqui a 5° 27' de latit. au sud de la Vega de Supia, sur la pente orientale de la chaeine occidentale des Andes. La chaeine centrale des Andes, dans toute l'etendue que j'ai suivie, est entre les noeuds de Los Robles et le passage de Quindiu, est couverte de granit, de gneiss et de mica schiste, que des masses de trachyte ont perces dans les paramos. Des sources salees, du gypse et du soufre naturel se trouvent au milieu de ces formations cristallisees. J'ai rencontre, dans le passage de Quindiu pres du Moral, a 1062 toises au-dessus de la mer, une crevasse ouverte dans le mica schiste du Quebrada del Azufral, ou du soufre naturel s'etait sublime, et d'ou, en octobre 1801, s'exhalait une combinaison de gaz si chaud, que le thermometre de Reaumur se soutenait dans cette fente a 38° 2. En me penchant, j'eprouvai des pesanteurs de tete et des etourdissemens. La temperature de l'atmosphere etait alors de 16° 5. Celle du petit ruisseau qui est impregne d'hydrogene sulfure, et qui se precipite du pic de Tolima, etait de 23° 3. Au printemps de 1827, M. Boussingault s'est arrete deux jours a Azufral. "Vous apprendrez avec interet, m'ecrit-il d'Ibague, que depuis vingt-six ans que vous avez examine cette fente ouverte, la chaleur souterraine a diminue d'une maniere surprenante. Presentement le thermometre ne se soutient dans cette crevasse qu'a 15° 2, tandis qu'a l'air libre et a l'ombre il marque 18° 6: par consequent la chaleur des gaz qui s'en exhalent, a diminue presque de 23°." On aurait pu presumer que le pic de Tolima s'etant rallume, devait produire un effet contraire dans la quebrada del Azufral, et par consequent diminuer la temperature plutot que l'augmenter. Mais peut-etre les commotions terrestres qui ont precede l'eruption du volcan ont-elles coupe les communications qui existaient auparavant avec les fentes de l'Azufral. Ces changemens dans la temperature d'une meme crevasse, de meme que dans la nature chimique des vapeurs qui s'en exhalent, sont tres communs au Vesuve, avant et apres une eruption. M. Boussingault a analyse avec beaucoup d'exactitude la combinaison des gaz qui s'exhalent des fissures du mica schiste de Quindiu; voici le resultat de son travail: Gaz acide carbonique .......... 94 Air atmospherique............. 5 Hydrogene sulfure ............. 1 100 Cette combinaison indique ce qui se passe audessous des roches cristallisees, regardees jusqu'ici comme primitives, et explique suffisamment l'etourdissement que MM. Boussingault et Bonpland et moi avons eprouve dans la mina del Azufral. La carte des chaeines de montagne et des volcans de l'Asie interieure jointe a ce memoire, n'est qu'une ebauche destinee a faciliter l'intelligence de cet ecrit. Les bases de mon travail ont ete, autant que la petitesse de l'espace me l'ont permis, l'Asie gravee par M. Berthe en 1829; la petite carte de l'Asie centrale de Klaproth, qui se trouve dans le Tome II des Memoires relatifs a l'Asie; la carte de l'interieur de l'Asie, en russe par Pansner; la carte du voyage de Meyendorff en Boukharie; la carte de Waddington, jointe aux Memoires du Sultan Baber (en anglais); l'esquisse d'une partie du step des Kirghiz par Meyer, dans le voyage de Ledebour a l'Altai; enfin quelques cartes et des itineraires manuscrits, recueillis en Siberie. La position des volcans de l'Asie centrale qui ont ete places avec soin, et la fixation de quelques hauteurs au-dessus et au-dessous du niveau de l'Ocean, donnent peut-etre un certain interet a ma premiere ebauche d'une carte des chaeines de montagnes de l'Asie, et la distinguent de toutes celles qui ont ete publiees jusqu'a present. NOTE SUPPLEMENTAIRE DE M. DE HUMBOLDT. Vivement interesse a comparer les differens recits des indigenes sur tout ce que je n'ai pu voir de mes yeux, j'ai prie mon ami M. Simonov, professeur d'astronomie a Kazan, et astronome de l'expedition du capitaine Billinghausen au pole austral, de vouloir bien prendre quelques renseignemens sur le terrain volcanique de Bichbalik, entre la chaeine du Thian chan et le Haut-Irtyche, aupres du savant professeur de litterature persane, M. Kazim-beg. Ces renseignemens ne confirment pas l'existence d'une montagne qui a jete du feu dans le lac Ala-goul meme, tel que l'indique l'itineraire tatar que je me suis procure a Orenbourg, mais ils font connaeitre une source thermale et une caverne pres du lac, de laquelle sort un vent impetueux qui effraie les caravanes. Ces contradictions dans les recits des voyageurs tatars sont malheureusement tres communes, comme je l'ai eprouve le long du step des Kirghiz, et aux confins de la Dzoungarie chinoise. Il me suffit d'avoir fixe de nouveau l'attention sur ce pays interessant entre le lac Balkhachi, les rives de l'Ile et Korgos. On va consigner ici la traduction litterale de la note de M. Kazim beg, ecrite en anglais, car ce Persan (fils du grand Mufti d'Oufa), s'est rendu tres familiere la langue anglaise, pendant son sejour parmi les membres de la societe biblique ecossaise residant a Astrakhan. Je ne doute pas que l'ensemble des notices que renferme mon memoire sur les chaeines de montagnes de l'interieur de l'Asie, et les notes savantes de M. Klaproth n'engagent bientot des voyageurs instruits, qui visitent aujourd'hui moins rarement qu'autrefois le Haut-Irtyche, a eclaircir la topographie des lacs Ala-koul et Alaktougoul, que le vieux Tatar Sayfoulla regarde aussi comme deux lacs distincts. Sont-ce des inondations qui changent par intervalle la configuration de ces bassins d'eau douce? Description du lac Ala goul et de la caverne Ouybe. "Un mollah tatar nomme Safuylla Kazi, age environ de 70 ans, et qui depuis plusieurs annees reside a Semipolatinsk, a fait plusieurs voyages dans ces regions; il a ete a Gouldja sur la riviere Ili, et connaeit bien les lacs Ala goul et Alatau goul. Il m'en a donne la notice suivante: Apres avoir passe la ville de Tchougoutchak, la route des caravanes se dirige a l'Ala goul, ou lac bigarre, nomme ainsi parce qu'il contient trois rochers assez grands et de differentes couleurs. Ce lac reste sur la gauche de la route. De l'autre cote ou a l'ouest du lac est un autre lac l'Ala tau goul. Dans celui-ci on voit une montagne blanche comme la neige, et beaucoup plus grande qu'aucun des rochers de l'Ala goul. (Le mot Ala tau goul est ou compose d'ala et tougoul, c'est-adire non bigarre, ou des trois mots Ala tau goul, c'est-a-dire un lac contenant une montagne bigarree; car le mollah dit que le mont situe dans ce lac a un bel aspect de diverses couleurs, quand les rayons du soleil s'y reflechissent.) Sur ma question, s'il y avait quelqu'indice que cette montagne avait ete autrefois un volcan, et si les Tartars et les Kalmuks, passant devant ces lacs, offrent un sacrifice a une de ces montagnes, il m'a repondu qu'il n'avait jamais entendu parler d'une chose pareille, relativement aux lacs et aux monts qu'ils contiennent, mais il ajouta: Quand vous avez passe l'Ala goul (place dans la carte precisement au sud de l'Ala tau goul), on rencontre deux montagnes, le Joug tau (dans les cartes Kuk-tau, ou la montagne bleue) sur la droite, et le Barlyk sur la gauche; la route des caravanes passe entre les deux. Quelques verst au-dela de ces montagnes et sur le chemin, est une grande caverne souterraine; elle porte le nom d'Ouybe. Quelquefois, et principalement en hiver, elle produit des tempetes violentes qui continuent souvent deux jours. L'entree de cette caverne ressemble a celle d'un vaste caveau, et personne n'ose y entrer ni meme y regarder. Sa profondeur est inconnue a tout le monde, a l'exception de Dieu (Allah). Enfin il decrit cette caverne comme si epouvantable et avec des termes si superstitieux, que je presume qu'elle doit a peu pres ressembler a l'Elden hole dans le Derbyshire. La seule difference est que la derniere se trouve dans le flanc d'une montagne, et ne produit ni tempetes ni vents. Le mollah assure que la tempete qui sort de l'Ouybe est quelquefois si forte qu'elle emporte tout ce qui se trouve sur le chemin et le jette dans le lac voisin. Il paraeit donc probable qu'avant quelques centaines d'annees, il sortit du feu et des flammes de la caverne d'Ouybe, et que c'est pour cette raison qu'elle pouvait porter le nom de volcan; ou qu'il y avait quelque chose de semblable. Je dois encore rapporter que le mollah avait entendu dire que le vent de l'Ouybe etait quelquefois chaud en hiver, et si dangereux, que les caravanes, qui arrivent dans le voisinage de la caverne, s'arretent souvent pendant une semaine entiere, quand elles supposent que les tempetes auront lieu, et ne continuent leur chemin qu'apres qu'elles ont cesse. Ce n'est pas cette montagne, mais un pic de l'Ala goul qu'on dit volcanique. (H.) "Pour ce qui regarde les sacrifices qu'on offre, le mollah rapporte que pres du mont Jouk tau, ou Kuk tau, se trouvent deux fontaines, dont une est froide et l'autre chaude. C'est a cette derniere que les Kirghiz et les Kalmuks offrent des sacrifices, parce qu'ils croient que son eau guerit presque toutes les maladies. Il est donc tres vraisemblable que ce que M. le baron de Humboldt a entendu des Tatars a Orenbourg, relativement aux sacrifices offerts a la montagne dans le lac Ala goul, est identique avec le rapport du mollah Sayfoulla sur les fontaines en question. "Apres avoir recu de lui les notions precedentes, j'ai fait la connaissance d'un autre mollah, ne a Kachkar, et qui a passe avec une caravane devant l'Ala goul et les montagnes Kouk tau et Barlyk. Il confirme tout ce qui a ete dit sur l'Ala goul et la caverne Ouybe, etc. "L'ecrivain de ces lignes se chargera tres volontiers de faire quelques nouvelles investigations sur tous ces points, qu'il paraeit important d'eclaircir. Aussitot qu'il aura recueilli quelque autre renseignement, il le mettra, avec le plus grand plaisir, devant les yeux de M. le baron de Humboldt, duquel il a l'honneur d'etre, etc." Alexandre Kazim Beg. NOTES ET ADDITIONS AU MEMOIRE PRECEDENT, Par M. KLAPROTH. (a) Page 219. Tchougoutchak ou Tchougoutchou, et dans les ecrits officiels des Chinois Tarbakhatai, porte chez les Kirghiz du voisinage le nom de Tach-tava. C'est un poste de frontiere etabli par les Chinois en 1767, sous le nom de Soui tsing tching. Cette ville a des remparts en terre, les autorites et les inspecteurs de la frontiere y resident. La garnison se compose d'un commandant, d'officiers superieurs, de 1000 soldats chinois et d'un colonel, et de 1500 Mandchoux et Mongols. Les Chinois y restent constamment en garnison; ils forment une colonie militaire, et sont tenus a cultiver la terre pour se procurer les grains necessaires a leur subsistance. Les Mandchoux et les Mongols y sont envoyes d'Ili et remplaces tous les ans. (2) P. 220. Le mot Ala-koul ou mieux Alak-koul signifie en kirghiz le lac bigarre; les Kalmuks du voisinage donnent a sa partie orientale, qui est la plus grande, le nom d' Alak-tougoul noor ou le lac du taureau bigarre, car tougoul designe un veau ou un taureau; une montagne qui sort du lac, separe cette partie de l'occidentale, qui est petite et porte le nom kalmuk de Chibartou kholai, ou de Golfe Boueux. Autrefois ce lac portait aussi le nom de Gourghe-noor, c'est-a-dire Lac du Pont. Je l'ai trouve pour la premiere fois indique sur la Carte du Pays du Contaicha (Khoungtaidzi des Kalmuks Dzoaungars) faite par le capitaine d'artillerie Ivan Ounkovski, en 1722 et 23, d'apres les informations recues par le Grand Contaicha et par d'autres Kalmuks et Cosaques. Ce lac y est bien place au sud du mont Tarbagatai, il est nomme Alak tougoul, et recoit les rivieres Kara-gol, Ourer (?) et Imil; on y voit aussi indiquees les sources chaudes qui sont a l'est. C'est par erreur que nos cartes font de ce lac deux lacs reunis par un ou plusieurs canaux. (3) P. 220, note a. Balkhachi noor signifie en kalmuk le lac etendu. (4) P. 221. Cette riviere s'appelle Boro tala gol, ou la riviere de la plaine grise; elle ne coule pas de l'est a l'ouest et ne se jette pas dans l'Alak tougoul noor, comme l'indique la carte de M. Pansner; elle se dirige au contraire de l'ouest a l'est, et a son embouchure dans le Khaltar ousike noor, appele aussi Boulkhatsi-noor. (5) P. 224. Notice sur le mont Altai, extraite de la grande geographie imperiale de la Chine. (Description de la province de Tarbagatai). Le mont Altai est au nord-est de la ville de Tarbagatai (Tchougoutchak), il prend naissance a la montagne Bidzi dabahn, dans le departement de Tchin si fou (ou Bar-koul), passe devant le Kourtou dabahn , et s'avance en serpentant. Ses cimes orientales sont les plus elevees et les plus roides. C'est la couronne de tous les monts de la province septentrionale (ou situee au nord du Thian chan ou mont Celeste). A l'est de cette chaeine est l'ancien pays des Kalka, et a l'ouest celui des Dzoaungar. En 1755, un mandarin y fut envoye pour offrir un sacrifice aux esprits de cette montagne, et depuis ce temps on renouvelle cette ceremonie tous les ans. Le Kourtou dabahm est a 100 [?] li au nord-ouest du Gourbi-dabahm et forme une meme chaeine avec lui. Le Khara Ertsis [Khara Irtyche] sort de son flanc occidental. Description du mont Altai, extraite de la grande geographie de la Chine (Description du pays des Kalka). "Le mont Altai est le Kin chan des anciens (en chinois mont d'Or); il est situe au nord-est de la riviere Tes, et se developpe sur une etendue de 2000 li. Il est si haut qu'il atteint la voie lactee, et que pendant l'ete meme, la neige accumulee sur ses cimes, ne fond pas. C'est la plus considerable de toutes les montagnes du nord-ouest. Sa cime la plus elevee est au nord-ouest du lac Oubsa-noor. Plusieurs branches, dont quatre principales, s'en detachent. L'une va droit au nord, suit le cours de la riviere Ertsis (Irtyche) et entre dans l'empire russe. Celle du nord-est, borde au nord la riviere Tes sur une etendue de 1000 li. Celle de l'est a pour embranchement la montagne Tangnou-oola; elle se dirige ensuite au nord-est, atteint le versant septentrional du Khanggai et s'etend au nord jusqu'a la Selengga. Elle envoie, a plus de cent li au sud, une branche qui se dirige apres vers l'est, porte le nom de Oulan gom oola et entoure le lac Kirghiz-noor au nord. Au sud-est est la montagne Berkinak kokei oola, et a l'est celle d' Angghi oola (sur les cartes Onggou oola); de son versant meridional sort la riviere Koungghe-gol, et du versant nord-est l'Oukhai gol. Plus au nord, est le mont Malaga oola, au pied oriental duquel sont les sources du Bourgassoutai gol . Au nord-est sont les hautes montagnes dont le versant meridional donne naissance aux rivieres qui forment le Khara-gol. La chaeine se dirige alors au nord-est, atteint le versant septentrional du Khanggai, et borde les rivieres Khatoun gol et Tamir." Gol en mongol signifie riviere. "Une autre branche de l'Altai se dirige vers le sud, et fait sans interruption divers detours. De son versant occidental decoulent les rivieres Narin gol, Khourtsin-gol, Khaliootou-gol, Neske-gol, Bordzigol, Khaba-gol, Kiran-gol, Khara Ertsis-gol et Kho Ertsis-gol, tandis que sur l'oriental sont les sources du Karkira-gol et du Khobtou-gol. La chaeine tourne alors a l'orient; le Bouyantou-gol a sa source sur son versant septentrional, tandis que le Boula Tsingghil gol et le Djaktai-gol (sur les cartes Ariktai gol) decoulent du meridional. A l'est est la queue du mont Altai (l'expression mandchoue sur les cartes Altai alin doube, a la meme signification; doube est la queue d'une feuille ou d'une plante, la pointe, l'extremite d'une chose). Au sud-est est le Taichiri oola. Plus loin au sud-est la chaeine se divise en deux branches, qui forment comme deux lignes de nuages noirs et servent de bornes au desert sablonneux. L'orientale porte le nom de Kouke sirke oola, et s'etend au nord-est jusqu'au Bayan oola. La branche meridionale est nommee Doute dabahn, puis Boutai-oola, au pied occidental duquel est la source du Tougourik-gol; plus au sud-est elle est appelee Bourkan-oola et Khonggor adzirgan oola; ses sommets s'etendent encore a une distance de quelques milliers de li, et traversent le step sablonneux, ou elles portent le nom d'Arban khoyor Datcha khada (les douze rochers de Datcha); plus au sud-est celui de Gourban saikan oola; au sud, est la montagne Nomkhon-oola, et au sud-est, celle d'Oubeghen-oola. La chaeine finit au mont Kouke Khararoung oola." "Au sud de la partie de la chaeine appelee Khonggor adzirgan oola sont les monts Kitsighene-oola, Baikhonggor-oola, Djalatou-oola, qui aboutissent a l'Itattou-oola. A quatre-vingts li au sud de ce dernier, le Thian chan (le mont Celeste) qui vient de l'occident, se dirige par divers detours au sudest, et traverse le step sablonneux sur une distance de plus de mille li." "A l'orient de la chaeine est encore le mont Khorgotou oola, qui se joint au Segoun Khaldjan oola; ce dernier s'etend a 200 li au nord jusqu'au Kouke Khararoung oola. Plus au sud, toutes ces montagnes traversent le step sablonneux, et se reunissent a la chaeine de Gardjan (en chinois In chan), a 500 li au nord de la courbure du Houang ho, qui entoure ici le pays d'Ordos." On voit donc que les Chinois en indiquant du N.-O. au S.-E. la direction du Grand-Altai, le font presque se reunir au Thian chan, ce qui correspond parfaitement avec ce que M. de Humboldt dit dans son memoire (page 228). (6) P. 227, note a. Le mont Khanggai oola est au nord de la source de l'Orkhon, a 2000 li droit au nord de la ville de Ning hia du Chen si, et a 500 au nord-ouest de l'Oungghin mouren. Ses sommets sont tres hauts et considerables. Cette chaeine est un embranchement de l'Altai, qui vient du nord-ouest; elle s'etend a l'orient sur les rivieres Orkhon et Toula avec leurs affluens, et devient le Kente du Khinggan. Une branche de cette chaeine s'en separe a l'ouest et se dirige au nord sous le nom de Koukou dabahn, elle entoure le Selengga superieur et tous ses affluens qui y prennent leur origine, puis se prolonge sur une distance de 1000 li, dans le territoire russe. L'Orkhon, le Tamir et leurs affluens ont egalement leurs sources dans cette chaeine, qui est probablement la meme que les anciens Chinois designaient sous le nom de Yan jen chan. (7) P. 230. Les montagnes appelees par les Russes Alghinskoe khrebet, Ayaghinskoe khrebet portent chez les Kirghiz le nom de Dalai kamtchat. Elles commencent au nord du lac Naourloun-koul, contiennent sur leur versant septentrional les sources du Kinkoul et du Baganak sec, qui sont des affluens de la gauche de l'Ichim, et finissent a l'est aux sources du Kairakly et du Kara sou de l'Ichim. Les rivieres qui forment le Petit-Tourgai et le Kara-Tourgai, prennent leur origine sur le versant meridional de cette chaeine. Cette derniere est une partie du prolongement des montagnes de la Dzoaungarie, et lie celles-ci a l'Oural. C'est une chaeine a filons, entrecoupee en plusieurs endroits de vastes plateaux inclines; elle ne montre nulle part des indices de grandes revolutions terrestres, et elle est partout habitable. Cependant le dos appele Eremen, a la source de l'Ichim, et le Bogouli tanga tau, sont tres eleves et montrent des precipices escarpes. Cette chaeine est encore plus aplatie aux sources du Tobol; elle y ressemble a un haut plateau ondule, et porte le nom d'Oulou tau (grande montagne). Dans le voisinage du lac Naourloun-koul ses promontoires forment des plaines peu inclinees et argileuses, couvertes de fragments de schiste calcaire, de gres, de gypse, d'albatre et d'argile durcie. La montagne meme y est assez elevee et couverte a quelques endroits de forets. (Extrait du Voyage de Bardanes dans le Step des Kirghiz.) (6) P. 237, note a. Ouch-Tourpan est le nom que les Boukhars donnent a la ville d'Ouchi, situee a 200 li a l'ouest d'Aksou. Le mot Tourpan (d'ou derive aussi le nom de la ville de Tourfan, qui est beaucoup plus a l'orient) signifie, d'apres les geographes chinois modernes, une residence, mais selon d'autres des eaux accumulees. (8) P. 241. Les mots davan en turc oriental, dabahn en mongol et dabagan en mandchou, designent, non pas une montagne, mais un passage dans une montagne; Kachkar davan ne signifie donc que le passage a travers les montagnes a Kachkar ou Kachghar; ce passage ou col peut aussi bien suivre par une longue vallee, que traverser une cote haute et escarpee. (9) P. 241. C'est le Moussour tagh, ou Moussar-tagh (de la Moussart de Strahlenberg et de Pallas) ou le glacier entre Ili et Koutche. Les glaces dont il est revetu lui donnent l'aspect d'une masse d'argent. Une route, appelee Moussour dabahn, percee a travers ces glaciers, conduit du sud-ouest au nord, ou pour mieux dire de la Petite Boukharie a Ili. Voici la description qu'un geographe chinois moderne fait de cette montagne. "Au nord, dit-il, est le relais de poste Gakhtsa kharkhai, et au sud celui de Tamga tach ou Terme khada; ils sont eloignes l'un de l'autre de 120 li. Si du premier relais on va au sud, la vue s'etend sur une vaste etendue couverte de neige, qui, en hiver, est tres profonde. En ete, on trouve sur les hauteurs de la glace, de la neige et des lieux marecageux. Les hommes et les bestiaux suivent les sentiers sinueux sur le flanc de la montagne. Quiconque est assez imprudent pour s'aventurer sur cette mer de neige, est perdu sans ressource. Apres avoir parcouru plus de 20 li, on arrive au glacier, ou l'on n'apercoit ni sable, ni arbres, ni herbes; ce qui effraie le plus ce sont des rochers gigantesques uniquement formes de glacons entasses les uns sur les autres. Si l'on jette les yeux sur les fentes qui separent ces masses de glace, on n'y decouvre qu'un espace vide et sombre ou le jour ne penetre jamais. Le bruit des eaux qui coulent sous ces glaces, ressemble au fracas du tonnerre. Des carcasses de chameaux et de chevaux sont dispersees ca et la. Pour faciliter le passage on a taille dans la glace des marches pour monter et descendre, mais elles sont si glissantes que chaque pas est dangereux. Trop souvent les voyageurs trouvent leur tombeau dans les precipices. Hommes et bestiaux marchent a la file, en tremblant d'effroi, dans ces lieux inhospitaliers. Si l'on est surpris par la nuit, il faut chercher un abri sur une grande pierre; si la nuit est calme, on entend des sons fort agreables, tels que ceux de plusieurs instrumens reunis: c'est l'echo qui repete le bruit du craquement produit par les glaces en se brisant. Le chemin que l'on a tenu la veille n'est pas toujours celui qu'il convient de suivre le lendemain. Au loin, dans l'ouest, une montagne, qui jusqu'a present a ete inaccessible presente ses cimes escarpees et couvertes de glaces. Le relais de Tamga tach est a 80 li de ce lieu." "Une riviere appelee Moursour gol, sort avec une impetuosite effrayante des flancs de ces glaciers, coule au sud-est, et porte ses eaux a l'Ergheou qui tombe dans le lac Lob. A quatre journees au sud de Tamga tach est une plaine aride, qui ne produit pas la plus petite plante. A 80 ou 90 li plus loin on continue a trouver des rochers gigantesques. Le commandant d'Ouchi envoie annuellement un de ses officiers porter des offrandes a ce glacier. La formule de la priere qui se recite dans cette occasion, est envoyee de Peking par le tribunal des Rits." "On trouve de la glace sur toute la crete du Thian-chan, si on la traverse dans sa longueur; mais si au contraire, on la franchit du nord au sud, c'est-a-dire dans sa largeur, on n'en trouve que sur une distance de quelques li. Tous les matins, dix hommes sont occupes au col du Moussour tagh, a tailler des degres pour monter et descendre; l'apres midi, le soleil les a fondus ou les rend extremement glissans. Quelquefois la glace manque sous les pieds des voyageurs; ils'y enfoncent sans esperance de jamais revoir le jour. Les Mahometans de la Petite-Boukharie, immolent un belier en sacrifice, avant de traverser ces montagnes. La neige y tombe toute l'annee, il n'y pleut jamais. P. 244, lig. 5. Le nom de Tartach davan s'applique de meme a la continuation occidentale de cette chaeine nommee Thsoung ling par les Chinois. Thsoung ling signifie montagnes des Ognons; on pourrait egalement traduire ce nom par Montagnes Bleues, car thsoung en chinois designe aussi la couleur bleuatre de l'ognon cru; cependant comme cette chaeine est appelee encore aujourd'hui Tartouch ou Tartach dabahn, par les Boukhars et autres habitans de l'Asie centrale, il faut prendre le mot thsoung dans sa signification d'ognon; car les geographes chinois rapportent que l'espece d'ognon sauvage, nommee tartouch ou tartach, croeit sur toutes les montagnes du Tubet occidental; ses tiges forment des tas, et si les voyageurs ou les betes de somme mettent le pied sur un de ces tas, ils glissent facilement et tombent; aussi craint-on beaucoup cet accident quand le chemin est escarpe. Les routes qui traversent ces montagnes sont tres raides et difficiles, cependant elles passent rarement a travers les glaciers, dont les cimes elevees et couvertes de neiges profondes et eternelles restent a cote du chemin. (12) P. 250. La partie orientale de cette chaeine, au point ou elle finit a l'eile de Formose, est egalement volcanique. Le mont Tchy kang (la chaeine rouge), au sud de Fung chan hian dans cette eile, a autrefois vomi du feu, et il s'y trouve encore un lac dont l'eau est chaude. Le Phy nan my chan, au sud-est de Fung chan hian, est tres eleve et couvert de pins; on y distingue pendant la nuit une lueur qui ressemble a du feu. Le Ho chan (mont du feu), au sud-est de Tchu lo hian, est rempli de rochers entre lesquels coulent des sources dont l'eau produit constamment des flammes. Enfin le Lieou houang chan (montagne du soufre), qui s'etend au nord de la ville de Tchang houa hian jusqu'a Tan choui tchhing, jette continuellement des flammes a sa base; et les exhalaisons sulfureuses y sont si fortes, qu'elles peuvent etouffer un homme; on extrait une grande quantite de soufre de cette montagne. (13) P. 261. Le Pe chan des anciens Chinois porte a present le nom turc d'Echik bach. Echik est une petite espece de chamois et bach signifie tete. Le soufre y est produit en abondance. L'Echik bach appartient aux hautes montagnes, qui, du temps de la dynastie de Wei (dans le troisieme siecle), bornaient au nord-ouest le royaume de Khouei thsu (Koutche); c'est l'Aghie chan sous les Soui (dans la premiere moitie du septieme siecle). L'histoire de cette dynastie dit que cette montagne a toujours du feu et de la fumee, et qu'on y recueille du sel ammoniac. On lit dans la description des pays occidentaux, qui fait partie de l'histoire de la dynastie des Thang, que la montagne en question s'appelait alors Aghie thian chan (ce qu'on pourrait traduire par mont des champs de feu ), ou Pe chan (Mont Blanc), qu'il etait au nord de la ville d'Ilolo, et qu'il en sortait un feu perpetuel. Ilolo (ou peut-etre Irolo, Ilor, Irol) etait alors la residence du roi de Khouei thsu. Dans ce nom, le mot thian ne signifie pas ciel, il y est exprime par le caractere qui designe un champ. L'Echik bach est au nord de Koutche, et a 200 li a l'occident du Khan tengri, qui fait partie de la chaeine du Thian-chan. L'Echick bach est tres large, et on y recueille encore aujourd'hui beaucoup de souffre et de sel ammoniac. Il donne naissance a la riviere Echik bach gol qui coule au sud de la ville de Koutche, et se jette apres un cours de 200 li dans l'Ergheou. Voici encore quelques notices sur d'autres lieux volcaniques de l'Asie centrale. Pres d'Ouroumtsi, et 30 li a l'ouest du poste de Byrke boulak, on voit un espace de 100 li de circonference, qui est couvert de cendres volantes; si l'on y jette la moindre chose, une flamme eclate et consume tout en un clin-d'oeil. Quand on y lance une pierre, on en voit sortir une fumee noire. En hiver, la neige ne s'y maintient pas. On appelle ce lieu la plaine enflammee. Les oiseaux n'osent pas voler au-dessus. Sur la frontiere qui separe la province d'Ili du district d'Ouroumtsi, on trouve un gouffre d'environ 90 li de circonference. De loin, il paraeit couvert de neige; le terrain, qui ressemble a une surface impregnee de sel, s'endurcit lorsqu'il a plu. Quand on y jette une pierre, on entend un bruit pareil a celui que ferait un baton qui frappe sur du fer. Si un homme ou un animal marche sur cet abeime, il est englouti a jamais. On l'appelle la fosse des cendres. Ouroumtsi est entoure, a l'ouest par une chaeine de monts sablonneux, tres riches en houille. La grande geographie imperiale de la Chine fait encore mention d'une montagne de sel ammoniac, appelee Naochidar oulan dabsoun oola, en mongol la montagne du sel ammoniac et du sel rouge. Elle la place en dehors de la frontiere orientale de la principaute de Khoten au milieu du desert de sable. A l'est, poursuit-elle, des montagnes contigues vont rejoindre la chaeine du Nanchan du district de Ngan si tcheou de la province chinoise de Kan sou. Les geographes arabes du moyen age designaient, sous le nom d'al-Botom, les montagnes de la partie orientale du district de la ville de Soutrouchna ou Osrouchna, actuellement detruite, et qui etait situee a moitie chemin de Samarkand a Ferghana. La ville de Zamin de nos jours appartenait a ce canton. Ibn Haukal place dans ces montagnes un puits de feu et de sel ammoniac, dont il donne la description suivante: "Dans le mont Botom est une espece de caverne, sur laquelle on a construit un edifice comme une maison dont les portes et les fenetres sont fermees. Il y a une source de laquelle s'eleve une vapeur qui, pendant le jour, ressemble a de la fumee, et pendant la nuit a du feu. Quand la vapeur se condense, elle forme le sel ammoniac (Nouchadir) qu'on recueille. Dans cette voaute la chaleur est si forte que personne n'y peut entrer sans se brauler, a moins d'etre vetu d'un habit epais trempe dans l'eau; (ainsi preserve) on entre rapidement et on prend autant de ce sel qu'on en peut saisir. Ces vapeurs changent de temps en temps de place; pour les retrouver il faut faire des fosses, jusqu'a ce qu'elles se montrent de nouveau. Souvent on fouille inutilement, et il faut recommencer le travail a un autre endroit pour les rencontrer. S'il n'y avait pas d'edifice construit sur ces fosses pour empecher que la vapeur se disperse, elle ne nuirait pas a ceux qui s'approchent, mais ainsi renfermee, elle braule par sa chaleur intense ceux qui y entrent." Apres ces details sur les volcans de l'interieur de l'Asie, je pense que quelques notices sur ceux du Japon, extraites des auteurs de ce pays, ne seront pas deplacees ici. Sur les volcans du Japon. La chaeine volcanique dont les premiers chaeinons meridionaux se trouvent dans l'eile de Formose, s'etend par les eiles Lieou khieou jusqu'au Japon, et de la par l'archipel des Kouriles jusqu'au Kamtchatka. La grande eile de Kiousiou, par laquelle commence le Japon au sud-ouest est tres volcanique dans ses parties occidentales et meridionales. L'Oaun zen ga dake (la haute montagne des sources chaudes), est situe sur la grande presqu'eile qui forme le district de Takakou de la province de Fisen, et a l'ouest du port de Simabara. On voit sur cette montagne, comme dans les presqu'eiles de Taman et d' Abcheron, plusieurs crateres qui jetaient une boue noire et de la fumee. Dans les premiers mois de l'annee 1793, le sommet de l'Oaun zen ga dake s'affaissa entierement. Des torrens d'eau bouillante sortirent de toutes parts de la cavite profonde qui en resulta, et la vapeur qui s'eleva au-dessus ressemblait a une fumee epaisse. Trois semaines plus tard il y eut une eruption du volcan Bivo-no-koubi, environ a une demi-lieue de distance du sommet, la flamme s'eleva a une grande hauteur; la lave qui en decoula s'etendit avec rapidite au bas de la montagne, et, en peu de jours, tout fut en flammes dans une circonference de plusieurs milles. Un mois apres un tremblement de terre horrible se fit sentir par toute l'eile de Kiousiou, principalement dans le canton de Simabara; il se repeta plusieurs fois, et finit par une eruption terrible du mont Miyi-yama, qui couvrit tout le pays de pierres et mit principalement la partie de la province de Figo, vis-a-vis de Simabara, dans un etat deplorable. Le mot dake en japonais est le synonyme du terme yo, par lequel les Chinois designent les plus hautes cimes de leur pays. Dans le district d'Aso, dans l'interieur du Figo, est le volcan Aso-noyama, qui jette des pierres et des flammes; les dernieres sont de couleur bleue, jaune et rouge. Enfin, la province la plus meridionale du Kiousiou, nommee Satsouma est entierement volcanique et impregnee de soufre; les eruptions n'y sont pas rares. En 764 de notre ere, trois nouvelles eiles sortirent du fond de la mer qui baigne le district de Kaga sima; elles sont a present habitees. Au sud de la pointe la plus meridionale du Satsouma est Ivoo-sima (l'eile de soufre) qui braule perpetuellement. Le phenomene volcanique le plus memorable au Japon, eut lieu dans l'annee 285 avant notre ere; alors un immense ecroulement forma, dans une seule nuit, le grand lac nomme Mitsou-oumi ou Biva-nooumi, situe dans la province d'Oomi, de la grande eile de Nifon, et auquel nos cartes donnent le nom de lac d'Oitz. Dans le meme moment que s'effectua cet ecroulement, la plus haute montagne du Japon, le Fousi-no-yama dans la province de Sourouga, s'eleva du sein de la terre. Du fond du lac Mitsou oumi sortit, dans l'annee 82 avant Jesus-Christ, la grande eile de Tsikou bo sima, qui existe encore. Le Fousi-no-yama est une enorme pyramide couverte de neiges perpetuelles, situee dans la province de Sourouga a la frontiere de celle de Kai; c'est le volcan le plus considerable et un des plus actifs du Japon. En 799 il fit une eruption qui dura depuis le 14e jour du 3e mois jusqu'au 18e du 4e; elle fut epouvantable, les cendres couvrirent tout le pied de la montagne et les courans d'eau du voisinage prirent une couleur rouge. L'eruption de l'an 800, se fit sans tremblement de terre, tandis que celles du 6e mois de 863 et du 5e de 864 en furent precedees. La derniere fut tres violente, la montagne braula sur une etendue de deux lieues geographiques carrees. De toutes parts des flammes s'eleverent a la hauteur de 12 toises et furent accompagnees d'un bruit de tonnerre effroyable. Les tremblemens de terre se repeterent trois fois, et la montagne fut en feu pendant dix jours; enfin sa partie inferieure creva, une pluie de cendres et de pierres en sortit, et tomba en partie dans un lac situe au nord-ouest, et fit bouillonner ses eaux, de sorte que tous les poissons y moururent. La devastation se repandit sur une etendue de 30 lieues, la lave coula a une distance de 3 a 4, et se dirigea principalement vers la province de Kai. En 1707, dans la nuit du 23e jour de la 11e lune, deux fortes secousses de tremblement de terre se firent sentir, le Fousi yama s'ouvrit, jeta des flammes et lanca des cendres a 10 lieues, au sud jusqu'au pont de Rasou-bats, pres d'Okabe dans la province de Sourouga. Le lendemain l'eruption s'apaisa, mais elle se renouvela avec plus de violence le 25 et le 26. Des masses enormes de rochers, du sable rougi par la chaleur, et une immense quantite de cendres couvrirent tout le plateau voisin. Ces cendres furent poussees jusqu'a Iosi vara, ou elles couvrirent le sol a une hauteur de 5 a 6 pieds; et meme jusqu'a Iedo, ou elles avaient plusieurs pouces d'epaisseur. A l'endroit ou l'eruption avait eu lieu, on vit s'ouvrir un large abeime, a cote duquel s'eleva une petite montagne a laquelle on a donne le nom de Foo ye yama, parce que sa formation eut lieu dans les annees nommees Foo ye. Au nord du lac Mitsou oumi et de la province d'Oomi est celle de Ietsisen, qui s'etend le long de la cote de la mer de Coree, et est bornee au nord par la province de Kaga. Sur leurs confins respectifs est situe le volcan Sira yama (montagne blanche) ou Kosi no Sira yama (montagne blanche du pays de Kosi); il est couvert de neiges perpetuelles. Ses eruptions les plus memorables eurent lieu en 1239 et 1554. On l'appelle aussi le Mont-Blanc de Kaga. Un autre volcan tres actif du Japon est le mont Asama yama ou Asama-no dake situe au nord-est de la ville de Komoro, dans la province de Sinano, une de celles du centre de la grande eile de Nifon, au nord-est de celles de Kai et de Mousasi. Il est tres eleve, braule depuis le milieu jusqu'a la cime, et jette une fumee extremement epaisse. Il vomit du feu, des flammes et des pierres; les dernieres sont poreuses et ressemblent a la pierre-ponce. Il couvre souvent toute la contree voisine de ses cendres. Une de ses dernieres eruptions est celle de 1783. Elle fut precedee par un tremblement de terre epouvantable; jusqu'au 1er aoaut la montagne ne cessa de vomir du sable et des pierres, des gouffres s'entrouvrirent de toutes parts, et la devastation dura jusqu'au 6 du meme mois. L'eau des rivieres Yoko gava et Kourou gava bouillonna; le cours du Yone gava, l'un des plus grands fleuves du Japon, fut intercepte, et l'eau houillante inonda les campagnes. Un grand nombre de villages furent engloutis par la terre ou braules et couverts par la lave. Le nombre des personnes qui ont peri par ce desastre est impossible a determiner; la devastation fut incalculable. Dans la meme province, il y a un lac spacieux nomme Souva-no-mitsou oumi, duquel decoule la grande riviere Tenriou gava. Le lac est au nordouest de la ville de Taka sima, et recoit un grand nombre de sources chaudes qui jaillissent de la terre dans ses environs. Dans la province de Yetsingo, situee au nord de celle de Sinano, il y a pres du village de Kourougava moura, un puits abondant de naphte, que les habitans braulent dans leurs lampes; il se trouve aussi dans le district de Gasi vara, un terrain dont le sol pierreux exhale du gaz inflammable, exactement comme dans plusieurs endroits de la presqu'eile d'Abcheron, ou est situee la ville de Bakou. Les habitans du voisinage se servent de ce gaz, en enfoncant un tuyau dans la terre et l'allument comme un flambeau. Le volcan le plus septentrional du Japon est l'Yake yama (mont braulant) de la province de Mouts ou Oosiou; il est situe dans la presqu'eile nord-est, au sud du detroit de Sangar, entre Tanab et Obata, et jette sans cesse des flammes. Les hautes montagnes qui traversent la province de Mouts et la separent de celle de Deva, contiennent egalement plusieurs volcans. Si nous les suivons a travers du detroit de Sangar, nous retrouvons sur la grande eile de Ieso plusieurs montagnes qui jettent des flammes, de sorte que nous pouvons suivre la chaeine volcanique qui commence a Formose, par les eiles Kouriles, jusqu'aux Kamtchatka, dont les volcans sont en activite perpetuelle. Les six volcans du Japon, que je viens de decrire, ainsi que les quatre montagnes desquelles sortent des sources chaudes, savoir le Kokensan ou Youno dake dans le Boungo, le Fokouro san dans le Deva, le Tate yama dans le Ietsiou et le Foko ne yama dans le Idzou, renferment, selon les Japonais, les dix enfers du pays. Les monts Fousi-no yama et Sira yama sont regardes comme les plus eleves du Japon. Outre ces deux montagnes les habitans de cette contree regardent les sept suivans comme les mi dake ou plus hautes cimes de leur pays. 1. Le Fiai yama dans la province d'Oomi. 2. Le Fira-no yama dans la meme province. 3. L'Ifouki yama dans le Setsou. 4. L'Atako yama dans le Yamasiro. 5. Le Kin bou san dans le Yamatto. 6. Le Sin bou san dans le Setsou. 7. Le Katsoura ki yama dans le Yamatto. Klaproth.