INDEPENDANCE DES FORMATIONS. (Min.) Le mot formation designe, en geognosie, ou la maniere dont une roche a ete produite, ou un assemblage (systeme) de masses minerales qui sont tellement liees entre elles, qu'on les suppose formees a la meme epoque, et qu'elles offrent, dans les lieux de la terre les plus eloignes, les memes rapports generaux de gisement et de composition. C'est ainsi que l'on attribue la formation de l'obsidienne et du basalte aux feux souterrains; c'est ainsi que l'on dit que la formation du thonschiefer de transition renferme de la pierre lydienne, de la chiastolithe, de l'ampelite, et des couches alternantes de calcaire noir et de porphyre. La premiere acception du mot est plus conforme au genie de la langue; mais elle a rapport a l'origine des choses, a une science incertaine qui se fonde sur des hypotheses geogoniques. La seconde acception, aujourd'hui generalement recue par les mineralogistes francois, a ete empruntee a la celebre Ecole de Werner: elle indique ce qui est, non ce que l'on suppose avoir ete. Cet article est extrait d'un ouvrage inedit de M. de Humboldt, ayant pour titre: De la superposition des roches dans les deux hemispheres. Dans la description geognostique du globe on peut distinguer differens degres d'agroupement des substances minerales, simples ou composees, selon que l'on s'eleve a des idees plus generales. Des roches qui alternent les unes avec les autres, qui s'accompagnent habituellement et qui offrent les memes rapports de gisement, constituent une meme formation; la reunion de plusieurs formations constitue un terrain: mais ces mots de roches, de formations et de terrains sont employes comme synonymes dans beaucoup d'ouvrages de geognosie. (Voyez Roche, Terrain.) La diversite des roches et la disposition relative des couches qui forment la croaute oxidee du globe, ont, des les temps les plus recules, fixe l'attention des hommes. Partout ou l'exploitation d'une mine etoit dirigee sur un depot de sel, de houille ou de fer argileux, qui se trouvoit recouvert d'un grand nombre de couches de nature differente, ce travail fit naeitre des idees plus ou moins precises sur le systeme de roches propres a un terrain de peu d'etendue. Munis de ces connoissances locales, remplis des prejuges qui naissent de l'habitude, les mineurs d'un pays se repandirent dans des pays voisins. Ils firent ce que les geognostes ont souvent fait de nos jours: ils jugerent du gisement des roches dont ils ignoroient la nature, d'apres des analogies incompletes, d'apres les idees etroites qu'ils s'etoient faites dans leur pays natal. Cette erreur dut avoir une influence funeste sur le succes de leurs nouvelles recherches. Au lieu d'etudier la liaison de deux terrains contigus, en suivant quelque couche generalement repandue; au lieu d'agrandir et d'etendre, pour ainsi dire, le premier type de formations qui etoit reste grave dans leur esprit, ils se persuaderent que chaque portion du globe avoit une constitution geologique entierement differente. Cette opinion populaire tres-ancienne a ete adoptee et soutenue, en differens pays, par des savans tres-distingues; mais, des que la geognosie s'est elevee au rang d'une science, que l'art d'interroger la nature a ete perfectionne, et que des voyages entrepris dans des contrees lointaines ont offert une comparaison plus exacte des divers terrains, de grandes et immuables lois ont ete reconnues dans la structure du globe et dans la superposition des roches. C'est alors que les analogies les plus frappantes de gisement, de composition et de corps organiques renfermes dans des couches contemporaines, se sont manifestees dans les deux Mondes. A mesure qu'on s'habitue a considerer les formations sous un point de vue plus general, leur identite meme devient de jour en jour plus probable. En effet, en examinant la masse solide de notre planete, on s'apercoit bientot que quelques-unes de ces substances que l'oryctognosie (ou mineralogie descriptive) nous a fait connoeitre isolement, se rencontrent dans des associations constantes, et que ces associations, que l'on designe sous le nom de roches composees, ne varient pas, comme les etres organises, selon la difference des latitudes ou des bandes isothermes sous lesquelles on les trouve. Les geognostes qui ont parcouru les pays les plus eloignes, n'ont pas seulement rencontre dans les deux hemispheres la plupart des memes substances simples, le quarz, le feldspath, le mica, le grenat ou l'amphibole: ils ont aussi reconnu que les grandes masses de montagnes presentent presque partout les memes roches, c'est-a-dire les memes assemblages de mica, de quarz et de feldspath, dans le granite; de mica, de quarz et de grenats, dans le micaschiste; de feldspath et d'amphibole dans la syenite. Si quelquefois on a cru d'abord qu'une roche appartenoit exclusivement a une seule portion du globe, on l'a constamment trouvee, par des recherches ulterieures, dans les regions les plus eloignees de la premiere localite. On est tente d'admettre que la formation des roches a ete independante de la diversite des climats; que peut-etre meme elle leur est anterieure (Humboldt, Geographie des plantes, 1807, p. 115; Idem, Vues des Cordilleres, tome 1.er, p. 122). Il y a identite de roches la ou les etres organises sont le plus diversement modifies. Mais cette identite de composition, cette analogie que l'on observe dans l'association de certaines substances minerales simples, pourroit etre independante de l'analogie de gisement et de superposition. On pourroit avoir rapporte des iles de l'Ocean Pacifique, ou de la Cordillere des Andes, les memes roches que l'on observe en Europe, sans qu'il faut permis d'en conclure que ces roches sont superposees dans un ordre semblable, et qu'apres la decouverte d'une d'elles on puisse predire avec quelque certitude quelles sont les autres roches qui se trouvent dans les memes lieux. C'est a reconnoeitre ces analogies de gisement et de positions respectives, que doivent tendre les travaux des geognostes qui se plaisent a etudier les lois de la nature inorganique. On a tente de reunir dans les tableaux suivans ce que nous savons de plus certain sur la superposition des roches dans les deux continens, au nord et au sud de l'equateur. Ces types de formations ne seront pas seulement etendus, mais aussi diversement modifies, a mesure que le nombre des voyageurs exerces aux observations geognostiques se trouvera agrandi, et que des monographies completes de divers cantons treseloignes les uns des autres fourniront des resultats plus precis. L'exposition des lois que l'on reconnoeit dans la superposition des roches, forme la partie la plus solide de la science geognostique. On ne sauroit nier que les observations de gisement presentent souvent de grandes difficultes, lorsqu'on ne peut parvenir au contact de deux formations voisines, ou que celles-ci n'offrent pas une stratification reguliere, ou que leur gisement n'est pas uniforme, c'est-a-dire que les strates du terrain superieur ne sont pas paralleles aux strates du terrain inferieur. Mais ces difficultes (et c'est la un des grands avantages des observations qui embrassent une partie considerable de notre planete) diminuent en nombre ou disparoissent totalement par la comparaison de plusieurs terrains tres-etendus. La superposition et l'age relatif des roches sont des faits susceptibles d'etre constates immediatement, comme la structure des organes d'un vegetal, comme les proportions des elemens dans l'analyse chimique, ou l'elevation d'une montagne au-dessus du niveau de la mer. La veritable geognosie fait connoeitre la croaute exterieure du globe telle qu'elle existe de nos jours. C'est une science aussi saure que peuvent l'etre les sciences physiques descriptives. Au contraire, tout ce qui a rapport a l'ancien etat de notre planete, a ces fluides qui, dit-on, tenoient toutes les substances minerales en dissolution, a ces mers que l'on eleve jusqu'aux sommets des Cordilleres pour les faire disparoeitre dans la suite, est aussi incertain que le sont la formation de l'atmosphere des planetes, les migrations des vegetaux, et l'origine des differentes varietes de notre espece. Cependant l'epoque n'est pas tres-eloignee ou les geologues s'occupoient de preference de ces problemes presque impossibles a resoudre, de ces temps fabuleux de l'histoire physique du monde. Pour faire mieux comprendre les principes d'apres lesquels est construit le tableau de la superposition des roches, nous devons le faire preceder de quelques observations que fournit l'etude pratique des differens terrains. Nous commencerons par rappeler qu'il n'est pas aise de circonscrire les limites d'une meme formation. Le calcaire du Jura et le calcaire alpin, tres-separes dans une region, paroissent parfois etroitement lies dans une autre. Ce qui annonce l'independance d'une formation, comme l'a tres-bien observe M. de Buch, c'est sa superposition immediate sur des roches de diverse nature et qui par consequent doivent toutes etre considerees comme plus anciennes. Le gres rouge est une formation independante, parce qu'il est superpose indifferemment sur du calcaire noir (de transition), sur du micaschiste ou du granite primitifs; mais, dans une region ou domine la grande formation de syenite et de porphyre, ces deux roches alternent constamment. Il en resulte que la roche syenitique y est dependante du porphyre, et n'y recouvre presque nulle part seule le thonschiefer de transition ou le gneis primitif. L'independance des formations n'exclut d'ailleurs aucunement l'uniformite ou concordance de gisement; elle exclut plutot le passage oryctognostique de deux formations superposees. Les terrains de transition ont tres-souvent la meme direction et la meme inclinaison que les terrains primitifs; et cependant, quelque rapprochee que puisse etre l'epoque de leur origine, on n'en est pas moins fonde a considerer le micaschiste anthraciteux ou le grauwacke, alternant avec du porphyre, comme deux formations independantes des granites et des gneis primitifs qu'ils recouvrent. L'uniformite de gisement (Gleichförmigkeit der Lagerung) ne fait rien prejuger contre l'independance des formations, c'est-a-dire sur le droit que l'on a de regarder une roche comme une formation distincte. C'est parce que les formations independantes sont placees indifferemment sur toutes les roches plus anciennes (la craie sur le granite, le gres rouge sur le micaschiste primitif), que la reunion d'un grand nombre d'observations faites sur des points tres-eloignes devient eminemment utile dans la determination de l'age relatif des roches. Pour reconnoeitre que la syenite zirconienne est une roche de transition, il faut l'avoir vue placee sur des formations posterieures a des calcaires noirs remplis d'orthoceratites. Des observations faites sur les porphyres et syenites de la Hongrie par M. Beudant, un des geologues les plus distingues de notre temps, peuvent jeter beaucoup de jour sur les formations des Andes mexicaines. C'est ainsi qu'un nouveau vegetal decouvert dans l'Inde fait reconnoeitre l'affinite naturelle entre deux familles de plantes de l'Amerique equinoxiale. L'ordre que l'on a suivi dans le tableau des formations est celui du gisement et de la position respective des roches. Je ne pretends pas que ce gisement et cette position s'observent dans toutes les regions de la terre; je les indique tels qu'ils m'ont paru le plus probables d'apres la comparaison d'un grand nombre de faits que j'ai recueillis. C'est l'idee de l'age relatif qui m'a guide dans ce travail, bien imparfait encore. Je l'ai commence, long-temps avant mon voyage dans les Cordilleres du Nouveau Continent, des l'annee 1792, ou, sortant de l'Ecole de Freyberg, j'etois charge (comme Oberbergmeister) de la direction des mines dans les montagnes du Fichtelgebirge. La meme roche peut varier de composition, des parties integrantes peuvent lui etre soustraites, de nouvelles substances peuvent s'y trouver disseminees, sans que pour cela, aux yeux du geognoste qui s'occupe de la superposition des terrains, la roche doive changer de denomination. Sous l'equateur, comme dans le nord de l'Europe, des strates d'une veritable syenite de transition perdent leur amphibole, sans que la masse devienne une autre roche. Les granites des bords de l'Orenoque prennent quelquefois de l'amphibole et ne cessent guere pour cela d'etre du granite primitif, quoiqu'ils ne soient pas de la premiere ou plus ancienne formation. Ces faits ont ete reconnus par tous les geognostes experimentes. Le caractere essentiel de l'identite d'une formation independante est son rapport de position, la place qu'elle occupe dans la serie generale des terrains. (Voyez le memoire classique de M. de Buch, Ueber den Begriff einer Gebirgsart, dans Mag. der Naturf., 1810, p. 128--133.) C'est pour cela qu'un fragment isole, un echantillon de roche trouve dans une collection, ne peuvent etre determines geognostiquement, c'est-a-dire comme formation constituant une des nombreuses assises dont se compose la croaute de notre planete. La chiastolithe, l'accumulation de carbone ou des noeuds de calcaire compacte dans les thonschiefer, le titane-nigrine et l'epidote dans les syenites (alternant avec un granite et des porphyres), des conglomerats ou poudingues enchasses dans un micaschiste anthraciteux, peuvent sans doute faire reconnoeitre des formations de transition; de meme que, d'apres les utiles travaux de M. Brongniart, des petrifications de coquilles bien conservees indiquent quelquefois directement telle ou telle couche de terrains tertiaires. Mais ces cas, ou l'on est guide par des substances disseminees ou par des caracteres purement zoologiques, n'embrassent qu'un petit nombre de roches d'une origine recente; souvent des observations de ce genre ne conduisent qu'a des faits negatifs. Les caracteres tires de la couleur du grain et des petits filons de carbonate de chaux qui traversent les roches calcaires; ceux que fournissent la fissilite et l'eclat soyeux du thonschiefer, l'aspect et les ondulations plus ou moins marquees des feuillets du mica dans les micaschistes; enfin, la grandeur et la coloration des cristaux de feldspath dans les granites de differentes formations, peuvent, comme tout ce qui tient simplement a l'habitus des mineraux, induire en erreur l'observateur le plus habile. Sans doute, les teintes blanches et les noires distinguent le plus souvent les calcaires primitifs et de transition; sans doute, la formation du Jura, surtout dans ses assises superieures, est generalement divisee en couches minces, blanchatres, a cassure matte, egale ou conchoide, avec des cavites tres-aplaties (flachmuschlig): mais dans les montagnes de calcaire de transition il y a des masses isolees qui, par leur couleur et leur texture, se rapprochent des caracteres oryctognostiques de la formation du Jura; mais au sud des Alpes il y a des collines de terrains tertiaires ou ce meme calcaire fissile et mat du Jura trouve ses analogues (quant a l'aspect) dans des formations placees au-dessus de la craie, et qui ressemblent au calcaire que l'on recherche pour les usages de la lithographie. Si l'on prefere de donner aux formations des noms tires de leurs seuls caracteres oryctognostiques, les divers strates d'une meme roche composee, dont l'epaisseur est considerable et que l'on poursuit tres-loin dans le sens de sa direction (Streichungslinie), sembleroient souvent appartenir a des roches differentes, selon les points ou l'on en prendroit des echantillons. Par consequent on ne peut guere determiner geognostiquement dans les collections que des suites de roches dont on connoeit la superposition mutuelle. En enoncant ces idees sur le sens que l'on doit attacher au mot formations independantes, lorsqu'il s'agit du tableau de leur gisement, on est bien loin de meconnoeitre les eminens services que l'examen oryctognostique le plus rigoureux, l'etude approfondie de la composition des roches, ont rendus a la geognosie moderne, et nommement a la science du gisement ou de la position respective des formations. Quoique, d'apres les decouvertes de M. Haüy sur la nature intime des substances inorganiques et cristallisees, il n'existe pas, a proprement parler, un passage d'une espece minerale a une autre ( Cordier, sur les roches volcan., p. 33, et Berzelius, Nouv. Syst. de Mineral., pag. 119), les passages des masses ou pates de roches ne sont pas restreints aux formations que l'on distingue generalement par le nom de roches composees. Celles que l'on croit simples, par exemple, les calcaires de transition ou les calcaires secondaires, sont en partie des varietes amorphes d'especes minerales dont il existe un type cristallise, en partie des agregats d'argile, de carbone, etc., qui ne peuvent etre soumis a aucune determination fixe. C'est sur les proportions variables de ces melanges heterogenes que se fonde le passage des calcaires marneux a d'autres formations schisteuses. ( Haüy, Tableau comparatif de la Cristallographie, p. XXVII, XXX.) Toutes les pates amorphes des roches, quelque homogenes qu'elles paroissent au premier aspect, les bases des porphyres et des euphotides (serpentines), comme ces masses noires problematiques qui constituent le basanite (basalte) des anciens, et qui ne sont pas toutes des grünstein surcharges d'amphibole, sont susceptibles d'etre soumises a l'analyse mecanique. M. Cordier a applique cette analyse d'une maniere ingenieuse aux diabases (grünstein), aux dolerites, et a d'autres productions volcaniques plus recentes. L'examen oryctognostique le plus minutieux en apparence ne peut etre indifferent au geognoste qui examine l'age des formations. C'est par cet examen qu'on peut se former une juste idee de la maniere progressive dont, par developpement interieur, c'esta-dire par un changement tres-lent dans les proportions des elemens de la masse, se fait le passage d'une roche a une roche voisine. Les schistes de transition, dont la structure paroeit d'abord si differente de la structure des porphyres ou des granites, offrent a l'observateur attentif des exemples frappans de passages insensibles a des roches grenues, porphyroides ou granitoides. Ces schistes deviennent d'abord verdatres et plus durs. A mesure que la pate amorphe recoit de l'amphibole, elle passe a ces amphibolithes trappeennes qu'on confondoit jadis avec le basalte. Ailleurs, le mica, d'abord cache dans la pate amorphe, se developpe et se separe en paillettes distinctes et nettement cristallisees; en meme temps le feldspath et le quarz deviennent visibles; la masse paroeit grenue a grains tres-alonges: c'est un vrai gneis de transition. Peu a peu les grains perdent leur direction commune; les cristaux se groupent autour de plusieurs centres, la roche devient un granite ou une syenite de transition. Ailleurs encore le quarz seul se developpe, il augmente et s'arrondit en noeuds, et le schiste passe au grauwacke le mieux caracterise. A ces signes certains les geognostes qui ont etudie long-temps la nature, reconnoissent d'avance la proximite des roches grenues, granitoides et arenacees. Des passages analogues du micaschiste primitif a une roche porphyroide, et le retour de cette roche au gneis, s'observent dans la Suisse orientale. (Voyez les developpemens lumineux qu'ont donnes M. de Raumer, Fragmente, p. 10 et 47; M. Leopold de Buch, dans son Voyage de Glaris a Chiavenna, fait en 1803 et insere dans le Magaz. der Berl. Naturf., tom. 3, p. 115.) Mais ces passages ne sont pas toujours insensibles et progressifs: souvent aussi les roches se succedent brusquement, et d'une maniere bien tranchee; souvent (par exemple, au Mexique, entre Guanaxuato et Ovexeras) les limites entre les schistes, les porphyres et les syenites sont aussi distinctes que les limites entre les porphyres et les calcaires; mais dans ce cas meme des bancs heterogenes intercales indiquent des rapports geognostiques avec les roches superposees. C'est ainsi que le granite de transition de la formation syenitique offre des couches de basanite, en se chargeant d'amphibole: c'est ainsi que ces memes granites passent quelquefois a l'euphotide. ( Buch, Voyage en Norwege, tom. I, p. 138, tom. II, p. 83.) Il resulte de ces considerations, que l'analyse mecanique des pates amorphes, au moyen de demi-triturations et de lavages (analyse dont M. Fleuriau de Bellevue a fait le premier essai qui ait ete couronne de succes, Journ. de Physique, tom. LI, p. 162), repand a la fois du jour, 1.° sur les grands cristaux qui s'isolent et se separent des cristaux microscopiques entrelaces dans la masse; 2. ° sur les passages mutuels de quelques roches superposees les unes aux autres; 3. ° sur les couches subordonnees qui sont de meme nature qu'un des elemens de la masse amorphe. Tous ces phenomenes sont produits, pour ainsi dire, par developpement interieur, par une variation quelquefois lente, quelquefois tresbrusque, dans les parties constituantes d'une masse heterogene. Des molecules cristallines, invisibles a l'oeil, se trouvent agrandies, degagees du tissu serre de la pate; insensiblement elles deviennent, par leur agroupement et leur melange avec de nouvelles substances, des bancs intercales d'une puissance considerable; souvent meme elles deviennent de nouvelles roches. Ce sont les bancs intercales qui meritent surtout la plus grande attention ( Leonhard, Kopp et Gaertner, Propaed. der Miner., p. 158). Lorsque deux formations se succedent immediatement, il arrive que les couches de l'une commencent d'abord a alterner avec les couches de l'autre, jusqu'a ce que (apres ces preludes d'un grand changement) la formation la plus neuve se montre sans aucun melange de couches subordonnees. ( Buch, Geogn. Beob., tome I, p. 104, 156; Humboldt, Rel. hist., tome II, p. 140.) Les developpemens progressifs des elemens d'une roche peuvent par consequent avoir une influence marquante sur la position respective des masses minerales. Leurs effets sont du domaine de la geognosie; mais, pour les decouvrir et pour les apprecier, l'observateur doit appeler a son secours les connoissances les plus solides de l'oryctognosie, surtout celles de la cristallographie moderne. En exposant les rapports intimes par lesquels nous voyons souvent lies les phenomenes de composition aux phenomenes de gisement, je n'ai point eu l'intention de parler de la methode purement oryctognostique, qui considere les roches d'apres la seule analogie de leur composition. ( Journal des mines, tome 34, n.° 199.) Ce sont la de veritables classifications, dans lesquelles on fait abstraction de toute idee de superposition, mais qui n'en peuvent pas moins donner lieu a des considerations interessantes sur l'agroupement constant de certains mineraux. Une classification purement oryctognostique multiplie les noms des roches plus que ne l'exigent les besoins de la geognosie, lorsqu'elle s'occupe des gisemens seuls. Selon les changemens qu'eprouvent les roches melangees, un meme strate de beaucoup d'etendue et d'une grande epaisseur peut (nous devons le repeter ici) renfermer des parties auxquelles l'oryctognoste, qui classe les roches d'apres leur composition, donnera des denominations entierement differentes. Ces remarques n'ont pas echappe au savant auteur de la Classification mineralogique des roches; elles devoient se presenter a un geognoste experimente qui a si bien approfondi la superposition des terrains qu'il a parcourus. "Il ne faut pas confondre, dit M. Brongniart, dans son memoire recent sur le Gisement des Ophiolithes, les positions respectives, l'ordre de superposition des terrains et des roches qui les composent, avec des descriptions purement mineralogiques (oryctognostiques). Leur confusion en jeteroit necessairement dans la science et en retarderoit les progres." Le tableau que nous donnons a la fin de cet article n'est aucunement ce que l'on appelle une classification des roches; on n'y trouve pas meme reunies, sous le titre de sections particulieres (comme dans l'ancienne methode geognostique de Werner, ou dans l'excellent Traite de Geognosie de M. d'Aubuisson), toutes les formations primitives de granite, toutes les formations secondaires de gres et de calcaire. On a tache, au contraire, de placer chaque roche comme elle se trouve dans la nature, selon l'ordre de sa superposition ou de son age respectif. Les differentes formations de granite sont separees par des gneis, des micaschistes, des calcaires noirs (de transition) et des grauwackes. Dans les roches de transition on a eloigne les formations des porphyres et des syenites du Mexique et du Perou, qui sont anterieures au grauwacke et au calcaire a orthoceratites, de la formation, beaucoup plus recente, des porphyres et des syenites zirconiennes de la Scandinavie. Dans les roches secondaires on a eloigne le gres a oolithes de Nebra, qui est posterieur au calcaire alpin ou zechstein, du gres rouge (gres houiller), qui appartient a une meme formation avec le porphyre et le mandelstein secondaires. D'apres le principe que nous suivons, les memes noms de roches se retrouvent plusieurs fois dans le meme tableau. Un micaschiste anthraciteux (de transition) est separe, par un grand nombre de formations plus anciennes, du micaschiste anterieur au thonschiefer primitif. Au lieu d'une classification des roches granitiques, schisteuses, calcaires et arenacees (agregees), j'ai voulu presenter une esquisse de la structure geognostique du globe, un tableau dans lequel les roches superposees se succedent, de bas en haut, comme dans ces coupes ideales que j'ai dessinees, en 1804, a l'usage de l'Ecole des mines de Mexico, et dont beaucoup de copies ont ete repandues depuis mon retour en Europe ( Bosquejo de una Pasigrafia geognostica, con tablas que ensennan la estratificacion y el parallelismo de las rocas en ambos continentes, para el uso del Real Seminario de Mineria de Mexico ). Ces tableaux pasigraphiques reunissoient, a mes propres observations faites dans les deux Ameriques, ce qu'a cette epoque on avoit recueilli de plus precis sur le gisement des roches primitives, intermediaires et secondaires, dans l'ancien continent. Elles offroient, avec le type que l'on pouvoit regarder comme le plus general, les types secondaires, c'est-a-dire les couches que j'ai nommees paralleles. Cette meme methode a ete suivie dans le travail que je publie aujourd'hui. Mes formations paralleles sont des equivalens geognostiques; ce sont des roches qui se representent les unes les autres (voyez le Traite de Geologie de M. d'Aubuisson , t. II, p. 255). En Angleterre et sur le continent de l'Europe oppose, il n'existe pas une identite de toutes les formations: il y existe des equivalens ou des formations paralleles. Celle de nos houilles situees entre les terrains de transition et le gres rouge, la position du sel gemme qui se trouve sur le continent dans le calcaire alpin (zechstein), la position de nos oolithes dans le gres de Nebra et dans le calcaire du Jura peuvent guider le geognoste dans le rapprochement des formations eloignees. On observe en Angleterre les houilles (coal-mesures) placees sur des formations de transition, par exemple, sur le calcaire ou mountain-limestone du Derbyshire et de South-Wales, et sur le gres de transition ou old red sandstone de Herfordshire. J'ai cru reconnoeitre dans le magnesian-limestone, le red-marl, le lias et les oolithes blanches de Bath, les formations reunies de calcaire alpin (avec sel gemme), de gres a oolithes (bunte sandstein) et de calcaire du Jura. En comparant les formations de pays plus ou moins eloignes, celles de l'Angleterre et de la France, du Mexique et de la Hongrie, du bassin secondaire de Santa-Fe de Bogota et de la Thuringe, il ne faut pas vouloir opposer a chaque roche une roche parallele; il faut se rappeler qu'une seule formation peut en representer plusieurs autres. C'est ainsi que des bancs d'argile inferieurs a la craie peuvent, en France (cap la Heve, pres de Caen), etre separes de la maniere la plus tranchee des couches calcaires oolithiques, tandis qu'en Suisse, en Allemagne et dans l'Amerique meridionale, ils ont pour equivalens des bancs de marnes subordonnes au calcaire du Jura. Les gypses qui, dans un district, ne sont quelquefois que des couches intercalees dans le calcaire alpin ou le gres a oolithes, prennent, dans un autre district, toute l'apparence de formations independantes, et se trouvent places entre le calcaire alpin et le gres a oolithes, entre ce gres et le muschelkalk (calcaire de Goettingue). Le savant professeur d'Oxford, M. Buckland, dont les recherches etendues ont ete egalement utiles aux geognostes de l'Angleterre et du continent, a publie recemment un tableau de formations paralleles, ou, comme il les appelle aussi, equivalents of rocks, qui ne s'etend que du 44.e au 54.e degre de lat. bor., mais qui merite la plus grande attention. ( On the structure of the Alps, and their relation with the rocks of England, 1821.) De meme que dans l'histoire des peuples anciens il est plus facile de verifier la serie des evenemens dans chaque pays que de determiner leur coincidence mutuelle, de meme aussi on parviendra plutot a connoeitre avec la plus grande exactitude la superposition des formations dans des regions isolees, qu'a determiner l'age relatif ou le parallelisme des formations qui appartiennent a differens systemes de roches. Meme dans des pays peu eloignes les uns des autres, en France, en Suisse et en Allemagne, il n'est pas aise de fixer l'anciennete relative du muschelkalk, de la molasse d'Argovie et du quadersandstein du Harz, parce que l'on manque le plus souvent de roches generalement repandues, servant, selon l'expression heureuse de M. de Gruner, d'horizon geognostique, et auxquelles on pourroit comparer les trois formations que nous venons de nommer. Lorsque des roches ne sont pas en contact immediat, on ne peut juger de leur parallelisme que par leurs rapports d'age avec d'autres formations qui les unissent. Ces recherches de geognosie comparee occuperont encore long-temps la sagacite des observateurs, et il n'est pas surprenant que ceux qui s'attendoient a retrouver chaque formation dans toute l'individualite de son gisement, de sa structure interieure et de ses couches subordonnees, finissent par nier toute analogie de superposition. J'ai eu l'avantage de visiter, avant mon voyage a l'equateur, une grande partie de l'Allemagne, de la France, de la Suisse, de l'Angleterre, de l'Italie, de la Pologne et de l'Espagne. Pendant ces courses, mon attention etoit particulierement fixee sur le gisement des formations, phenomene que je comptois discuter dans un ouvrage particulier. Arrive dans l'Amerique du Sud, et parcourant d'abord en differentes directions le vaste terrain qui se prolonge de la chaeine cotiere de Venezuela au bassin de l'Amazone, je fus singulierement frappe de la conformite de superposition qu'offrent les deux continens. (Voyez ma premiere esquisse d'un tableau geologique de l'Amerique equinoxiale, dans le Journ. de phys., T. LIII, p. 30.) Des observations posterieures, qui embrassoient les Cordilleres du Mexique , de la Nouvelle-Grenade, de Quito et du Perou, depuis le 21.e degre de latitude boreale jusqu'au 12.e degre de latitude australe, ont confirme ces premiers apercus. Le type des formations s'est plutot agrandi a mes yeux, qu'il ne s'est altere dans ses parties les plus essentielles. Mais, en parlant des analogies que l'on observe dans le gisement des roches et de l'uniformite de ces lois qui nous revelent l'ordre de la nature, je puis citer un temoignage bien autrement imposant que le mien, celui du grand geognoste dont les travaux ont le plus avance la connoissance de la structure du globe. M. Leopold de Buch a pousse ses recherches de l'archipel des eiles Canaries jusqu'au-dela du cercle polaire, au 71.e degre de latitude. Il a decouvert de nouvelles formations placees entre les formations, anciennement connues; et, dans les terrains primitifs comme dans les terrains de transition, dans les secondaires comme dans les volcaniques, il a ete frappe des grands traits qui caracterisent le tableau des formations dans les regions les plus eloignees. Du scepticisme qui nie tout ordre dans le gisement des roches, il faut distinguer une opinion qui renaeit, de temps en temps, parmi des observateurs tres-experimentes, et d'apres laquelle les formations de granite-gneis, de grauwacke, de calcaire alpin et de craie, uniformement superposees dans differens pays, ne correspondent guere entre elles par rapport a l'age des elemens homonymes de chaque serie. On croit qu'une roche secondaire peut avoir ete formee sur un point du globe, lorsque les roches de transition n'existoient pas encore sur un autre point. Dans cette supposition, il ne s'agit pas de ces roches granitiques qui recouvrent un calcaire rempli d'orthoceratites, et qui sont par consequent posterieures aux roches primitives. C'est un fait generalement reconnu de nos jours, que des formations de composition analogue se sont repetees a des epoques tres-eloignees les unes des autres. Le doute que nous exposons, sans le partager nous-memes, porte sur un point beaucoup moins constate, sur la question de savoir si des micaschistes indubitablement places dans un pays au milieu de roches primitives (au-dessous de celles dans lesquelles la vie organique commence a paroeitre), sont plus neuves que les roches secondaires d'un autre pays. J'avoue que, dans la partie du globe que j'ai pu examiner, je n'ai rien vu qui semble confirmer cette opinion. Des roches grenues syenitiques repetees deux, peut-etre meme trois fois, dans des terrains primitifs, intermediaires (et secondaires?) sont des phenomenes analogues qui nous sont devenus familiers depuis quinze ans; mais la non-concordance d'age des grands terrains homonymes ne me semble guere prouvee jusqu'ici par des observations directes, faites sur le contact de formations superposees. La craie ou le calcaire du Jura peut, d'un cote, couvrir immediatement le granite primitif, et de l'autre en etre separe par de nombreuses roches secondaires et de transition: ces faits trescommuns ne demontrent que la soustraction, l'absence, le non-developpement de plusieurs membres intermediaires de la serie geognostique. Le grauwacke peut, d'un cote, plonger sous une roche feldspathique, par exemple, sous du granite de transition ou sous la syenite zirconienne, et, de l'autre cote, etre superpose a du calcaire noir rempli de madrepores: ce gisement ne demontre que la position intermediaire d'une couche de grauwacke entre des roches calcaires et des roches feldspathiques de transition. Depuis que, par les travaux importans de MM. Cuvier et Brongniart, l'examen approfondi des corps organises fossiles a repandu comme une nouvelle vie dans l'etude des terrains tertiaires, la decouverte des memes fossiles dans des couches analogues de pays treseloignes a rendu encore plus probable l'isochronisme de formations tres-generalement repandues. C'est cet isochronisme seul, c'est cet ordre admirable de succession, qu'il semble donne a l'homme de reconnoeitre avec quelque certitude. Les essais que des geologues hebraizans ont faits pour soumettre les epoques a des mesures absolues du temps, et pour lier la chronologie d'anciens mythes cosmogoniques aux observations memes de la nature, n'ont pu etre qu'infructueux. "On a voulu plus d'une fois, dit M. Ramond dans un discours rempli de vues philosophiques, trouver dans les monumens de la nature un supplement a nos courtes annales. C'etoit pourtant assez des siecles historiques pour nous apprendre que la succession des evenemens physiques et moraux ne se regle point sur la marche uniforme du temps, et ne sauroit par consequent en donner la mesure. Nous voyons derriere nous une suite de creations et de destructions par l'arrangement des couches dont la croaute de la terre est formee. Elles font naeitre l'idee d'autant d'epoques distinctes; mais ces epoques si fecondes en evenemens peuvent avoir ete tres-courtes, eu egard au nombre et a l'importance des resultats. Entre les creations et les destructions, au contraire, nous ne voyons rien, quelle que puisse etre l'immensite des intervalles. La ou tout se perd dans le vague d'une antiquite indeterminee, les degres d'anciennete n'ont plus de valeur appreciable, parce que la succession des phenomenes n'a plus d'echelle qui se rapporte a la division du temps." ( Memoires de l'Institut pour l'annee 1815, p. 47.) Dans la monographie geognostique d'un terrain de peu d'etendue, par exemple, des environs d'une ville, on ne sauroit distinguer assez minutieusement les differentes couches qui composent les formations locales. Des bancs de sable et d'argile, les sousdivisions des gypses, les strates de calcaire marneux et oolithique, designes en Angleterre sous les noms de Purbeck-Beds, Portland-Stone, Coral-Ray, Kelloway- Rock et Corn-Brash, acquierent alors beaucoup d'importance. De minces couches de terrains secondaires et tertiaires, renfermant des assemblages de corps fossiles tres-caracteristiques, ont servi d'horizon au geognoste. On a pu, dans leur prolongement, rapporter a l'une d'elles ce qui se trouve place au-dessus ou au-dessous dans l'ordre de la serie totale. Les denominations particulieres par lesquelles on distingue ces couches, offrent meme beaucoup d'avantage dans une description geognostique, quelque bizarre ou impropre que puisse etre leur signification ou leur origine puisee dans le langage des mineurs. Mais, des que l'on traite du gisement des roches sur une surface tres-etendue, il est indispensable de considerer les formations ou agroupemens habituels de certaines couches sous un point de vue plus general. C'est alors qu'il faut etre plus sobre et plus circonspect dans la distinction des roches et dans leur nomenclature. L'ouvrage de M. Freiesleben, sur les plaines de la Saxe, qui ont plus de 700 lieues carrees ( Geogr. Beschr. des Kupferschiefergebirges, in 4 Th., 1807 -- 1815), offre un beau modele de la reunion d'observations locales et de generalisations geognostiques. Ces generalisations, ces essais de simplifier le tableau des formations et de ne s'arreter qu'a de grands traits caracteristiques, doivent etre plus ou moins timides, selon qu'on decrit le bassin d'un fleuve, une province isolee, un pays grand comme la France et l'Allemagne, ou un continent entier. Plus on approfondit l'etude des terrains, plus la liaison entre des formations qui nous paroissent d'abord entierement independantes, se manifeste par le grand phenomene d'alternance, c'est-a-dire par une succession periodique de couches qui offrent de l'analogie dans leur composition, et quelquefois meme dans de certains corps fossiles. C'est ainsi que dans les montagnes de transition, par exemple, en Amerique (a l'entree des plaines de Calabozo), des bancs de grünstein et d'euphotide; en Saxe (pres de Friedrichswalde et Maxen), les schistes avec ampelites, les grauwackes, les porphyres, les calcaires noirs et les grünstein, constituent, d'apres leur alternance frequente et repetee, une meme formation. Souvent il arrive que des bancs subordonnes ne paroissent qu'a la limite extreme d'une formation, et prennent l'aspect d'une roche independante. Les marnes cuivreuses et bitumineuses (Kupferschiefer), qui se trouvent placees en Thuringe entre le calcaire alpin (zechstein) et le gres rouge (rothes liegende), et qui sont devenues depuis des siecles l'objet de grandes exploitations, sont representees dans plusieurs parties du Mexique, de la Nouvelle-Andalousie et de la Baviere meridionale, par des couches multipliees d'argile marneuse, plus ou moins carburees, et enclavees dans le calcaire alpin. Des circonstances semblables donnent souvent a des gypses, a des gres, et a de petits bancs de calcaires compactes, l'apparence de formations particulieres. On reconnoeit leur dependance ou leur subordination par leur association frequente avec d'autres roches, par leur manque d'etendue et d'epaisseur, ou par leur suppression totale frequemment observee. Il ne faut point oublier (et ce fait m'a beaucoup frappe dans les deux hemispheres) que les grandes formations de calcaires, par exemple le calcaire alpin, ont leurs gres, comme les gres tres-generalement repandus ont leurs bancs calcaires. De minces couches de gres, de calcaires et de gypses caracterisent, sous toutes les zones, les depots de houille et de sel gemme ou d'argile muriatifere (salzthon), depots isoles qui le plus souvent ne sont recouverts que de ces petites formations locales. C'est en negligeant ces considerations, qui devroient etre familieres a tout geognoste experimente, que l'on a rendu trop complique le type des grandes formations independantes. Le phenomene de l'alternance se manifeste, ou localement dans des roches superposees plusieurs fois les unes aux autres et constituant une meme formation complexe, ou dans la suite des formations considerees dans leur ensemble. Ce sont ou des grünstein et des syenites, des schistes et des calcaires de transition, des couches de calcaires et de marne qui alternent immediatement, ou c'est tout un systeme de micaschistes et de roches feldspathiques grenues (granites, gneis et syenites) qui reparoeit parmi les terrains de transition et que separent du systeme homonyme primitif les grauwackes et les calcaires a orthoceratites. La premiere connoissance de ce fait, un des plus importans et des plus inattendus de la geognosie moderne, est due aux belles observations de MM. Leopold de Buch, Brochant et Haussmann. Ce phenomene rapproche, non par rapport au temps ou a l'anciennete relative, mais par rapport a l'analogie de composition et d'aspect, le terrain de transition du terrain primitif. De ce que, dans le premier, des roches grenues, depourvues entierement de debris organiques, succedent a des roches compactes qui contiennent ces memes debris, de celebres geognostes ont conclu que cette alternance de roches coquilleres et non coquilleres pourroit bien s'etendre au-dela des terrains que nous appelons primitifs. On n'a pas seulement demande si des thonschiefer, des micaschistes et des gneis ne supportoient pas les granites que l'on a crus les plus anciens; on a aussi agite la question de savoir si des grauwackes et des calcaires noirs a madrepores ne pourroient pas se retrouver sous ces memes granites. D'apres cet apercu, les roches primitives et de transition ne formeroient qu'un seul terrain, et les premieres pourroient etre regardees comme intercalees dans un terrain posterieur au developpement des etres organises et qui penetreroit a une profondeur inconnue dans l'interieur du globe. J'avoue qu'aucune observation directe n'a pu etre citee jusqu'ici pour etayer ces suppositions. Les fragmens de roches que j'ai vus enchasses dans les laves lithoides des volcans du Mexique, de Quito et du Vesuve, et que l'on croit arraches aux entrailles de la terre, semblent appartenir a des roches alterees de granite, de micaschiste, de syenite et de calcaire grenu, et non a des grauwackes et a des calcaires a madrepores. On a conserve, dans le tableau des roches, les grandes divisions connues sous le nom de terrains primitifs, intermediaires, secondaires et tertiaires. Les limites naturelles de ces quatre systemes de roches sont le thonschiefer avec ampelite et pierre lydienne, alternant avec des calcaires compactes et des grauwackes, la formation des houilles et les formations qui succedent immediatement a la craie. En geognosie, comme dans la botanique descriptive (phytographie), les sousdivisions ou les petits groupes des familles ont des caracteres plus tranches que les grandes divisions ou les classes. C'est le cas de toutes les sciences dans lesquelles on s'eleve de l'individu aux especes, des especes aux genres, et de ceux-ci a des degres d'abstraction encore superieurs. Une methode repose necessairement sur des abstractions diversement graduees, et les passages deviennent plus frequens a mesure que les caracteres sont plus complexes. Les terrains intermediaires de Werner, que M. de Buch a limites le premier avec la sagacite qui le distingue ( Moll's Jahrb., 1798, B. 2, p. 254), tiennent, par le thonschiefer ampeliteux, les syenites a zircons, les granites quelquefois depourvus d'amphibole, et les micaschistes anthraciteux, aux terrains primitifs, tandis que les grauwackes a petits grains et les calcaires madreporiques et compactes les lient aux gres houillers et aux calcaires des terrains secondaires. Des porphyres de formations tres-differentes ont leur siege principal parmi les roches de transition; mais ils debordent, pour ainsi dire, en masses considerables vers les terrains secondaires, ou ils se lient au gres houiller, tandis qu'ils ne penetrent dans le terrain primitif que comme des couches subordonnees et de peu d'epaisseur. Le mouvement progressif, ou, si j'ose me servir de ce mot impropre, l'etendue de l'oscillation de la serpentine et de l'euphotide, est tresdifferente. Ces roches de diallage, constituant plusieurs formations distinctes, rarement recouvertes, et d'un gisement difficile a verifier, s'arretent presque a la limite inferieure des terrains secondaires; vers le bas elles percent bien avant dans les terrains primitifs au-dela du micaschiste. La craie semble offrir une limite naturelle aux terrains tertiaires, que MM. Cuvier et Brongniart ont caracterises les premiers, et avec justesse, comme des terrains entierement differens des dernieres formations secondaires, decrites par l'ecole de Freyberg ( Geogr. miner. des environs de Paris, p. 8 et 9). Frappe des rapports qui existent entre le terrain tertiaire et les couches sous la craie, M. Brongniart a meme propose recemment de designer les formations tertiaires sous le nom de terrains secondaires superieurs. ( Sur le gisement des ophiolithes, p. 37; comparez aussi les discussions geognostiques tres-interessantes que renferme le Traite des roches de M. de Bonnard, p. 138, 210 et 212.) La distinction des quatre terrains que nous venons de nommer successivement, et dont trois sont posterieurs au developpement de la vie organique sur le globe, me paroeit digne d'etre conservee, malgre le passage de quelques formations a des formations differentes, et malgre les doutes que plusieurs geognostes tres-distingues ont fondes sur ces passages. La classification des terrains marque de grandes epoques de la nature, par exemple, la premiere apparition de quelques animaux pelagiques (zoophytes, mollusques cephalopodes) et la destruction simultanee d'une enorme masse de monocotyledones; elle offre comme des points de repos a l'esprit, et tout en se rappelant que les formations memes sont bien plus importantes que les grandes divisions, on a souvent lieu, en avancant des hautes montagnes vers les plaines, de reconnoeitre l'influence diverse que l'agroupement des roches primitives et intermediaires, celui des roches secondaires et tertiaires ont exerce sur l'inegalite et la configuration du sol. C'est a cause de cette influence que l'aspect du paysage, la forme des montagnes et des plateaux, le caractere de la vegetation, varient moins, lorsqu'on voyage parallelement a la direction des couches, qu'en les coupant a angle droit ( Greenough, Crit. examinat. of Geologie, p. 38). Je continue, en suivant MM. de Buch, Freiesleben, Brochant, Beudant, Buckland, Raumer ( Geb. von Nieder-Schles., 1819) et d'autres geognostes celebres, a grouper les formations independantes d'apres les divisions en terrains primitifs, de transition, secondaires, etc., sans m'appesantir sur l'impropriete de la plupart de ces denominations. Je continue de separer l'argile (avec lignites) superposee a la craie, de celle qui est dessous, et la craie meme, des formations secondaires plus anciennes. Mais ces distinctions par assises et par groupes d'assises, si utiles dans la description d'un terrain de peu d'etendue, ne doivent pas empecher le geognoste, lorsqu'il tente de s'elever a un point de vue plus general, de lier ces argiles et la craie au calcaire du Jura, et de les regarder comme les derniers strates de cette grande formation composee de couches calcaires et marneuses. Les assises inferieures de la craie (tuffeau) renferment des ammonites. Le calcaire de la montagne de Saint-Pierre de Maestricht indique, comme l'ont deja observe MM. Omalius et Brongniart ( Geogr. miner., p. 13), le passage de la craie a des calcaires secondaires plus anciens. Pres de Caen, selon les belles observations de M. Prevost, les argiles sous la craie renferment ces memes lignites qui se trouvent, en plus grande masse, dans l'argile superposee a la craie; des cerites, qui rappellent le calcaire grossier de Paris, se montrent, dans un calcaire a trigonies, places entre des argiles inferieures a la craie et les couches oolithiques. Je n'insiste pas sur ces faits particuliers; je les cite seulement pour prouver, par un exemple frappant, comment, en rapprochant des faits observes sur differens points d'un meme pays, le grand phenomene de l'alternance nous revele des liaisons entre des formations qui, au premier abord, paroissent n'avoir presque rien de commun. C'est le propre de ces couches qui alternent les unes avec les autres, de ces roches qui se succedent en serie periodique, d'offrir les contrastes les plus marques dans les deux couches qui se suivent immediatement. En geognosie, comme dans les differentes parties de l'histoire naturelle descriptive, il faut reconnoeitre l'avantage des classifications, des coupes diversement graduees, sans jamais perdre de vue l'unite de la nature. Aussi, ceux qui ont avance le plus la philosophie naturelle, ont eu a la fois et la tendance a generaliser et la connoissance exacte d'une grande masse de faits particuliers. On a l'habitude de terminer la serie des terrains par les roches volcaniques, et de les faire succeder aux terrains secondaires et tertiaires, meme aux terrains de transport. Dans un tableau forme d'apres le seul principe de l'anciennete relative, cet arrangement m'a paru peu convenable. Sans doute que des laves lithoides se sont repandues sur les formations les plus recentes, meme sur des couches de galets. On ne sauroit nier qu'il n'existe des productions volcaniques de differentes epoques; mais, d'apres ce que j'ai pu observer dans les Cordilleres du Perou, de Quito et du Mexique, dans une partie du monde si celebre par la frequence des volcans, il m'a paru que le site principal des feux souterrains est dans les roches de transition et au-dessous de ces roches. J'ai reconnu que tous les crateres enflammes ou eteints des Andes se sont ouverts au milieu de porphyres trappeens ou trachytes ( Berl. Abhandl. der Kön. Acad., 1813, p. 131), et que ces trachytes sont lies a la grande formation de porphyre et de syenite de transition. D'apres cette remarque, il m'a paru plus naturel de faire suivre parallelement, comme par bisection, les terrains secondaires et volcaniques aux terrains de transition. Par cette nouvelle disposition la formation des porphyres et des grauwackes, ou celle des porphyres, des syenites et des granites de transition, se trouve liee a la fois, 1.° aux porphyres du gres rouge dans le terrain houiller secondaire, 2.° aux trachytes ou porphyres trappeens qui sont depourvus de quarz et meles de pyroxenes. J'emploie a regret le mot de terrain volcanique, non que je doute, comme ceux qui designent les trachytes, les basaltes et les phonolithes (porphyrschiefer) sous le nom de terrain trappeen, que tout ce que j'ai reuni dans le terrain volcanique ne soit produit ou altere par le feu; mais parce que plusieurs roches, intercalees entre les roches (primitives?), de transition et secondaires, pourroient bien aussi etre volcaniques. J'aurois de plus voulu eviter toute idee (historique) de l'origine des choses dans un tableau (statistique) de gisement ou de superposition. A Skeen, en Norwege, une syenite basaltique et poreuse, renfermant des pyroxenes, est placee, d'apres l'observation de M. de Buch, entre le calcaire de transition et la syenite zirconienne. C'est une couche, non un filon (dyke); c'est un phenomene bien moins problematique que le basalte (urgrünstein? Buch, Geogn. Beob., T. I, p. 124, et Raumer, Granit des Riesengebirges, p. 70) renferme dans le micaschiste de Krobsdorf en Silesie. Les trachytes avec obsidienne du Mexique sont intimement lies aux porphyres de transition, qui alternent avec des syenites. Les mandelstein, appartenant au gres rouge, prennent, sur le continent de l'Europe et dans l'Amerique equinoxiale, tout l'aspect d'un mandelstein de formation basaltique. M. Boue, dans son interessant Essai geologique sur l'Ecosse, p. 126 -- 162, a decrit des roches pyroxeniques (dolerites) enclavees dans le gres rouge. Sans rien prejuger sur l'origine de ces masses, ni, en general, sur celle de toutes les roches primitives et de transition, nous designons ici par le nom de terrains volcaniques la serie la moins interrompue de roches alterees par le feu. En faisant l'enumeration des roches, je me suis servi des noms le plus generalement employes par les geognostes de la France, de l'Allemagne, de l'Angleterre et de l'Italie; j'aurois craint, en essayant de perfectionner la nomenclature des formations, d'ajouter de nouvelles difficultes a celles que presente deja la discussion des gisemens. J'ai cependant evite avec soin les denominations, trop long-temps conservees, de calcaire inferieur et superieur; de gypse de premiere, seconde ou troisieme formation; d'ancien ou de nouveau gres rouge, etc. Ces denominations offrent sans doute un vrai caractere geognostique: elles ont rapport, non a la composition des roches, mais a leur age relatif. Cependant, comme le type general des formations de l'Europe ne peut etre modele sur celui d'un seul canton, la necessite d'admettre des formations paralleles (sich vertretende Gebirgsarten) rend les noms de premier ou second gypse, de gres ancien ou mitoyen, extremement vagues et obscurs. Dans un pays on est en droit de considerer une couche de gypse ou de gres comme une formation particuliere, tandis que dans un autre on doit la regarder comme subordonnee a des formations voisines. Les meilleures denominations sont sans doute les denominations geographiques: elles font naeitre des idees de superposition tres-precises. Lorsqu'on dit qu'une formation est identique avec le porphyre de Christiania, le lias de Dorsetshire, le gres de Nebra (bunter sandstein), le calcaire grossier de Paris, ces assertions ne laissent, a un geognoste instruit, aucun doute sur la position que l'on veut assigner a la formation que l'on decrit. Aussi c'est comme par convention tacite que les mots: zechstein de Thuringe, calcaire de Derbyshire, terrain de Paris, etc., se sont introduits dans le langage mineralogique; ils rappellent un calcaire qui succede immediatement au gres rouge houiller, un calcaire de transition place sous le gres houiller, enfin, des formations plus recentes que la craie. Les seules difficultes que presente la multiplicite de ces denominations geographiques, consistent dans le choix des noms et dans le degre de certitude que l'on a acquis sur le gisement ou l'age relatif de la roche a laquelle on rapporte les autres. Les geognostes anglois cherchent sur le continent leur lias et leur red-marl; les geognostes allemands leur bunte sandstein et leur muschelkalk. Ces mots se trouvent associes dans l'esprit des voyageurs a des souvenirs de localites. Il ne s'agit par consequent, pour faire naeitre des idees precises, que de choisir des localites assez generalement connues et qui sont celebres, soit par l'exploitation des mines, soit par des ouvrages descriptifs. Pour diminuer les effets des vanites nationales, et pour rattacher les nouveaux noms a des objets plus importans, j'avois propose, il y a long-temps (1795), les denominations de pierre calcaire alpine, et calcaire du Jura. Une partie des Hautes-Alpes de la Suisse, et la majeure partie du Jura, sont sans doute formees de ces deux roches: cependant les noms, aujourd'hui generalement recus, de calcaire alpin (zechstein) et de calcaire du Jura, devroient etre, a ce que je pense, modifies ou entierement abandonnes. Les assises inferieures des montagnes du Jura, remplies de gryphites, appartiennent a une formation plus ancienne, peut-etre au zechstein; et une tres-grande partie du calcaire des Alpes de la Suisse n'est certainement pas du zechstein, mais, d'apres MM. de Buch et Escher, du calcaire de transition. Il vaut donc mieux choisir les noms geographiques des roches parmi les noms de montagnes isolees et dont toute la masse visible n'appartient qu'a une seule formation, que de les emprunter, comme je l'ai fait a tort, a des chaeines entieres. J'avois pense, et beaucoup de geognostes ont partage cette opinion, que le calcaire du Jura (calcaire a cavernes de Franconie) etoit generalement place, sur le continent, audessous du gres de Nebra (bunte sandstein), entre ce gres et le zechstein. Des observations posterieures ont prouve que le nom de calcaire du Jura avoit ete avec raison applique a des roches qui sont tres-eloignees des montagnes de la Suisse occidentale; mais que la veritable place geognostique de cette formation (lorsqu'il n'y a pas suppression des formations inferieures) se trouve bien au-dessus du gres de Nebra, entre le muschelkalk (ou le quadersandstein?) et la craie. Un nom geographique, justement applique a plusieurs roches analogues, nous rend attentif a leur identite de gisement; mais la place que des roches homonymes doivent occuper dans la serie totale, n'est bien determinee que lorsque le nom geographique a ete choisi apres avoir acquis une certitude entiere sur leur gisement. Les geognostes se trouvent encore dans une position semblable, en fixant l'age relatif de la molasse d'Argovie (nagelfluhe) et du quadersandstein de Pirna (gres blanc de M. de Bonnard), deux roches tresrecentes, qui ont ete tres-bien etudiees separement, mais dont les rapports entre elles et avec la craie et le calcaire du Jura n'ont ete que tres-recemment eclaircis. On peut etre assez saur d'avoir rencontre dans le nouveau continent des roches identiques avec la molasse ou le quadersandstein, sans pouvoir prononcer pour cela sur leurs rapports avec toutes les autres roches secondaires ou tertiaires. Quand des formations ne se touchent pas immediatement, et qu'elles ne sont pas recouvertes par des terrains d'un gisement connu, on ne peut juger de leur anciennete relative que d'apres de simples analogies. Les termes de la serie geognostique sont ou simples ou complexes. Aux termes simples appartiennent la plupart des formations primitives: les granites, les gneis, les micaschistes, les thonschiefer, etc. Les termes complexes se trouvent en plus grand nombre parmi les roches de transition: c'est la que chaque formation comprend un groupe entier de roches qui alternent periodiquement. Les termes de la serie n'y sont pas des calcaires de transition ou des grauwackes, constituant des formations independantes: ce sont des associations de thonschiefer, grünstein et grauwacke; de porphyre et grauwacke; de calcaire grenu steatiteux et de poudingues a roches primitives; de thonschiefer et de calcaire noir. Lorsque ces associations sont formees de trois ou quatre roches qui alternent, il est difficile de leur donner des noms significatifs, des noms qui indiquent toute la composition du groupe, tous les membres partiels du terme complexe de la serie. On peut alors aider a fixer les groupes dans la memoire, en rappelant les roches qui y dominent sans manquer absolument dans les groupes voisins. C'est ainsi que le calcaire grenu steatiteux caracterise la formation de la Tarantaise; le grauwacke, la grande formation de transition du Harz et des bords du Rhin; les porphyres metalliferes riches en amphibole et presque depourvus de quarz, la formation du Mexique et de la Hongrie. Si les phenomenes d'alternance et d'agroupement atteignent leur maximum dans les terrains de transition, ils ne sont pas entierement exclus pour cela des terrains primitifs et secondaires. Dans l'un et l'autre de ces terrains, des termes complexes sont meles aux termes simples de la serie geognostique. Je citerai parmi les formations secondaires le gres place au-dessus du calcaire alpin (le gres de Nebra, le bunte sandstein), qui est une association d'argile marneuse, de gres et d'oolithes; le calcaire qui recouvre le gres rouge houiller (le zechstein ou alpenkalkstein), qui est une association moins constante de calcaire, de gypse (muriatifere), de stinkstein et de marne bitumineuse pulverulente (asche des mineurs du Mansfeld). Dans les terrains primitifs nous trouvons les trois premiers termes de la serie, les roches les plus anciennes, ou isoles ou alternant deux a deux, selon qu'ils sont geognostiquement plus rapproches par leur age relatif, ou bien alternant tous les trois. Le granite forme quelquefois avec le gneis, le gneis avec le micascheiste, des associations constantes. Ces alternances suivent des lois particulieres: on voit (par exemple, au Bresil, et, quoique moins distinctement, dans la chaeine du littoral de Venezuela) le granite, le gneis et le micaschiste dans une triple association; mais je ne connois pas de granite alternant seul avec du micaschiste, du gneis et du micaschiste alternant seuls avec le thonschiefer. Il ne faut pas confondre, et j'ai souvent insiste sur ce point dans cet article, des roches passant insensiblement a celles qui sont en contact immediat avec elles, par exemple, des micaschistes qui oscillent entre le gneis et le thonschiefer, avec des roches qui alternent les unes avec les autres, et qui conservent tous leurs caracteres distinctifs de composition et de structure. M. d'Aubuisson a fait voir, il y a long-temps, combien l'analyse chimique rapproche le thonschiefer du mica. ( Journal de physique, T. 68, pag. 128; Traite de Geognosie, T. II, pag. 97.) Le premier, il est vrai, n'a pas l'eclat metallique du micaschiste; il renferme un peu moins de potasse et plus de carbone; la silice ne s'y reunit pas en noeuds ou lames minces de quarz comme dans le micaschiste: mais on ne peut douter que des feuillets de mica ne constituent la base principale du thonschiefer. Ces feuillets sont tellement soudes ensemble, que l'oeil ne peut les distinguer dans le tissu. C'est peut-etre cette affinite meme qui empeche l'alternance des thonschiefer et des micaschistes: car dans ces alternances la nature semble favoriser l'association de roches heterogenes; ou, pour me servir d'une expression figuree, elle se plaeit dans les associations dont les roches alternantes offrent un grand contraste de cristallisation, de melange et de couleur. Au Mexique j'ai vu des grünstein vert-noiratre alterner des milliers de fois avec des syenites blanc-rougeatre et qui abondent plus en quarz qu'en feldspath: il y a dans ce grünstein des filons de syenite, et dans la syenite des filons de grünstein; mais aucune des deux roches ne passe a l'autre. ( Essai politique sur la Nouvelle Espagne, T. II, p. 523.) Elles offrent sur la limite de leur contact mutuel des differences aussi tranchees que les porphyres qui alternent avec les grauwackes ou avec les syenites, que les calcaires noirs qui alternent avec les thonschiefer de transition, et tant d'autres roches de composition et d'aspect entierement heterogenes. Il y a plus encore: lorsque dans des terrains primitifs des roches plus rapprochees par la nature de leur composition que par leur structure ou par le mode de leur agregation, par exemple, les granites et les gneis, ou les gneis et les micaschistes, alternent, ces roches ne montrent guere cette meme tendance de passer les unes aux autres qu'elles presentent isolement dans des formations non complexes. Nous avons deja fait observer plus haut que souvent une couche b, devenant plus frequente dans la roche a, annonce au geognoste voyageur qu'a la formation simple a va succeder une formation complexe dans laquelle a et b alternent. Plus tard il arrive que b prend un plus grand developpement; que a n'est plus une roche alternante, mais une simple couche subordonnee a b, et que cette roche b se montre seule jusqu'a ce que par la frequente apparition de couches g elle prelude a une formation complexe de b alternant avec g. On peut substituer a ces signes les mots de granite, gneis et micaschiste; ceux de porphyre, grauwacke et syenite; de gypse, marne et calcaire fetide (stinkstein). Le langage pasigraphique a l'avantage de generaliser les problemes; il est plus conforme aux besoins de la philosophie geognostique, dont j'essaie de donner ici les premiers elemens, en tant qu'ils ont rapport a l'etude de la superposition des roches. Or, si souvent entre des formations simples et tres-rapprochees dans l'ordre de leur anciennete relative, entre les formations a, b, g, se trouvent placees des formations complexes, ab et bg (c'est-a-dire a alternant avec b, et b alternant avec g); on observe aussi, quoique moins frequemment, qu'une des formations (par exemple, a) prend un accroissement si extraordinaire qu'elle enveloppe la formation b, et que b, au lieu de se montrer comme une roche independante, placee entre a et g, n'est plus qu'une couche dans a. C'est ainsi que dans la Silesie inferieure le gres rouge renferme la formation du zechstein; car le calcaire de Kunzendorf, rempli d'empreintes de poissons, et analogue a la marne bitumineuse et abondante en poissons de Thuringe, est entierement enveloppe dans le gres houiller. ( Buch, Beob., T. I, p. 104, 157; Id., Reise nach Norwegen, T. I, p. 158; Raumer, Gebirge von Nieder- Schlesien, p. 79.) M. Beudant ( Voy. min., T. III, p. 183) a observe un phenomene semblable en Hongrie. Dans d'autres regions, par exemple, en Suisse et a l'extremite meridionale de la Saxe, le gres rouge disparoeit entierement, parce qu'il est remplace et pour ainsi dire vaincu par un prodigieux developpement de la grauwacke ou du calcaire alpin. ( Freiesleben, Kupfersch., B. IV, 109.) Ces effets de l'alternance et du developpement inegal des roches sont d'autant plus dignes d'attention, que leur etude peut jeter du jour sur quelques deviations apparentes d'un type de superposition generalement reconnu, et qu'elle peut servir a ramener a un type commun des series de gisement observees dans des pays tres-eloignes. Pour designer les formations composees de deux roches qui alternent les unes avec les autres, j'ai generalement prefere les mots granite et gneis, syenite et grünstein, aux expressions plus usitees de granite-gneis, syenite-grünstein. J'ai craint que cette derniere methode de designer des formations composees de roches alternantes, ne feit plutot naeitre l'idee d'un passage du granite au gneis, de la syenite au grünstein. En effet, un geognoste dont les travaux sur les trachytes de l'Allemagne n'ont pas ete assez apprecies, M. Nose, s'etoit deja servi des mots granite-porphyres et porphyregranites, pour indiquer des varietes de structure et d'aspect, pour separer les granites porphyroides des porphyres qui, par la frequence des cristaux empates dans la masse, presentent une structure d'agregation, une veritable structure granitique. En adoptant les denominations de granite et gneis, de syenite et porphyre, de grauwacke et porphyre, de calcaire et thonschiefer, on ne laisse aucun doute sur la nature des termes complexes de la serie geognostique. Parmi les differentes preuves de l'identite des formations dans les regions les plus eloignees du globe, une des plus frappantes et que l'on doit aux secours de la zoologie, est l'identite des corps organises enfouis dans des couches d'un gisement analogue. Les recherches qui conduisent a ce genre de preuves ont singulierement exerce la sagacite des savans, depuis que MM. de Lamarck et Defrance ont commence a determiner les coquilles fossiles des environs de Paris, et que MM. Cuvier et Brongniart ont publie leurs memorables travaux sur les ossemens fossiles et les terrains tertiaires. Comme la plus grande masse des formations qui composent la croaute de notre planete ne renferme pas des depouilles de corps organises; que ces depouilles sont tres-rares dans les terrains de transition, souvent brises et difficiles a separer de la roche dans les terrains secondaires tres-anciens, l'etude approfondie des corps fossiles n'embrasse qu'une petite partie de la geognosie, mais une partie bien digne de l'attention du philosophe. Les problemes qui se presentent sont nombreux: ils ont rapport a la geographie des animaux dont les races sont eteintes, et qui par cette raison appartiennent deja a l'histoire de notre planete: ils necessitent la discussion des caracteres zoologiques par lesquels on voudroit distinguer les differentes formations superposees. Pour rester fidele au but que je me suis propose, de ne considerer, dans cette Introduction au Tableau des roches, les objets que dans leur plus grande generalite, je vais citer les questions de zoologie geognostique qui paroissent les plus importantes dans l'etat actuel de la science, et dont la solution a ete tentee avec plus ou moins de succes: Quels sont les genres et (si l'etat de conservation et le peu d'adherence a la masse rocheuse permettent une determination plus complete) quelles sont les especes auxquelles on peut rapporter les depouilles fossiles? Une determination exacte des especes en fait-elle reconnoeitre avec certitude qui sont identiques avec les plantes et les animaux du monde actuel? Quels sont les classes, les ordres et les familles d'etres organises qui offrent le plus de ces analogies? Dans quel rapport le nombre des genres et des especes identiques augmente-t-il avec la nouveaute des roches ou des depots terreux? L'ordre observe dans la superposition des terrains intermediaires, secondaires, tertiaires et d'alluvion, est-il partout en harmonie avec l'analogie croissante qu'offrent les types d'organisation? Ces types se succedent-ils de bas en haut (en passant des grauwackes et des calcaires noirs de transition, par le gres houiller, le calcaire alpin, le calcaire du Jura et la craie, au gypse tertiaire, aux terrains d'eau douce et aux alluvions modernes) dans le meme ordre que nous adoptons dans nos systemes d'histoire naturelle, en disposant les etres selon que leur structure devient plus compliquee, et qu'aux organes de la nutrition d'autres systemes d'organes se trouvent ajoutes? La distribution des corps organises fossiles indique-t-elle un developpement progressif de la vie vegetale et animale sur le globe; une apparition successive de plantes acotyledones et monocotyledones, de zoophytes, de crustaces, de mollusques (cephalopodes, acephales, gasteropodes), de poissons, de sauriens (quadrupedes ovipares), de plantes dicotyledones, de mammiferes marins et de mammiferes terrestres? En considerant les corps fossiles, non dans leur rapport avec telle ou telle roche dans laquelle on les a decouverts, mais simplement sous le point de vue de leur distribution climaterique, remarque-t-on une difference appreciable entre les especes qui dominent dans l'ancien et le nouveau continent, dans les climats temperes et sous la zone torride, dans l'hemisphere boreal et dans l'hemisphere austral? Y a-t-il un certain nombre d'especes tropicales que l'on trouve partout, et qui semblent annoncer qu'independantes d'une distribution de climats semblables aux climats actuels, elles ont eprouve, au premier age du monde, la haute temperature que la croaute crevassee du globe fortement echauffe dans son interieur a donnee a l'atmosphere ambiante? Est-on saur de distinguer par des caracteres precis les coquilles d'eau douce et les coquilles marines? La determination du genre suffit-elle? ou n'y a-t-il pas (comme parmi les poissons) quelques genres dont les especes vivent a la fois dans les fleuves et les mers? Quoique dans quelquesunes des roches tertiaires les coquilles fluviatiles se trouvent melangees (par exemple a l'embouchure de nos rivieres) avec les coquilles pelagiques, n'observe-t-on pas en general que les premieres forment des depots particuliers, caracterisant des terrains dont l'etude avoit ete negligee jusqu'ici, et qui sont d'une origine tres-recente? A-t-on jamais decouvert sous le calcaire du Jura, pres des poissons reputes fluviatiles, dans le schiste bitumineux du calcaire alpin, des coquilles d'eau douce? Des especes identiques de fossiles se trouvent-elles dans les memes formations sur differens points du globe? Peuvent-elles fournir des caracteres zoologiques pour reconnoeitre les diverses formations superposees? ou ne doit-on pas plutot admettre que des especes que le zoologiste est en droit de regarder comme identiques, d'apres les methodes adoptees, penetrent a travers plusieurs formations; qu'elles se montrent meme dans celles qui ne sont pas en contact immediat? Les caracteres zoologiques ne doivent-ils pas etre tires et de l'absence totale de certaines especes, et de leur frequence relative ou predominance, enfin de leur association constante avec un certain nombre d'autres especes? Est-on en droit de diviser une formation dont l'unite a ete reconnue d'apres des rapports de gisement et d'apres l'identite des couches qui sont egalement intercalees aux strates superieurs et inferieurs, par la seule raison que les premiers de ces strates renferment des coquilles d'eau douce, et les derniers des coquilles marines? L'absence totale de corps organises dans certaines masses de terrains secondaire et tertiaire, est-elle un motif suffisant pour considerer ces masses comme des formations particulieres, si d'autres rapports geognostiques ne justifient pas cette separation? Une partie de ces problemes s'etoit presentee depuis longtemps aux naturalistes. Deja Lister avoit avance, il y a plus de cent cinquante ans, que chaque roche etoit caracterisee par des coquilles fossiles differentes. ( Phil. Trans., n.° 76, p. 2283.) Pour prouver que les coquilles de nos mers et de nos lacs sont specifiquement differentes des coquilles fossiles (lapides sui generis), il affirme "que les dernieres, par exemple, celles des carrieres de Northamptonshire, portent tous les caracteres de nos Murex, de nos Tellines et de nos Trochus; mais que des naturalistes qui ne sont pas accoutumes a s'arreter a un apercu vague et general des choses, trouveront les coquilles fossiles specifiquement differentes de toutes les coquilles du monde actuel. Presque a la meme epoque, Nicolas Stenon ( De solido intra solidum contento, 1669, p. 2, 17, 28, 63, 69, fig. 20--25) distingua le premier "les roches (primitives) anterieures a l'existence des plantes et des animaux sur le globe et ne renfermant par consequent jamais des debris organiques, et les roches (secondaires) superposees aux premieres et remplies de ces debris (turbidi maris sedimenta sibi invicem imposita)." Il considera chaque banc de roche secondaire "comme un sediment depose par un fluide aqueux; et exposant un systeme entierement semblable a celui de Deluc "sur la formation des vallees par des affaissemens longitudinaux, et sur l'inclinaison de couches d'abord toutes horizontales," il admet pour le sol de la Toscane, a la maniere de nos geologues modernes, "six grandes epoques de la nature (sex distinctae Etruriae facies, ex praesenti facie Etruriae collectae), selon que la mer inonda periodiquement le continent, ou qu'elle se retira dans ses anciennes limites. Dans ces temps ou l'observation de la nature fit naeitre en Italie les premieres idees sur l'age relatif et la succession des couches primitives et secondaires, la zoologie et la geognosie ne pouvoient encore se preter un secours mutuel, parce que les zoologistes ne connoissoient pas les roches, et que les geognostes etoient entierement etrangers a l'histoire naturelle des animaux. On se bornoit a des apercus vagues, on regardoit comme specifiquement identique tout ce qui offroit quelque analogie de forme; mais en meme temps, et ceci etoit un pas fait dans la bonne route, on etoit attentif aux fossiles qui predominoient dans telle ou telle roche. C'est ainsi que les denominations de calcaire a gryphites, de calcaire a trochites, de schistes a fougeres, schistes a trilobites (Gryphiten- und Trochiten-Kalk; Kräuter- und Trilobiten- Schiefer), furent tres-anciennement employees par les mineralogistes d'Allemagne. La determination des genres caracterises par les dents, par les fossettes, par les lames saillantes et crenelees de la charniere, par les plis et les bourrelets de l'ouverture de la coquille, est bien plus difficile dans les roches secondaires tres-anciennes que dans les formations tertiaires, les premieres etant generalement moins friables et plus adherentes au test du corps fossile. Cette difficulte augmente lorsqu'on veut distinguer les especes; elle devient presque insurmontable dans quelques roches calcaires de transition et dans le muschelkalk, qui renferme des coquilles brisees. Si les caracteres zoologiques d'un certain nombre de formations pouvoient etre tires de genres bien distincts, si les trilobites et les orthoceratites appartenoient exclusivement aux terrains intermediaires, les gryphites au calcaire alpin (zechstein), les pectinites au bunte sandstein (gres de Nebra), les trochites et mytulites au muschelkalk, les tellines au quadersandstein, les ammonites et turritelles au calcaire du Jura et a ses marnes, les oursins ananchytes et les spatanges a la craie les cerites au calcaire grossier; la connoissance de ces genres seroit d'un secours aise pour la determination des roches: on n'auroit plus besoin d'examiner sur les lieux la superposition des formations; on reconnoeitroit ces dernieres sans sortir de son cabinet, en ne consultant que les collections. Mais il s'en faut de beaucoup que la nature ait rendu si facile a l'homme l'etude des masses coquilleres qui constituent la croaute de notre planete. Les memes types d'organisation se sont repetes a des epoques tres-differentes: les memes genres se retrouvent dans les formations les plus distinctes. Il y a des orthoceratites dans les calcaires de transition, les calcaires alpins et le gres bigarre; des terebratulites dans le calcaire du Jura et dans le muschelkalk; des trilobites dans les thonschiefer de transition, dans le schiste bitumineux du zechstein, et, selon un excellent geognoste, M. de Schlottheim, meme dans le calcaire du Jura; il y a des pentacrinites dans le thonschiefer de transition et dans le muschelkalk le plus moderne. Les ammonites penetrent a travers beaucoup de formations calcaires et marneuses, depuis les grauwackes ( Raumer, Versuche, p. 22; Schlottheim, Petrefactenkunde, p. 38) jusque dans les couches inferieures de la craie. Il y a des troncs de monocotyledones et dans le gres rouge, et dans les marnes du gypse d'eau douce, formees a une epoque ou le monde etoit deja rempli de plantes dicotyledones. Mais, a une epoque ou les naturalistes ne s'arretent plus a des notions vagues et incertaines, on a reconnu avec sagacite que le plus grand nombre de ces fossiles (gryphites, terebratulites; ammonites, trilobites, etc.), enfouis dans differentes formations, ne sont pas specifiquement les memes; qu'un grand nombre d'especes qu'on a pu examiner avec precision, varient avec les roches superposees. Les poissons que l'on observe dans les schistes de transition (Glaris), dans les schistes bitumineux du zechstein, dans le calcaire du Jura, dans le calcaire tertiaire a cerite de Paris et de Monte Bolca, et dans le gypse de Montmartre, sont des especes distinctes, en partie pelagiques, en partie fluviatiles. Eston en droit de conclure de la reunion de ces faits, que toutes les formations sont caracterisees par des especes particulieres; que les coquilles fossiles de la craie, du muschelkalk, du calcaire du Jura et du calcaire alpin, different toutes entre elles? Je pense que ce seroit pousser l'induction beaucoup trop loin, et M. Brongniart meme, qui connoeit si bien la valeur des caracteres zoologiques, restreint leur application absolue au cas "ou la superposition (les circonstances de gisement) ne s'y opposent pas." Je pourrois citer les cerites du calcaire grossier, qui se trouvent (pres de Caen) au-dessous de la craie, et qui semblent indiquer, comme la repetition des argiles avec lignites en-dessus et au-dessous de la craie, une certaine connexite entre des terrains qu'au premier coup d'oeil on croiroit entierement distincts. Je pourrois m'arreter a d'autres especes de coquilles qui appartiennent a la fois a plusieurs formations tertiaires, et rappeler que si un jour, par des caracteres peu sensibles et par de foibles nuances, on parvenoit a separer des especes que l'on croit identiques aujourd'hui, la finesse meme de ces distinctions ne rassureroit pas trop sur l'universalite, d'ailleurs si desirable, des caracteres zoologiques en geognosie. Une autre objection, tiree de l'influence que les climats exercent meme sur les animaux pelagiques, me paroeit plus importante encore. Quoique les mers, par des causes physiques tres-connues, offrent, a de grandes profondeurs, la meme temperature sous l'equateur et sous la zone temperee, nous voyons pourtant, dans l'etat actuel de notre planete, les coquilles des tropiques (parmi lesquelles les univalves dominent, comme parmi les testaces fossiles) differer beaucoup des coquilles des climats septentrionaux. Le plus grand nombre de ces animaux aiment les recifs et les bas-fonds: d'ou il suit que les differences specifiques sont souvent tressensibles, sous un meme parallele, sur des cotes opposees. Or, si les memes formations se repetent et s'etendent, pour ainsi dire, a de prodigieuses distances, de l'est a l'ouest et du nord au sud, d'un hemisphere dans l'autre, n'est-il pas probable, quelles que soient les causes compliquees de l'ancienne temperature de notre globe, que des variations de climats ont modifie, jadis comme de nos jours, les types d'organisation, et qu'une meme formation (c'est-a-dire une meme roche placee, dans les deux hemispheres, entre deux formations homonymes) a pu envelopper des especes distinctes? Il arrive souvent sans doute que des couches superposees presentent un contraste de corps fossiles tres-frappant. Mais peuton conclure de la qu'apres qu'un depot s'etoit forme, les etres qui habitoient alors la surface du globe, aient tous ete detruits? Il est incontestable que des generations de types differens se sont succede les unes aux autres. Les ammonites, que l'on trouve a peine parmi les roches de transition, atteignent leur maximum dans les couches qui representent sur differens points du globe le muschelkalk et le calcaire du Jura; ils disparoissent dans les couches superieures de la craie et au-dessus de cette formation. Les echinites, tresrares dans le calcaire alpin et meme dans le muschelkalk, deviennent au contraire tres-communs dans le calcaire du Jura, dans la craie et les terrains tertiaires. Mais rien ne nous prouve que cette succession de differens types organiques, cette destruction graduelle des genres et des especes, coincide necessairement avec les epoques ou chaque terrain s'est forme. "La consideration de similitude ou de difference entre les debris organiques n'est pas d'une grande importance, dit M. Beudant ( Voyage min., T. III, p. 278), lorsque l'on compare des depots qui se sont formes dans des contrees tres-eloignees les unes des autres: elle est de beaucoup d'importance, si l'on compare des depots tresrapproches." Tout en combattant les conclusions trop absolues qu'on pourroit etre tente de tirer de la valeur des caracteres zoologiques, je suis loin de nier les services importans que l'etude des corps fossiles rend a la geognosie, si l'on considere cette science sous un point de vue philosophique. La geognosie ne se borne pas a chercher des caracteres diagnostiques; elle embrasse l'ensemble des rapports sous lesquels on peut considerer chaque formation: 1. ° son gisement; 2. ° sa constitution oryctognostique (c'est-a-dire, sa composition chimique, et le mode particulier d'agregation plus ou moins cristalline de ses molecules); 3. ° l'association des differens corps organises que l'on y trouve enfouis. Si la superposition des masses rocheuses heterogenes nous revele l'ordre successif de leur formation, comment ne pas nous interesser aussi a connoeitre l'etat de la nature organique aux differentes epoques ou les depots se sont formes? On ne peut revoquer en doute que, sur une surface de plusieurs milliers de lieues carrees (en Thuringe et dans toute la partie septentrionale de l'Allemagne), neuf formations superposees, celles de calcaire de transition, de grauwacke, de gres rouge, de zechstein avec schiste bitumineux (de gypse muriatifere), de gres a oolithes (de gypse argileux), de muschelkalk et de gres blanc (quadersandstein), ont pu etre reconnues comme distinctes, sans recourir aucunement a l'emploi de caracteres zoologiques; mais il ne suit pas de la que la recherche la plus minutieuse de ces caracteres, ou, pour mieux dire, que la connoissance la plus intime des fossiles contenus dans chacune des formations ne soit indispensable pour offrir un tableau complet et vraiment geognostique. Il en est de l'etude des terrains comme de celle des etres organises. La botanique et la zoologie, considerees de nos temps sous un point de vue plus eleve, ne se bornent plus a la recherche de quelques caracteres exterieurs et distinctifs des especes; ces sciences approfondissent l'ensemble de l'organisation vegetale et animale. Les caracteres tires des formes de la coquille suffisent pour distinguer les diverses especes d'acephales testaces. Regarderoit-on pour cela comme superflue la connoissance des animaux qui habitent ces memes coquilles? Telle est la connexite des phenomenes et de leurs rapports naturels (de ceux de la vie, comme de ceux qu'offrent les depots pierreux formes a differentes epoques), que, si l'on en neglige quelquesuns, on se forme non-seulement une image incomplete, mais le plus souvent une image infidele. Dans le cas de la conformite de gisement, il peut y avoir identite de masse (c'est-a-dire de composition mineralogique) et diversite de fossiles, ou diversite de masse et identite de fossiles. Les roches b et b' placees a de grandes distances horizontales entre deux formations identiques a et g, ou appartiennent a une meme formation, ou sont des formations paralleles. Dans le premier cas, leur composition minerale est semblable; mais, a cause de la distance des lieux et des effets climateriques, les debris organiques qu'elles renferment, peuvent differer considerablement. Dans le second cas, la composition mineralogique est differente, mais les debris organiques peuvent etre analogues. Je pense que les mots, formations identiques, formations paralleles, indiquent la conformite ou non-conformite de composition mineralogique, mais qu'ils ne font rien prejuger sur l'identite des fossiles. S'il est assez probable que des depots b et b', places a de grandes distances horizontales entre les memes roches a et g, sont formes a la meme epoque, parce qu'ils renferment les memes fossiles et une masse analogue, il n'est pas egalement probable que les epoques de formation sont tres-eloignees les unes des autres, lorsque les fossiles sont distincts. On peut concevoir que sous une meme zone, dans un pays de peu d'etendue, des generations d'animaux se sont succede, et ont caracterise, comme par des types particuliers, les epoques des formations; mais a de grands eloignemens horizontaux des etres de formes tres-diverses peuvent, sous differens climats, avoir occupe simultanement la surface du globe ou le bassin des mers. Il y a plus encore: le gisement de b entre a et g prouve que la formation de b est anterieure a celle de g, posterieure a celle de a; mais rien ne nous donne la mesure absolue de l'intervalle entre les epoqueslimites, et differens depots (isoles) de b peuvent ne pas etre simultanes. Il semble resulter des faits que le zele et la sagacite des naturalistes ont reunis depuis un petit nombre d'annees, que, si l'on ne doit pas toujours s'attendre a trouver, comme le pretendoit Lister, dans chaque formation differente d'autres depouilles de corps organises, le plus souvent des formations reconnues pour identiques par leur gisement et leur composition renferment, dans les contrees les plus eloignees du globe, des associations d'especes entierement semblables. M. Brongniart, dont les travaux, joints a ceux de MM. Lamarck, Defrance, Beudant, Desmarest, Prevost, Ferussac, Schlottheim, Wahlenberg, Buckland, Webster, Phillips, Greenough, Warburton, Sowerby, Brocchi, Soldani, Cortesi, et d'autres mineralogistes celebres, ont tant avance l'etude de la conchyliologie souterraine, a fait voir recemment les analogies frappantes qu'offrent, sous le rapport des corps fossiles, certains terrains d'Europe et de l'Amerique septentrionale. Il a essaye de prouver qu'une formation est parfois tellement deguisee, que ce n'est que par des caracteres zoologiques que l'on peut la reconnoeitre ( Brongniart, Hist. nat. des crustaces fossiles, p. 57, 62). Dans l'etude des formations, comme dans toutes les sciences physiques descriptives, ce n'est que l'ensemble de plusieurs caracteres qui doit nous guider dans la recherche de la verite. La description specifique des debris de plantes et d'animaux renfermes dans les divers terrains, nous en offre pour ainsi dire la Flore ou la Faune. Or, dans le monde primordial, comme dans celui d'aujourd'hui, la vegetation et les productions animales des diverses portions du globe paroissent avoir ete moins caracterisees par quelques formes isolees d'un aspect extraordinaire, que par l'association de beaucoup de formes specifiquement differentes, mais analogues entre elles, malgre la distance des lieux. En decouvrant une nouvelle terre pres du detroit de Torres, il ne seroit pas aise de determiner, d'apres un petit nombre de productions, si cette terre est contigue a la Nouvelle-Hollande, ou a l'une des eiles Moluques ou a la Nouvelle-Guinee. Comparer des formations sous le rapport des fossiles, c'est comparer des Flores et des Faunes de divers pays et de diverses epoques; c'est resoudre un probleme d'autant plus complique qu'il est modifie a la fois par l'espace et le temps. Parmi les caracteres zoologiques appliques a la geognosie, l'absence de certains fossiles caracterise souvent mieux les formations que leur presence. C'est le cas des roches de transition: on n'y trouve generalement que des madrepores, des encrinites, des trilobites, des orthoceratites et des coquilles de la famille des terebratules, c'est-a-dire des fossiles dont quelques especes, non identiques, mais analogues, se rencontrent dans des couches secondaires tres-modernes; mais ces roches de transition sont privees de bien d'autres depouilles de corps organises, qui paroissent en abondance au-dessus du gres rouge. Le jugement que l'on porte sur l'absence de certaines especes, ou sur l'absence totale des corps fossiles, peut cependant etre fonde sur une erreur qu'il sera utile de signaler ici. En examinant en grand les formations coquillieres, on observe que les corps organises ne sont pas toujours egalement distribues dans la masse; mais 1. °, que des strates entierement depourvus de fossiles alternent avec d'autres strates qui en fourmillent; 2. ° que, dans une meme formation, des associations particulieres de fossiles caracterisent certains strates qui alternent avec d'autres strates a fossiles distincts. Ce phenomene, observe depuis long-temps, se retrouve dans le muschelkalk et dans le calcaire alpin (zechstein), qu'une couche de trochites separe souvent du gres houiller ( Buch, Beob., T. I, p. 135, 146, 171); il est propre aussi au calcaire du Jura et a plusieurs formations tertiaires. En n'etudiant que la craie des environs de Paris, on pourroit presque croire que les coquilles univalves manquent entierement a cette formation: cependant les univalves polythalames, les ammonites, comme nous l'avons rappele deja, sont tres-communs en Angleterre, dans les couches les plus anciennes de la craie. Meme en France (cote de Sainte-Catherine pres de Caen) la craie tuffeau et la craie chloritee contiennent beaucoup de fossiles que l'on ne trouve pas dans la craie blanche ( Brongniart, Caracteres zool., p. 12). Comme dans differens pays les terrains ne se sont pas developpes egalement, et que l'on peut prendre des lambeaux de formations pour des formations entieres et completes, celles qui sont depourvues de coquilles dans une region, peuvent en offrir dans une autre. Cette consideration est importante pour obvier a la tendance assez generale de trop multiplier les formations; car, lorsque sur un meme point du globe un terrain (par exemple de gres) abonde dans sa partie inferieure en corps fossiles, et que sa partie superieure en manque entierement, cette seule absence des fossiles ne justifie pas la scission du meme terrain en deux formations distinctes. Dans la description geologique des environs de Paris, M. Brongniart a tres-bien reuni les meulieres sans coquilles avec celles qui sont comme petries de coquilles d'eau douce. Nous venons de voir qu'une formation peut renfermer dans differens strates des petrifications specifiquement differentes, mais que le plus souvent quelques especes du strate inferieur se melent a la grande masse d'especes heterogenes qui se trouvent reunies dans le strate superpose. Lorsque cette difference porte sur des genres dont les uns sont des coquilles pelagiques, les autres des coquilles d'eau douce, le probleme de l'unite ou de l'indivisibilite d'une formation devient plus embarrassant. Il faut d'abord distinguer deux cas: celui ou quelques coquilles fluviatiles se trouvent melees a une grande masse de coquilles marines, et celui ou des coquilles marines et fluviatiles pourroient alterner couche par couche. MM. Gilet de Laumont et Beudant ont fait des observations interessantes sur ce melange de productions marines et d'eau douce dans une meme couche. M. Beudant a prouve, par des experiences ingenieuses, comment beaucoup de mollusques fluviatiles s'habituent graduellement a vivre dans une eau qui a toute la salure de l'ocean. Le meme savant a examine, conjointement avec M. Marcel de Serres, certaines especes de paludines qui, preferant les eaux saumatres, se trouvent pres de nos cotes, tantot avec des coquilles pelagiques, tantot avec des coquilles fluviatiles. ( Journ. de phys., T. LXXXIII, p. 137, T. LXXXVIII, p. 211; Brongniart, Geogr. min., p. 27, 54, 89.) A ces faits curieux se joignent d'autres faits, que j'ai publies dans la Relation de mon Voyage aux regions equinoxiales (T. I., p. 535 et T. II, p. 606), et qui semblent expliquer ce qui s'est passe jadis sur le globe, d'apres ce que nous observons encore aujourd'hui. Sur les cotes de la Terre-ferme, entre Cumana et Nueva-Barcelona, j'ai vu des crocodiles s'avancer loin dans la mer. Pigafetta a fait la meme observation sur les crocodiles de Borneo. Au sud de l'eile de Cuba, dans le golfe de Xagua, il y a des lamantins dans la mer, sur un point ou, au milieu de l'eau salee, jaillissent des sources d'eau douce. Lorsqu'on reflechit sur l'ensemble de ces faits, on est moins etonne du melange de quelques productions terrestres avec beaucoup de productions incontestablement marines. Le second cas que nous avons indique, celui de l'alternance, ne s'est jamais presente, je crois, d'une maniere aussi prononcee que l'alternance du thonschiefer et du calcaire noir dans un meme terrain de transition, ou (pour rappeler un fait qui a rapport a la distribution des corps organises) que l'alternance de deux grandes formations marines (calcaire a cerites et gres de Romainville) avec deux grandes formations d'eau douce (gypse et meulieres du plateau de Montmorency). Ce que l'observation attentive des superpositions a offert jusqu'ici, se reduit a des couches alternantes de gypse et de marne, placees entre deux formations marines, et renfermant au centre (dans leur plus grande masse) des productions terrestres et d'eau douce, et vers les limites superieure et inferieure, tant dans le gypse que dans les marnes, des productions marines: telle est la constitution geologique du gypse de Montmartre. La variation specifique dans les petrifications, le melange observe a Pierrelaie, et le phenomene d'alternance que presente Montmartre, ne suffisent pas pour motiver le morcellement d'une meme formation. Les marnes et le gypse, qui renferment des coquilles marines (n.° 26 de la troisieme masse), ne peuvent etre geognostiquement separes des marnes et des gypses qui renferment des productions d'eau douce. Aussi MM. Cuvier et Brongniart n'ont pas hesite de considerer l'ensemble de ces marnes et de ces gypses marins et d'eau douce comme un meme terrain. Ces savans ont meme cite cette reunion de couches alternantes comme un des exemples les plus clairs de ce que l'on doit entendre par le mot formation. ( Geogr. miner., p. 31, 39, 189.) En effet, dans un meme terrain peuvent etre renfermes differens systemes de couches: ce sont des groupes, des sous-divisions, ou, comme disent les geognostes de l'ecole de Freiberg, des membres plus ou moins developpes d'une meme formation ( Freiesleben, Kupf., T. I, p. 17, T. III, p. 1). Malgre le melange de coquilles pelagiques et fluviatiles que l'on observe quelquefois au contact de deux formations d'origine differente, on peut donner a l'une de ces formations le nom de calcaire ou de gres marin, lorsqu'on ne veut tirer la denomination des roches que des especes qui constituent la plus grande masse et le centre des couches. Cette terminologie rappelle un fait qui a rapport, pour ainsi dire, a la geogonie, a l'ancienne histoire de notre planete: elle precise (et peut-etre un peu trop) l'alternance des eaux douces et des eaux salees. Je ne conteste pas l'utilite des denominations gres ou calcaire marin pour des descriptions locales; mais, d'apres les principes que je me suis propose de suivre dans le tableau general des formations caracterisees d'apres la place qu'elles occupent comme termes d'une serie, j'ai cru devoir l'eviter avec soin. Tous les terrains au-dessous de la craie et meme au-dessous du calcaire a cerites (calcaire grossier du bassin de Paris) sont-ils, sans exception, des calcaires et des gres marins? Ou les monitors et les poissons des schistes cuivreux dans le calcaire alpin de Thuringe; les ichthyosaures de M. Home, places au-dessous des oolithes d'Oxford et de Bath, dans le lyas de l'Angleterre (qui sur le continent est represente par une partie du calcaire du Jura); les crocodiles de Honfleur, enfouis dans des argiles avec bancs calcaires au-dessus des oolithes de Dive et du calcaire d'Isigny, par consequent superieurs au calcaire du Jura, prouvent-ils qu'il y a deja au-dessous de la craie, entre ce terrain et le gres rouge, de petites formations d'eau douce, intercalees aux grandes formations marines? Les houilles a fougeres sous le gres rouge et sous le porphyre secondaire ne nous offrent-elles pas un exemple evident d'une tres-ancienne formation non marine? Ces circonstances prescrivent, dans l'etat actuel de la science, beaucoup de reserve, lorsqu'on se hasarde, d'apres des caracteres purement zoologiques, de morceler des terrains dont l'unite a paru constatee par l'alternance des memes couches et par d'autres phenomenes de gisement. ( Engelhard et Raumer, Geogn. Vers., p. 125 -- 133.) Cette reserve est d'autant plus necessaire que, d'apres le temoignage d'un mineralogiste qui a long-temps approfondi cette matiere, M. Brongniart, "il existe une espece de transition entre la formation du calcaire marin et du gypse d'eau douce qui suit ce calcaire, et que ces deux terrains n'offrent pas cette separation brusque qui se montre, sur les memes lieux, entre la craie et le calcaire grossier, c'est-a-dire entre deux formations marines. On ne peut douter, ajoute le meme observateur, que les premieres couches de gypse n'aient ete deposees dans un liquide analogue a la mer, tandis que les suivantes ont ete deposees dans un liquide analogue a l'eau douce." ( Geogr. min., p. 168 et 193.) En enoncant les motifs qui m'empechent de generaliser une terminologie fondee sur le contraste entre des productions d'eau douce et des productions marines, je suis loin de contester l'existence d'une formation d'eau douce superieure a toutes les autres formations tertiaires, et qui ne renferme que des bulimes, des limnees, des cyclostomes et des potamides. Des observations recentes ont demontre combien cette formation est plus repandue qu'on ne l'avoit cru d'abord. C'est un nouveau et dernier terme a ajouter a la serie geognostique. Nous devons la connoissance plus intime de ce calcaire d'eau douce aux utiles travaux de M. Brongniart. Les phenomenes qu'offrent les formations d'eau douce, dont l'existence n'etoit anciennement connue que par les tuffs de la Thuringe et par le Travertin toujours renaissant des plaines de Rome ( Reuss, Geogn., T. II, p. 642; Buch, Geogn. Beob., T. II, p. 21--30), se lient de la maniere la plus satisfaisante aux lois admirables que M. Cuvier a reconnues dans le gisement des os des quadrupedes vivipares. ( Brongniart, Annales du Museum, T. XV, p. 357, 581; Cuvier, Rech. sur les ossem. fossiles, T. I, p. LIV.) La distinction entre les coquilles fossiles fluviatiles et marines est l'objet de recherches tres-delicates: car il peut arriver, lorsque les depouilles des corps organises se detachent difficilement de la masse du calcaire siliceux qui les renferme, qu'on confonde des ampullaires avec des natices, des potamides avec des cerites. Dans la famille des conques on ne separe avec certitude les cyclades et les cyrenes, des venus et des lucines, que par l'examen des dents de la charniere. Le travail que M. de Ferussac a entrepris sur les coquilles terrestres et fluviatiles, jettera beaucoup de jour sur cet objet important. D'ailleurs, lorsqu'on croit voir un genre de coquilles pelagiques au milieu d'un genre de coquilles d'eau douce, on peut agiter la question, si effectivement les memes types generiques ne peuvent se retrouver dans les lacs et dans les mers. On connoeit deja l'exemple d'un veritable mytilus fluviatile. Peut-etre les ampullaires et les corbules offriront-ils des melanges analogues de formes marines et de formes d'eau douce. (Voyez un memoire de M. Valenciennes, insere dans mon Recueil d'obs. de zoologie et d'anatomie comparee, T. II, p. 218.) Il resulte de ces considerations generales sur les caracteres zoologiques et sur l'etude des corps fossiles, que, malgre les beaux et anciens travaux de Camper, de Blumenbach et de Sömmering, l'exacte determination specifique des especes, et l'examen de leurs rapports avec des couches tres-recentes et voisines de la craie, ne datent que de vingt-cinq ans. Je pense que cette etude des corps fossiles, appliquee a toutes les autres couches secondaires et intermediaires par des geognostes qui consultent en meme temps le gisement et la composition minerale des roches, loin de renverser tout le systeme des formations deja etablies, servira plutot a etayer ce systeme, a le perfectionner, a en completer le vaste tableau. On peut envisager sans doute la science geognostique des formations sous des points de vue tres-differens, selon que l'on s'attache de preference a la superposition des masses minerales, a leur composition (c'est-a-dire, a leur analyse chimique et mecanique), ou aux fossiles qui se trouvent renfermes dans plusieurs de ces masses; cependant la science geognostique est une. Les denominations, geognosie de gisement ou de superposition, geognosie oryctognostique (analysant le tissu des masses), geognosie des fossiles, designent, je ne dirai pas, des embranchemens d'une meme science, mais diverses classes de rapports que l'on tache d'isoler pour les etudier plus particulierement. Cette unite de la science, et le vaste champ qu'elle embrasse, avoient ete tres-bien reconnus par Werner, le createur de la geognosie positive. Quoiqu'il ne possedat pas les moyens necessaires pour se livrer a une determination rigoureuse des especes fossiles, il n'a cesse, dans ses cours, de fixer l'attention de ses eleves sur les rapports qui existent entre certains fossiles et les formations de differens ages. J'ai ete temoin de la vive satisfaction qu'il eprouva, lorsqu'en 1792 M. de Schlottheim, geognoste des plus distingues de l'ecole de Freiberg, commenca a faire de ces rapports l'objet principal de ses etudes. La geognosie positive s'enrichit de toutes les decouvertes qui ont ete faites sur la constitution minerale du globe; elle fournit a une autre science, improprement appelee theorie de la terre, et qui embrasse l'histoire premiere des catastrophes de notre planete, les materiaux les plus precieux. Elle reflechit plus de lumieres sur cette science qu'elle n'en recoit d'elle a son tour; et, sans revoquer en doute l'ancienne fluidite ou le ramollissement de toutes les couches pierreuses (phenomene qui se manifeste par les corps fossiles, par l'aspect cristallin des masses, par les cailloux roules ou les fragmens empates dans les roches de transition et les roches secondaires), la geognosie positive ne prononce point sur la nature de ces liquides dans lesquels, dit-on, les depots se sont formes, sur ces eaux de granite, de porphyre et de gypse, que la geologie hypothetique fait arriver, maree par maree, sur un meme point du globe. Dans le tableau des formations je n'ai point indique l'inclinaison des strates comme caractere geognostique. Nul doute que la discordance de deux roches (Ungleichförmigkeit der Lagerung), c'est-a-dire, le manque de parallelisme dans leur direction et leur inclinaison, ne soit le plus souvent une preuve evidente de l'independance des formations; nul doute que la grande inclinaison du terrain houiller (coal-measures), du gres rouge et des roches de transition, si justement opposee en Angleterre par M. Buckland a l'horizontalite du calcaire magnesien, du red-marl, du lyas et de toutes les couches plus modernes encore, ne soit un phenomene tres-digne d'attention: mais, dans d'autres regions de la terre, sur le continent de l'Europe et dans l'Amerique equinoxiale, le calcaire alpin et le calcaire du Jura, qui representent ces formations horizontales de l'Angleterre, sont tres-inclines aussi. En embrassant sous un meme point de vue de vastes etendues du globe, les Alpes, les montagnes metalliferes de la Saxe, les Apennins, les Andes de la Nouvelle-Grenade et les Cordilleres du Mexique, on observe que l'inclinaison des strates n'augmente pas du tout (comme on le repete encore souvent dans des ouvrages tres-estimes) selon l'age des formations. Il y a quelquefois, et sur des etendues de terrain tres-considerables, des couches presque horizontales parmi les roches tres-anciennes; et, qui plus est, ces phenomenes s'observent plutot parmi les roches primitives que parmi les roches de transition, et dans les premieres plutot parmi les gneis et les granites stratifies que parmi les thonschiefer et les micaschistes. Il m'a paru, en general, que les roches les plus inclinees se trouvent (si l'on fait abstraction de couches tres-rapprochees des hautes chaeines de montagnes) entre le micaschiste primitif et le gres rouge. L'horizontalite des strates n'est bien generale et bien prononcee qu'au-dessus de la craie, dans les terrains tertiaires, par consequent dans des masses d'une epaisseur comparativement peu considerable. Ce n'est point ici le lieu d'approfondir la question de savoir si toutes les couches inclinees sont des couches relevees, comme le pretendoit Stenon des l'annee 1667, et comme le semble prouver le phenomene local de galets ou fragmens aplatis places parallelement aux surfaces des couches inclinees dans des conglomerats de transition (grauwacke) et dans le nagelfluhe, ou s'il est possible que des attractions que l'on suppose avoir agi a la fois sur une grande partie de la surface du globe, ont produit dans nos plaines des strates inclines des leur origine, semblables a ces lames superposees, et sans contredit primitivement inclinees, qui forment le clivage d'un cristal. Certains gres (Nebra) offrent un parallelisme tresregulier dans leurs feuillets les plus minces, coupant sous un angle de 20° a 35° les fissures de stratification horizontales ou inclinees. Sans vouloir tenter de resoudre ces problemes, il me sera permis de reunir a la fin de cette introduction quelques faits qui se lient a l'etude des gisemens. Lorsqu'au milieu de pays non montagneux, ou sur des plateaux non interrompus par des vallees, ou la roche reste constamment visible, on voyage pendant huit a dix lieues dans une direction qui coupe celle des couches a angle droit, et que l'on trouve ces couches (de thonschiefer de transition) paralleles entre elles, presque egalement inclinees de 50 a 60 degres, vers le nord-ouest par exemple, on a de la peine a se former une idee d'un relevement ou d'un abaissement si uniformes, et des dimensions de la montagne ou du creux, qu'on doit admettre pour expliquer par une impulsion violente et simultanee cette inclinaison des strates. En raisonnant sur l'origine des couches inclinees, il faut distinguer deux circonstances tres-differentes: leur position dans la proximite d'une haute chaeine de montagnes qui est traversee par des vallees longitudinales ou transversales, et leur position loin de toute chaeine de montagnes, au milieu des plaines ou de plateaux peu eleves. Dans le premier cas, les effets du relevement paroissent souvent incontestables, et les couches inclinent assez generalement vers la chaeine, c'est-adire sur la pente septentrionale des Alpes au sud, sur la pente meridionale, mais beaucoup moins regulierement, au nord ( Buch, in Schr. Nat. Freunde, 1809, p. 103, 109, 179, 181; Bernouilli, Schweiz. Miner., p. 23); mais, a de grandes distances de la chaeine, celle-ci paroeit influer sur la seule direction des couches, et non sur leur inclinaison. J'ai ete, des l'annee 1792, tres-attentif a ce parallelisme ou plutot a ce loxodromisme des couches. Habitant des montagnes de roches stratifiees ou ce phenomene est tres-constant, examinant la direction et l'inclinaison des couches primitives et de transition, depuis la cote de Genes, a travers la chaeine de la Bochetta, les plaines de la Lombardie, les Alpes du Saint- Gothard, le plateau de la Souabe, les montagnes de Baireuth et les plaines de l'Allemagne septentrionale, j'avois ete frappe, sinon de la constance, du moins de l'extreme frequence des directions hor. 3--4 de la boussole de Freiberg (du sud-ouest au nord-est). Cette recherche, que je croyois devoir conduire les physiciens a la decouverte d'une grande loi de la nature, avoit alors tant d'attraits pour moi, qu'elle est devenue un des motifs les plus puissans de mon voyage a l'equateur. Lorsque j'arrivai sur les cotes de Venezuela, et que je parcourus la haute chaeine du littoral, et les montagnes de granite-gneis qui se prolongent du Bas-Orenoque au bassin du Rio Negro et de l'Amazone, je reconnus de nouveau, dans la direction des couches, le parallelisme le plus surprenant. Cette direction etoit encore hor. 3--4 (ou N. 45° E.), peut-etre parce que la chaeine du littoral de Venezuela ne s'eloigne pas considerablement de l'angle que fait avec le meridien la chaeine centrale de l'Europe. J'ai enonce les premiers resultats que m'offroient les roches primitives et de transition de l'Amerique meridionale, dans un memoire publie par M. de Lametherie, dans son Journal de Physique, T. 54, p. 46. J'y ai mele (comme cela arrive souvent aux voyageurs, lorsqu'ils publient le resultat de leurs travaux pendant le cours meme du voyage), a des observations tres-precises sur la grande uniformite dans la direction des couches (a l'isthme d'Araya, a la Silla de Caracas, au Cambury pres Portocabello, sur les rives du Cassiquiare: voyez ma Relat. hist., T. I, p. 393, 542, 564, 578, T. II, p. 81, 99, 125, 141), des apercus generaux que j'ai regardes depuis comme vagues et moins exacts. Quatre annees de courses dans les Cordilleres ont rectifie mes idees sur un phenomene qui est beaucoup plus important qu'on ne l'avoit cru autrefois; et, de retour en Europe, je me suis empresse de consigner le resultat general de mes observations dans la Geographie des plantes, p. 116, et dans l' Essai politique sur la Nouvelle-Espagne, T. II, p. 520. L'indication de ce resultat etoit sans doute restee inconnue au savant auteur du Critical examination of Geology (p. 276), lorsqu'il a combattu les assertions publiees pendant mon absence, en 1799, par M. de Lametherie. Il n'existe dans aucun hemisphere, parmi les roches, une uniformite generale et absolue de direction; mais, dans des regions d'une etendue tres-considerable, quelquefois sur plusieurs milliers de lieues carrees, on reconnoeit que la direction, plus rarement l'inclinaison, ont ete determinees par un systeme de forces particulier. On y decouvre, a des distances tres-grandes, un parallelisme de couches, une direction dont le type se manifeste au milieu des perturbations partielles, et qui reste souvent le meme dans les terrains primitifs et de transition. Cette identite de direction s'observe plus frequemment loin des hautes chaeines alpines tres-elevees, que dans ces chaeines memes, ou les strates se trouvent contournes, redresses et brises. Assez generalement, et ce fait avoit deja frappe M. Palassou ( Essai sur la Min. des Pyrenees, 1781) et meme M. de Saussure ( Voyages dans les Alpes, §. 2302), la direction de couches tres-eloignees des chaeines principales suit la direction de ces chaeines de montagnes. Cette uniformite de parallelisme des couches (du nord-est au sud-ouest) a ete observee dans une grande partie de l'Allemagne septentrionale, au Fichtelgebirge, en Franconie et sur les bords du Rhin; en Belgique; aux Ardennes; dans les Vosges; dans le Cotentin; dans la Tarantaise; dans la majeure partie des Alpes de la Suisse et en Ecosse. Je ne citerai que des geognostes modernes, tres-exerces a ce genre d'observations, et d'autant plus attentifs a la direction et a l'inclinaison des strates, que les assertions que j'avois emises sur un parallelisme ou loxodromisme a de grandes distances avoient excite de vives contestations. "Qu'on vienne, dit M. Boue, examiner en Ecosse, la boussole a la main, la position des masses minerales, et qu'on sache s'arreter aux faits generaux; l'on s'apercevra que la direction des couches est constante et correspond a celle des chaeines du sud-ouest au nord-est, mais que l'inclinaison varie d'apres des circonstances locales." ( Raumer, Geogn. Versuche, p. 41, 44, 48; Id., Fragmente, p. 58, 64. Goldfuss et Bischof, Fichtelg., T. I, p. 189. Omalius d'Halloy, dans le Journal des mines, 1808, p. 463. Brochant, Observ. geol. sur les terrains de transition, p. 14. Escher, dans l'Alpina, T. IV, p. 337; Gruner, dans l'Isis, 1805, Oct., p. 181. Bernoulli, Schweiz. Min., p. 19--24. Ebel, Alpen, T. I, p. 220; T. II, p. 201, 215, 357. Boue, Geol. d'Ecosse, p. 13.) Dans les Pyrenees la direction generale des strates est, d'apres les belles observations de MM. Palassou, Ramond, Charpentier et d'Aubuisson, comme la direction generale de la chaeine, N. 68° O., ou de l'est-sud-est a l'ouest-nord-ouest. ( Ramond, Pyren., T. I, p. 57, T. II, p. 354; d'Aubuisson, Geologie, T. I, p. 342.) Cette meme regularite regne dans le Caucase. Aux Etats-unis de l'Amerique septentrionale, les roches primitives et intermediaires sont dirigees, d'apres M. Maclure, comme la chaeine des Alleghanys, du nord-est au sud-ouest. Les directions du nord au sud ou du nord-nord-est au sud-sud-ouest predominent en Suede et en Finlande. ( Haussmann, dans les Memoires de l'Academie de Munic, 1808, P. I, p. 147. Buch, Lappland, T. I, p. 277, 298. Hisinger, Min. Geogr. von Schweden, p. 465. Engelhardt, Felsgebilde Russlands, p. 18.) Dans les Cordilleres du Mexique on observe un type de direction tresgeneral: les couches qui forment le plateau se dirigent du sud-est au nord-ouest, parallelement a la direction de la chaeine d'Anahuac, tandis que l'axe volcanique (la ligne qui passe, entre les 18° 59' et 19° 12' de latitude, par le Pic d'Orizaba, les deux volcans de la Puebla, le Nevado de Toluca, le Pic de Tancitaro et le volcan de Colima, ligne qui est en meme temps le parallele des plus grandes elevations) se prolonge de l'est a l'ouest, comme une crevasse qui traverse l'isthme mexicain d'une mer a l'autre. ( Essai politique, T. II, p. 253.) Comme nous ignorons les causes primordiales des phenomenes, la philosophie naturelle, dont la geognosie sera un jour une des parties les plus interessantes, doeit s'arreter a la connoissance des lois; et, dans le phenomene qui nous occupe, ces lois peuvent etre soumises a des mesures exactes. Il ne faut point oublier que les lignes de direction des couches (Streichungslinien) rencontrent les meridiens, lorsqu'a de grandes distances ces couches sont, par exemple, uniformement dirigees N. 45° E., comme les elemens d'une ligne loxodromique, sans etre paralleles dans l'espace. La direction des couches anciennes (primitives et de transition) n'est pas un petit phenomene de localite: c'est au contraire un phenomene independant de la direction des chaeines secondaires, de leurs embranchemens et de la sinuosite de leurs vallees; un phenomene dont la cause a agi, d'une maniere uniforme, a de prodigieuses distances, par exemple, dans l'ancien continent, entre les 43° et 57° de latitude, depuis l'Ecosse jusqu'aux confins de l'Asie. Quelle est cette influence apparente des hautes chaeines alpines sur des couches qui, quelquefois, en sont eloignees de plus de cent lieues? J'ai de la peine a croire que la meme catastrophe ait souleve les montagnes et incline les strates dans les plaines, de sorte que la tranche de ces strates, jadis tous horizontaux, aujourd'hui tous inclines de 50° a 60°, et formant la surface du globe, se seroit trouvee a de grandes profondeurs. Les chaeines des montagnes alpines ont-elles ete soulevees? Sont-elles sorties (semblables a cette rangee de cimes volcaniques dans les plaines de Jorullo, entre la ville de Mexico et les cotes de la mer du Sud), sur des crevasses formees parallelement a la direction de couches inclinees deja preexistantes? En tracant le tableau geognostique des formations, j'ai dau m'abstenir de citer a chaque observation la source a laquelle je l'ai puisee. La geognosie positive est une science qui ne date que de la fin du dernier siecle, et il n'est pas facile, je pourrois ajouter, il n'est pas sans danger, de faire l'histoire d'une science si moderne. Quoique dans le cours d'une vie laborieuse j'aie eu le bonheur de voir une plus grande etendue de montagnes qu'aucun autre geognoste, le peu que j'ai observe se perd dans la grande masse des faits que j'entreprends d'exposer ici. Ce que ce Traite des formations renferme d'important, est dau aux efforts reunis de mes contemporains. J'ai voulu presenter aux lecteurs, d'une maniere concise, l'enchaeinement des decouvertes qui ont ete faites: j'ai cru pouvoir ajouter ce qui est seulement probable a ce qui me paroeit entierement constate. Si j'avois atteint le but que je me suis propose, les hommes superieurs qui en Allemagne, en France, en Angleterre, en Suede et en Italie, ont contribue a agrandir l'edifice de la science geognostique, devroient reconnoeitre a chaque page les resultats de leurs travaux. J'ai rejete dans des notes, a la fin du tableau, les citations des faits moins generalement connus, et je n'ai nomme dans le tableau meme que les savans qui ont bien voulu me communiquer des observations et des apercus qu'ils n'ont point encore publies. Les communications les pius nombreuses et les plus interessantes de ce genre sont celles que je dois, depuis quinze ans, a M. Leopold de Buch, avec lequel j'ai eu l'avantage de faire mes premieres etudes mineralogiques sous un grand maeitre, et qui, sur une vaste etendue de terrains (entre les 28° et les 71° de latitude), a recueilli des materiaux precieux pour la geognosie, l'histoire de l'atmosphere et la geographie des vegetaux. J'ai fait usage, dans le cours de mon travail, de plusieurs notes inedites que ce savant a bien voulu me donner sur le tissu cristallin des trachytes que j'ai rapportes des Cordilleres, et sur l'ordre des formations en Suisse, en Angleterre, en Ecosse, en Toscane et dans les environs de Rome. J'ai aussi eu l'avantage de le consulter, pendant les differens sejours qu'il a faits a Paris, sur ce qui me paroissoit douteux dans le gisement des formations. Toutes les observations relatives a la Hongrie sont tirees du Voyage mineralogique de M. Beudant, qui est sur le point de paroeitre, et dans lequel la plupart des questions de gisement sont traitees avec une grande superiorite. Mon compatriote, M. de Charpentier, directeur des salines de Suisse, a bien voulu me communiquer son excellente description des Pyrenees, travail le plus complet que l'on possede sur une grande chaeine de montagnes. Plusieurs renseignemens sur les porphyres d'Europe sont tires d'une notice que j'ai ecrite, pour ainsi dire, sous la dictee de M. Werner, lorsque cet homme celebre est venu, pour quelques jours, de Carlsbad a Vienne (en 1811), pour s'entretenir avec moi sur la constitution geognostique de la Cordillere des Andes et du Mexique. C'est un devoir bien doux a remplir que de donner un temoignage public de reconnoissance a ceux dont la memoire nous est chere. Je n'ai pas tire tout le parti que j'aurois voulu des travaux importans de MM. Maculloch, Jameson, Weawer, Berger, et d'autres membres des Societes geologique et wernerienne, en Angleterre, parce que j'ai eraint de prononcer sur l'identite des formations d'un pays que je ne connois pas, au nord des montagnes du Derbyshire, et qui, dans ce moment, est explore avec tant de zele et de succes. En indiquant pour chaque formation les noms de quelquesuns des lieux ou elles se trouvent (ce que les botanistes appellent les habitations), je n'ai eu aucunement la pretention d'etendre le domaine de la geographie mineralogique: je n'ai voulu que presenter des exemples de gisement bien observes. Les exemples ne sont pas toujours choisis parmi des contrees qui, par les descriptions de geognostes celebres, sont devenues, pour ainsi dire, classiques. Il a fallu nommer quelquefois, dans l'autre hemisphere, des lieux qu'on ne trouve sur aucune de nos cartes. Allemont, Dudley, cap de Gates, Mansfield et OEningue sont plus connus des mineralogistes que les grandes provinces metalliferes d'Antioquia, des Guamalies et de Zacatecas. Pour faciliter ce genre de recherches, j'ai souvent ajoute, entre deux parentheses, des renseignemens geographiques, par exemple, Quindiu (Nouvelle-Grenade), Ticsan (Andes de Quito), Tomependa (plaines de l'Amazone). A cote de l'indication des lieux ou predomine telle ou telle formation, j'ai tache de faire connoeitre l'ordre entier de superposition qui a ete observe avec quelque certitude sur des points tres-eloignes, par exemple, dans les Cordilleres des Andes, en Norwege, en Allemagne, en Angleterre, en Hongrie et au Caucase. Ces descriptions de coupes, qui presentent des materiaux pour la construction, si long-temps desiree, d'un Atlas geognostique, sont, pour ainsi dire, les pieces justificatives d'un tableau general des roches; car la geognosie, lorsqu'elle s'occupe de la serie des formations, est a la geographie mineralogique ce que l'hydrographie comparee est a la topographie des grands fleuves, tracee isolement. C'est de la connoissance intime des influences qu'exercent les inegalites du terrain, la fonte des neiges, les pluies periodiques et les marees, sur la veitesse, sur les sinuosites, sur les etranglemens, sur les bifurcations et sur la forme des embouchures du Danube, du Nil, du Gange, de l'Amazone, que resulte une theorie generale des fleuves, ou, pour mieux dire, un systeme de lois empiriques qui embrassent ce que l'on a trouve de commun et d'analogue dans les phenomenes locaux et partiels. (Voyez quelques elemens de cette hydrographie comparee, dans ma Relat. histor., T. II, p. 517--526 et 657 -- 664.) La geognosie des formations offre aussi des lois empiriques, qui ont ete abstraites d'un grand nombre de cas particuliers. Fondee sur la geographie mineralogique, elle en differe essentiellement, et cette difference entre l'abstraction et l'observation individuelle peut devenir, chez des geognostes qui ne connoissent qu'un seul pays, la cause de quelques jugemens errones sur la precision d'un tableau general des terrains. Les sciences physiques reposent en grande partie sur des inductions; et plus ces inductions deviennent completes, plus aussi les circonstances locales qui accompagnent chaque phenomene, se trouvent exclues de l'enonce des lois generales. L'histoire meme de la geognosie justifie cette assertion. Werner, en creant la science geognostique, a reconnu, avec une perspicacite digne d'admiration, tous les rapports sous lesquels il faut envisager l'independance des formations primitives, de transition et secondaires. Il a indique ce qu'il falloit observer, ce qu'il importoit de savoir: il a prepare, pressenti, pour ainsi dire, une partie des decouvertes dont la geognosie s'est enrichie apres lui, dans des pays qu'il n'a pu visiter. Comme les formations ne suivent pas les variations de latitude et de climats, et que des phenomenes, observes peut-etre pour la premiere fois dans l'Himalaya ou dans les Andes, se retrouvent, et souvent avec l'association de circonstances que l'on croiroit entierement accidentelles, en Allemagne, en Ecosse ou dans les Pyrenees; une tres-petite portion du globe, un terrain de quelques lieues carrees dans lequel la nature a reuni beaucoup de formations, peut (comme un vrai microcosme des philosophes anciens) faire naeitre, dans l'esprit d'un excellent observateur, des idees tres-precises sur les verites fondamentales de la geognosie. En effet, la plupart des premiers apercus de Werner, meme ceux que cet homme illustre s'etoit formes avant l'annee 1790, etoient d'une justesse qui nous frappe encore aujourd'hui. Les savans de tous les pays, meme ceux qui ne montrent aucune predilection pour l'ecole de Freiberg, les ont conserves comme bases des classifications geognostiques. Cependant, ce que l'on savoit en 1790 des terrains primitifs, de transition et secondaires, se fondoit presque entierement sur la Thuringe, sur les montagnes metalliferes de la Saxe et sur celles du Harz, sur une etendue de pays qui n'a pas 75 lieues de longueur. Les memorables travaux de Dolomieu, les descriptions des Alpes de Saussure, furent consultes; mais ils ne purent exercer une grande influence sur les travaux de Werner. Sans doute, Saussure a donne des modeles inimitables d'exactitude dans la topographie de chaque cime, de chaque vallon; mais cet intrepide voyageur, frappe et de la complication que presentent les phenomenes de superposition et du desordre apparent qui regne toujours dans l'interieur des hautes chaeines alpines, sembloit peu tente de se livrer a des idees generales sur la constitution geognostique d'un pays. Dans ce premier age de la science, le type des formations etoit fonde sur un petit nombre d'observations; il ressembloit trop a la description des lieux ou il avoit pris naissance. On prenoit pour des formations independantes les masses minerales qui, dans d'autres pays, ne sont que des couches subordonnees ou accidentelles; on ignoroit l'existence des formations qui jouent un role important dans l'Amerique equatoriale, dans le nord et dans l'ouest de l'Europe; on meconnoissoit l'anciennete relative des porphyres, des syenites et des euphotides; on ne completoit pas l'histoire des couches plus recentes par une determination rigoureuse des corps organiques fossiles qu'elles renferment: on observoit avec une grande precision le gisement des basaltes, des phonolithes (phorphyrschiefer) et des dolerites, qu'on avoit long-temps confondus avec les grünstein trappeens; mais on combattoit jusqu'a la possibilite de leur origine ignee, parce que, dans le pays ou la geognosie moderne s'est formee, on n'etoit entoure que de quelques lambeaux de terrains volcaniques, et que l'on ne pouvoit examiner les rapports qui existent entre les trachytes (trapporphyr), les basaltes, les laves plus modernes, les scories et les ponces. Si le tableau des formations de Werner, malgre les livres qu'il consultoit, malgre la surprenante perspicacite avec laquelle il savoit demeler la verite dans les recits souvent confus des voyageurs, etoit reste incomplet, ce savant ne s'affligeoit pas de voir ses travaux perfectionnes par d'autres mains. Il avoit enseigne le premier l'art de reconnoeitre et d'observer des formations. C'est par l'application de cet art que la geognosie est devenue une science positive. Reconnoissant que sa veritable gloire se fondoit plutot sur la decouverte des principes de la science, sur l'instrument qu'il falloit employer, que sur les resultats obtenus a telle ou telle epoque, Werner ne cherissoit pas moins ceux de ses eleves qui ne partageoient pas son opinion sur l'age relatif et sur l'origine de plusieurs terrains. Ce n'est qu'en soumettant a l'observation une plus grande partie du globe, que le type des formations a pu etre a la fois agrandi et simplifie. On l'a rendu plus conforme a la constitution geognostique des continens consideres sous un point de vue general. Nous connoissons aujourd'hui d'une maniere assez exacte le gisement relatif de beaucoup de formations. 1. ° Dans l'ancien continent: dans les eiles de la Grande-Bretagne, dans le nord de la France, et en Belgique, en Norwege, en Suede et en Finlande, en Allemagne, en Hongrie, en Suisse, dans les Pyrenees, en Lombardie, en Toscane et dans les environs de Rome; en Crimee et au Caucase (lat. 41° -- 71° bor.; long. 40° or. -- 12° oc.). 2. ° Dans le nouveau continent: aux Etats-unis de l'Amerique septentrionale, entre la Virginie et le lac Ontario (lat. 36° -- 43° bor.; long. oc. 78° -- 86°); au Mexique, entre Veracruz, Acapulco et Guanaxuato (lat. 16° 50' -- 21° 1' bor.; long. oc. 98° 29' -- 103°22'); dans l'eile de Cuba (lat. 23° 9' bor.); dans les Provincesunies de Venezuela, entre la cote de Paria, Portocabello, le Haut-Orenoque et San Carlos del Rio Negro; dans les Andes de la Nouvelle-Grenade, de Popayan, de Pasto, de Quito et du Perou; dans la vallee de la Riviere des Amazones et sur les cotes de la mer du Sud (lat. 10° 27' bor. a 12° 2' austr.; long. oc. 66° 15'--82° 16'); au Bresil, entre Rio Janeiro et la limite occidentale de la province de Minas Geraes (lat. 18° -- 23° austr.; long. oc. 45° -- 49°). A mesure que l'on s'eleve a des idees plus generales, le tableau des formations, tout en devenant plus vaste et (nous osons le croire) plus vrai, satisfait moins ceux qui voudroient y trouver fortement prononces les traits individuels, la physionomie locale de leur canton. Mais ces traits individuels, cette physionomie locale, ne peuvent y etre conserves que comme de simples variations d'un type general, comme des modifications particulieres des grandes lois de gisement. Quelque incomplete que soit encore la connoissance de ces lois, c'est deja un grand pas fait dans ce genre de recherches que d'avoir acquis, par les travaux reunis de nos contemporains, la certitude qu'il en existe de constantes et d'immuables au milieu du conflit des perturbations locales. Terrains primitifs. Les plus anciennes formations de roches primitives que l'on a pu soumettre aux observations, sont, dans quelques regions du globe, le granite (une formation dans laquelle le granite n'alterne avec aucune autre roche); dans d'autres regions, le granite-gneis (une formation granitique dans laquelle des couches de granite alternent avec des couches de gneis). On auroit de la peine a nommer un granite que les geognostes regardassent unanimement comme anterieur a toutes les autres roches; mais cette incertitude tient a la nature meme des choses, a l'idee que nous nous formons de l'age relatif et de la superposition des roches. On peut constater par l'observation, que le granite du Saint-Gothard repose sur du micaschiste; que celui de Kielwig, en Norwege, repose sur du thonschiefer. Mais comment demontrer un fait negatif? comment prouver que, sous un granite que l'on appelle de premiere formation, il ne se trouve pas de nouveau du gneis, ou quelque autre roche primitive? En tracant le tableau des connoissances que nous avons acquises sur la superposition des roches, nous devons nous abstenir de prononcer avec assurance sur la premiere assise de l'edifice geognostique. C'est ainsi (car il en est du temps comme de l'espace) qu'a travers de longues migrations des peuples l'histoire ne reconnoeit pas avec certitude quels ont ete les premiers habitans d'une contree. I. Granite primitif. §. 1. Granite qui n'alterne pas avec le gneis. Comme on a recemment eleve des doutes tres-fondes sur l'anciennete de beaucoup de formations de granite, on ne peut designer la premiere des roches primitives que par des caracteres negatifs. Il m'a paru que dans les deux hemispheres, surtout dans le nouveau monde, le granite est d'autant plus ancien, qu'il n'est pas stratifie, qu'il est plus riche en quarz et moins abondant en mica. Dans les hautes chaeines des montagnes (dans les Alpes de la Suisse et dans la Cordillere des Andes, entre Loxa et Zaulaca), le granite, par l'abondance et la direction uniforme des feuillets de mica, tend a devenir lamelleux; tandis que les granites qui percent la terre vegetale dans les plaines, presentent generalement, par leur texture plus uniformement grenue, un contraste plus marque avec le gneis. La grosseur du grain, la regularite de la cristallisation des parties constituantes, et la couleur rouge ou blanche du feldspath, sont des phenomenes tres-dignes d'attention, si l'on considere de grandes masses d'une roche, et si l'on fait abstraction des bancs subordonnes de granite a petits grains que l'on rencontre au milieu d'un granite a gros grains, et vice versa. Ces phenomenes designent l'age relatif d'une formation dans une etendue de terrain plus ou moins circonscrite; mais on ne sauroit en deduire des caracteres generaux, applicables a un continent entier. Dans les Cordilleres, le granite a petits grains et a feldspath blanc et blanc jaunatre m'a paru le plus ancien. L'absence, je ne dis pas de la tourmaline et du titane-rutile, mais de l'amphibole dissemine, de la steatite, des grenats, de l'epidote, de l'actinote, de l'etain, du fer oligiste, remplacant le mica (Gottesgabe dans le Haut- Palatinat); le manque de bancs subordonnes heterogenes (grünstein, calcaire grenu) et de rognons a tres-petits grains et fortement micaces, qui sont de formation contemporaine et semblent comme enchasses dans la masse principale; enfin, le manque de stratification dans les couches inferieures, et la structure non porphyroide, paroissent caracteriser les granites de premiere formation (cotes occidentales de l'Amerique equinoxiale, Cascas, Santa et Guarmay dans le Bas-Perou; rives du Cumbeima pres Ibague; Quilichao et Caloto dans les Andes de la Nouvelle-Grenade). Les granites des cataractes de l'Orenoque et des montagnes de la Parime renferment, comme ceux des Pyrenees et de la Haute-Egypte, quelques couches dans lesquelles on reconnoeit des cristaux isoles d'amphibole: ces roches appartiennent probablement a une epoque un peu plus recente que le granite du Bas-Perou. Quoique les granites les plus anciens n'offrent generalement pas de bancs subordonnes de calcaire primitif, la chaux commence cependant deja a se montrer, au sein des montagnes primitives (je n'ose dire au premier age du monde), dans le feldspath et peut-etre dans les tourmalines. Plus tard cette quantite de chaux augmente par l'addition de l'amphibole dans les couches syenitiques qui caracterisent les granites les plus modernes. Granite et Gneis primitifs. §. 2. Cette formation, si bien caracterisee par M. de Raumer, offre des couches de granite et de gneis tres-distinctes, a peu pres contemporaines et alternant les unes avec les autres. Elle repose quelquefois (Riesengebirge) immediatement sur la formation precedente; d'autres fois (au sud-est de Riobamba, dans le royaume de Quito) elle est la plus ancienne des roches visibles. Ce retour periodique de couches heterogenes se retrouve surtout dans les formations de transition, par exemple, dans celles de porphyre et syenite, de syenite et grünstein. Je pense qu'il faut distinguer de la formation de granite et gneis, et les granites dont les couches passent souvent et insensiblement au gneis, comme le granite du littoral de Venezuela, et les gneis qui passent au granite (pente meridionale de la Jungfrau et du Titlis). Les bancs subordonnes au granite et gneis sont: les micaschistes, qui, a leur tour, renferment du calcaire grenu; les schistes amphiboliques et chloriteux; le weisstein. Granite stannifere. §. 3. Generalement a parties constituantes tres-desagregees, le feldspath passant au caolin (Carlsbad, chemin d'Eibenstock a Johann-Georgenstadt; et, d'apres M. de Bonnard, probablement aussi les granites du departement de la Haute- Vienne). On reconnoeitra peut-etre dans la suite que plusieurs de ces roches stanniferes sont d'un age plus recent encore, et qu'il faudroit les placer parmi les granites posterieurs au gneis et anterieurs au micaschiste. Des caracteres de nouveaute semblent se retrouver meme dans les granites du Fichtelgebirge, en Franconie, qui non-seulement sont tresregulierement stratifies, mais qui contiennent aussi des bancs d'urgrünstein (diabase primitive, paterlestein). Je ne connois point la formation alpine de granite stannifere dans les Andes: le granite qui constitue les sommets des Cordilleres, est presque toujours recouvert de formations de porphyre de transition et de trachyte. Weisstein avec Serpentine. §. 4. Le weisstein (eurite), dans lequel domine le feldspath compacte (partie nord-ouest de l'Erzgebirge), repose sur le granite ancien. Il est recouvert de gneis, quelquefois de micaschiste (Hartha), ou d'un schiste primitif auquel (Hermsdorf, Döbeln) le weisstein paroeit passer insensiblement. Bancs subordonnes: granite tantot a grains tres-gros (Penig), tantot a petits grains, passant souvent au weisstein, et renfermant de la lepidolithe et de la parenthine lamelleuse; serpentine (Waldheim). Le weisstein qui enchasse quelquefois des grenats et de la cyanite, est en Saxe, d'apres les observations de MM. Pusch, Raumer et Mohs, une formation independante, anterieure au gneis, et non un banc subordonne; en Silesie (Engelsberg pres Zobten, et Weiseritz pres Schweidnitz), il ne forme que des couches dans le granite et le gneis primitifs. Ce phenomene n'a rien qui puisse etonner le geognoste. Les micaschistes, les gneis et les porphyres se trouvent a la fois comme roches independantes et comme bancs subordonnes. La serpentine de Buenavista dans les montagnes de l'Higuerote, a l'ouest de Caracas, appartient proprement au gneis talqueux; mais il paroeit que, dans le meme groupe de montagnes, il y a aussi de la serpentine liee a un weisstein qui est superpose a la formation de granite et gneis. La serpentine du weisstein est la plus ancienne des roches d'euphotides a tres-petits grains, roches qui passent, pour ainsi dire, a travers toutes les formations suivantes jusqu'a la limite superieure des terrains de transition. II. Gneis primitif. §. 5. Nous distinguons cette formation de gneis (Freiberg; Lyon, plateau entre Autun et la montagne d'Aussi; Arnsberg dans le Riesengebirge, Lödingen en Norwege, Grampians en Ecosse), qui renferme des bancs subordonnes de micaschiste, de la formation, egalement importante, de gneis et micaschiste, dans laquelle des couches de gneis alternent avec des couches de micaschiste. Le gneis est, d'apres MM. de Buch et Haussmann, la roche dominante en Scandinavie, ou le granite ancien (anterieur au gneis) n'est presque nulle part visible. Les bancs subordonnes du gneis sont tresvaries et frequens; ils le sont cependant beaucoup moins lorsque le gneis ne passe pas au micachiste. Nous ne nommerons ici que les bancs les plus remarquables: quarz souvent grenatifere; feldspath plus ou moins decompose et depourvu de potasse; porphyre, generalement rougeatre, a base petrosiliceuse, renfermant du feldspath, du quarz et du mica (lagerporphyr de la Halsbrücke, d'Ober-Frauendorf, de Liebstadt); calcaire grenu assez rarement (route du Simplom, mine du Kurprinz pres de Freiberg); grenat commun, mele de calcaire grenu, de blende et de fer oxidule (Schwarzenberg); micaschiste (Bergen en Norwege); syenite (Burkersdorf en Silesie); granite a feldspath decompose, mais non stannifere; serpentine (ophyolithe) formant, d'apres M. Cordier, une couche d'une etendue immense dans les departemens de la Haute-Vienne, du Lot et de l'Aveyron; amphibolite schistoide ou hornblendschiefer; grünstein, mele de fer magnetique (Taberg pres Jonköping), de zircon, de zoisite et de menakan (Priockterhalt, en Carinthie); fer magnetique en couches de 20 a 30 toises d'epaisseur, souvent mele de calcaire grenu, d'ichthyophtalme, de spodumene, de tremolite, d'amianthe, d'actinote et de bitume (Danemora, Gellivara et Kinsivara, en Suede et en Laponie); pegmatite (Loch-Läggan en Ecosse); gneis renfermant des masses anguleuses de gneis d'une texture differente de celle de la roche principale (Rostenberg, en Norwege). Ce dernier phenomene (effet d'une cristallisation contemporaine?) est beaucoup plus analogue aux granites du Greiffenstein en Saxe, et du Pic Quairat dans les Pyrenees, qu'au gneis de transition renfermant les poudingues de la Valorsine. La grande formation de gneis primitif, tresriche en minerais d'argent et d'or, en Allemagne, dans quelques parties de la France, en Grece et dans l'Asie mineure, a ete designee long-temps comme la roche la plus argentifere du globe. On sait aujourd'hui, d'apres des recherches faites dans les deux Ameriques et en Hongrie, que la grande masse des metaux precieux qui circulent dans les deux continens, est due a des formations de beaucoup posterieures au gneis et a toutes les autres formations primitives; qu'elle provient de roches de transition, de porphyres syenitiques et meme de trachytes. Le gneis peu metallifere de la partie equinoxiale du nouveau monde se montre sur une plus grande etendue de terrain dans les montagnes qui courent de l'est a l'ouest (chaeine du littoral de Caracas, cap Codera, et eiles du lac de Tacarigua; Orenoque, Sierra de la Parime) et dans les regions basses eloignees de la chaeine des Andes (a l'est des montagnes du Bresil), que dans la crete elevee de cette chaeine meme. Je n'ai pas vu le gneis (a la Silla de Caracas et au passage des Andes de Quindiu) a plus de 1300 et 1400 toises de hauteur au-dessus du niveau de l'ocean. Sur le dos des Cordilleres, entre Ibague et Carthago (Nouvelle-Grenade ou Cundinamarca), comme au Paramo de Chulucanas, en descendant vers l'Amazone, un granite de nouvelle formation recouvre le gneis a 1800 toises de hauteur. Si dans les montagnes de l'Europe le gneis, le micaschiste et un granite de seconde formation constituent les plus hautes cimes; dans les Andes, au contraire, les sommets les plus eleves ne presentent que d'enormes accumulations de roches trachytiques. En suivant une meme chaeine, un meme alignement de montagnes, on voit les basses regions de granitegneis et de gneis-micaschiste (province d'Oaxaca dans la Nouvelle-Espagne, ou le gneis est aurifere; groupes primitifs de Quindiu; Almaguer, Guamote, au sud du Chimborazo; Saraguru et Loxa, dans les Andes du Perou) alterner avec les regions elevees (2000 a 3300 toises) de trachytes. Ces derniers terrains, produits ou modifies par le feu, recouvrent sans doute et quelquefois immediatement, sans que des formations porphyriques de transition soient interposees, le granite et le gneis; cependant, la ou j'ai pu voir les trachytes du royaume de Quito (volcan de Tunguragua, ravin du Rio- Puela pres de Penipe) reposer sur un schiste micace verdatre rempli de grenats et recouvrant a son tour un granite un peu syenitique avec quarz et mica (noir!), cette superposition n'a aussi lieu qu'a la hauteur peu considerable de 1240 toises. Il resulte en general de mon nivellement barometrique des Cordilleres, que dans toute cette region des tropiques les granites et les gneis anciens, qu'il ne faut pas confondre avec des roches syenitiques et granitiques de transition, ne s'elevent guere au-dessus de la hauteur qu'atteignent les sommets des Pyrenees. Tous les massifs superposes aux roches primitives, qui depassent la limite des neiges perpetuelles (2300--2460 toises), et qui donnent aux Cordilleres leur caractere de grandeur et de majeste, ne sont generalement dus ni a des formations primitives ni a des roches calcaires (il n'y a que le calcaire alpin des plateaux de Gualgayoc et de Guancavelica qui se trouve a 2100 et 2300 toises), mais a des porphyres trachytiques, a des dolerites et des phonolithes. (Nous ignorons encore de quelles roches sont composes les sommets de l'Himalaya, les extremites de ces pics recemment mesures par M. Webb.) Le gneis des Cordilleres abonde bien plus que le micaschiste en couches subordonnees de calcaire grenu (micace et rempli de pyrites). Aussi, dans l'Amerique equinoxiale, comme a l'extremite la plus boreale de l'Europe et dans les Pyrenees, le grenat est le plus commun dans le gneis, et cette derniere roche ne cesse generalement de contenir des grenats que lorsqu'elle se rapproche du schiste micace (montagne d'Avila, pres de Caracas). Un veritable gneis, depourvu de grenats, se montre cependant a l'ouest de Mariquita, entre Rio Quamo et les mines de S. Ana (Nouvelle-Grenade). Au Bresil, d'apres l'observation de M. d'Eschwege, l'etain (zinnstein) est dissemine, non dans le granite, mais dans le gneis (bords du Rio- Paraopeba pres de Villa-Ricca). Entre les deux grandes formations de gneis et de micaschiste primitifs, nous placerons plusieurs formations paralleles: Gneis et Micaschiste; Granite posterieur au Gneis et anterieur au Micaschiste; Syenite primitive? Serpentine primitive? Calcaire grenu. Deux de ces formations sont peut-etre aussi douteuses que l'est le porphyre primitif, considere comme formation independante. Gneis et Micaschiste. §. 6. Des couches de gneis alternent avec des couches de micaschiste, de meme que le gneis, dans la formation §. 2, alterne avec le granite. Ce ne sont pas des roches qui passent l'une a l'autre, mais des couches alternantes, tres-nettement tranchees (Neisbach et Jauersberg en Silesie; Waltersdorf pres Scheibenberg en Saxe). Dans les Cordilleres de l'Amerique, et peut-etre dans la plupart des grandes chaeines de montagnes de l'ancien continent, comme l'illustre Dolomieu me l'avoit fait observer en Suisse des l'annee 1795, les formations mixtes ou d'alternance periodique, de gneis et granite, et de gneis et micaschiste, sont beaucoup plus frequentes que les formations simples, de granite, de gneis et de micaschiste. La formation independante de gneis-micaschiste repose tantot sur la formation de gneiss (§. 5), tantot immediatement sur le granite le plus ancien (§. 1). Dans ce dernier cas elle doit etre consideree comme une formation parallele au gneis. Bancs subordonnes: calcaire grenu, schistes amphiboliques, grünstein, serpentine, et thonschiefer avec actinote. Ces bancs subordonnes se repetent plusieurs fois; car, dans toutes les formations d'alternance periodique, soit primitives, soit de transition (les granites et gneis, les gneis et micaschistes, les syenites et grünstein, les porphyres et syenites, les porphyres et grauwacke, les calcaires noirs et schistes de transition), le retour periodique des masses s'etend jusqu'aux bancs subordonnes. Cette grande loi geologique se manifeste dans toute la Cordillere des Andes, surtout dans les montagnes situees au sud et au sud-est du volcan de Tunguragua, au Condorasto, au Cuvillan et au Paramo del Hatillo, ou (ce qui est tres-rare dans cette region) le gneis-micaschiste s'eleve a plus de 2000 toises de hauteur, et renferme des filons d'argent jadis tres-celebres (weissgültigerz et sprödglaserz, argent blanc et argent vitreux aigre). Ces gneismicaschistes metalliferes du Condorasto et de Pomallacta se cachent vers le sud sous les formations de porphyres trachytiques des Andes de l'Assuay; ils reparoissent (a 1700 toises de hauteur) entre les ruines du palais de l'Inca (Ingapilca) et la ferme de Turche, et ils se cachent de nouveau sous les gres de Cuenca. Les forets de Quinquina, a l'ouest de Loxa, couvrent aussi des montagnes de gneis alternant avec du micaschiste. Dans le passage des Andes de Quindiu, entre les bassins du Rio Cauca et du Rio Magdalena, la formation de gneis-micaschiste repose (au-dessus de la station de la Palmilla) immediatement sur le granite ancien. Elle atteint une enorme epaisseur, en s'elevant vers le Paramo de San-Juan. Les couches de micaschistes alternant avec le gneis y sont toujours depourvues de grenats; elles offrent, au Valle del Moral (a 1065 toises de hauteur), des filons remplis de soufre, exhalant des vapeurs sulfureuses dont la temperature s'eleve a 48° cent., l'air atmospherique etant a 20°. Ce phenomene est d'autant plus remarquable qu'au sud de l'equateur, dans la celebre montagne de soufre de Ticsan, j'ai trouve le soufre dans du quarz, subordonne comme couche au micaschiste primitif. Les couches de gneis de Quindiu contiennent des grenats dissemines et des bancs de caolin decompose. Dans la chaeine cotiere de Caracas, entre Turiamo et Villa de Cura, les formations de granite-gneis et de gneis-micaschiste occupent, dans une direction perpendiculaire a l'axe de la chaeine, un terrain de dix lieues de largeur; le gneis-micaschiste se cache vers les Llanos de Venezuela sous des schistes verts de transition. Pres de la Guayra, au cap Blanc, cette formation renferme des bancs subordonnes de chlorite schisteuse (avec grenats et sable magnetique), de hornblendschiefer et de grünstein mele de quarz et de pyrites. Sur les cotes du Bresil, ou plusieurs chaeines primitives se dirigent parallelement aux Andes du Perou et du Chili dans le sens d'un meridien, des couches de granite, de gneis et de micaschiste constituent une seule formation et alternent en series periodiques (Ilha Grande, au sud de Rio-Janeiro, pres Villa d'Angra dos Reis, selon M. d'Eschwege). Les trois roches y sont contemporaines, comme les syenites qui alternent periodiquement, soit avec les thonschiefer, soit avec les grünstein de transition. Granites posterieurs au Gneis, anterieurs au Micaschiste primitif. §. 7. Je reunis ici plusieurs formations de granite a peu pres paralleles, placees entre le gneis et le micaschiste, telles que le granite stannifere (hyalomicte, graisen) de Zinnwald et d'Altenberg, en Saxe, qui paroeit reposer sur le gneis et qui abonde en tourmalines noires; la plupart des pegmatites ou granites graphiques (schriftgranite), qui renferment de la lepidolite (Rozena, en Moravie); les granites avec epidote; les granites a bancs subordonnes de weisstein ou eurite (Reichenstein en Silesie); les granites avec steatite et chlorite, contenant souvent de l'amphibole disseminee, et prenant l'aspect d'une syenite ou d'un schiste chloriteux (protogynes du Mont-Blanc et de presque toute la chaeine des Alpes entre le Mont-Cenis et le Saint-Gothard; probablement aussi la roche du Rehberg au Harz); les granites des Pyrenees, si bien etudies par M. de Charpentier, et renfermant de nombreux bancs de gneis, de micaschiste et de calcaire grenu. Peut-etre les granites d'Altenberg appartiennent-ils (c'est l'opinion de M. Beudant) aux assises inferieures de porphyres de transition; peut-etre les granites des Pyrenees, qui enchassent des amas d'urgrünstein (diabase primitive) sont-ils meme posterieurs a la grande formation de micaschiste (§. 11), comme aussi les granites stanniferes du Fichtelberg, qui renferment du grünstein (Ochsenkopf, Schneeberg, en Franconie), et que nous avons indiques provisoirement au §. 3. Le meme doute me reste sur beaucoup de granites qui abondent en filons argentiferes, sur tous les granites avec grenats, et sur les granites porphyroides (a tres-grands cristaux de feldspath rouge et blanc), qui sont souvent aussi regulierement stratifies que l'est le calcaire secondaire. Je n'ai point voulu citer ici les amas d'etain de Geyer et de Schlackenwald, parce que les granites qui les renferment, ne sont que des couches dans le gneis et le micaschiste: ce ne sont pas de veritables roches, des formations independantes, comme les granites de Carlsbad et du Fichtelgebirge. Dans l'Amerique equinoxiale on peut rapporter avec quelque vraisemblance a la formation de granite posterieure au gneis et anterieure au micaschiste, les granites de la pente occidentale des Cordilleres du Mexique (plateau du Papagallo et de la Moxonera), qui sont ou porphyroides, ou divises en boules a couches concentriques. Ils enchassent des bancs syenitiques lies a des filons de basanite (urgrünstein compacte). Je les ai vus regulierement stratifies en couches de 7 a 8 pouces d'epaisseur, et affectant, non une meme inclinaison, mais une meme direction avec les couches du porphyre de transition et du calcaire alpin superposees. On ne connoeit point, il est vrai, les roches que recouvre cette formation mexicaine de granite; c'est celle sur laquelle toutes les autres roches du Mexique sont placees; mais les caracteres de composition et de structure qu'elle offre en grand, et son analogie avec d'autres granites stratifies des hautes Andes du Perou, me font croire qu'elle est d'un age plus recent que la formation §. 1. Au granite anterieur au micaschiste, mais posterieur au gneis, appartient plus positivement celui de la Garita del Paramo, au pied du volcan eteint de Tolima (Andes de Quindiu); celui de la Silla de Caracas; les granites tres-regulierement stratifies (sans passer au gneiss) de Las Trincheras dans la chaeine cotiere de Venezuela; les granites du groupe etendu des montagnes de la Parime, qui sont ou regulierement stratifies (detroit du Baraguan, vallee du Bas-Orenoque), ou passant a la pegmatite (Esmeralda et confluent de l'Ucamu, Haut-Orenoque), ou amphiboliques (cataractes d'Atures). Dans ce vaste groupe granitifere de la Sierra Parime, qui separe le bassin du Bas- Orenoque de celui de l'Amazone, se repetent quelques phenomenes de la Finlande et de la Norwege: aucune autre masse minerale n'y paroeit au jour que la roche granitique. La ou j'ai cotoye la Sierra Parime au nord, a l'ouest et au sud, j'ai observe, a quelques petites masses de gres pres, une absence totale de formations secondaires, meme de roches posterieures a un granite de nouvelle formation. Ce granite, et le gneis qui le supporte, forment, la ou de petites plaines separent les montagnes entre elles, au milieu des forets et d'une vegetation vigoureuse, des bancs de rochers nus, depourvus de terreau, ayant plus de 250,000 toises carrees, et s'elevant a peine de trois a quatre pouces au-dessus du sol environnant. Dans l'hemisphere meridional je peux citer comme granites de nouvelle formation, la roche du Pareton (pente orientale des Andes du Perou, entre Guancabamba et la riviere des Amazones), ou le granite steatiteux passe a la protogyne; le granite du Paramo de Pata grande et de Nunaguacu, stratifie et depourvu d'amphibole; la roche de Yanta, stratifiee comme le granite de l'Ochsenkopf en Franconie, se cachant sous le micaschiste de Gualtaquillo et d'Aipata, et renfermant des cristaux dissemines d'amphibole, sans passer a la vraie syenite (Cordilleres de Gueringa, a l'ouest de Guancabamba). On voit par ces exemples que, dans les Andes comme dans les Alpes, surtout a des hauteurs considerables, une roche granitique couvre le gneis primitif. On se demande si les grünstein primitifs, qui forment des couches dans les formations §§. 3, 5, 6, 7, renferment quelquefois, comme le pretendent plusieurs geognostes, non-seulement de l'amphibole mele au feldspath compacte, mais aussi du pyroxene. M. de Charpentier a vu cette derniere substance en grandes masses dans le calcaire primitif des Pyrenees. Il y a aussi du pyroxene-coccolithe dans l'urgrünstein du lac Champlain; je n'ai vu de veritables pyroxenes identiques avec ceux des trachytes et de quelques porphyres de transition de Quito que dans les grünstein et mandelstein de transition de Parapara (montagnes de Venezuela). Syenite primitive? §. 8. La plupart des syenites de l'ancien et du nouveau continent, que l'on consideroit autrefois comme des roches independantes et de formation primitive, sont ou des granites avec amphibole, c'est-a-dire des couches subordonnees aux granites §§. 7 et 11 (Syene, non Philae, ou les premieres cataractes memes de la Haute-Egypte, qui sont dans le gneis; Atures ou cataractes de l'Orenoque; vallee de Macara et Gualtaquillo, a la pente orientale des Andes du Perou), ou des formations de transition (Mont Sinai, d'apres les interessantes observations de M. Roziere; vallee de Plauen, pres de Dresde; Guanaxuato, au Mexique), intimement liees aux porphyres, au grünstein et au thonschiefer de transition. Quelques veritables syenites ne me paroissent cependant offrir aucune trace de cette liaison; elles constituent peut-etre des formations primitives independantes: telles sont la syenite (beaucoup de feldspath lamellaire rougeatre, peu d'amphibole, presque pas de quarz, pas de mica, pas de fer titane) du Cerro Munchique (Cordillere centrale des Andes du Popayan, a l'est de la metairie du Cascabel), superposee au gneis, et en partie (?) recouverte de micaschiste primitif; la syenite du Paramo de Yamoca (pente orientale des Andes du Perou, pres des villages indiens de Colascy et de Chontaly), placee sur le granite de Zaulaca et recouverte par le schiste du lac de Hacatacumba. Comme ce schiste, a son tour, supporte un porphyre vert de transition, et que ce porphyre supporte un calcaire gris-noiratre, mais coquillier (San-Felipe, province de Jaen de Bracamoros), il reste tres-douteux si la syenite de Yamoca et le schiste de Hacatacumba ne sont pas aussi des roches de transition, et par consequent plus neuves que les syenites du Cerro Munchique dans les Andes de Popayan. Les syenites composees de feldspath blanc et d'amphibole vert du pied du Mont-Blanc (Cormayeux), et les syenites de Biela, liees a des euphotides, sont-elles primitives? Serpentine primitive? §. 9. Les grandes formations d'euphotide (gabbro ou roches serpentineuses) sont posterieures au thonschiefer primitif, et appartiennent en partie deja aux roches de transition. La petite formation que nous designons ici, est analogue a celle de Zoeblitz en Saxe: elle repose sur du gneis et n'est recouverte par aucune autre roche. Dans l'Amerique meridionale la serpentine (sans diallage metalloide, mais avec grenats) des montagnes de l'Higuerote (pres San-Pedro, entre la ville de Caracas et les vallees d'Aragua) paroeit analogue a celle de Saxe. Elle repose sur le gneis talqueux de Buenavista, qui passe, ce qui est assez rare dans ces contrees, a un micaschiste grenatifere. Cependant, comme on ne voit aucune roche superposee a ces serpentines, leur age reste un peu douteux. Ce qui me paroeit prouver l'anciennete des serpentines de l'Higuerote, c'est qu'avant de paroeitre comme formation particuliere et independante, elles se montrent comme des couches subordonnees au gneis-micaschiste, a peu pres comme les serpentines de la vallee d'Aoste. Calcaire primitif. §. 10. Existe-t-il une formation independante de calcaire grenu parmi les roches primitives? Ou tous ces calcaires grenus, comme on l'a admis assez generalement jusqu'ici, ne sont-ils que des bancs subordonnes au gneis, au micaschiste, aux granites de nouvelle formation, et au thonschiefer? Dans les Pyrenees (vallee de Vicdessos) M. de Charpentier regarde le calcaire grenu, quelquefois noiratre et mele de graphite, et renfermant de grandes masses de pyroxene (lherzolite, augitfels) et des couches de grünstein, comme une formation etendue et independante. Cette autorite est sans doute de beaucoup de poids. Au sud de l'equateur, sur le plateau de Quito (au Cebollar et aux bords du Rio Machangara, pres Cuenca; Portete, dans le Llano de Tarqui), on trouve place sur le micaschiste (de Guasunto et du Cannar) un calcaire blanc, a gros grain, ressemblant au plus beau marbre de Carare, et alternant avec des couches calcaires presque compactes, rubanees et tellement translucides qu'on s'en sert dans les couvens et les chapelles en guise de glaces pour les fenetres. J'ai regarde long-temps ce calcaire grenu de Cuenca, depourvu de petrifications, comme une formation primitive et independante; mais il n'est couvert que de gres rouge de Nabon, et une formation tres-analogue (Tolonta pres de Chillo), placee au milieu d'un terrain de trachytes et de porphyres de transition, rend tres-douteux l'age de la formation de Cuenca. Les bancs de calcaires primitifs, subordonnes aux roches de granite-gneis, sont beaucoup plus rares dans l'Amerique equinoxiale que dans les Pyrenees et les Alpes. En examinant avec soin les granites-gneis de la Parime, entre les 2.e et 8.e degres de latitude boreale, je n'ai pas vu un seul de ces bancs. III. Micaschiste primitif. §. 11. Le micaschiste (schiste micace, glimmerschiefer) repose le plus souvent sur le gneis, d'autres fois immediatement sur le granite (§. 1), avec lequel il commence d'abord a alterner (Schneeberg, en Saxe; Minas Geraes, au Bresil) avant de se montrer comme une formation independante. Il se distingue du gneis, lorsque les deux roches sont nettement tranchees (ce qui est bien plus rare dans la haute chaeine des Alpes et des Cordilleres du Perou que dans les plaines), par l'agregation du mica, qui, dans le micaschiste, offre une surface continue. De toutes les formations primitives c'est celle qui, dans l'Europe centrale, est la plus developpee, et qui presente la plus grande variete de bancs subordonnes; l'heterogeneite des couches augmente a mesure que l'on s'eloigne du granite. Les micaschistes des Pyrenees, que l'on considere comme bien decidement primitifs, renferment souvent de la chiastolithe, et cette substance penetre quelquefois jusque dans les bancs de thonschiefer et de calcaire grenu intercales. Couches subordonnees au micaschiste: schiste chloritique (chloritschiefer avec grenats); melange entrelace de micaschiste et de calcaire grenu (Splügen, entre Glaris et Chiavenna; pic de Midi de Tarbes, dans les Pyrenees); thonschiefer; calcaire grenu et dolomie avec tremolite (grammatite), epidote, talc, tourmaline, lepidolithe, amphibole, fer magnetique et corindon; calcaire grenu renfermant du quarz (Pyrenees); dolomie melee de gypse primitif (passage du Splügen dans les Alpes); quarz schistoide et micace, gestellstein; grünstein et grünsteinschiefer, diabase grenue et schisteuse (Montanna de Avila, Cabo blanco pres Caracas); feldspath compacte vert-noiratre (dichter grünstein); pierre ollaire, topfstein (Ursern); schiste talqueux (talkschiefer) avec grenats, cyanite, tourmaline et actinote; serpentine pure (Sillthal dans le Tyrol); serpentine melee de calcaire grenu, verde antico (montagnes de Caramanie; Reichenstein, Rörsdorf et Rothzeche, en Silesie); schiste amphibolique (Saint-Pierre, au sud du grand Saint- Bernard); amphibole commune en grandes masses (Schönberg, en Tyrol); syenite (Mittelwald, dans le Tyrol); couches de grenat avec fer oxidule (Braunsberg pres Freiberg, Frauenberg pres Ehrenfriedrichsdorf, en Saxe); grenat avec pyroxene-omphacite et amphibole (Gefrees et Schwarzenbach, pays de Bareuth; Saualpe en Carinthie); grenat actinote et cyanite; fluate de chaux (Meffersdorf); bancs de micaschiste renfermant des masses de gneis, peut-etre d'une formation contemporaine (Toffle, en Norwege); bancs de plusieurs pieds d'epaisseur, composes d'un melange intime de feldspath compacte, de quarz et de mica (Kühlstad pres Drontheim, en Norwege); micaschiste avec mica noir et carbure (Sneehättan, en Norwege; Huffiner, dans le Valais). Je ne cite pas le gypse du Val Canaria pres d'Airolo, que nous avons cru, M. Freiesleben et moi, en 1795, etre de formation primitive intercalee au micaschiste, mais que MM. Brochant et Beudant (qui les ont etudies tous deux separement avec soin) ont reconnu pour un gypse de transition superpose au micaschiste. Le micaschiste renferme souvent de l'amphibole dissemine dans toute sa masse (Salzbourg; Saint- Gothard; Oberwiesenthal en Saxe; Sommerleiten pres Bareuth). Les emeraudes de Sabara, dans la Haute-Egypte, retrouvees par l'intrepide voyageur M. Cailliaud, et celles de Salzbourg, sont enchassees dans la masse du micaschiste meme, comme le sont, dans les deux continens, le grenat, la staurotide (Saint-Gothard; Sierra Nevada de Merida) et la cyanite (eiles Shetland; Maniquarez, au nord de Cumana). Les emeraudes de Muzo, dans la Nouvelle-Grenade, m'ont paru former une couche dans un hornblendschiefer qui est subordonne au micaschiste. Si l'on ne considere les formations que sous le rapport de leur volume et de leur masse, on doit admettre que le micaschiste, dans les chaeines des montagnes de l'Europe, joue un role presque aussi important que le font, au Mexique et dans les Andes de Quito et du Perou, les porphyres de transition et les trachytes. Les masses continues de micaschiste les plus considerables que j'aie vues dans l'Amerique equinoxiale, sont celles de la Cordillere du littoral de Venezuela, ou le granite-gneis domine depuis le cap Codera jusqu'a la Punta-Tucacas (a l'ouest de Portocabello), tandis que la meme Cordillere est composee de micaschiste et meme d'un micaschiste grenatifere vers l'est, dans les montagnes du Macanao de l'eile de la Marguerite et dans toute la peninsule d'Araya. A l'ouest de Chuparipari, cette derniere roche offre de petites couches de quarz avec cyanite et titane rutile. Pres de Caracas le calcaire grenu forme des couches, non dans le micaschiste, mais dans le gneis; au contraire, dans les montagnes du Tuy, c'est un micaschiste passant (comme dans la vallee de Capaya) au schiste talqueux, qui renferme des bancs de calcaire primitif et de petites couches de zeichenschiefer (ampelite graphique). Au sud de l'Orenoque, dans le groupe des montagnes de la Parime, sur 180 lieues de longueur, je n'ai pas vu de veritable micaschiste superpose au granite-gneis. Cette derniere formation semble seule couvrir cette vaste contree; mais le gneis y passe quelquefois au micaschiste: il rend resplendissans, au lever et au coucher du soleil, les flancs de plusieurs montagnes elevees (pic Calitamini, Cerro Ucucuamo, entre les sources de l'Essequebo et du Rio-Branco), et a contribue par la au mythe du Dorado et des richesses de la Guyane espagnole. Dans les Cordilleres des Andes, la formation independante de micaschiste m'a paru moins rare au nord qu'au sud de l'equateur. Au Nevado de Quindiu (Nouvelle-Grenade) elle atteint une epaisseur de plus de 600 toises. En avancant de la par Quito et Loxa vers les Andes du Perou, on voit sortir le micaschiste sous les trachytes et porphyres de transition de Popayan (au sud des volcans de Sotara et de Purace); plus loin cette roche reste visible sur differens points, depuis l'Alto del Roble (arete qui partage les eaux entre l'ocean Pacifique et la mer des Antilles) jusqu'a la vallee de Quilquase; elle se cache de nouveau par intervalles sous des porphyres trachytiques, a base de phonolithe, et reparoeit plusieurs fois, par exemple, entre Almaguer et le Rio Yacanacatu, entre Voisaco et le volcan de Pasto, entre Gansce et le volcan de Tunguragua, entre Guamote et Ticsan pres d'Alausi (ou le micaschiste offre une immense couche de quarz renfermant du soufre, et une autre couche (?) de gypse primitif), entre Guasunto et Popallacta; entre le Cannar et Burgay, a la partie meridionale du groupe trachytique de l'Assuay; enfin, entre Loxa et Gonzanama. C'est pres de ce dernier lieu que, dans le ravin de Vinayacu, on trouve une couche de graphite lamellaire dans un micaschiste qui est certainement primitif. En descendant de Loxa par le Paramo de Yamoca, vers l'Amazone, entre les 4° et les 51/2° de latitude australe, un granite de seconde formation est recouvert de micaschiste dans la vallee de Pomahuaca; mais, en general, dans cette partie des Cordilleres ce n'est pas le micaschiste, mais la syenite et le thonschiefer primitifs qui ont pris un grand developpement, partout ou le sol n'est pas couvert de porphyres et de trachytes. Dans la Nouvelle-Espagne, le micaschiste abonde (mines d'or de Rio San-Antonio) dans la province d'Oaxaca: mais plus au nord (16--18° lat. bor.), sur la pente orientale des Cordilleres entre Acapulco et Sumpango, le granite n'est pas meme recouvert de gneis; il l'est immediatement de calcaire alpin (Alto del Peregrino) et de porphyres de transition (la Moxonera, Acaguisotla). Cependant un micaschiste, depourvu de grenats et passant quelquefois au thonschiefer, se montre dans les riches mines de Tehuilotepec et de Tasco (entre Chilpansingo et Mexico) sous le calcaire alpin. Des filons d'argent rouge penetrent de l'une de ces roches dans l'autre, malgre la grande distance qu'on doit admettre entre l'age de leur formation. Je ne connois dans les Andes aucun exemple d'une couche de porphyre dans le micaschiste, ou d'un passage de cette derniere roche a une roche porphyroide; passage qui, selon l'importante observation de M. de Buch, a lieu dans les Alpes du Splügen, entre le village de ce nom et la vallee de Schams. Les terrains primitifs dans lesquels abonde le micaschiste, sont ceux qui offrent aux oryctognostes la plus grande variete de substances cristallisees. Ces roches, si abondantes en potasse, rivalisent sous ce rapport avec les mandelstein (amygdaloides) de transition et plusieurs roches volcaniques. Il est tres-rare que l'on observe dans la nature un developpement a peu pres egal des trois formations de gneis, de micaschiste et de thonschiefer, et lorsque ce developpement a eu lieu, c'est plutot dans des montagnes de peu d'elevation et la ou elles se perdent vers les plaines, que dans les hautes chaeines des Andes, des Alpes, des Pyrenees et de la Norwege. Nulle part, peut-etre, la suppression totale des formations micacees ou schisteuses n'est plus frequente que dans les Cordilleres du Mexique et de l'Amerique meridionale. On y voit la serie des roches primitives s'arreter brusquement, soit au granitegneis et a une syenite que je crois primitive, soit au gneismicaschiste. Ce phenomene a meme lieu la ou il y a (Cordillere de la Parime) absence de trachytes et de tout phenomene volcanique. Granite posterieur au Micaschiste, anterieur au Thonschiefer. §. 12. Un granite de nouvelle formation reposant sur le micaschiste, auquel il appartient geognostiquement (Saint- Gothard, dans les Alpes; Reichenstein, en Silesie). Souvent il est stratifie (Högholm, en Norwege, selon M. de Buch; Maifriedersdorf et Striegau en Silesie, selon M. Schulze), renferme des grenats et de l'amphibole, et passe a une roche syenitique a tres-gros grains. Le quarz y est remarquable par sa grande transparence, le feldspath par la grandeur de ses cristaux. Ce granite est parfois steatiteux; il indique le retour des roches schisteuses aux roches grenues et cristallisees. Le granite de Mittelwald, au nord de Brixen (passage des Alpes du Brenner), repose sur une syenite primitive qui alterne plusieurs fois avec le micaschiste. Le granite a topazes du Schneckenstein, en Saxe, que l'on a considere long-temps comme une roche ou terrain particulier (topasfels), n'est probablement qu'un amas transversal dans le micaschiste. Je suppose l'existence d'une formation de granite analogue a celle du Saint-Gothard (c'est-a-dire posterieure aux micaschistes) dans les Andes du Baraguan, de Quindiu et d'Herveo, ou plusieurs granites modernes viennent au jour sur la crete des Cordilleres, supportant des pics de trachytes. Est-ce a cette meme formation qu'appartiennent le granite de Krieglach en Styrie, dans lequel la lasulithe (blauspath) remplace le feldspath commun, et la roche interessante du Carnatic, dont nous devons la connoissance a M. le comte de Bournon ? Cette derniere est composee d'indianite, de feldspath et de corindon (avec grenats, epidote et fibrolite). Gneis posterieur au Micaschiste. §. 13. Une petite formation de gneis grenatifere, observee par M. de Buch. Elle couvre le micaschiste (Bergen, Classness et Klöwen, en Norwege), et renferme des bancs subordonnes de calcaire grenu et meme de micaschiste. Cette formation se retrouve dans les Pyrenees. Grünstein-Schiefer? §. 14. La diabase schistoide (grünstein-schiefer) est placee entre le gneis et le thonschiefer primitif (Siebenlehn, Rosenthal), ou entre le micaschiste et le thonschiefer primitif (Gersdorf et Rosswein, en Saxe); elle renferme des filons argentiferes tres-anciens. On trouve aussi le grünsteinschiefer comme banc subordonne au micaschiste. C'est une formation de feldspath compacte, dont l'independance me paroeit assez douteuse. IV. Thonschiefer primitif. §. 15. Schiste primitif (schiste argileux, phyllade, urthonschiefer), moins carbure et generalement a couleurs moins foncees que le thonschiefer de transition. Lorsqu'il passe au micaschiste, le mica est fendu en grandes lames, tandis que le mica, en petites paillettes isolees, caracterise le thonschiefer de transition. Bancs subordonnes: calcaire grenu bleuatre; porphyre; chlorite schisteuse avec grenats et sphene dissemines; micaschiste (Klein-Kielvig, en Norwege); grünstein, mais beaucoup plus rare que dans le thonschiefer de transition; grünstein-schiefer; quarz avec epidote; un melange de diallage et de feldspath. Les bancs subordonnes au thonschiefer primitif sont moins frequens que ceux du micaschiste, roche dans laquelle l'heterogeneite des couches, l'abondance et la variete des substances cristallisees ont atteint leur maximum, en passant du granite primitif aux roches de transition. Lorsqu'on considere en grand la difference des thonschiefer primitifs et des thonschiefer de transition, on peut indiquer pour les premiers plusieurs caracteres negatifs tresimportans, tels que l'absence des noeuds ou bancs subordonnes de calcaire compacte, l'absence de chiastolithe disseminee dans la masse, de feuillets de thonschiefer luisans et fortement charges de carbone; enfin, l'absence de couches frequentes de grünstein (en boules), d'ampelite alumineuse et graphique (alaun- und zeichenschiefer), de pierre lydienne et de kieselschiefer: mais il ne faut point oublier que ces caracteres generaux souffrent des exceptions partielles, dont le geognoste experimente est d'autant moins surpris, que le thonschiefer de transition succede souvent immediatement, selon l'age relatif des formations, au thonschiefer primitif. On trouve, dans le dernier, de la chiastolithe, aux sommets des Pyrenees et pres de Kielvig en Norwege. M. de Raumer y a vu, en Silesie (Rohrsdorf, Nieder- Kunzendorf), a la fois des bancs subordonnes de porphyre a base feldspathique, de gneis-micaschiste, de calcaire grenu, d'ampelite et de pierre lydienne. Dans l'Amerique equinoxiale (chaeine du littoral de Venezuela, isthme d'Araya, Cerro de Chupariparu), j'ai observe, dans un thonschiefer qui passe au micaschiste primitif et cyanitifere sur lequel il repose, a la fois des couches de titane-rutile et d'ampelite luisante, traversees par de petits filons d'alun natif. Il est quelquefois tres-difficile d'indiquer avec precision, ou cessent les thonschiefer primitifs, ou commencent ceux de transition. Les schistes bleu-noiratre de Piedras Azules (entre Villa de Cura et Parapara), a l'ancien rivage boreal des Llanos ( ou steppes de Venezuela), ceux de Guanaxuato, au Mexique, dont les strates inferieurs passent au schiste talqueux et chloriteux (talk- et chloritschiefer), tandis que les strates superieurs sont charges de carbone et enchassent des bancs de syenite serpentineuse, se trouvent sur cette limite de deux terrains contigus. Il n'est gueres douteux que dans les deux continens la plus grande masse de schistes ne soient des schistes de transition; mais en Amerique, surtout dans la region equinoxiale, on est moins frappe de cette difference que de la rarete absolue de tous les thonschiefer, en les comparant aux gneis-micaschistes. Le thonschiefer paroeit manquer entierement dans la Cordillere de la Parime, a travers laquelle l'Orenoque s'est fraye un chemin: dans les Andes, comme dans les Pyrenees, il n'occupe que des terrains de peu d'etendue. Je l'ai trouve au nord de l'equateur, supportant les formations secondaires du plateau de Santa-Fe de Bogota, entre Villeta et Mave; au sud de l'equateur, place sur les micaschistes du Condorasto, et servant de base aux porphyres de transition de l'Alto de Pilches, entre San-Luis et Pomallacta (Andes de Quito); sous la pierre calcaire alpine de Hualgayoc, venant au jour a 2000 toises de hauteur, dans le Paramo de Yanaguanga (crete des Andes du Perou); superpose immediatement a du granite ancien, entre les villages indiens de San-Diego et de Cascas (pente occidentale des Andes du Perou). J'ignore si le thonschiefer recouvrant une syenite qui appartient au granite, aux bords du lac de Hacatacumba et au Paramo de Yamoca (pente orientale des Andes du Perou, province de Jaen de Bracamoros), est veritablement de formation primitive. Les passages insensibles que l'on observe quelquefois entre les granites, les gneis, les micaschistes et les thonschiefer, et qui trouvent leurs analogues dans les passages des syenites et des serpentines aux grünstein de transition, ont fait croire a plusieurs geognostes que ces quatre formations n'en sont qu'une seule. On voit en effet de vastes etendues de pays dans lesquelles le gneis oscille perpetuellement entre le granite et le micaschiste, le micaschiste entre le gneis et le thonschiefer; mais ce phenomene n'est aucunement general. Il faut distinguer dans les deux hemispheres, 1.° des terrains ou ces passages insensibles, ces oscillations entre des roches voisines, ont lieu frequemment et d'une maniere irreguliere; 2.° des terrains ou des strates distincts de granite et de gneis, de gneis et de micaschiste, alternent et constituent des formations complexes de granite et gneis, de gneis et micaschiste; 3.° des terrains ou les formations simples de granite, gneis, micaschiste et thonschiefer sont superposees sans alternance (avec ou sans passage au point du contact mutuel). Ce dernier cas n'exclut point, dans le gneis, par exemple, les couches de granite qui rappellent les roches de dessous, ni les couches de micaschiste, qui annoncent, pour ainsi dire, d'avance les roches qui se trouveront superposees. Nous ferons suivre au thonschiefer quatre formations paralleles: Roche de Quarz. Granite-Gneis posterieur au Thonschiefer. Porphyre primitif? Euphotide primitive. La premiere de ces formations est tres-peu connue en Europe; la troisieme paroeit douteuse comme formation independante. Roche de quarz (avec masses de fer oligiste metalloide). §. 16. C'est la grande formation qui embrasse l'Itacolumite, ou quarz elastique chloriteux (gelenkquarz, biegsamer sandstein, chloritquarz) de M. d'Eschwege, et des couches de fer oligiste micace et speculaire. Au sud de l'equateur, dans les montagnes du Bresil et dans les Cordilleres des Andes, on trouve des masses de quarz, tantot entierement pur, tantot mele de talc et de chlorite, qui, par l'enorme epaisseur de leurs couches et par l'etendue qu'elles occupent, meritent l'attention des geognostes. Ces roches de quarz m'ont paru offrir plusieurs formations d'une anciennete relative tres-differente. Dans l'Amerique meridionale, les unes sont liees a un thonschiefer qui est decidement primitif; les autres, bien plus difficiles a saisir dans leurs rapports de superposition, sont placees entre les porphyres de transition et le calcaire alpin; elles remplacent quelquefois le gres rouge. Nous ne parlerons ici que des premieres, en separant les formations dont le gisement est exactement connu, de celles qui offrent plus d'incertitude. Sur le plateau de Minas-Geraes pres de Villa-Rica (selon les belles observations de M. d'Eschwege, directeur general des mines du Bresil), un micaschiste qui renferme des bancs de calcaire grenu, est recouvert d'un thonschiefer primitif. Sur cette derniere roche repose, en stratification concordante, le quarz chloriteux (chloritquarz) qui constitue la masse du Pic d'Itacolumi, a 1000 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer. Cette formation quarzeuse renferme des couches alternantes, 1.° de quarz aurifere blanc, ou verdatre, ou rubane, mele de talc-chlorite et offrant des strates de quarz flexible, que l'on a faussement attribuees jusqu'ici a l'hyalomicte (greisen), ou a des couches de quarz dans le micaschiste; 2. ° de chlorite schisteuse; 3. ° de quarz aurifere, mele de tourmaline (schörlschiefer de Freiesleben); 4. ° de fer oligiste metalloide, mele de quarz aurifere (goldhaltiger eisenglimmerschiefer). Les couches de quarz chloriteux ont jusqu'a 1000 pieds d'epaisseur. Toute cette formation est couverte d'une breche ferrugineuse extremement aurifere. C'est a la destruction des couches que nous venons de nommer, et qui sont liees geognostiquement les unes aux autres, que M. d'Eschwege croit pouvoir attribuer les terrains de lavage qui renferment a la fois l'or, le platine, le palladium et les diamans (Corrego das Lagens), l'or et les diamans (Tejuco), le platine et les diamans (Rio Abaete). Le chloritschiefer decompose, dont on tire les topazes et les euclases du Bresil, appartient a cette meme formation. Quelquefois, dans les montagnes de Minas-Geraes, la roche de quarz est d'une structure plus simple. Sans etre composee de couches alternantes, elle n'offre qu'une seule masse de quarz entrelace avec du fer speculaire granulaire ou dense (dichter eisenglanz; fer oligiste non lamellaire, non micace). Cette masse a jusqu'a 1800 pieds d'epaisseur, et ne contient pas d'or dissemine. Elle est placee sur le thonschiefer primitif qui recouvre immediatement le gneis. On peut dire que c'est cette formation peu connue de quarz-Itacolumite qui a fourni, par sa decomposition (par les terrains meubles auxquels il a donne naissance), dans les annees 1756 -- 1764, annuellement pres de trente millions de francs en or. Elle succede immediatement au thonschiefer; mais, d'apres les observations faites jusqu'ici, il seroit difficile de la considerer avec les schistes novaculaires (cos, wezschiefer), qui sont gris-verdatre, gris de fumee, meles de beaucoup d'alumine, comme des couches subordonnees au thonschiefer. Le quarz-Itacolumite, par une affinite oryctognostique qui existe entre le talc et la chlorite, se rapproche du schiste talqueux (talkschiefer), qui abonde, dans tous les pays, en mineraux bien cristallises, et qui, par la suppression des lames de talc, n'est quelquefois que du quarz pur: aussi le schiste talqueux forme-t-il, dans les deux continens, des couches subordonnees au thonschiefer et au micaschiste primitifs. J'ai trouve une formation analogue a celle de Minas-Geraes, mais depourvue de fer speculaire, a 1600 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer, dans les savanes de Tiocaxas (au sud du Chimborazo, entre Guamote et San-Luis) et a l'est du Paramo de Yamoca pres de Hacatacumba (Andes de Quito). D'enormes masses de quarz y sont melees a quelques feuillets de mica, et superposees au thonschiefer primitif. L'independance des formations quarzeuses primitives, que nous indiquons ici, sera mieux etablie lorsqu'on les trouvera immediatement superposees, non toujours a la meme roche (au thonschiefer), mais a differentes roches plus anciennes, par exemple, au micaschiste, au gneis et au granite. C'est dans cette independance de gisement que s'observe la roche de quarz de Contumaza, que je crois secondaire: elle recouvre d'abord le porphyre, puis (pres de Cascas) le meme granite qui forme les cotes de la Mer du Sud dans le Bas-Perou. Une observation tres-importante, que M. de Buch a faite dans le nord de la peninsule Scandinave, paroeit justifier la place que nous assignons, parmi les roches primitives, a la roche de quarz de l'hemisphere austral. Cet infatigable voyageur a reconnu que, dans la region boreale de l'ancien monde, le thonschiefer primitif est remplace quelquefois par une roche de quarz que colore le fer. Cette roche de quarz et le thonschiefer sont par consequent, en Norwege, des roches paralleles, des equivalens geognostiques. Il est bien remarquable de voir le soufre, l'or, le mercure et le fer oligiste metalloide, lies dans l'Amerique meridionale a ces enormes amas de silice. Quel que soit l'interet qu'inspirent les metaux precieux, on ne sauroit nier que l'abondance du soufre dans des terrains primitifs est, sous le rapport de l'etude des volcans et des roches a travers lesquelles le feu souterrain s'est fraye son chemin, un phenomene bien plus important que l'abondance de l'or. Un peu au sud des hautes savanes de Tiocaxas et de Guamote (Cordilleres de Quito), ou nous venons de designer la formation, peut-etre independante, de quarz superpose au thonschiefer, j'ai examine la celebre montagne de soufre de Ticsan, qui est une couche de quarz (direction N. 18° E.; inclinaison 70 -- 80° au NO.; epaisseur de la couche, 200 toises; hauteur au-dessus du niveau de la mer, 1250 toises) dans le micaschiste. Au Bresil, la formation de quarz chloriteux (Itacolumite), superposee au thonschiefer primitif, renferme nonseulement de l'or, mais aussi du soufre. Des plaques de cette roche, fortement chauffees, braulent avec une flamme bleue. Un thonschiefer du meme age que celui sur lequel est superpose le quarz chloriteux, renferme (Serra do Frio, pres de S. Antonio Pereira) un banc de calcaire primitif mele de masses de soufre natif. L'or et le soufre se trouvent aussi (Andes de Caxamarca, au Perou, entre Curimayo et Alto del Tual), sur la limite des porphyres de transition et des calcaires alpins, dans des masses puissantes de quarz qui sont paralleles au gres rouge. C'est a ces memes roches de quarz, ou plutot a des formations plus neuves encore, qu'appartient le grand depot (quarzflötz) de mercure sulfure de Guancavelica, tandis que le mercure de Cuenca (partie meridionale du royaume de Quito), de meme que celui du duche de Deuxponts, appartient au gres rouge. Ces notions suffisent pour repandre quelque jour sur les couches puissantes de quarz que nous avons observees, M. d'Eschwege et moi, dans l'hemisphere austral, et qu'on ne peut guere appeler des gres quarzeux. Ces roches semblent passer, comme les formations calcaires, a travers les differens terrains primitifs, intermediaires et secondaires. Plusieurs geognostes celebres ont deja tente d'introduire des roches de quarz, comme formations independantes, dans le type general des terrains. Le quarzgebirge de Werner est primitif et repose sur du gneis (Frauenstein, Oberschönau, en Saxe), dont peut-etre il a ete jadis recouvert. Des couches qui appartiennent essentiellement a une formation, se trouvent quelquefois a la limite superieure et inferieure de cette formation (exemples: schiste bitumineux sous le zechstein ou calcaire alpin; gypse au-dessus du zechstein; kieselschiefer, pierre lydienne ou ampelite, au-dessus du thonschiefer de transition et dans cette roche). Les petites masses de quarz primitif observees sur la crete des montagnes de l'Europe ne peuvent etre comparees, pour leur puissance et leur etendue, aux roches de quarz primitives des Andes et du Bresil. Le granular-quarzrock (avec feldspath) des Hebrides de M. Jameson, les roches quarzeuses et chloriteuses anterieures au grauwacke et liees au gres rouge (primary red sandstone) de M. Maculloch, offrent quelques traits d'analogie geognostique avec les masses quarzeuses de l'Amerique equinoxiale; mais elles sont beaucoup plus melangees (moins simples de structure), et pourroient bien, d'apres les discussions interessantes de M. Boue, appartenir a d'anciennes roches de transition. Le trappsandstein ou quarzfels secondaire de quelques geognostes allemands entoure les basaltes, et est, a n'en pas douter, d'un age beaucoup plus recent que la formation de quarz en masse (extremement pur, non melange et non agrege) qui, place entre le porphyre de transition et le calcaire alpin, atteint, d'apres mes observations a la pente occidentale des Andes du Perou (Contumaza, Namas), l'enorme epaisseur de 6000 pieds. Granite et Gneis posterieur au Thonschiefer. §. 17. Une formation de granite a petits grains, passant quelquefois a un gneis grenatifere et alternant avec lui. Cette formation interessante (Kielvig, a l'extremite septentrionale de la Norwege, et eiles Shetland) repose, selon M. de Buch, sur le thonschiefer primitif. Elle renferme de l'amphibole et du diallage; elle manifeste par la son affinite avec une des formations suivantes. On pourroit designer les formations de granite (§§. 4, 7, 12 et 17) par les noms de granite du weisstein, du gneis, du micaschiste et du thonschiefer; mais ces denominations feroient croire que ces petites formations sont necessairement dans le weisstein, dans le gneis, dans le micaschiste et dans le thonschiefer: elles se trouvent simplement superposees aux roches dont elles paroissent dependre. La presence de l'etain, du fer magnetique (?), de l'amphibole, de la diallage, du grenat, du talc et de la chlorite remplacant le mica, comme la tendance de passer a la pegmatite (schriftgranit), caracterisent les granites de nouvelle formation. Porphyre primitif? §. 18. Existe-t-il une formation primitive et independante de porphyre? Il ne peut etre question ici, ni des porphyres qui se trouvent comme des bancs subordonnes dans d'autres roches primitives (§§. 5 et 15), ni de ces gneis et micaschistes des hautes Alpes qui deviennent grenus et prennent, par l'isolement des cristaux de feldspath, un aspect porphyroide. J'hesite de placer parmi les roches primitives les porphyres de Saxe et de Silesie (duche de Schweidnitz), quoique les premiers recouvrent immediatement le gneis (entre Freiberg et Tharandt). Ils sont quelquefois traverses par des filons d'etain (Altenberg) et des minerais d'argent (Grund). Les porphyres de Silesie renferment de l'amphibole dissemine (Friedland): on les a crus jusqu'ici plus anciens que le thonschiefer primitif. Il est certain que les porphyres de Saxe sont en partie des porphyres de transition, en partie des porphyres de gres rouge. Dans les Cordilleres des Andes du Perou, de Quito, de la Nouvelle-Grenade et du Mexique, parmi cette innombrable variete de roches porphyriques dont les masses atteignent 2500 a 3000 toises d'epaisseur, je n'ai pas vu un seul porphyre qui me paraut decidement primitif. La formation la plus ancienne que j'aie observee, se trouve dans la vallee profonde de la Magdalena (entre Guambos et Truxillo, au Perou): c'est un porphyre a base argileuse, un peu decomposee, avec feldspath commun, non vitreux, sans amphibole, mais aussi sans quarz. Cette formation, qui paroeit distincte de tous les porphyres de transition et trachytiques de Quito et de la crete des Andes du Perou, vient au jour a 600 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer; elle est placee immediatement sur le granite, et recouverte, a la pente occidentale des Andes, d'une roche de quarz secondaire, a la pente orientale (vraisemblablement) de gres rouge. V. Euphotide primitive posterieure au Thonschiefer. §. 19. Une formation placee a la limite des formations primitives et de transition. C'est le Gabbro de M. de Buch; l'Euphotide de M. Haüy; le Schillerfels de M. de Raumer; l'Ophiolithe de M. Brongniart. Cette roche a ete designee jadis sous les noms de serpentinite, granite serpentineux, granite de diallage, granitone, granito di gabbro, granito dell' Impruneta, serpentinartiger urgrünstein. Nous la caracterisons ici telle que M. de Buch l'a circonscrite le premier. Elle se trouve superposee (cap Nord de l'eile Mageroe, en Norwege) a un schiste primitif, qui passe vers le haut a l'euphotide, vers le bas au micaschiste. L'euphotide du Val Sesia recouvre aussi, selon M. Beudant, immediatement le micaschiste primitif. On peut dire qu'en general l'euphotide ou gabbro est un melange de diallage (smaragdite), de jade (saussurite, feldspath tenace) et de feldspath lamelleux. Quelquefois (Bergen, en Norwege) le jade manque entierement; mais dans le verde di Corsica (Stazzona, au nord de Corte et S. Pietro di Rostino dans l'eile de Corse) l'euphotide n'est qu'un melange de jade voisin du feldspath compacte, et de diallage verte sans feldspath lamelleux. Quoique, d'apres les interessantes observations rapportees par M. Haüy dans son Tableau comparatif, les diallages metalloides (schillerspath) vertes, a reflets satines, et les diallages grises passent progressivement (roches du Musinet pres de Turin) les unes aux autres, on peut pourtant distinguer ces substances par les caracteres geognostiques qu'elles offrent le plus frequemment en grand. L'euphotide a diallage grise est beaucoup plus frequente (un peu plus ancienne?) que l'euphotide a diallage verte. La serpentine est presque toujours dans une liaison de gisement intime avec l'euphotide, dont elle ne semble etre qu'une variete a tres-petits grains, d'apparence homogene. Cette liaison se manifeste aussi en Hongrie (Dobschau), ou M. Beudant a trouve l'euphotide grenue et schisteuse immediatement superposee au micaschiste primitif. La soude, d'apres les travaux de Theodore de Saussure et de Klaproth, s'observe parmi les roches primitives dans le feldspath compacte du weisstein et du grünsteinschiefer, dans le jade des euphotides, et dans la lazulite (outre-mer) du Baldakschan. Cette derniere substance paroeit appartenir a une couche de calcaire primitif intercalee au granite-gneis. Bancs subordonnes a l'euphotide: serpentine avec asbeste et diallage metalloide; serpentine accompagnee de chrysoprase, opale et calcedoine (Kosemitz, en Silesie); calcaire grisatre compacte, passant au calcaire a petits grains (Alten, en Norwege). Ce calcaire rapproche l'euphotide de la Scandinavie, qui est le dernier membre des formations primitives, du terrain des roches intermediaires tres-anciennes. Comme l'euphotide n'est souvent pas recouverte, et que la superposition d'une roche sur une autre tres-ancienne ne nous eclaire pas sur l'epoque de sa formation, il reste des doutes sur l'age relatif de beaucoup d'euphotides. M. de Buch a vu celle du Haut-Valais (Saas, Mont-More) placee au-dessus du micaschiste; celle de Sestri, au nord du golfe de la Spezzia, sous le thonschiefer (de transition?) de Lavagna. M. de Raumer, dans son excellent ouvrage sur la Silesie inferieure, place le schillerfels du Zobtenberg parmi les formations primitives; M. Keferstein y range l'euphotide du Harz (entre Neustadt et Oderkrug), qui renferme du titane ferrifere (nigrine) dissemine. Je pense aussi que les serpentines du Heideberg pres de Zell, et celles que l'on trouve entre Wurlitz et Kotzau, ou elles renferment du pyroxene-diopside, sont tres-anciennes. Toutes ces serpentines des montagnes de Bareuth m'ont paru intimement liees au schiste amphibolique (hornblendschiefer) et au schiste chloriteux (chloritschiefer). Elles offrent des proprietes magnetiques tres-remarquables, que j'ai fait connoeitre en 1796, et qui depuis ont ete l'objet des recherches plus exactes de MM. Goldfuss, Bischof et Schneider. En jetant un coup d'oeil general sur les euphotides des deux continens, on ne sauroit se refuser d'admettre plusieurs formations, d'un age relatif assez distinct. Les euphotides que j'ai observees a l'eile de Cuba, a Guanaxuato, au Mexique, et a l'entree des Llanos de Venezuela, sont liees soit a la syenite soit au calcaire noir, et me semblent bien decidement des euphotides de transition, de meme que l'euphotide (serpentine stratifiee en couches assez minces: direct. N. 52° E.; incl. 70° au NO.; epaisseur 10 toises) de la cime de la Bochetta de Genes, que j'ai observee en 1795 et 1805, et qui est intercalee a un thonschiefer de transition qui alterne avec du calcaire noir. Les euphotides de la Spezzia, de Prato et de tout le Siennois, que MM. de Buch et Brocchi considerent comme de formation primitive ou de formation de transition tres-ancienne, paroissent a M. Brongniart, qui les a recemment examinees avec beaucoup de soin, appartenir aux formations secondaires, ou tout au plus aux formations de transition les plus recentes. Les geognostes celebres que je viens de nommer, sont assez d'accord sur le gisement immediat de ces euphotides de l'Italie, c'est-a-dire sur la determination oryctognostique des roches qui se trouvent au-dessous et au-dessus de l'euphotide; mais ils different sur l'age de formation que l'on doit assigner geognostiquement a ces roches en contact avec l'euphotide. C'est ainsi qu'en geographie on connoeit quelquefois avec precision le gisement d'un eilot, par rapport aux eiles voisines; tandis que la longitude absolue de tout l'archipel, sa plus grande proximite de l'ancien ou du nouveau continent, restent encore incertaines. Terrains de transition. Le terrain de transition reunit, d'apres M. Werner, des roches qui offrent dans leur composition beaucoup d'analogie avec celles des terrains primitifs, mais qui alternent avec des roches fragmentaires ou arenacees (clastiques, agregees; roches de transport). Quelques debris de corps organiques (des empreintes de roseaux, de palmiers et de fougeres arborescentes; des madrepores, pentacrinites, orthoceratites, trilobites, hysterolithes, etc.) y paroissent de preference, je ne dirai pas dans les roches superieures, ou les moins anciennes de cet ordre, mais en general dans les roches non feldspathiques et dont la masse ne presente pas un aspect tres-cristallin. Ce sont surtout les belles observations de MM. de Buch et Brochant qui ont etendu les limites des terrains de transition. Ces limites sont plus faciles a fixer vers le haut, ou commencent les terrains secondaires, que vers le bas, ou finissent les terrains primitifs. J'ai rappele ailleurs comment, par les micaschistes anthraciteux et les thonschiefer verts, les roches de transition se lient aux roches primitives; comment, par les porphyres a feldspath vitreux, elles se lient aux terrains volcaniques, et par les grauwackes a petits grains et les porphyres abondant en cristaux de quarz, au gres rouge et aux porphyres des terrains secondaires. Dans les regions les plus eloignees les unes des autres, des roches analogues, des thonschiefer talqueux, a feuillets fortement contournes, charges de carbone, renfermant de l'ampelite (alaunschiefer) et de la pierre lydienne; des calcaires noirs alternant avec le thonschiefer, des grauwackes, des porphyres et des syenites melanges de fer titane, se trouvent places entre des roches primitives, c'est-a-dire entierement depourvues de traces d'organisation et de masses arenacees, et la grande formation de houilles; mais la succession des roches homonymes de transition varie meme la ou elles semblent toutes egalement developpees. Le plus grand nombre des formations de ce terrain sont composees de deux ou trois roches alternantes (calcaire noir compacte, grünstein et thonschiefer; grauwacke et porphyre; calcaire grenu, grauwacke et micaschiste anthraciteux); et comme des membres partiels des groupes ou formations d'une structure si compliquee passent d'un groupe a l'autre, d'excellens observateurs, MM. de Raumer, d'Engelhardt et Bonnard, ont ete tellement frappes de ce phenomene de connexite et d'alternance, qu'ils ne reconnoissent dans la classe entiere qu'une seule grande famille de roches. Si l'ou examine les formations de transition d'apres leur structure et leur composition oryctognostique, on y distingue cinq associations tres-marquees: les roches schisteuses; les roches porphyritiques (feldspathiques ou syenitiques); les roches calcaires grenues et compactes, avec gypse anhydre et sel gemme; les roches d'euphotide, et les roches agregees (grauwacke et breches calcaires). Sur quelques points du globe un seul de ces groupes ou de ces associations de roches cristallisees et non cristallisees a pris un developpement si extraordinaire, que les autres groupes paroissent presque entiererement supprimes. C'est ainsi que dominent dans les Cordilleres du Mexique et de Quito, comme en Hongrie et dans plusieurs parties de la Norwege, les porphyres et les syenites de transition; dans la Tarantaise, les calcaires grenus et talqueux; dans quelques regions des Alpes et de la Bochetta, les calcaires noirs presque compactes ou a tres-petits grains; enfin, au Harz et sur les bords du Rhin, les grauwackes et thonschiefer de transition: mais cette epaisseur et cette etendue qu'acquierent les masses minerales, ne doivent pas guider le geognoste lorsqu'il discute l'age relatif des formations partielles. Une extreme variete de gisement ne s'observe pas seulement dans les petites formations; aussi les grandes formations homonymes tres-developpees ne peuvent guere etre envisagees comme contemporaines, c'est-a-dire qu'elles n'ofrent pas le meme gisement par rapport aux autres termes de la serie des roches in termediaires. Les porphyres de Guanaxuato, par exemple, sont superposes a un thonschiefer steatiteux et charge de carbone; ceux de la Hongrie, a un micaschiste talqueux de transition renfermant des bancs de calcaire gris-noiratre. Les porphyres des Andes de Quito (et des eiles Britanniques?) recouvrent immediatement des roches primitives, et sont par consequent anterieurs a toute roche calcaire qui renferme des vestiges de corps organises: au contraire, les porphyres et syenites zirconiennes de Norwege, comme probablement aussi les porphyres du Caucase, si bien observes par MM. d'Engelhardt et Parrot, succedent, selon l'age de leur formation, au calcaire rempli d'orthoceratites. Les plus grandes masses de grauwacke (alternant avec le grauwackenschiefer) se sont developpees sans doute au milieu des schistes de transition les plus anciens; mais on trouve aussi des bancs de grauwacke tres-puissans, d'une origine beaucoup plus recente. En general, les cinq groupes de roches que nous venons de distinguer d'apres des rapports de composition ou des caracteres oryctognostiques, ne conservent pas partout la meme place dans la serie des formations intermediaires; ils ne se trouvent guere separes dans la nature comme dans une classification oryctognostique des roches. On observe que les thonschiefer et les calcaires noirs, les thonschiefer et les porphyres, les thonschiefer et les grauwackes, les porphyres et les syenites, les calcaires grenus et les micaschistes anthraciteux, forment des associations geognostiques dans les contrees les plus eloignees les unes des autres. C'est la constance de ces associations binaires ou ternaires qui caracterise les terrains de transition, bien plus que l'analogie qu'offre dans chaque groupe la succession des roches homonymes. En discutant les terrains primitifs ou les formations sont plus simples, plus tranchees, sujettes a des alternances moins frequentes, j'ai pu essayer d'enumerer separement les granites qui succedent aux gneis, les gneis qui succedent aux micaschistes. Il y a des granites et des gneis primitifs de differens ages, comme dans les terrains de transition il y a des grauwackes ou des calcaires noirs, semblables de composition, mais tres-eloignes les uns des autres, selon leur anciennete relative. Si dans ces derniers terrains le geognoste ne tente pas de nommer separement les differentes couches de grauwacke ou de calcaire, c'est parce que ces couches, isolement, n'ont pas de valeur comme termes de la serie des roches intermediaires; elles n'en ont qu'autant qu'elles font partie de certains groupes. Or, ce sont ces groupes memes, ces associations constantes de thonschiefer, grünstein et grauwacke, de calcaire steatiteux et grauwacke, de porphyre et grauwacke, etc., qui sont les veritables termes de la serie. Il en resulte que, d'apres les principes que nous suivons dans l'arrangement des formations, on doit enumerer separement non des masses isolees de calcaire, de grauwacke et de porphyre, qui se melent entre elles ou a d'autres roches, mais des groupes entiers et bien caracterises, ceux, par exemple, dans lesquels dominent les grauwackes et les thonschiefer, ou les porphyres et les syenites. Parmi ces derniers les uns sont posterieurs, les autres anterieurs a des roches qui renferment des debris d'etres organises. Dans les terrains primitifs les termes de la serie sont generalement simples; dans les terrains de transition ils sont tous complexes, et c'est de cette complexite meme que naeit la difficulte d'etudier, par assises, un edifice dont on saisit avec peine l'ordonnance au milieu de l'entassement de tant de materiaux semblables. Pour justifier l'ordre que j'assigne aux differens terrains de transition, je commencerai par presenter dans le tableau suivant la succession des formations (en commencant par les plus anciennes) qui ont ete observees dans plusieurs contrees et examinees avec soin. Je n'emploeirai que la description oreographique des geognostes habitues a suivre les memes principes dans la denomination des roches. 1. Andes de Quito et du Perou. Porphyres de transition, non metalliferes, recouvrant immediatement les roches primitives (granite, thonschiefer). Grünstein en boules (kugelgestein). Calcaire noir, superpose au porphyre. Je n'y ai pas vu de grauwacke; il est remplace, dans les Andes de Quito et du Perou, au sud de l'equateur, par la grande formation de porphyre. 3. Montagnes du Mexique. Thonschiefer de transition, charge de carbone, renfermant des couches de syenite et de serpentine. Les couches inferieures passent au schiste talqueux et reposent sur des roches primitives. Syenite alternant avec du grünstein. 2. Montagnes de Venezuela. Schistes verts steatiteux de transition, couvrant du gneis-micaschiste primitif. Calcaire noir. Serpentine et grünstein (recouverts d'amygdaloide avec pyroxene). C'est la suite de roches que j'ai observee au bord septentrional des Llanos de Calabozo. 4. Hongrie. Micaschiste de transition avec des bancs de calcaire noir superpose a des roches primitives. Porphyres et syenites de transition. Couches subordonnees: micaschiste de transition; calcaire grenu blanc avec serpentine; masses de grünstein. Ces porphyres sont, comme la plupart de ceux des Andes, immediatement recouverts par des trachytes syenitiques blancs et noirs. (Observations de M. Beudant.) Porphyre de transition, metallifere, place immediatement sur le thonschiefer de transition. Les couches superieures passent a la phonolithe. Telle est la serie de roches de Guanaxuato. Dans le chemin de Mexico a Acapulco j'ai vu les porphyres de transition reposer immediatement sur le granite primitif. Pres de Totonilco ces porphyres sont couverts de roches secondaires, tels que le calcaire alpin, le gres et le gypse argileux. Je n'ose prononcer sur les rapports d'age entre les calcaires de transition des mines du Doctor et de Zimapan, et les porphyres de Guanaxuato et de Pachuca; mais, d'apres MM. Sonneschmidt et Valencia, on voit suivre dans les riches mines de Zacatecas, presque comme a Guanaxuato, de bas en haut, syenite et thonschiefer de transition (avec grünstein et pierre lydienne), grauwacke, porphyre non metallifere. 5. Tarantaise. Une meme formation, reposant immediatement sur le terrain primitif, renferme du calcaire grenu steatiteux, du micaschiste avec gneis et du grauwacke anthraciteux. Ces differentes roches alternent plusieurs fois et offrent des bancs subordonnes de serpentine, de grünstein, de quarz compacte et de gypse de transition. (Observations de M. Brochant de Villiers.) 6. Suisse. Dans le passage des Alpes, de Chiavenna a Claris, d'apres M. de Buch: Thonschiefer de transition, avec des couches de calcaire gris, reposant sur du thonschiefer et du micaschiste primitifs. Serpentine avec grenats. Calcaire noir. Grauwacke. Thonschiefer alternant avec du calcaire noir. Thonschiefer avec empreintes de poissons (presque secondaire). Dans les environs de Bex, d'apres M. de Charpentier: Grauwacke superpose au gneis (primitif?). Calcaire noir, renfermant des belemnites, et alternant avec du thonschiefer de transition. Calcaire argileux de transition, avec ammonites, offrant des couches subordonnees de grauwacke, de gypse anhydre et de sel gemme. M. de Buch, d'apres des observations geognostiques faites avant l'annee 1804, assignoit aux formations de transition de la Suisse occidentale, considerees sous un point de vue general, et en passant des roches inferieures aux roches superieures, l'ordre suivant: Thonschiefer de transition. -- Calcaire noir. -- Muriacite salifere et gypse. -- Grauwacke. -- Calcaire noir. -- Thonschiefer, avec empreintes de poissons. 7. Allemagne. Systeme de gisement en Saxe, entre Freiberg, Maxen et Meissen, d'apres MM. de Raumer et Bonnard: Thonschiefer avec ampelite et pierre lydienne, alternant a la fois avec du grauwacke, du grünstein, du porphyre et du calcaire. Ce terrain repose sur le gneis primitif. Syenite et porphyre. Dans cette formation, qui abonde aussi au Thüringerwald, selon l'excellente description de M. Heim, se trouvent intercales du granite et du gneis de transition. Le Harz et l'Allemagne occidentale (entre le Rhin et la Lahn) sont recouverts d'une grande formation de thonschiefer, dans laquelle, comme par developpement interieur, se montrent des masses de grauwacke et grauwackenschiefer, de calcaire (souvent d'une couleur peu foncee), de grünstein, de quarz et de porphyre. Cette derniere roche y est cependant plus rare que dans la formation independante de syenite et porphyre, que supporte dans d'autres contrees le thonschiefer de transition. 11. Caucase. Thonschiefer, peut-etre deja de transition. Calcaire noir avec ampelite. Porphyre de transition, alternant avec le thonschiefer. Ce porphyre, souvent colonnaire, avec feldspath vitreux, peu de quarz et peu de mica, ressemble dans les montagnes du 8. Presqu'eile du Cotentin et Bretagne. Thonschiefer vert, luisant, steatiteux (de transition), alternant quelquefois avec du grauwacke, avec du calcaire noir et avec la roche de quarz. Syenite et granite. Thonschiefer de transition, recouvrant quelquefois de nouveau la syenite. (Observations de MM. Brongniart et d'Omalius d'Halloy.) 9. Isles Britanniques. Syenite et porphyre de transition reposant sur des roches primitives. (Chaeine du Snowdon, Grampians, Ben-Nevis.) Thonschiefer de transition, avec trilobites, renfermant dans les couches inferieures un aglomerat de roches primitives, semblable a celui de la Valorsine (Llandrindod, Killarney, cime du Snowdon). Grauwacke (May-hill et North- Wales). Calcaire de transition (Longhope, Dudley). Grauwacke, old red sandstone (Mitchel Dean de Herefordshire). Calcaire de transition, mountainlimestone (Derbyshire), recouvert par la grande formation de houille. (Observations de M. Buckland, qui semble cependant regarder la syenite et une partie des porphyres comme primitifs.) 10. Norwege. Cisement des roches pres de Christiania, d'apres les observations de M. de Buch: Kasbek (comme font souvent les porphyres des sommets mexicains) a du trachyte poreux. Gneis, syenite et granite de transition en couches alternantes. Thonschiefer de transition, couvert d'un calcaire fetide, qui paroeit secondaire. (Observations de MM. d'Engelhardt et Parrot.) Thonschiefer de transition, alternant avec du calcaire noir, rempli d'orthoceratites et reposant sur du gneis primitif. Grauwacke et kieselschiefer. Porphyre a cristaux de quarz, renfermant une couche de grünstein poreux avec pyroxene. Syenite a zircons, et granite de transition, avec couches de porphyre. On reconnoeit, dans ces differens types de superposition, recueillis en Europe, en Amerique et en Asie, au nord et au sud de l'equateur, que parmi les plus anciennes roches de transition trois grandes formations, celle de calcaire grenu et talqueux, grauwacke avec anthracite et micaschiste, celle de syenite et porphyre (a cristaux d'amphibole et tres-peu de quarz), et celle de thonschiefer, grauwacke et calcaire noir, occupent a peu pres le meme rang sur differens points du globe. Les calcaires micaces et poudingues a fragmens de roches primitives de la Tarantaise; les porphyres et syenites du Perou; le thonschiefer de transition avec grauwacke (Harz, Friedrichswalde en Saxe, Aggerselv en Norwege, et Guanaxuato au Mexique), sont peut-etre d'une origine contemporaine. En rangeant les roches comme termes d'une seule serie, il auroit fallu peut-etre rappeler leur parallelisme de la maniere suivante: II (I ou III). Je distingue, comme termes de la serie des roches de transition, six groupes qui me paroissent bien caracterises par les roches qui y dominent, par leur gisement et par l'etendue de leur masse. Ces groupes ou grandes formations sont: I. Calcaire grenu steatiteux, micaschiste de transition et grauwacke a fragmens primitifs. II. Porphyre (non metallifere) anterieur au calcaire a orthoceratites, au thonschiefer et au micaschiste de transition. III. Thonschiefer renfermant des grauwackes, des calcaires, des porphyres et des grünstein. IV. Porphyres et syenites (metalliferes) posterieurs au thonschiefer de transition, anterieurs a un calcaire qui renferme des debris organiques. V. Porphyres, syenites et granites zirconiens (non metalliferes), posterieurs au thonschiefer et au calcaire avec orthoceratites. VI. Euphotide de transition avec jaspe et serpentine. Presque chaque groupe est compose de roches alternantes, et plusieurs de ces roches, qu'on peut considerer comme de petites formations partielles, sont communes a tous les groupes. C'est cette communaute, cette alternance, ce retour periodique des memes masses, qui constituent l'unite apparente de la grande famille des terrains de transition. Cependant chaque groupe a des roches qui predominent et qui lui donnent un aspect particulier. Tels sont les calcaires grenus et talqueux dans le premier groupe; les porphyres non metalliferes, abondant en amphibole et presque depourvus de quarz, dans le second; les grauwacke dans le troisieme; les roches serpentineuses dans le sixieme. Le quatrieme et le cinquieme groupes sont caracterises, l'un par des porphyres et syenites metalliferes; l'autre, par des granites zirconiens. Mais ce sont la des caracteres en partie oryctognostiques; la veritable base de la division que nous proposons provisoirement aux geognostes, sont la superposition et l'age relatif, observes dans differentes parties du globe. Une partie des porphyres mexicains et peruviens du deuxieme et meme du quatrieme groupe, semble avoir des rapports intimes avec les trachytes, qui sont les plus anciennes parmi les roches volcaniques. Avant de decrire en detail les six grandes formations intermediaires, je developperai quelques considerations generales sur le terrain de transition, superpose le plus souvent en gisement concordant au terrain primitif. La magnesie; le fer oxidule (magnetique), qui offre des rapports geognostiques si frappans avec toutes les substances dans lesquelles domine la magnesie; le fer titane; le carbone et la chaux carbonatee, penetrent a travers la plupart des formations de transition. M. Beudant a fait l'observation importante, que les syenites et porphyres de Schemnitz, de Plauen et de Guanaxuato font effervescence avec les acides, tandis que les trachytes (porphyres trachytiques) de la Hongrie n'offrent pas le meme phenomene. Saussure et M. Brochant ont trouve effervescens des micaschistes de transition (a la Tete-Noire) et des quarz compactes (dans la Tarantaise), la meme ou ces roches sont tres-eloignees de bancs intercales de calcaire grenu steatiteux. J'ai vu dans les Cordilleres du Perou (Paramo de Yamoca), comme dans le Thüringerwald-Gebirge (entre Lauenstein et Gräfenthal), un thonschiefer qui offroit d'abord tous les caracteres d'une roche primitive, mais qui peu a peu devenoit effervescent, et dont les dernieres couches presentoient des noeuds epars de calcaire compacte gris-noiratre. La chaux carbonatee, d'abord disseminee dans la masse entiere, se concentre progressivement pour donner a la roche une structure glanduleuse, pour former des strates minces alternans, des bancs intercales, et a la fin des roches calcaires grenues ou compactes, qui remplacent le thonschiefer, le micaschiste ou l'euphotide, au sein desquels elles se sont developpees. M. Steffens, dans son Traite d'Oryctognosie, a consigne des remarques ingenieuses sur le role important que le feldspath et l'amphibole jouent dans les terrains primitifs, dans les terrains intermediaires ou de transition, et dans le gres rouge. Au milieu du second de ces terrains le feldspath se montre jusque dans le calcaire compacte. On peut croire qu'en passant du granite au thonschiefer, par les gneis et les micaschistes, cette substance reste cachee dans la pate qui n'est qu'homogene en apparence; car nous voyons le thonschiefer de transition devenir quelquefois du porphyre, comme, par d'autres developpemens interieurs, par des accumulations de silice et de carbone, et par l'agregation des elemens de l'amphibole, il devient du kieselschiefer, de l'anthracite, du grünstein et de la syenite. Dans les porphyres de transition on distingue souvent deux sortes de feldspath, le commun, et le vitreux a cristaux tres-effiles (Andes du Perou, vallee de Mexico). Ce dernier, qui est moins une espece mineralogique qu'un etat particulier du feldspath commun, appartient a la fois aux terrains de transition et aux veritables trachytes. La presence frequente de l'amphibole et le manque de quarz cristallise distinguent oryctognostiquement beaucoup de porphyres de transition de ceux des terrains primitifs. Ces derniers ne sont peut-etre que des couches subordonnees a d'autres roches. L'amphibole, qui est presque restreint aux bancs intercales dans le terrain primitif, n'est nulle part plus abondant que dans les terrains de transition et dans les terrains trachytiques. Parmi les premiers, les grünstein et les syenites offrent, par des changemens de proportions dans les elemens du tissu cristallin, une espece de lutte entre le feldspath et l'amphibole. Le pyroxene, que l'on croit trop exclusivement caracteriser les trachytes, les basaltes et les dolerites, est propre a plusieurs porphyres de transition des Andes et de la Hongrie. On le trouve aussi dans les couches bulleuses, noires et basaltiques, de la syenite zirconienne de Norwege. J'ai cru avoir reconnu dans quelques porphyres de transition de l'Amerique equinoxiale des traces d'olivine; mais ce n'etoient sans doute que des varietes moins foncees et verdatres du pyroxene, dont on distinguoit a peine les sommets diedres, et dont je n'ai pu essayer la fusibilite au chalumeau. L'olivine appartient proprement aux formations basaltiques, et il est meme encore douteux si elle se montre dans les trachytes. La tendance frequente a la cristallisation, que l'on observe dans les terrains de transition au milieu de roches a sediment et de roches agregees, est un phenomene si extraordinaire, que des geognostes celebres ont ete tente d'admettre que beaucoup de ces roches qui paroissent agregees (sous forme de breches ou poudingues; de roches clastiques et arenacees; de gres de transition ou d'agglomerats), bien loin de contenir des debris de roches preexistantes, ne sont que l'effet d'une cristallisation confuse, mais contemporaine. Des masses que dans quelques strates on a prises pour des fragmens anguleux et nettement circonscrits, se fondent a peu de distance de la dans la pate meme de la roche; d'autres masses, qui ressemblent a des cailloux roules, deviennent des noeuds fortement adherens aux lames contournees d'un schiste, s'alongent et s'evanouissent peu a peu. Lorsque l'on compare certains granites et porphyres, des breches calcaires, des grauwackes et des gres rouges, on croit reconnoeitre dans des roches d'age si different, a de certains indices de structure, le passage insensible d'une formation contemporaine, d'une cristallisation simultanee, mais troublee par des attractions particulieres, a une veritable agregation (agglutination) de debris de roches preexistantes. Sous toutes les zones il y a des granites a gros grains, dans lesquels des masses a petits grains tres-micaces se trouvent concentrees ca et la, et qui paroissent, au premier coup d'oeil, renfermer des fragmens d'un granite plus ancien. Cette apparence est aussi trompeuse que celles de tant de porphyres, d'euphotides et de calcaires de transition, que les antiquaires et les marbriers designent sous le nom de breches ou de roches regenerees. Les pretendus fragmens, souvent stries ou rubanes (dans le verde antico et les calcaires les plus recherches comme ornemens interieurs des edifices), ne sont vraisemblablement que des masses qui se sont consolidees les premieres dans un fluide fortement agite. L'eau congelee de nos fleuves, et divers melanges de sels, dans nos laboratoires, presentent des phenomenes analogues. La maniere dont les fragmens reunis ou anguleux du grauwacke, ceux des poudingues calcaires a pate grenue et a fragmens compactes, ceux de certains gres rouges, paroissent quelquefois s'evanouir et se fondre dans la masse entiere, est bien plus difficile a expliquer dans l'etat actuel de nos connoissances. On ne peut revoquer en doute que l'alternance frequente de strates visiblement agreges et de strates presque homogenes ou legerement noduleux, de meme que le passage de ces masses les unes dans les autres, ont ete constates par des observations tres-precises; et M. de Bonnard, dans son Traite des terrains, a eu raison de dire "que ce phenomene est un des plus incomprehensibles de tous ceux qui peuvent nous frapper dans l'etude de la geognosie." Doit-on admettre, lorsque les contours des fragmens enchasses disparoissent presque en entier, qu'il n'y a eu qu'un tres-petit intervalle de temps entre la solidification des fragmens et celle de la pate? Nous verrons plus tard que, dans le gres rouge, des cristaux de feldspath naissent dans cette pate meme et la rapprochent du porphyre du gres rouge. ( Steffens, Geognostisch-geolog. Aufs., p. 13, 16, 23, 31. Freiesleben, Kupfersch., T. IV, p. 115.) I. Calcaire grenu talqueux, Micaschiste de transition, et Grauwacke avec anthracite. §. 20. C'est un meme terrain, une meme formation, qui embrasse differentes roches calcaires, schisteuses et fragmentaires, alternant les unes avec les autres. Cette formation n'est pas composee de trois roches isolees (comme l'est la formation de porphyre, de syenite et de grünstein), mais de trois formations partielles, de trois series ou systemes de roches. Le type le plus complique de cet agroupement de roches presque contemporaines s'est developpe au sud-est des Alpes, dans la vallee de l'Isere, ou il a ete l'objet des recherches approfondies de M. Brochant. Si presque tous les termes de la serie des roches intermediaires sont complexes, ces termes ou grandes formations n'en varient pas moins, selon le degre de cette complexite, selon le nombre et la nature des masses alternantes. Le terrain de la Tarantaise (c'est le nom sous lequel nous designerons le terrain §. 20) offre dans sa structure et sa composition (dans ses calcaires grenus et talqueux, dans ses gneis et ses micaschistes) tellement l'apparence d'un terrain primitif, qu'on ne reconnoeit son age relatif que par quelques debris de corps organiques et par l'intercalation frequente de couches arenacees (poudingues, breches, grauwackes). Aussi, pendant long-temps les geognostes, negligeant l'observation de l'alternance et de l'unite de cette formation complexe, ont place les poudingues de la Valorsine parmi les roches primitives, et les ont considerees comme un phenomene purement local. Des recherches qui embrassent une plus grande partie du globe, nous ont revele beaucoup de faits analogues. Ces poudingues a fragmens primitifs sont des grauwackes qui alternent avec des calcaires micaces, ou avec les thonschiefer verts, ou avec des gneis de transition. On les observe dans les Alpes (Trient au Valais), dans la Tarantaise, en Irlande, dans les montagnes de Killarney et Saint-David; enfin, sur les cotes orientales de l'Egypte, dans la vallee de Cosseir (Qozir). Les calcaires de la Tarantaise et du petit Saint-Bernard, qui renferment des cristaux de feldspath dissemines, et qui constituent une espece de roche porphyroide a base calcaire, se retrouvent dans des formations analogues des Alpes de Carinthie. Ce phenomene d'association de la chaux et du feldspath est d'autant plus remarquable que le feldspath lamelleux et les calcaires grenus et compactes paroissent manifester partout ailleurs, dans leurs rapports geognostiques, une espece de repulsion beaucoup plus prononcee que celle qu'on remarque dans quelques pays entre l'amphibole et le calcaire. Des micaschistes et des gneis de transition ont ete regardes long-temps comme exclusivement propres a la region sud-ouest des Alpes; mais ils se retrouvent dans les terrains de thonschiefer et porphyre du Caucase, et dans le terrain de porphyre et syenite de Saxe et de Hongrie. Cependant, en general, la formation qui fait l'objet de cet article, et qui est caracterisee a la fois par l'absence des porphyres et par la frequence des calcaires grenus et talqueux, des quarz micaces et des anthracites, paroeit avoir plus favorise le developpement des micaschistes et des gneis de transition que les grandes formations de porphyres et syenites, ou de thonschiefer et grauwacke. C'est au contraire dans ces deux dernieres que se trouvent plus abondamment les granites de transition, roches cristallines, grenues, non feuilletees, presque depourvues de mica, et appartenant geognostiquement (lors meme qu'elles ne renferment aucune trace d'amphibole) a la syenite, comme les micaschistes et les gneis de transition appartiennent au quarz micace. Les syenites, soit qu'elles forment de simples couches dans les thonschiefer verts, soit qu'elles constituent avec les porphyres une formation independante, preludent pour ainsi dire aux granites de transition; les quarz compactes, schisteux et melanges de feuillets de mica (quarz du terrain calcaire anthraciteux, quarz du terrain de thonschiefer et porphyre), preludent aux micaschistes et a ces gneis de transition que l'on a tres-justement designes comme des micaschistes porphyroides a cristaux (et noeuds) de feldspath. Ce sont ces modes divers de developpement des granites au sein des roches syenitiques, des gneis et des micaschistes au sein des roches quarzeuses, qui nous font concevoir pourquoi les gneis et micaschistes se trouvent associes (environs de Meissen en Saxe, et pente septentrionale du Caucase) bien plus rarement au granite des terrains de transition, que des terrains primitifs. On pourroit dire que les granites du premier de ces terrains ne sont que des bancs de syenite avec suppression d'amphibole, et que la plupart des micaschistes de transition ne presentent que des modifications (de certains etats) d'un quarz micace, dans lequel le mica devient plus abondant. Cependant ces changemens par developpement interieur ne se font pas toujours de la meme maniere. Quelquefois aussi (vallee de Müglitz en Saxe) le granite de transition naeit immediatement du thonschiefer, et les syenites de Meissen et de Prasitz passent a la fois au granite et au gneis intermediaires. Voici les series de roches calcaires, schisteuses et arenacees alternantes, qui constituent la formation que nous placons a la tete des terrains de transition. Calcaires grenus talqueux, souvent veines, schisteux, fetides (comme le marbre grenu et blanc de l'eile de Thasos), meles de grains ou noeuds de quarz, et renfermant (Sainte-Foix) des couches d'une serpentine de transition. Calcaire compacte jaunatre, quelquefois gris et renfermant des cristaux de feldspath (Bonhomme, Petit Saint-Bernard et vallee de la Tarantaise). Poudingues ou conglomerats calcaires a pate grenue et a fragmens compactes (breche tarentaise de Villette). Ces trois roches, qui forment une sous-division du groupe §. 20, alternent entre elles et avec les schistes de la serie suivante. Les calcaires compactes de transition ressemblent quelquefois au calcaire du Jura, d'autres fois ils passent au calcaire a petits grains. Le calcaire saccharoide talqueux, souvent blanc et veine, prend l'aspect des beaux marbres primitifs du Pentelique (Cipolino), de l'Hymette et du Caryste dans l'Eubee. Les debris de corps organises manquent generalement dans la serie calcaire; mais, comme nous le verrons bientot, les roches de cette serie alternent avec des schistes remplis d'empreintes de plantes monocotyledones. M. Brochant a meme decouvert une petrification de nautile ou d'ammonite dans les poudingues calcaires de la Villette, entre Moutiers et Saint-Maurice. Thonschiefer de transition, ou rubanes, et offrant des lames de calcaire interposees, ou onctueux, melanges de talc fibreux (mine de Pesey), sans parties calcaires visibles, mais faisant effervescence avec les acides. Ce thonschiefer renferme (Bonneval) des couches subordonnees de grünstein. Quarz compactes, ou quarzites, sans melange, ou micaces, et appartenant aussi bien aux calcaires grenus qu'au thonschiefer de transition. C'est de l'accumulation du mica dans ces quarz compactes que naissent les micaschistes de cette formation, et meme les gneis; car souvent les quarz renferment un peu de feldspath dissemine dans la masse. Les micaschistes, passant a des schistes noirs bitumineux, remplis d'empreintes vegetales (Montagny, Petit Saint-Bernard, Landry), sont associes a des anthracites, et alternent (Moutiers) avec les calcaires steatiteux et des grauwackes ou poudingues a fragmens primitifs. La pate de ces conglomerats, qui enchassent du quarz, du granite et du gneis, n'est pas toujours de la nature du thonschiefer, comme dans les grauwackes du Harz (de la grande formation §. 22): le plus souvent elle ressemble au schiste micace. Lorsque les fragmens deviennent tres-rares dans la masse, on confond ces roches avec de vrais micaschistes de transition. Dans ce terrain, compose de tant de couches periodiquement alternantes, la serie schisteuse avec anthracite paroeit un peu plus neuve, lorsqu'on a egard aux grandes masses, que la serie calcaire. Si, d'un cote, les gypses de la Tarantaise et de l'Allee-blanche, renfermant du muriate de soude, du soufre et de la chaux anhydrosulfatee, reposent simplement sur les terrains de transition, sans en etre bien visiblement recouverts, il n'en paroeit pas moins certain, d'apres les discussions interessantes de M. Brochant, que les gypses de Cogne, de Brigg et de Saint-Leonard, en Valais, sont intercales dans le calcaire de transition meme. Les grandes formations §§. 20 et 25 sont les seules des roches intermediaires dans lesquelles les porphyres et les syenites ne paroissent pas s'etre developpes: ce sont celles aussi dans lesquelles abondent le plus les calcaires saccharoides blancs et les masses de talc. Le feldspath lamelleux qui penetre dans les roches calcaires (calciphyres feldspathiques de M. Brongniart), semble n'appartenir qu'au terrain §. 20. Les anthracites sont communs a ce terrain et a la grande formation de thonschiefer et grauwacke, §. 22; mais ils sont moins frequens dans cette derniere formation, ou le carbone est plutot dissemine dans la masse entiere des thonschiefer, des lydiennes et des calcaires, qu'il colore en noir, que concentre dans des couches particulieres. L'anthracite, comme l'observe tres-bien M. Breithaupt, est d'une formation plus ancienne que la houille, et d'une formation plus recente que le graphite ou fer carbure. Le carbone devient plus hydrogene a mesure qu'il s'approche des roches secondaires. Ces roches sont dans les memes rapports geognostiques avec la houille, que le sont l'anthracite avec les roches de transition, et le graphite avec les roches primitives. Je ne connois dans les Andes aucune formation calcaire qui se rapproche de celles contenues dans le groupe §. 20. Seulement a Contreras, au pied oriental de la Cordillere de Quindiu (Nouvelle-Grenade) j'ai vu un calcaire de transition non compacte, mais tres-grenu, gris-bleuatre, mele de grains de quarz, et enchassant des masses siliceuses qui ressemblent au pechstein. Ces masses sont traversees par des filons de calcedoine. Le gisement de ce calcaire de Contreras, au milieu d'un terrain de gres et de gypse secondaires, est difficile a determiner. II. Porphyres et Syenites de transition recouvrant immediatement les roches primitives, Calcaire noir et Grünstein. §. 21. C'est la grande formation, depourvue de grauwacke, de l'Amerique meridionale. Elle offre des problemes assez difficiles a resoudre, et embrasse les porphyres de transition des Andes de Popayan et de cette partie du Perou que j'ai traversee en revenant de la riviere des Amazones aux cotes de la Mer du Sud. Avant de donner la description detaillee de cette formation, je jetterai un coup d'oeil general sur les roches porphyroides de l'Amerique equinoxiale, roches qui ont ete l'objet principal de mes recherches geognostiques. Si en Allemagne et dans une grande partie de l'Europe, comme l'observe tres-bien M. Mohs, le grauwacke caracterise de preference les terrains intermediaires, on peut, dans la region equinoxiale du nouveau continent, regarder les porphyres comme le type principal de ces terrains. Aucune autre chaeine de montagnes ne renferme une plus grande masse de porphyres que les Cordilleres, qui s'etendent presque dans le sens d'un meridien, sur une longueur de 2500 lieues de l'un a l'autre hemisphere. Ces porphyres, en partie riches en minerais d'or et d'argent (§. 23), sont le plus souvent associes aux trachytes qui les surmontent et a travers lesquels agissent encore les forces volcaniques. Cette association de roches metalliferes aux roches produites ou alterees par le feu etonneroit moins les geognostes d'Europe, si elle ne s'etendoit pas a l'or et a l'argent, mais seulement au fer oligiste, au fer oxidule, au fer titane et au cuivre muriate. C'est un des phenomenes les plus frappans et les plus contraires aux opinions qui ont ete partagees long-temps par les hommes les plus celebres. Cependant, et il est necessaire de bien preciser ce fait, il y a proximite dans le gisement, quelquefois analogie dans la composition, et non-identite de formation. La methode, que nous avons adoptee, de circonscrire les differens terrains d'apres leur superposition et la nature des roches qui les recouvrent, servira, je m'en flatte, a jeter quelque lumiere sur les rapports qu'on observe entre les porphyres de transition, les trachytes et les porphyres (secondaires) du gres rouge. J'indiquerai en meme temps les lieux ou l'on n'a point encore decouvert dans la nature des limites aussi tranchees que semble l'exiger l'etat actuel de nos divisions systematiques. Les porphyres de l'Amerique meridionale peuvent etre consideres de deux manieres: selon leur position geographique, et selon la difference que presente l'age de leur formation. En Europe, nous trouvons les porphyres et syenites de transition (Saxe, Vosges, Norwege), generalement eloignes des trachytes (Siebengebirge pres de Bonn, Auvergne); il arrive cependant aussi que les porphyres et les trachytes se trouvent reunis (Hongrie), et alors les premiers sont quelquefois metalliferes. Dans l'Amerique meridionale les porphyres et les trachytes sont tous accumules sur une bande etroite dans la partie la plus occidentale et la plus elevee du continent, au bord de cet immense bassin de l'ocean Pacifique, qui est limite, du cote de l'Asie, par les volcans et les roches trachytiques des eiles Kuriles, Japonoises, Philippines et Moluques. A l'est des Andes, dans toute la partie orientale de l'Amerique du Sud, sur une etendue de terrain de plus de 500,000 lieues carrees, soit dans les plaines, soit dans des groupes de montagnes isolees, on ne connoeit encore ni du porphyre de transition, ni du veritable basalte avec olivine, ni du trachyte, ni un volcan actif. Les phenomenes du terrain trachytique paroissent restreints a la crete et a la lisiere des Andes du Chili, du Perou, de la Nouvelle-Grenade, de Sainte-Marthe et de Merida. J'enonce ce fait d'une maniere absolue, pour exciter les voyageurs a l'eclaircir davantage ou a le refuter. Dans cette meme region, qui s'etend de la pente orientale des Andes vers les cotes de la Guiane et du Bresil, on a trouve de l'or, du platine, du palladium, de l'etain et d'immenses amas de fer speculaire et magnetique; mais, au milieu de beaucoup d'indices d'argent sulfure ou muriate, on n'y a pas decouvert un geite de minerais que l'on puisse comparer pour la richesse aux geites du Perou et du Mexique. Je n'ai meme pas vu de porphyres de transition ni de porphyres de gres rouge dans la chaeine cotiere de Venezuela, dans la Sierra de la Parime, ni dans les plaines entre l'Orenoque, le Rio Negro et la riviere des Amazones. Je ne connois a l'est des Andes qu'un petit lambeau de terrain trachytique, pres de Parapara (bord septentrional des Llanos de Caracas), ou, dans un lieu infiniment interessant pour la geognosie, de la phonolithe et du mandelstein avec pyroxene sont superposes a des serpentines et des thonschiefer de transition: mais ces phonolithes se trouvent sur la lisiere de la Cordillere de Caracas, qui se lie par Nirgua, Tocuyo et le Paramo de Niquitao aux Andes de Merida. M. d'Eschwege a trouve au Bresil quelques porphyres intercales par couches dans des formations primitives de granite-gneis; mais il pense que ce vaste pays est egalement depourvu de formations independantes de porphyre de transition, de trachyte, de basalte ou de dolerite. En Amerique, la prodigieuse longueur du cours des fleuves et le nombre de leurs affluens facilitent, par l'examen des pierres roulees, la connoissance des contrees qu'on n'a pu parcourir. Entre Carare et Honda j'ai ramasse, au milieu d'un terrain de gres, des fragmens de trachytes que la riviere de la Magdeleine recoit des Andes d'Antioquia et de Herveo (Nouvelle-Grenade). Quant a la nature des formations de porphyre accumulees dans la bande occidentale et montagneuse de l'Amerique du Sud et du Mexique, qui n'est qu'une prolongation de cette meme bande, nous y ferons connoeitre deux groupes bien distincts. Le premier (§. 21), non metallifere, repose immediatement sur des roches primitives; le second (§. 23), souvent metallifere, repose sur un thonschiefer ou sur des schistes talqueux avec calcaire de transition: l'un et l'autre, par leur gisement et leur composition, se rapprochent quelquefois des porphyres trachytiques, comme les porphyres du groupe §. 22 se rapprochent de ceux du gres rouge. En effet, les porphyres de transition des Andes du Perou et du Mexique se trouvent souvent recouverts de trachytes, tandis que les porphyres de quelques parties de l'Allemagne sont recouverts de la formation secondaire du gres rouge, qui renferme a son tour des porphyres et du mandelstein. Dans l'Amerique equinoxiale les limites entre les porphyres de transition et les veritables trachytes, reconnus pour etre des roches volcaniques, ne sont pas faciles a fixer. En s'elevant des porphyres qui renferment les riches mines d'argent de Pachuca, de Real del Monte et de Moran (porphyres depourvus de quarz, souvent abondans en amphibole et en feldspath commun), vers les trachytes blancs avec perlite et obsidienne de l'Oyamel et du Cerro de las Navajas (montagne des Couteaux, a l'est de Mexico); en passant, dans les Andes de Popayan, des porphyres de transition recouverts sur quelques points de calcaire noir a petits grains, aux trachytes ponceux qui entourent le volcan de Purace, on trouve des roches porphyriques intermediaires que l'on est tente de regarder tantot comme des porphyres de transition, tantot comme des trachytes. Il y a plus encore: au milieu de ces porphyres du Mexique, si riches en minerais d'or et d'argent, on observe des couches (Villalpando pres de Guanaxuato) depourvues d'amphibole, mais riches en cristaux effiles de feldspath vitreux. On ne sauroit les distinguer des phonolithes (porphyrschiefer) du Biliner-Stein en Boheme. Generalement, comme le savant professeur de mineralogie a Mexico, M. Andres del Rio, un des eleves les plus distingues de l'ecole de Werner, l'avoit observe avant moi; generalement, les porphyres de transition de la Nouvelle- Espagne contiennent a la fois deux especes de feldspath, le commun et le vitreux. Il m'a paru que le dernier devient plus abondant dans les couches superieures, a mesure que l'on approche des porphyres trachytiques. Dans la partie equinoxiale du nouveau continent on est tout aussi embarrasse de la liaison des porphyres souvent argentiferes avec les trachytes qui renferment des obsidiennes, qu'on l'est en Europe de la liaison intime des dernieres roches de transition avec les plus anciennes roches secondaires, ou de l'alternance des micaschistes de transition, qui ont toute l'apparence de roches primitives, avec les grauwackes et les conglomerats tres-anciens. La source de cet embarras n'est cependant pas la meme. Il n'y a rien de bien etonnant de voir qu'a des roches fragmentaires ou remplies d'orthoceratites, de madrepores et d'encrinites, puissent succeder de nouveau des roches depourvues de debris organiques, et ressemblant a des gneis et a des micaschistes primitifs. Cette alternance, cette absence locale et periodique de la vie, se manifeste jusque dans les terrains secondaires et tertiaires: elle y paroeit indiquer differens etats de la surface du globe ou du fond des bassins dans lesquels les depots pierreux se sont formes. Au contraire, l'association des porphyres de transition et des trachytes, l'apparence frequente du passage de ces roches les unes aux autres, est un phenomene qui semble attaquer la base des idees geogoniques les plus generalement recues. Faut-il considerer les trachytes, les perlstein et les obsidiennes, comme etant de meme origine que les thonschiefer a trilobites et que les calcaires noirs a orthoceratites? ou ne doit-on pas plutot admettre que l'on a trop restreint le domaine des forces volcaniques, et que ces porphyres, en partie metalliferes, depourvus de quarz, meles d'amphibole, de feldspath vitreux et meme de pyroxene, sont, sous le rapport de l'age relatif et de l'origine, lies aux trachytes, comme ces trachytes, confondus jadis avec les porphyres de transition sous le nom de porphyres trappeens, sont lies aux basaltes et aux veritables coulees de laves que vomissent les volcans actuels? La premiere de ces hypotheses me paroeit repugner a tout ce que l'on a observe en Europe, a tout ce que j'ai pu recueillir sur les obsidiennes et les perlstein au Pic de Teneriffe, aux volcans de Popayan et de Quito. La seconde hypothese paroeitra moins hardie, moins denuee de vraisemblance peut-etre, lorsqu'on ne restreindra plus l'idee d'une action volcanique aux effets produits par les crateres de nos volcans enflammes, et que l'on envisagera cette action comme due a la haute temperature qui regne partout, a de grandes profondeurs, dans l'interieur de notre planete. On a vu dans les temps historiques, meme dans ceux qui sont le plus rapproches de nous, sans flammes, sans ejection de scories, des roches de trachytes s'elever du sein de la mer (archipel de la Grece, eiles Acores et Aleutiennes); on a vu des boules de basalte, a couches concentriques, sortir de la terre toutes formees, et s'amonceler en petits cones (Playas de Jorullo au Mexique). Ces phenomenes ne font-ils pas deviner, jusqu'a un certain point, ce qui, sur une echelle beaucoup plus grande, a pu avoir lieu jadis dans la croaute crevassee du globe, partout ou cette chaleur interieure, qui est independante de l'inclinaison de l'axe de la terre et des petites influences climateriques, a souleve, par l'intermede de fluides elastiques, des masses rocheuses plus ou moins ramollies et liquefiees? Lorsqu'on parle de ces terrains de transition qui, dans les Andes du Mexique, de la Nouvelle-Grenade et du Perou, semblent lies aux trachytes dont ils sont recouverts, on ne peut eviter de se livrer a des considerations sur l'origine des roches. C'est l'imperfection de notre classification des terrains qui conduit a cette digression. Le mot roche volcanique annonce, comme je l'ai rappele plus haut, un principe de division tout different de celui que l'on suit en separant les roches primitives des roches secondaires. Dans le dernier cas on indique un fait susceptible d'une observation directe. Sans remonter plus haut, en n'examinant que l'etat actuel des choses, on peut decider si une association de roches est entierement depourvue de debris organiques, si aucun banc arenace ou fragmentaire ne s'y trouve intercale, ou si ces debris et ces bancs y paroissent. Au contraire, en opposant les terrains volcaniques aux terrains primitifs et secondaires, on agite une question entierement historique; on engage le geognoste, malgre lui, a prononcer, comme par exclusion, sur l'origine des granites, des syenites et des porphyres. Ce n'est plus l'observation directe de ce qui est, la presence ou le manque d'empreintes de corps organises; c'est un raisonnement fonde sur des inductions et des analogies plus ou moins contestees, qui doit decider sur la volcanicite ou la non-volcanicite d'une formation. Entre les produits que le plus grand nombre des geognostes, je pourrois dire tous ceux qui ont vu l'Italie, l'Auvergne, les Canaries et les Andes, considerent comme decidement ignes (porphyres a base d'obsidienne, porphyres semi-vitreux, porphyres trachytiques), et les porphyres qui, par leur composition, par la presence du quarz, par l'absence du feldspath vitreux, de l'amphibole et du pyroxene, se rapprochent des porphyres du grauwacke, se trouvent placees dans la Cordillere des Andes des couches dont la base passe a la phonolithe (a la base du porphyrschiefer), et dans lesquelles le feldspath vitreux, l'amphibole et quelquefois meme le pyroxene remplacent progressivement le feldspath commun. On ne sait alors ou finissent les porphyres qu'on est convenu d'appeler de transition, et ou commencent les trachytes. Je ne doute pas que de nouveaux voyages, et l'examen approfondi des roches feldspathiques intermediaires et de celles que renferme le gres rouge, ne repandent plus de jour sur ce probleme interessant; dans l'etat actuel de nos connoissances, je me laisserai guider dans la separation des porphyres et des trachytes des Andes, moins par des idees de composition, que par des idees de gisement. Il est extremement rare de rencontrer dans les veritables trachytes de l'Amerique equinoxiale du feldspath commun; mais le feldspath vitreux, l'amphibole et le pyroxene s'observent a la fois dans ces roches et dans les porphyres §§. 21 et 23, qui sont en partie recouverts d'un calcaire noir de transition et de gres rouge secondaire. On rencontre egalement peu de quarz dans les porphyres de l'Amerique equinoxiale et dans les trachytes; cette substance caracterise, au contraire, la plupart des porphyres de l'Europe, §§. 22 et 24. Son absence totale est cependant si peu un indice certain d'une formation trachytique, qu'il se trouve, quoiqu'en petites masses, dans quelques trachytes des Dardanelles, de la Hongrie et du Chimborazo. M. de Buch a observe pres des basaltes d'Antrim un porphyre tres-analogue a ceux du gres rouge et renfermant a la fois, et du quarz et du feldspath commun dissemines, et des couches intercalees de perlstein et d'obsidienne. Ce phenomene se repete aussi dans les trachytes des Monts Euganeens. Le mica et surtout les grenats paroissent, quoique tres-rarement, dans les porphyres de transition des deux continens; mais ils se montrent egalement dans les trachytes de l'ancien volcan de Yanaurcu, au pied du Chimborazo et dans les conglomerats trachytiques de l'Europe. Les porphyres, aussi bien que les trachytes des Andes, offrent de superbes colonnes: la masse des trachytes colonnaires est quelquefois tellement compacte, qu'on a de la peine a y decouvrir des pores et des gercures. Il resulte de ces donnees, que les caracteres de composition (caracteres absolus et isoles, par lesquels on voudroit distinguer les porphyres de transition et les trachytes des Cordilleres) sont tres-incertains: c'est l'ensemble de tous les caracteres oryctognostiques, c'est le passage d'une roche a l'etat vitreux, ce sont l'obsidienne, le perlstein et les masses scorifiees qu'elle enchasse, ce sont des rapports de gisement, qui la font reconnoeitre comme trachyte. On se decide d'ailleurs plus facilement a nommer certaines formations des trachytes, qu'a prononcer sur l'origine pretendue neptunienne de quelques autres. Les trachytes et les porphyres de transition peuvent etre egalement superposes aux roches primitives; ce ne sont pas les roches qui les supportent, mais celles dont elles sont recouvertes, qui doivent guider le geognoste. Le plus souvent les trachytes et les porphyres des Cordilleres ne sont pas recouverts par d'autres formations; mais, partout ou ce recouvrement a lieu et ou la roche superposee est indubitablement de transition, cette superposition seule decide, selon moi, le probleme de classification que l'on veut resoudre. Les trachytes ne servent de base qu'a d'autres produits ignes; tres-rarement (Hongrie) a des formations tertiaires identiques avec le terrain de Paris; plus rarement encore (archipel des Canaries, Andes de Quito) a de minces formations de gypse et d'oolithes intercalees ou superposees aux tufs ponceux. Quelquefois les porphyres de transition de l'Amerique (et non les trachytes) sont recouverts de calcaire noir a petits grains, de gres rouge ou de calcaire alpin; et c'est lorsque ce recouvrement ne s'observe pas, qu'on est oblige d'avoir recours a la methode peu saure de l'induction et des analogies. On risqueroit peut-etre moins de separer ce que la nature a reuni par des liens assez etroits, si l'on decrivoit provisoirement sous la denomination vague de porphyres amphiboliques (hornblendiges porphyrgebilde) l'ensemble de ces roches des Cordilleres a structure porphyroide (porphyres de transition et porphyres trappeens ou trachytes), qui sont presque depourvus de quarz, et qui abondent a la fois en amphibole et en feldspath lamelleux ou vitreux. Apres avoir donne cet apercu general des porphyres de transition des Andes, et de leur affinite geognostique avec les trachytes, je vais caracteriser le groupe de porphyres qui sont anterieurs au calcaire a entroques et a orthoceratites, au thonschiefer et au micaschiste de transition. On peut distinguer dans ce groupe equatorial, la ou je l'ai observe avec soin dans l'hemisphere boreal (Cordilleres de Popayan et d'Almaguer) et dans l'hemisphere austral (montagnes d'Ayavaca sur les limites des Andes de Quito et du Perou), plusieurs formations partielles; savoir: Porphyres; Grünstein et argiles ferrugineuses; Syenites; (Granites de transition?); Calcaires charges de carbone; (Gypses de transition?). Des porphyres dont l'aspect est souvent trachytique dominent dans ce groupe. Je n'y ai vu alterner ni les porphyres avec la syenite ou avec le calcaire de transition, ni la syenite avec le grünstein, comme c'est le cas (§§. 23 et 24) au Mexique et dans plusieurs parties de l'Europe. La syenite des Andes de Baraguan, de Chinche et de Huile (a l'est du Rio Cauca entre Quindiu et Guanacas, lat. bor. 2° 45' a 4° 10'), est superposee a des roches primitives, a du granite-gneis, peut-etre meme a du micaschiste. C'est une formation partielle qui est parallele aux porphyres de Popayan, recouverts de calcaire fortement charge de carbone. Cette syenite est composee de beaucoup d'amphibole et de feldspath commun blanc-rougeatre, contenant tres-peu de mica noir et de quarz. Le feldspath domine dans la masse; le quarz (ce qui est assez remarquable dans une syenite) est translucide, gris-blanchatre et constamment cristallise, comme l'est le quarz des porphyres d'Europe du groupe §. 24. L'agregation des parties est presque en plaques, de sorte que la syenite de transition des Cordilleres n'a pas la texture entierement grenue, comme la syenite de Plauen pres de Dresde; la texture (flasrige Structur) de cette roche se rapproche au contraire de celle du gneis. Ce qui eloigne la syenite du Nevado de Baraguan, des granites avec amphibole (§. 7), ou d'une syenite que l'on pourroit croire primitive (§. 8), est son passage au trachyte et sa liaison avec les grünstein de transition qui lui sont superposes, entre le Paramo d'Iraca et le Rio Paez (province de Popayan). Le quarz disparoeit peu a peu dans cette syenite de transition, l'amphibole devient plus abondant, et la roche prend la structure porphyroide. On trouve alors dans une pate petrosiliceuse (euritique), de couleur rougeatre ou gris-jaunatre, tres-peu de mica noir, beaucoup d'amphibole, et des cristaux epars, tres-alonges, de feldspath, dont l'eclat est plutot vitreux que nacre, et dont les lames peu prononcees ont des gercures longitudinales. Ce n'est plus une syenite, mais un trachyte dont des masses enormes et diversement groupees s'elevent, comme des chateaux forts, sur la crete des Andes. Ces passages me paroissent tres-remarquables et semblent fortifier les doutes qu'on peut avoir sur l'origine de toutes les roches primitives grenues. Il est tresdifficile, dans les contrees equatoriales, d'appliquer des noms a un grand nombre de formations melees de feldspath et d'amphibole, parce que ces formations se trouvent sur la limite entre les syenites de transition et les trachytes. Tantot grenues, tantot porphyroides, elles ressemblent ou aux syenites du groupe §. 23 de Hongrie, ou aux trachytes du Drachenfels, pres de Bonn, et du grand plateau de Quito. Comme on observe que les porphyres de transition de Popayan passent aussi aux trachytes, le parallelisme de formation entre les syenites et les porphyres du meme groupe §. 21 se trouve confirme par les rapports geognostiques de deux roches avec une troisieme. Quelquefois (pied du volcan de Purace, pres de Santa-Barbara) un granite de transition, tres-abondant en mica, semble separer les syenites qui enchassent du quarz et du feldspath commun a eclat nacre, des vrais trachytes, dont la pate, vers le sommet des montagnes (a 2200 toises de hauteur), devient vitreuse et passe a l'obsidienne. Dans tout le groupe des syenites et des porphyres que j'ai examines dans la Cordillere des Andes (entre le Nevado de Tolima et les villes de Popayan, d'Almaguer et de Pasto), le porphyre qui porte le plus decidement le caractere d'une roche de transition, est celui qui entoure les basaltes de la Tetilla de Julumito (rive gauche du Rio Cauca a l'ouest de Popayan), et qui est recouvert (a Los Serillos) d'un calcaire noiratre, passant du compacte au calcaire a petits grains, traverse de filons de spath calcaire blanc, et tellement surcharge de carbone, que dans quelques parties il tache fortement les doigts et que le carbone s'y trouve accumule en poudre sur les fissures de stratification. Cette accumulation de carbone, que l'on observe egalement dans les schistes anthraciteux et alumineux, et dans les lydiennes et le kieselschiefer, ne laisse aucun doute sur la question de savoir si le calcaire noiratre de Los Serillos (pres de Julumito), dans lequel je n'ai pu trouver aucune trace de debris organiques, est un vrai calcaire de transition. La lydienne que l'on observe dans les thonschiefer de transition de Naila et de Steben (montagnes de Bareuth), offre aussi ce depot de poudre charbonneuse entre ses fissures; et des echantillons qui ne tachent pas les doigts m'ont servi a exciter les nerfs d'une grenouille, en les employant dans le cercle galvanique conjointement avec le zinc. Le calcaire noir de transition (nero antico), si celebre parmi les anciens sous le nom de marmor Luculleum, contient aussi, d'apres l'analyse de M. John, 3/4 p. c. d'oxide de carbone, distribue comme principe colorant dans toute la masse de la roche. Un porphyre recouvert d'un calcaire fortement carbure, noir-grisatre, a grains fins, et peutetre depourvu de petrifications, est pour le geognoste, qui met plus d'importance au gisement qu'a la composition des terrains, un porphyre de transition, quelle que soit la nature oryctognostique de ses parties constituantes. Les trachytes, comme nous l'avons expose plus haut, n'ont ete trouves recouverts jusqu'ici que par d'autres roches volcaniques, par des tuffs ou par quelques formations tertiaires tresrecentes. Le porphyre de transition de Popayan, auquel le calcaire noir est superpose, est assez regulierement stratifie; il renferme peu d'amphibole, tres-peu de quarz en petits cristaux implantes dans la masse, et un feldspath qui passe du commun au feldspath vitreux. Je n'y ai point vu de pyroxene, pas plus que dans les porphyres de Pisoje, qui forment, a la pente occidentale du volcan de Purace, sur la rive droite du Rio Cauca, une magnifique colonnade. Ce porphyre de Pisoje est divise en prismes a 5--7 pans et de 18 pieds de long, prismes que j'ai pris de loin pour du basalte, et que l'on retrouve en Europe dans beaucoup de porphyres de transition, meme dans ceux du gres rouge. Une rangee perpendiculaire de ces colonnes est placee sur une rangee entierement horizontale. Dans une pate gris-verdatre, vraisemblablement de feldspath compacte colore par l'amphibole, l'on observe tres-peu de cristaux d'amphibole visibles a l'oeil nu, du mica noir, et beaucoup de feldspath laiteux, non vitreux. Le quarz manque dans ces porphyres colonnaires, comme dans presque tous les porphyres de transition et metalliferes du Mexique. La roche de Pisoje etant geographiquement assez eloignee des porphyres de Julumito lies au calcaire de transition, il reste douteux si elle n'appartient pas deja a la formation de trachyte. Quant aux porphyres de transition de Julumito, on ne sait pas sur quel terrain ils reposent; car, depuis Quilichao jusqu'a l'arete de los Robles, qui est situee a l'ouest du Paramo de Palitara et du volcan de Purace, et qui partage les eaux entre la mer du Sud et la mer des Antilles, on ne voit plus de roches primitives au jour. L'Alto de los Robles meme est compose de schiste micace (direction des couches N. 60° E., comme le gneis-micaschiste des Andes de Quindiu, incl. 50° auSO.). Cette roche primitive des Robles s'observe egalement pres de Timbio et pres des sources du Rio de las Piedras (hauteur 1004 toises), sortant au-dessous des trachytes de Purace et de Sotara. Sur le schiste micace reposent, comme je l'ai vu tres-clairement dans les ravins entre le Rio Quilquase et le Rio Smita, les roches porphyriques du Cerro Broncaso, et celles qui suivent vers le sud entre Los Robles et le Paramillo d'Almaguer. Aussi de grands blocs de quarz que l'on trouve epars au milieu de ces terrains de porphyre et de trachyte, annoncent partout la proximite du micaschiste. C'est ici que se presente la question importante de savoir si les roches a structure porphyroide, au sud de l'Alto de los Robles, formant la pente occidentale du volcan de Sotara et des Paramos de las Papas et de Cujurcu (voyez ma carte du Rio Grande de la Magdalena ), sont de veritables porphyres de transition? Je vais exposer les faits tels que je les ai observes. Les porphyres de Broncaso (lat. bor. 2° 17', long. 79° 3', en deduisant cette position des observations astronomiques que j'ai faites a Popayan et a Almaguer) renferment beaucoup et de tres-grands cristaux de feldspath blanc-laiteux, des cristaux effiles d'amphibole qui se croisent, comme le feldspath dans le porphyre appele vulgairement par les antiquaires serpentino verde antico ou porfido verde (grün-porphyr de Werner), et un peu de quarz translucide cristallise. Souvent les cristaux d'amphibole et de feldspath partent d'un meme point. Dans l'interieur du feldspath on trouve d'autres cristaux tres-petits et noirs, que j'ai cru etre plutot du pyroxene que de l'amphibole. Le point central autour duquel se groupent les lames cristallisees du leucite (amphigene) est egalement, d'apres M. de Buch, un cristal microscopique de pyroxene, et dans les grünstein porphyriques de Hongrie M. Beudant a trouve des grenats au milieu des cristaux d'amphibole. Des croisemens et des agroupemens bizarres de cristaux de feldspath commun et d'amphibole caracterisent tous les porphyres entre le Cerro Broncaso et les vallees de Quilquase et de Rio Smita, porphyres qui sont irregulierement stratifies en stratification non concordante (bancs de 2 -- 3 pieds; direction N. 53° O., inclin. 40° au nord-est) avec les couches du micaschiste. Leur pate differe de celle des porphyres de Julumito: elle est d'un beau vert d'asperge, a cassure compacte ou ecailleuse, quelquefois assez tendre, offrant une raclure grise et prenant au souffle une couleur tres-foncee; d'autres fois elle est dure et ressemble au jade ou a la phonolithe (klingstein, base du porphyrschiefer), c'est-a-dire qu'elle appartient au feldspath compacte. Sur les bords du Rio Smita j'ai vu dans ces porphyres, qui passent au porfido verde des antiquaires, des couches presque depourvues de cristaux dissemines: ce sont des masses de jade (saussurite) vert d'asperge et vert poireau, presque semblables a celles qu'on trouve dans les roches d'euphotide de transition; elles sont traversees par une infinite de petits filons de quarz. Plus au sud, les porphyres verts a base de feldspath compacte conservent leurs cristaux epars de quarz, et ce caractere les eloigne du porphyrschiefer appartenant au terrain trachytique, dans lequel le quarz est un phenomene isole, d'une rarete extreme. En meme temps on commence a y trouver du mica noir et une variete de pyroxene, a surface tres-eclatante, a cassure transversale conchoide, et d'une couleur vert-olive si peu foncee qu'on la prendroit presque pour l'olivine des basaltes. Ce porphyre a mica noir remplit les vallees des petites rivieres de San-Pedro, Guachicon et Putes; il se cache quelquefois (vallee de la Sequia) sous des amas de grünstein en boules de 4--6 pouces de diametre, et finit par ne plus etre stratifie, mais separe, exactement comme le grünstein superpose, en boules qui se divisent par decomposition en pieces separees concentriques. Souvent les boules de porphyre, d'une extreme durete, sont d'une composition identique avec le porphyre en masse. Leur noyau est solide et ne renferme ni quarz ni calcedoine: elles forment des couches particulieres de six pieds d'epaisseur, et se trouvent comme implantees et fondues dans la roche non alteree par des influences atmospheriques ou galvaniques. Cette structure n'est pas un effet de la decomposition, comme on l'a cru de quelques basaltes colonnaires qui se separent en boules. Elle me paroeit plutot tenir a un arrangement primitif des molecules. Je crois que nulle part dans le monde on ne trouve une plus grande accumulation de roches a structure globuleuse que dans la Cordillere des Andes, surtout depuis Quilichao (entre Caloto et Popayan) jusqu'a la petite ville d'Almaguer. En descendant du Cerro Broncaso, et en traversant successivement (toujours dans la direction du nord au sud, et dans le chemin de Popayan a Almaguer) les vallees de Smita, de San Pedro et de Guachicon, on observe, au milieu d'un porphyre qui n'est pas divise en boules, et qui renferme plus d'amphibole et plus de pyroxene vert d'olive que de feldspath vitreux, un phenomene geognostique tres-remarquable. Des fragmens anguleux de gneis de 3 a 4 pouces carres sont empates dans la masse. C'est un gneis abondant en mica: c'est le phenomene que presentent les trachytes du Drachenfels (Siebengebirge sur les bords du Rhin) et, dans ses couches inferieures, la phonolithe (porphyrschiefer) du Biliner Stein en Boheme. Non loin de la, dans la partie nord-est de cette meme vallee de Rio Guachicon (vallee de 400 toises de profondeur, dans laquelle je me suis arrete une journee entiere), la roche porphyroide a la structure la plus composee que j'aie jamais trouvee dans les porphyres de transition et dans les trachytes porphyriques. On y observe a la fois des cristaux de feldspath vitreux, d'amphibole, de mica noir, de quarz et de pyroxene, dont la couleur se rapproche de celle de l'olivine. Le quarz ne se presente qu'en de trespetites masses; mais il n'est certainement pas dau a des infiltrations posterieures. Apres avoir passe, plus au sud encore, l'arete qui separe le Rio Guachicon du Rio Putes, les cinq substances disseminees dans la masse disparoissent presque entierement; la roche porphyroide devient homogene, extremement dure, et de ce beau noir que l'on admire dans quelques lydiennes tres-pures, ou dans la base du pretendu jaspe porphyrique de l'Altai, ou dans de certaines statues egyptiennes faussement appelees basaltes ou basanites. Je doute que ce soit du pechstein: c'est plutot un feldspath compacte, colore en noir par l'amphibole ou par quelque autre substance. La cassure de cette pate homogene est unie ou conchoide, a grandes cavites aplaties; elle est sans eclat, presque entierement matte. Je n'y ai reconnu que peu de cristaux tres-effiles de feldspath vitreux et des prismes hexaedres de pyroxene conchoide (muschliger augit de Werner), qui ont la couleur noire du melanite, et qui ressemblent, quant a l'eclat et a la cassure, au pyroxene du Heulenberg pres de Schandau en Saxe. Je viens de decrire successivement les porphyres de Julumito, recouverts de calcaire noir et carbure; ceux de Pisoje, a feldspath non vitreux, et divises en prismes; les porphyres verts renfermant du quarz, et frequemment des cristaux croises d'amphibole du Cerro Broncaso et de la vallee de Smita; les roches porphyroides du Rio Guachicon, enchassant des fragmens de gneis; enfin, celles du Rio Putes, dont la masse noire homogene et compacte n'offre que tres-peu de cristaux dissemines. Toutes ces roches appartiennent-elles a une meme formation, qui offre des caracteres particuliers dans les diverses vallees de la Cordillere de Sotara et de Cujurcu? On ne sauroit revoquer en doute que les fragmens de gneis empates dans les roches qui avoisinent le Rio Guachicon, ne caracterisent de veritables trachytes. Ce sont, pour ainsi dire, les precurseurs de ces trachytes et de cet enorme amas de ponces que j'ai trouves, vingt lieues plus au sud, sur les rives du Mayo. Mais faut-il etendre cette denomination de trachyte sur tous les porphyres qui se prolongent par le Cerro Broncaso vers les micaschistes de l'Alto de los Robles, et qui sont en partie couverts, non de dolerites, mais de grünstein de structure globuleuse, ressemblant entierement au grünstein du terrain de transition en Allemagne? D'apres ce que j'ai expose plus haut sur le passage insensible des porphyres metalliferes du Mexique a des roches qui renferment de l'obsidienne et du perlstein, et dont la volcanicite n'est presque plus contestee aujourd'hui, je ne sais pas comment decider une question si importante. Elle presente moins un probleme de gisement qu'un probleme que j'appellerois historique, parce qu'il est l'objet de la geogonie, et qu'il tient aux idees que l'on se forme sur l'origine des divers depots rocheux qui couvrent la surface du globe. Le geognoste a rempli sa tache lorsqu'il a examine les rapports de gisement et de composition. Il n'est pas temps encore de prononcer sur des masses qui semblent osciller entre les porphyres de transition et ces trachytes exclusivement appeles porphyres volcaniques. Ce qui paroeit difficile a debrouiller aujourd'hui, deviendra clair peut-etre lorsque l'Amerique equinoxiale, libre, civilisee, plus accessible aux voyageurs, sera exploree par un grand nombre d'hommes instruits; lorsque de nouvelles decouvertes auront fait concevoir que des effets volcaniques, lents et progressifs, ou brusques et tumultueux, ont pu avoir lieu partout ou des crevasses ont ouvert des communications avec l'interieur du globe dans lequel regne encore aujourd'hui, d'apres toutes les apparences, une temperature extremement elevee. Nous avons deja des preuves certaines que des roches presque identiques avec celles qui appartiennent au terrain trachytique ou qui surmontent ce terrain, sont intercalees dans de veritables porphyres de transition et dans des porphyres du gres rouge. Tous les geognostes connoissent les observations importantes, faites par M. de Buch, pres de Holmstrandt, dans le golfe de Christiania en Norwege. Un porphyre renfermant, outre le feldspath commun (non vitreux), tres-peu d'amphibole et de quarz, se trouve place entre un calcaire a orthoceratites et une syenite a zircons. Personne ne s'est encore refuse a considerer ce porphyre comme une formation de transition; personne ne l'a appele trachyte. Or, au milieu de ce porphyre on voit, non un filon (dyke), mais une couche de basalte avec pyroxene. "Le porphyre de Holmstrandt, dit M. de Buch, devient basalte par ces memes passages et ces nuances insensibles que l'on trouve si communement en Auvergne. Ce basalte est tres-noir, presque a petits grains, depourvu de feldspath, mais rempli de pyroxene. Quelquefois il devient bulleux, et prend un aspect rouge et scorifie, au contact avec le porphyre." Il ne seroit peutetre pas plus etrange de decouvrir des fragmens de gneis enveloppes dans ce basalte bulleux et scorifie, rempli de pyroxenes, que de les avoir observes dans les basaltes du Bärenstein (pres d'Annaberg en Saxe) ou dans les trachytes de la vallee du Rio Guachicon (dans l'Amerique meridionale). Quelle est l'origine de cette couche basaltique, bulleuse, pyroxenique, de Holmstrandt? Est-elle, comme tout le porphyre, une coulee venue d'en-bas par des filons? La presence d'une masse que l'on croit d'origine ignee, offre-t-elle un motif suffisant pour admettre que tout le terrain auquel cette masse appartient doive etre separe des formations de transition et classe parmi les trachytes? J'en doute: les roches incontestablement volcaniques du Rio Guachicon, enchassant des fragmens de gneis, sont geognostiquement liees aux porphyres de transition, comme, sur d'autres points du globe, ceux-ci sont geognostiquement lies aux porphyres du gres rouge. Je separe provisoirement toutes les roches porphyroides placees au sud d'une arete composee de micaschiste (Alto de los Robles), de celles qui se trouvent au nord-ouest de cette arete, et qui, pres de Julumito, sont recouvertes d'un calcaire abondant en carbone. C'est a cette derniere classe, et par consequent au terrain de transition (§. 21) qui fait l'objet special de cet article, que je rapporte, avec plus de confiance peut-etre, les porphyres de Voisaco (Andes de Pasto, lat. 1° 24' bor.) et ceux d'Ayavaca (Andes du Perou, lat. 4° 38' austr.). Voici les circonstances de gisement de ces deux roches. Les porphyres et trachytes de Popayan, du Cerro Broncaso, du Rio Guachicon et du Rio Putes sont separes de ceux de la province de Pasto par un plateau de roches primitives, qui s'etend depuis Almaguer jusqu'au Tablon, au pied du Paramo de Puruguay. C'est au sud du Tablon que recommencent les porphyres: pres du village indien de Voisaco ils se distinguent par une polarite que nous avons trouvee sensible jusque dans les plus petits fragmens. On voit tresclairement que ces porphyres sont places sur le micaschiste. Une masse gris-verdatre enchasse a la fois deux varietes de feldspath, le commun et le vitreux: phenomene que l'on rencontre souvent dans les porphyres de transition du Mexique (§. 23). Quelques cristaux aciculaires de pyroxene penetrent entre les feuillets du feldspath vitreux. Un rocher place a l'entree du village nous a offert en petit, a M. Bonpland et moi, tous les phenomenes de la serpentine polarisante de Bareuth (§. 19) que j'avois decouverte en 1796. Dans l'hemisphere austral, en suivant les Andes de Quito par Loxa a Ayavaca, on voit paroeitre alternativement au jour les roches primitives et les porphyres, phenomene que nous avons deja signale plus haut (§§. 5 et 6). Presque chaque fois que la masse des montagnes s'eleve, les porphyres se montrent, et cachent aux yeux du voyageur le gneis et le micaschiste. A ces porphyres, qui offrent d'abord plus de feldspath commun que de feldspath vitreux, succedent des trachytes, et ces trachytes annoncent assez generalement deux phenomenes combines, le voisinage de quelque volcan encore actif, et l'elevation rapidement croissante de la Cordillere, dont les sommets vont atteindre ou depasser la limite des neiges perpetuelles (2460 toises sous l'equateur). J'ajouterai que les trachytes recouvrent immediatement ou les roches primitives ou les porphyres de transition, et que dans ceux-ci le feldspath vitreux, l'amphibole et quelquefois le pyroxene deviennent plus frequens a mesure qu'ils se trouvent plus pres des roches volcaniques. Tel est le type que suivent les phenomenes de gisement dans la region equinoxiale du Mexique et de l'Amerique meridionale; type que j'ai reconnu surtout dans les coupes que j'ai dessinees sur les lieux en 1801 et 1803. Les porphyres d'Ayavaca forment une partie de cet enchaeinement general de roches feldspathiques. Sur les schistes micaces de Loxa, ou vegetent les plus beaux arbres de quinquina que l'on connoisse jusqu'ici (Cinchona condaminea), sont places des porphyres qui remplissent tout le terrain compris entre les vallees du Catamayo et du Cutaco. Pres de Lucarque et d'Ayavaca (hauteur 1407 toises), ces porphyres se trouvent divises en boules a couches concentriques, et des amas de ces boules reposent (vallee du Rio Cutaco; hauteur du fond de ce ravin, 756 toises) sur un porphyre qui renferme du feldspath commun et de l'amphibole, qui est regulierement stratifie, et dont la masse, tres-dense, est traversee par une infinite de petits filons de spath calcaire, tout comme le thonschiefer de transition en Europe est traverse par des veines de quarz. Les mesures barometriques que j'ai faites, assignent a ces porphyres d'Ayavaca, que je ne crois pas etre des trachytes, 4800 pieds d'epaisseur. Je ne cite pas, comme appartenant au groupe §. 21, les roches porphyroides vertes, depourvues de quarz, renfermant tres-peu d'amphibole et beaucoup de feldspath commun laiteux, qui constituent les Andes de l'Assuay. Ils sont places sur les micaschistes primitifs de Pomallacta, et j'ai eu occasion de les examiner dans leur enorme epaisseur depuis 1500 jusqu'a 2074 toises de hauteur au-dessus du niveau de l'ocean. Ils sont generalement stratifies; mais cette stratification, souvent tres-reguliere (N. 45° O.), s'observe aussi dans beaucoup de vrais trachytes du Chimborazo et du volcan enflamme de Tunguragua. En examinant avec soin, dans les Cordilleres des Andes, les differens etats du feldspath dans les porphyres de transition et dans les trachytes, j'ai vu que des roches decidement trachytiques en renferment aussi qui n'est pas vitreux, mais feuillete laiteux. J'incline a croire que le porphyre de l'Assuay, groupe de montagnes celebre par le passage qu'il offre entre Quito et Cuenca, est du trachyte. J'ai discute les roches qui constituent dans l'Amerique meridionale le groupe §. 21, la syenite du Baraguan, le granite de transition de Santa-Barbara, les porphyres de Julumito, les grünstein, et le calcaire noir et carbure: il me reste quelques observations a faire sur des membres moins importans de ce groupe. Des sources de muriate de soude que l'on trouve entourees de syenite a une prodigieuse hauteur pres de San- Miguel, a l'est de Tulua, dans la Cordillere du Baraguan, indiquent peut-etre la liaison geognostique de quelque gypse de transition avec la syenite ou avec un calcaire noir analogue a celui des Serillos de Popayan. Mais dans ces contrees la hauteur seule n'est pas un motif pour exclure une formation gypseuse du domaine des terrains secondaires. J'ai vu sur le plateau de Santa-Fe de Bogota, a 1400 toises de hauteur, la masse de sel gemme de Zipaquira reposer sur un calcaire qui est decidement de formation secondaire. Il est plutot probable que le gypse fibreux, mele d'argile, de Ticsan (Pueblo viejo dans le royaume de Quito, lat. 2° 13' austr.), place vis-a-vis la fameuse montagne de soufre (§§. 11 et 16), loin de toute roche secondaire, sur du micaschiste primitif, est un gypse de transition, analogue a ceux de Bedillac dans les Pyrenees et de Saint-Michel pres Modane en Savoie. Les grünstein du groupe §. 21, qui paroissent couvrir les syenites du Baraguan et des porphyres analogues a ceux de Julumito, abondent, au nord de Popayan, au pied des Paramos d'Iraca et de Chinche, surtout dans la vallee orientale du bassin du Rio Cauca (Curato de Quina major et Quilichao). Dans ce dernier endroit de riches lavages d'or s'operent entre des fragmens de grünstein (diabase de Brongniart, diorite de Haüy). Cette roche n'est decidement pas une dolerite: c'est un grünstein de transition semblable a celui que l'on trouve intercale au thonschiefer charge de carbone du Fichtelgebirge (§. 22) et au micaschiste de Caracas (§. 11). Le grünstein de Quina major devient quelquefois tres-noir, tres-homogene, sonore, fissile et stratifie comme le schiste amphibolique des terrains primitifs (hornblendschiefer). Il est rempli de pyrites, n'agit point sur l'aimant, et prend a l'air une croaute jaunatre, comme le basalte. Pres de Quilichao (entre les villes de Cali et de Popayan) il presente de grands cristaux d'amphibole dissemines dans la masse, et des filons qui sont remplis de pyroxenes d'une couleur vert d'olive tres-peu foncee. J'ai pris, sur les lieux, ces pyroxenes pour l'olivine lamelleuse de M. Freiesleben. Les cristaux ne se trouvent pas dissemines dans la masse, mais seulement tapissant des fentes: c'est comme des filons de dolerite qui traversent le grünstein. Cette meme roche, quoique depourvue de filons, se montre, comme nous l'avons dit plus haut, en boules aplaties au sud de Popayan et de l'Alto de los Robles, dans la vallee de la Sequia (entre le Cerro Broncaso et le Rio Guachicon); elle y recouvre les porphyres verts du Rio Smita. La superposition du grünstein est ici plus manifeste que dans le Curato de Quina major et dans les lavages d'or de Quilichao. Comme les porphyres au nord de l'Alto de los Robles sont en partie (Julumito) couverts de calcaire noir de transition, et que ceux au contraire que l'on observe au sud de Los Robles paroissent lies aux trachytes du Rio Guachicon, cette superposition uniforme du grünstein sur l'un et l'autre de ces porphyres est un phenomene de gisement qui merite beaucoup d'attention. D'apres les observations faites jusqu'ici dans les deux continens, les trachytes et les basaltes se trouvent couverts de dolerite (melange intime de feldspath et de pyroxene), mais non de grünstein (melange intime de feldspath et d'amphibole). Ne faut-il pas conclure de la, que tout ce qui est au-dessous des grünstein en boules de la Sequia et de Quilichao, est un porphyre de transition, et non un trachyte? Ne doit-on pas, a cause de cette superposition uniforme du grünstein, separer les roches porphyroides du Rio Smita et du Cerro Broncaso, des porphyres trachytiques et plus decidement pyrogenes de la vallee du Guachicon, c'esta-dire de ceux qui enchassent des fragmens de gneis? Il y a une certaine probabilite qu'une roche recouverte de grünstein est plutot une formation de transition qu'une formation de trachyte: mais des terrains d'origine ignee peuvent etre d'un age tres-ancien. Pourquoi n'y auroit-il pas des masses de trachytes et de dolerites intercalees aux roches de transition modernes? De plus, et j'adresse cette question aux savans mineralogistes qui se sont livres plus specialement a l'etude des caracteres oryctognostiques des roches, les grünstein sont-ils toujours mineralogiquement (par leur composition) aussi differens des dolerites qu'ils en sont le plus souvent eloignes geognostiquement (par leur gisement)? Les cristaux qui se separent du tissu d'une pate et qui deviennent visibles a l'oeil nu, existent, a n'en pas douter, meles a d'autres substances dans ce tissu meme. Comme les basaltes renferment souvent a la fois (Saxe, Boheme, Rhönegebirge) de grands cristaux dissemines de pyroxene et d'amphibole (basaltische hornblende), on ne sauroit douter qu'outre le pyroxene, l'amphibole n'entre aussi dans la masse de quelques basaltes. Pourquoi des melanges analogues ne pourroient-ils avoir lieu dans les pates des dolerites et des grünstein, dont on croit (pour me servir de la nomenclature mythologique generalement recue) les uns d'origine volcanique, les autres d'origine neptunienne? Le pyroxene en roche, qui, d'apres M. de Charpentier, se trouve en stratification parallele dans le calcaire primitif des Pyrenees, renferme de l'amphibole dissemine. On assure avoir reconnu des pyroxenes dans les grünstein qui forment de vraies couches au milieu des granites du Fichtelgebirge en Franconie (§. 7). M. Beudant a vu des grünstein indubitablement pyroxeniques (par consequent des dolerites) dans les porphyres et syenites de transition de Hongrie (Tepla pres de Schemnitz), comme dans le gres houiller (secondaire) de Fünfkirchen. Les grünstein stratifies et globulaires des environs de Popayan ne passent ni au mandelstein, ni au porphyre syenitique. C'est une formation tresnettement tranchee, et qui est accompagnee ici, comme presque partout dans la Cordillere des Andes (ou elle se tient assez eloignee de la crete des volcans actifs), de masses enormes d'argile. Ces masses rappellent plus encore les accumulations d'argile dans les terrains basaltiques du Mittelgebirge en Boheme, que l'argile liee au gypse des grünstein (ophites de Palassou) dans les Pyrenees et dans le departement des Landes. Elles rendent le passage des Cordilleres, de Popayan a Quito, extremement penible pendant la saison des pluies. Les analogies que nous avons indiquees entre quelques porphyres du groupe §. 21 et les trachytes ou autres roches volcaniques, se retrouvent dans le groupe mexicain §. 23 et meme dans les porphyres norwegiens du groupe §. 24; mais generalement (a l'exception des porphyres du Caucase) on ne les observe presque pas dans les porphyres subordonnes au thonschiefer de transition et aux grauwackes §. 22. Il y a plus encore: au milieu des porphyres secondaires du gres rouge, les mandelstein et d'autres couches intercalees (Allemagne, Ecosse, Hongrie) prennent aussi quelquefois l'aspect de roches pyrogenes. D'apres ces divers rapports de gisement et de composition, je pense qu'on n'est point en droit, dans l'etat actuel de nos connoissances, de nier entierement l'existence des porphyres de transition dans les Cordilleres de l'Amerique meridionale, et de regarder toutes les roches de syenites, de porphyres et de grünstein, que je viens de decrire, comme des trachytes. Les porphyres des groupes §§. 21 et 23 sont caracterises dans l'Amerique meridionale et au Mexique par leur tendance constante a une stratification reguliere; tendance tres-rarement observee en Europe, sur une grande etendue de terrain, dans les groupes §§. 22 et 24. La regularite de stratification est cependant beaucoup plus grande dans les porphyres mexicains posterieurs au thonschiefer de transition que dans les porphyres des Andes de Popayan, de Pasto et du Perou, qui reposent immediatement sur les roches primitives. Cette derniere formation (§. 21) ne m'a pas offert une seule couche subordonnee de syenite, de grünstein, de calcaire et de mandelstein, comme on en trouve dans les groupes §§. 22 et 23. Dans la Nouvelle-Espagne, entre Acapulco et Tehuilotepec, j'ai vu des porphyres de transition, qui ne sont pas metalliferes, reposer immediatement sur du granite primitif (Alto de los Caxones, Acaguisotla, et plusieurs points entre Sopilote et Sumpango); mais, comme plus au nord (pres de Guanaxuato) des porphyres metalliferes d'une composition semblable couvrent un thonschiefer de transition, il reste incertain, malgre la difference de gisement, si les uns et les autres n'appartiennent pas a un meme terrain et a un terrain plus recent que le groupe §. 21. Un terme d de la serie geognostique peut suivre, immediatement a b, la ou g ne s'est pas developpe. C'est ainsi que le calcaire du Jura repose pres de Laufenbourg immediatement sur du gneis, parce que les termes intermediaires de la serie des formations, les roches situees ailleurs (par exemple dans la vallee du Necker) entre le calcaire du Jura et le terrain primitif, s'y trouvent supprimes. Dans les Isles Britanniques, d'apres les observations du savant professeur Buckland et d'apres celles de MM. de Buch et Boue, la formation de syenite, grünstein et porphyre de transition (Ben Nevis, Grampians) repose aussi immediatement sur des roches primitives (micaschiste et urthonschiefer). Elle paroeit par consequent appartenir au premier groupe de porphyres dont je viens de tracer l'histoire (§. 21). Les porphyres du nord de l'Angleterre et ceux de l'Ecosse sont recouverts tantot de grauwacke, tantot de la formation houillere; ils offrent une base feldspathique, et se trouvent souvent depourvus de quarz, comme les porphyres de l'Amerique equinoxiale. On y a observe des grenats: ce phenomene se retrouve dans les porphyres de transition de Zimapan (Mexique), et dans ceux qui couronnent la fameuse montagne du Potosi et qui appartiennent probablement aussi au groupe §. 23. Si le mandelstein d'Ilefeld fait partie, comme le croit M. de Raumer, du terrain de gres rouge, les porphyres grenatiferes du Netzberg (au Harz) sont probablement de formation secondaire. En Hongrie, les grenats se rencontrent a la fois et dans les porphyres ou grünstein porphyriques du groupe §. 23, et dans les conglomerats du terrain trachytique. Il en resulte que les grenats penetrent depuis les roches primitives (gneis, weisstein, serpentine), par les porphyres de transition, jusque dans les trachytes et basaltes volcaniques, et que, dans les zones les plus eloignees les unes des autres, certains porphyres offrent des rapports tresmultiplies avec les trachytes. J'ignore si la syenite titanifere de Keilendorf en Silesie, qui repose immediatement sur le gneis et qui passe a un granite de transition a petits grains depourvu d'amphibole, appartient a l'ancienne formation du groupe §. 21, ou si c'est un lambeau de la formation §. 23, place accidentellement sur des roches primitives. Rien n'est plus difficile que de reconnoeitre avec certitude s'il y a eu suppression de quelques membres intermediaires de la serie des roches, ou si le contact immediat que l'on observe, est celui que l'on trouveroit partout ailleurs sur le globe, en comparant l'age relatif ou le gisement des memes terrains. III. Thonschiefer de transition renfermant des grauwackes, des grünstein, des calcaires noirs, des syenites et des porphyres. §. 22. C'est la grande formation de thonschiefer qui traverse les Pyrenees occidentales, les Alpes de la Suisse entre Ilantz et Glaris, et le nord de l'Allemagne depuis le Harz jusqu'en Belgique et aux Ardennes, et dans laquelle dominent le grauwacke et les calcaires; ce sont les thonschiefer et gneis de transition du Cotentin, de la Bretagne et du Caucase; ce sont les roches schisteuses placees en Norwege au-dessous des porphyres et syenites zirconiennes, c'est-a-dire, entre ces porphyres et les roches primitives; ce sont les thonschiefer verts, avec calcaires noirs, serpentine et grünstein, de Malpasso dans la Cordillere de Venezuela, et les thonschiefer avec syenites de Guanaxuato au Mexique. Nous avons expose plus haut le gisement de ces roches dans les differens pays que nous venons de nommer: il s'agit a present de les considerer dans leur ensemble, et de separer les resultats de la geognosie des notions purement locales qu'offre la geographie mineralogique. Le groupe §. 22 repose, comme les deux groupes precedens, immediatement sur le terrain primitif: il se distingue du premier (§. 20) par l'absence presque totale des calcaires grenus steatiteux; du second (§. 21), par la frequence des thonschiefer et des grauwackes. Les formations suivantes, intimement liees entre elles, appartiennent a ce groupe (§. 22), qui est un des mieux connus et des plus anciennement etudies: Thonschiefer, avec des couches de quarz compacte, de grauwacke, de calcaire noir, de lydienne, d'ampelite carburee, de porphyre, de grünstein, de granite a petits grains, de syenite et de serpentine; Grauwacke (et gres quarzeux); Calcaire noir. Ces roches, ou sont isolees, ou alternent les unes avec les autres, ou forment des couches subordonnees. J'ai discute plus haut (§. 15) les caracteres qui distinguent assez generalement le thonschiefer primitif du thonschiefer de transition: j'ai fait observer que les caracteres tires de la composition mineralogique des roches n'ont pas la valeur absolue qu'on a voulu quelquefois leur assigner; et que, pour les employer avec succes, il faut avoir recours en meme temps au gisement, a l'intercalation ou a l'absence de couches fragmentaires (grauwackes, conglomerats), et aux debris de corps organises, qui manquent totalement aux terrains primitifs et que l'on commence a trouver dans les terrains de transition. Les thonschiefer de ce dernier terrain se distinguent par leur variabilite, par une tendance continuelle a changer de composition et d'aspect; par le nombre des bancs intercales; par des passages frequens, tantot brusques, tantot insensibles et lents, a l'ampelite, au kieselschiefer, au grünstein, ou a des roches porphyroides et syenitiques. Sans doute que ces changemens, ces effets d'un developpement interieur, se font aussi remarquer dans quelques roches primitives. M. de Charpentier observe que les granitesgneis des Pyrenees, qui renferment presque toujours un peu d'amphibole dissemine dans la masse, sans etre pour cela des syenites, et que l'on croit primitifs sans etre des plus anciens, presentent un grand nombre de couches etrangeres, par exemple, des couches de micaschiste, de grünstein et de calcaire grenu. Dans cette meme chaeine de montagnes, le micaschiste primitif contient de la chiastolithe disseminee, substance generalement plus commune dans le thonschiefer de transition. Les Alpes de la Suisse, surtout le passage du Splügen, si bien decrit par M. de Buch, offrent un micaschiste du terrain primitif qui passe insensiblement a un porphyre dont la pate de feldspath compacte enchasse des cristaux de feldspath lamelleux et de quarz. Cependant, en general, ces changemens sont moins frequens parmi les formations primitives que parmi les formations de transition. Quelque intime que soit la liaison que l'on observe entre les roches qui constituent un meme groupe, ou entre les differens groupes de tout le terrain intermediaire, on reconnoeit pourtant, sur differens points du globe, un certain degre d'independance, non-seulement entre les six groupes ou termes de la serie des roches de transition (par exemple, entre les thonschiefer avec grauwacke et les porphyres et syenites), mais aussi entre les membres partiels de chaque groupe ou association de roches intermediaires. Il en resulte que, pour bien saisir les traits qui caracterisent la constitution geologique d'un pays, il faut etudier ces rapports isolement (par exemple, ceux des grauwackes, des thonschiefer et des calcaires que renferme le groupe §. 22), et fixer pour les divers terrains ou membres partiels d'une meme association les degres de dependance ou d'independance qu'ils conservent entre eux. Nous les voyons ou alterner periodiquement, ou s'envelopper et se reduire les uns les autres (par un accroissement inegal de volume) a l'etat de simples couches subordonnees, ou enfin se couvrir mutuellement comme feroient des roches primitives de differente formation. Il arrive en effet que les termes partiels d'un meme groupe, a, b, g, se succedent quelquefois avec une certaine regularite en serie periodique, a. b. g. a. b. g. a.... D'autres fois a prend un si grand developpement que b et g s'y trouvent renfermes comme de simples couches; d'autres fois encore a, b, g sont simplement superposes les uns aux autres sans retour periodique. Ce dernier cas n'exclut point la possibilite que b, avant de succeder a a, n'y paroisse d'abord comme une couche subordonnee. Il arrive dans un meme groupe tout ce que l'on observe dans des termes non complexes de la serie des terrains primitifs. On peut dire, comme nous l'avons fait observer plus haut, qu'une formation de calcaire noir, qui constitue de grandes masses de montagnes et qui est superposee a des masses egalement considerables de thonschiefer de transition, prelude par des couches de calcaire noir intercalees au thonschiefer. Lorsque b et g forment des couches intercalees dans a, ces couches peuvent etre si frequemment repetees, qu'elles prennent, sur de grandes etendues de terrain, l'aspect de roches alternantes. C'est ainsi que le thonschiefer intermediaire, qui d'abord enveloppoit le grauwacke et le calcaire noir, et puis alternoit avec eux (gorge d'Aston dans les Pyrenees, Maxen en Saxe), finit par recouvrir, et avec un grand accroissement de masse, ces roches alternantes ou ces couches frequemment intercalees. Il en est d'ailleurs de la regularite du type dans les formations partielles de chaque groupe comme de la direction des strates ou de l'angle que font ces strates avec le meridien. Au premier abord tout paroeit confus et contradictoire; mais, des que l'on examine avec soin une grande etendue de pays, on finit toujours par reconnoeitre certaines lois de gisement ou de stratification. Si le type que l'on decouvre dans la suite des formations partielles, paroeit varier selon les lieux, c'est que le developpement de ces petites formations n'a pas ete partout le meme. Quelquefois (Caucase) le porphyre, le calcaire, la syenite et le granite de transition, se sont developpes a la fois au sein des thonschiefer de transition; d'autres fois on n'y trouve ni le porphyre (Cotentin, Alpes de la Suisse), ni le grauwacke (chaeine du littoral de Venezuela), ni le granite et la syenite de transition (Pyrenees). L'association du thonschiefer de transition et du calcaire noir compacte est presque aussi constante que celle du calcaire blanc et grenu avec le micaschiste dans le terrain primitif. On trouve cependant aussi des calcaires de transition qui, n'etant associes ni au thonschiefer ni au grauwacke, paroissent remplacer geognostiquement le thonschiefer; mais je ne connois pas un seul point des deux continens ou l'on ait vu, sur une etendue un peu considerable, des thonschiefer de transition qui ne fussent pas lies au calcaire. Nous venons de voir que dans quelques parties du globe (Caucase et presqu'eile du Cotentin) le thonschiefer intermediaire enveloppe ou les porphyres ou les syenites et les granites; dans d'autres parties (Norwege et Saxe, entre Friedrichswalde, Maxen et Dohna), ces trois roches se trouvent, apres avoir prelude comme couches subordonnees au thonschiefer, superposees a celui-ci, soit isolement et formant des masses considerables, soit alternant entre elles. C'est seulement dans ces cas d'isolement ou d'alternance qu'un terrain independant de porphyre (Mexique), ou un terrain independant de porphyre et syenite (Norwege), semble surmonter le terrain des thonschiefer intermediaires. Ce meme isolement (sinon cette meme independance) s'observe quelquefois dans les calcaires de transition et, quoiqu'a un degre moins prononce, dans les grauwackes. La syenite et le granite sont lies dans le terrain de transition plutot aux porphyres qu'au micaschiste et au gneis: dans ce meme terrain on trouve des syenites sans granite; mais il est beaucoup plus rare de trouver des syenites et des granites sans porphyre. Lorsque les membres partiels d'un groupe, a, b, g, alternent en serie periodique, et que par consequent ils ne sont ni intercales les uns aux autres comme couches subordonnees, ni superposes comme des roches ou formations distinctes, il est difficile de determiner si b et g sont d'une formation plus recente que a: cependant, meme dans le cas d'une origine que l'on appelle contemporaine, l'examen attentif des terrains fait reconnoeitre de certaines preponderances de formation. Generalement le grauwacke et le thonschiefer de transition sont plus anciens que les calcaires noirs, ou, pour m'appuyer d'une observation tres-juste de M. de Charpentier, "generalement on observe que, malgre l'alternance dans la partie du terrain intermediaire qui est la plus rapprochee du terrain primitif, c'est le grauwacke et le thonschiefer qui dominent en grandes masses, et le calcaire leur est subordonne; tandis que, dans la partie plus moderne du terrain de transition, c'est au contraire le calcaire qui est la roche preponderante, et le thonschiefer est seulement intercale au calcaire en couches plus ou moins epaisses." Apres avoir expose les rapports d'age et de gisement des roches qui constituent un meme groupe, nous allons caracteriser plus specialement chacune des formations partielles. Thonschiefer, bleu noiratre et carbure, ou verdatre, onctueux et soyeux; tantot terreux ou a feuillets tres-epais, tantot fissile et parfaitement feuillete. Dans ses couches tresanciennes, qui passent au micaschiste de transition, il est ondule et n'offre que de grandes lames de mica fortement adherentes. Dans les couches plus neuves, pres du contact avec le grauwacke, il renferme de petites paillettes isolees de mica, souvent aussi de la chiastolithe, de l'epidote et des filets de quarz. Le thonschiefer de transition, caracterise par son extreme variabilite, c'est-a-dire par sa tendance continuelle a changer de composition et d'aspect, contient un grand nombre de couches, dont quelques-unes, par leur repetition frequente, semblent former des roches alternantes avec lui. Les effets les plus habituels de ce developpement interieur sont les bancs intercales de grauwacke et de grauwacke schisteux; de calcaire generalement compacte et noir, ou grisnoiratre, quelquefois rougeatre (Braunsdorf), et meme grenu et blanc (Miltitz en Saxe), comme dans le groupe §. 20; de grünstein; de porphyre (Caucase; Saxe, pres Friedrichswalde et Seidwitzgrund); de schiste alumineux, ou ampelite fortement carburee; de quarz compacte (quarzite; quarzfels de Hausmann), quelquefois avec de petits cristaux de feldspath (Kemielf en Finlande); de lydienne et kieselschiefer. Ces deux dernieres substances siliceuses se trouvent a la fois dans le thonschiefer, le grauwacke, le calcaire, et sous la forme de jaspe dans le porphyre: elles attestent par leur presence l'affinite geognostique qui unit ces diverses roches de transition. Le thonschiefer (§. 22) renferme moins habituellement: des bancs intercales de gneis (Lokwitzgrund et Neutanneberg); de micaschiste et granite (Krotte en Saxe; Fürstenstein en Silesie; Honfleur en Normandie; Montherme dans les Ardennes); de granite et syenite (Caucase, Cotentin, Calixelf en Norwege); d'argile schisteuse graphique (schwarze kreide: vallee de Castillon dans les Pyrenees; Ludwigstadt en Franconie); de schiste novaculaire (wetzschiefer); de serpentine (Bochetta pres de Genes; Lovezara et deux autres points, plus au nord, vers Voltaggio: voyez §. 19); de feldspath compacte (vallee d'Arran dans les Pyrenees, Poullaouen en Bretagne), tantot pur, noiratre, gris-verdatre ou vert d'olive, tantot (Pyrenees, Harz, et partie orientale de la Haute-Egypte) mele de cristaux dissemines de feldspath lamelleux, d'amphibole, de schörl et de quarz. Lorsque le feldspath compacte est simplement mele d'amphibole, il forme le grünsteinschiefer de Werner, qui alterne avec le thonschiefer de transition (Ulleaborg en Suede) et se retrouve dans les terrains primitifs. Quoique, comme j'ai tache de le prouver dans mon Memoire sur le basanites et lithos Erakleia, publie en 1790, la majeure partie des basaltes des anciens soit due a des roches syenitiques de transition, ou a des bancs de grünstein intercales a des roches primitives, l'examen des statues egyptiennes conservees a Rome, a Naples, a Londres et a Paris, m'a cependant fait naeitre l'idee que beaucoup de basaltes noirs et verts de nos antiquaires ne sont que des masses de feldspath compacte tirees de terrains intermediaires, et colorees soit en noir soit en vert par de l'amphibole, par de la chlorite, par du carbone ou des oxides metalliques. Il n'y a que l'analyse chimique de ces masses anciennes non melangees qui pourra resoudre cette question d'archeologie mineralogique. M. Beudant a vu, dans le terrain de transition de la Hongrie, des grünstein porphyroides se transformer en une pate verte ou noire d'apparence homogene. Cette pate n'etoit plus qu'un feldspath compacte colore par l'amphibole. Nous avons deja fait observer plus haut que le thonschiefer de transition forme de beaucoup plus grandes masses dans le monde que le thonschiefer primitif. Ce dernier est generalement subordonne au micaschiste; comme formation independante il est aussi rare dans les Pyrenees et les Alpes que dans les Cordilleres. Je n'ai meme vu dans l'Amerique meridionale, entre les paralleles de 10° nord et 7° sud, de thonschiefer de transition que sur la pente australe de la chaeine du littoral de Venezuela, a l'entree des Llanos de Calabozo. Ce bassin des Llanos, fond d'un ancien lac couvert de formations secondaires (gres rouge, zechstein et gypse argileux), est borde par une bande de terrain intermediaire de thonschiefer, de calcaire noir et d'euphotide, liee a des grünstein de transition. Sur les gneis et micaschistes, qui ne constituent qu'une seule formation entre les vallees d'Aragua et la Villa de Cura, reposent en gisement concordant, dans les ravins de Malpasso et de Piedras azules, des thonschiefer (direction N. 52° E.; inclin. 70° vers le NO.), dont les couches inferieures sont vertes, steatiteuses et melees d'amphibole; les superieures d'une couleur gris-perlee et bleu-noiratre. Ces thonschiefer renferment (comme ceux de Steben en Franconie, du duche de Nassau et de la Peschels-Mühle en Saxe) des couches de grünstein, tantot en masse, tantot divise en boules. Dans la Nouvelle-Espagne, le fameux filon de Guanaxuato, qui, de 1786 a 1803, a produit, annee commune, 556,000 marcs d'argent, traverse aussi un thonschiefer de transition. Cette roche, dans ses strates inferieurs, passe, dans la mine de Valenciana (a 932 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer), au schiste talqueux, et je l'ai decrite, dans mon Essai politique, comme placee sur la limite des terrains primitifs et intermediaires. Un examen plus approfondi des rapports de gisement que j'avois notes sur les lieux, la comparaison des bancs de syenite et de serpentine que l'on a perces en creusant le tiro general, avec les bancs qui sont intercales dans les terrains de transition de Saxe, de la Bochetta de Genes et du Cotentin, me donnent aujourd'hui la certitude que le thonschiefer de Guanaxuato appartient aux plus anciennes formations intermediaires. Nous ignorons si sa stratification est parallele et concordante avec celle des granitesgneis de Zacatecas et du Pennon blanco, qui probablement le supportent; car le contact de ces formations n'a point ete observe; mais sur le grand plateau du Mexique presque toutes les roches porphyriques suivent la direction generale de la chaeine des montagnes (N. 40° -- 50° O). Cette concordance parfaite (Gleichförmigkeit der Lagerung) s'observe entre le gneis primitif et les thonschiefer de transition de la Saxe (Friedrichswalde; vallees de la Müglitz, Seidewitz et Lockwitz): elle prouve que la formation du terrain intermediaire a succede immediatement a la formation des dernieres couches du terrain primitif. Dans les Pyrenees, comme l'observe M. de Charpentier, le premier de ces deux terrains se trouve en gisement different (non parallele), quelquefois en gisement transgressif (übergreifende Lagerung) avec le second. Je rappellerai a cette occasion que le parallelisme entre la stratification de deux formations consecutives, ou l'absence de ce parallelisme, ne decide pas seul la question de savoir si les deux formations doivent etre reunies ou non reunies dans un meme terrain primitif ou secondaire: c'est plutot l'ensemble de tous les rapports geognostiques qui decide le probleme. Le thonschiefer de Guanaxuato est tres-regulierement stratifie (direct. N. 46° O.; incl. 45° auSO.), et la forme des vallees n'a aucune influence sur la direction et l'inclinaison des strates. On y distingue trois varietes, qu'on pourroit designer comme trois epoques de formation: un thonschiefer argente et steatiteux passant au schiste talqueux (talkschiefer); un thonschiefer verdatre, a eclat soyeux, ressemblant au schiste chlorite; enfin, un thonschiefer noir, a feuillets tres-minces, surcharge de carbone, tachant les doigts comme l'ampelite et le schiste marneux du zechstein, mais ne faisant point effervescence avec les acides. L'ordre dans lequel j'ai nomme ces varietes, est celui dans lequel je les ai observees de bas en haut dans la mine de Valenciana, qui a 263 toises de profondeur perpendiculaire; mais, dans les mines de Mellado, d'Animas et de Rayas, le thonschiefer surcarbure (hoja de libro) se trouve sous la variete verte et steatiteuse, et il est probable que des strates qui passent au schiste talqueux, a la chlorite et a l'ampelite, alternent plusieurs fois les uns avec les autres. L'epaisseur de cette formation de thonschiefer de transition, que j'ai retrouvee a la montagne de Santa-Rosa pres de Los Joares, ou les Indiens ramassent de la glace dans de petits bassins creuses a mains d'hommes, est de plus de 3000 pieds. Elle renferme, en couches subordonnees, non-seulement de la syenite (comme les thonschiefer de transition du Cotentin), mais aussi, ce qui est tres-remarquable, de la serpentine et un schiste amphibolique qui n'est pas du grünstein. On a trouve, en creusant en plein roc, dans le toit du filon, le grand puits de tirage de Valenciana (puits qui a coaute pres de sept millions de francs), de haut en bas, sur quatre-vingtquatorze toises de profondeur, les strates suivans: conglomerat ancien, representant le gres rouge; thonschiefer de transition noir, fortement carbure, a feuillets tres-minces; thonschiefer gris-bleuatre, magnesifere, talqueux; schiste amphibolique, noir-verdatre, un peu mele de quarz et de pyrites, depourvu de feldspath, ne passant pas au grünstein, et entierement semblable au schiste amphibolique (hornblendschiefer) qui forme des couches dans le gneis et le micaschiste primitifs (§§. 5 et 11); serpentine vert de prase passant au vert d'olive, a cassure inegale et a grain fin, interieurement matte, mais eclatante sur les fissures, remplie de pyrites, depourvue de grenats et de diallage metalloide (schillerspath), melangee de talc et de steatite; schiste amphibolique; syenite, ou melange grenu de beaucoup d'amphibole vert-noiratre, beaucoup de quarz jaunatre et peu de feldspath lamelleux et blanc. Cette syenite se fend en strates tres-minces; le quarz et le feldspath y sont si irregulierement repartis, qu'ils forment quelquefois de petits filons au milieu d'une pate amphibolique. De ces huit couches intercalees, dont la direction et l'inclinaison sont exactement paralleles a celles de la roche entiere, la syenite forme la couche la plus puissante. Elle a plus de 30 toises d'epaisseur, et comme dans les travaux les plus profonds de la mine (planes de San-Bernardo) j'ai vu, a 170 toises au-dessous de la couche de syenite, reparoeitre un thonschiefer carbure, identique avec celui a travers lequel on a commence a creuser le nouveau puits, il ne peut rester douteux que l'amphibole schisteuse alternant deux fois avec la serpentine, et que la serpentine alternant probablement avec la syenite, ne forment des bancs subordonnes a la grande masse de thonschiefer de Guanaxuato. La liaison que nous venons de signaler entre des roches amphiboliques et la serpentine, se retrouve sur d'autres points du globe, dans des formations d'euphotide de differens ages: par exemple, au Heideberg pres Zelle en Franconie (§. 19); a Kielwig, a l'extremite boreale de la Norwege; a Portsoy en Ecosse, et a l'eile de Cuba, entre Regla et Guanavacoa. Je n'ai rencontre ni des debris de corps organiques, ni des couches de porphyres, de grauwacke et de lydienne, dans le thonschiefer de transition de Guanaxuato, qui est la roche la plus riche en minerai d'argent qu'on ait trouvee jusqu'ici: mais ce thonschiefer est recouvert en gisement concordant, dans quelques endroits, de porphyres de transition tres-regulierement stratifies (los Alamos de la Sierra); en d'autres endroits, de grünstein et de syenites alternant des milliers de fois les uns avec les autres (entre l'Esperanza et Comangillas); en d'autres encore, ou d'un conglomerat calcaire et d'une roche calcaire de transition gris-bleuatre, un peu argileuse et a petits grains (ravin d'Acabuca), ou de gres rouge (Marfil). Ces rapports du thonschiefer de Guanaxuato avec les roches qu'il supporte, et dont quelques-unes (les syenites) preludent comme bancs subordonnes, suffisent pour le placer parmi les formations de transition; ils justifieront surtout ce resultat aux yeux des geognostes qui connoissent les observations publiees recemment sur les terrains intermediaires de l'Europe. Quant a la pierre lydienne, il ne peut y avoir aucun doute que le thonschiefer de Guanaxuato ne la renferme sur quelques points non encore explores; car j'ai trouve cette substance frequemment enchassee en gros fragmens dans le conglomerat ancien (gres rouge) qui recouvre le thonschiefer entre Valenciana, Marfil et Cuevas. A dix lieues au sud de Cuevas, entre Queretaro et la Cuesta de la Noria, au milieu du plateau mexicain, on voit sortir, sous le porphyre, un thonschiefer (de transition) gris-noiratre, peu fissile et passant a la fois au schiste siliceux (jaspe schistoide, kieselschiefer) et a la lydienne. Tout pres de la Noria beaucoup de fragmens de lydienne se trouvent epars dans les champs. Les roches a filons argentiferes de Zacatecas et une petite partie des filons de Catorce traversent aussi, d'apres le rapport de deux mineralogistes instruits, MM. Sonneschmidt et Valencia, un thonschiefer de transition qui renferme de veritables couches de pierre lydienne et qui paroeit reposer sur des syenites. Cette superposition prouveroit, d'apres ce qui a ete rapporte sur les couches pereees dans le grand puits de Valenciana, que les thonschiefer mexicains constituent (comme au Caucase et dans le Cotentin) une seule formation avec les syenites et les euphotides de transition, et que peut-etre ils alternent avec elles. Grauwacke. Ce nom bizarre, usite parmi les geognostes allemands et anglois, a ete conserve, comme celui de thonschiefer, pour eviter une confusion de nomenclature si nuisible a la science des formations. Il designe, lorsqu'on le prend dans un sens plus general, tout conglomerat, tout gres, tout poudingue, toute roche fragmentaire ou arenacee du terrain de transition, c'est-a-dire, anterieure au gres rouge et au terrain houiller. Le vieux gres rouge (old red sandstone du Herefordshire) de M. Buckland, place sous le calcaire de transition (mountain limestone) de Derbyshire, est un gres du terrain intermediaire, comme cet excellent geognoste l'a tres-bien indique lui-meme dans son Memoire sur la structure des Alpes. Le nouveau conglomerat rouge (new red conglomerate d'Exeter) est le gres rouge des mineralogistes francois, ou todte liegende des mineralogistes allemands; c'est le premier gres du terrain secondaire, c'est-a-dire le gres du terrain houiller, qui est intimement lie au porphyre secondaire, appele pour cela porphyre du gres rouge. Lorsqu'on prend le mot grauwacke (traumates de M. d'Aubuisson, psammites anciens et mimophyres quarzeux de M. Brongniart) dans un sens plus etroit, on l'applique a des roches arenacees du terrain de transition, qui ne renferment que de petits fragmens plus ou moins arrondis de substances simples, par exemple, de quarz, de lydienne, de feldspath et de thonschiefer, non des fragmens de roches composees. On exclut alors des grauwackes, et l'on decrit sous le nom de breches ou conglomerats a gros fragmens primitifs (§. 20), les diverses agglutinations de morceaux de granite, de gneis et de syenite: on separe egalement les poudingues calcaires dans lesquels des fragmens arrondis de chaux carbonatee sont cimentes par une pate de meme nature. Toutes ces distinctions (si l'on en excepte certaines breches calcaires dans lesquelles le contenu et le contenant pourroient bien etre quelquefois d'une origine contemporaine) ne sont pas d'une grande importance pour l'etude des formations. Le grauwacke grossier (grosskörnige grauwacke) passe peu a peu au conglomerat a gros fragmens; il alterne dans une meme contree, non-seulement avec des couches de grauwacke a petits grains, mais aussi avec d'autres dont la pate est presque homogene. Les poudingues et breches a gros fragmens de roches primitives et composees (urfels-conglomerate de la Valorsine en Savoie, et de Salvan dans le Bas-Valais) sont de veritables grauwackes; ce sont les couches les plus anciennes de cette formation, couches dans lesquelles les fragmens a contours distincts ne sont pas fondus dans la masse, et dont le ciment schisteux a feuillets courbes et ondules ressemble au micaschiste, tandis que le ciment des grauwackes plus recens du Harz, du duche de Nassau et du Mexique, ressemble au thonschiefer. En general, les conglomerats ou grauwackes du groupe §. 20 offrent des fragmens de roches preexistantes d'un volume plus considerable et plus inegal que les grauwackes du groupe §. 22. Lorsqu'on compare ceux-ci au calcaire de transition, on les trouve le plus souvent d'une origine anterieure; quelquefois ils remplacent meme le thonschiefer de transition. L'anteriorite du grauwacke au calcaire se manifeste dans les Pyrenees et en Hongrie. Il paroeit que dans ce dernier pays le thonschiefer intermediaire n'a pu prendre un grand developpement; car, loin d'y etre une formation independante qui renferme le grauwacke, c'est au contraire le grauwacke schisteux (grauwacken-schiefer), a paillettes de mica agglutinees, qui y prend tous les caracteres d'un vrai schiste de transition. En Angleterre aussi, la grande masse isolee des montagnes calcaires (comtes de Derby, de Glocester et de Sommerset) est d'un age plus recent que la grande masse de grauwackes qui alternent avec quelques strates calcaires; mais, lorsqu'on examine en detail les points ou les differens membres du groupe §. 22 ont pris un developpement extraordinaire, on reconnoeit deux grandes formations calcaires (transition-limestone de Longhope, et mountainlimestone du Derbyshire et de South-Wales), alternant avec deux formations de grauwacke (greywacke de May-Hill et old red sandstone de Mitchel-Dean en Herefordshire). Cet ordre de gisement, cette bisection des masses calcaires et arenacees se trouve repetee sur plusieurs points du globe. M. Beudant a reconnu, en Hongrie, le vieux gres rouge de l'Angleterre dans le gres quarzeux de transition de Neusohl, qui surmonte des grauwackes a gros grains apres y avoir ete intercale: il croit reconnoeitre le mountain-limestone, place entre le vieux gres rouge et le terrain houiller d'Angleterre, dans le calcaire intermediaire du groupe de Tatra. Si l'Oldenhorn et les Diablerets, comme il est tres-probable, appartiennent au terrain de transition, il y a aussi en Suisse, au-dessus et au-dessous du grauwacke de la Dent de Chamossaire, deux grandes formations de calcaires noirs, que M. de Buch, depuis long-temps, a distingues sous les noms de premier et second calcaire de transition. En Norwege (Christianiafiord) le grauwacke est decidement plus nouveau que le thonschiefer intermediaire et le calcaire a orthoceratites. Dans le centre de l'Europe, le grauwacke a tres-petits grains offre quelquefois des fragmens de cristaux de feldspath lamelleux qui lui donnent un aspect porphyroide (Pont Pelissier pres Servoz; Elm, dans le passage du Splügen; Neusohl, en Hongrie); mais il ne faut pas confondre ces varietes d'une roche arenacee avec des bancs de porphyre intercales. Nous verrons bientot que, dans les deux continens, ces cristaux brises de feldspath se retrouvent dans le gres rouge, et dans un conglomerat feldspathique beaucoup plus recent. Dans l'hemisphere austral, le grauwacke forme, d'apres M. d'Eschwege, la pente orientale des montagnes du Bresil. Aux Etats-unis j'ai trouve cette meme roche (chaeine des Aleghanys) renfermant des bancs de lydienne et de calcaires noirs, entierement semblables a ceux du terrain de transition du Harz. M. Maclure a, le premier, determine les veritables limites des grauwackes depuis la Caroline jusqu'au lac Champlain. Dans le nord de l'Angleterre (Cumberland, Westmoreland) cette roche offre des couches de porphyres grenatiferes. Calcaire de transition. Cette roche commence, ou par former des couches dans le grauwacke et le thonschiefer intermediaires, ou par alterner avec eux: plus tard, le thonschiefer et le grauwacke schisteux disparoissent, et le calcaire superpose devient une formation simple, que l'on seroit tente de croire independante, quoiqu'elle appartienne toujours au groupe §. 22. Lorsqu'il y a alternance de schiste et de calcaire, cette alternance a lieu, ou par couches epaisses (cime de la Bochetta pres de Genes, et chemin entre Novi et Gavi), comme dans les formations composees de granite et gneis, de grauwacke et grauwacke schisteux, de syenite et grünstein, de thonschiefer et porphyre; ou bien l'alternance s'etend aux feuillets les plus minces des roches (calschistes), de sorte que chaque lame de schiste est soudee sur une lame calcaire (vallees de Campan et d'Oueil, dans les Pyrenees; montagnes de Poinik en Hongrie). De meme que dans les Pyrenees on trouve intercales au granite-gneis et au micaschiste primitifs des calcaires que par leur seul aspect on croiroit intermediaires, savoir, des calcaires noir-grisatre (Col de la Trappe) colores par du graphite, qui est la plus ancienne des substances carburees, des calcaires fetides, repandant l'odeur de l'hydrogene sulfure, et des calcaires compactes remplis de chiastolithes: de meme aussi les terrains de transition du groupe §. 22 presentent quelques exemples de calcaires blancs et grenus (Miltitz, en Saxe; vallees d'Ossan et de Soubie, dans les Pyrenees). En general, cependant, si l'on en excepte le groupe §. 20 (celui dont la Tarantaise offre le type), les calcaires de formation intermediaire sont ou compactes, ou passent au grenu a tres-petits grains. Leurs teintes sont plus obscures (gris cendre, gris noir) que celles des calcaires primitifs. Le plus grand nombre des belles varietes de marbres rouges (vallee de Luchon des Pyrenees), verts et jaunes, celebres parmi les antiquaires sous les noms de marbre africain fleuri, noir de Lucullus, jaune et rouge antique, pavonazzo et breche doree, me semblent appartenir a des calcaires et conglomerats calcaires de transition. Nous avons vu plus haut que la chiastolithe du thonschiefer de transition se montre par exception dans le thonschiefer primitif: c'est d'une maniere analogue que la tremolithe, si commune dans la dolomie et le calcaire blanc primitif, se trouve par exception (entre Giellebeck et Drammen en Norwege) dans le calcaire noir de transition. Certaines especes minerales appartiennent sans doute plus a tel age qu'a tout autre; mais leurs rapports avec les formations ne sont pas assez exclusifs pour en faire des caracteres diagnostiques dans une science dans laquelle le gisement seul peut decider d'une maniere absolue. Souvent des circonstances locales ont singulierement influe sur les liaisons que l'on observe entre les especes minerales et les terrains. Dans les Pyrenees et surtout dans l'Amerique meridionale, les grenats dissemines sont propres au gneis, tandis que partout ailleurs ils semblent plutot appartenir au micaschiste. Les calcaires de transition, la ou ils forment de grandes masses isolees, abondent en silice; et tantot (chaeine des Pyrenees) cette silice se trouve reunie en cristaux de quarz; tantot (chaeine des Alpes) elle est melee a la masse entiere, comme un sable tres-fin. Dans la premiere de ces chaeines le calcaire intermediaire renferme, comme le calcaire primitif, des couches de grünstein (vallee de Saleix) et meme de feldspath compacte, deux roches qui generalement sont plus communes dans le thonschiefer intermediaire. Les bancs de grünstein se trouvent aussi, d'apres M. Mohs, dans le calcaire de transition de la Styrie, et les mandelstein du mountainlimestone du Derbyshire (entre Sheffield et Castelton) appartiennent a un systeme de couches intercalees geognostiquement analogues. Ces couches prennent souvent l'aspect de veritables filons. Le prodigieux developpement que le calcaire intermediaire atteint dans la haute chaeine des Alpes, pourroit faire croire que le groupe §. 22 renferme deux formations distinctes, dont l'une, plus ancienne, embrasse les schistes et les grauwackes avec des porphyres et des calcaires intercales, et l'autre, d'un age plus recent, les calcaires consideres comme roches independantes; mais cette separation ne me paroeitroit pas suffisamment justifiee par la constitution geognostique des terrains. En Suisse, comme en Angleterre, de grandes masses calcaires alternent avec des roches fragmentaires de transition, et ces memes calcaires, qu'on voudroit elever au rang de formations independantes, manifestent par des bancs intercales une liaison intime avec tous les autres membres du groupe §. 22. Dans le calcaire intermediaire des Diablerets et de l'Oldenhorn, M. de Charpentier a observe des couches de grauwacke schisteux. D'apres ce meme geognoste experimente, le gypse muriatifere de Bex est subordonne a un calcaire de transition qui repose sur du grauwacke, et qui alterne a la fois avec cette derniere roche et avec du thonschiefer de transition. Les assises inferieures du calcaire de transition sont tres-noires et remplies de belemnites; les assises superieures sont argileuses et renferment des ammonites. Le gypse anhydre, dans lequel le sel gemme est dissemine, appartient a ces assises superieures; il offre a son tour des bancs subordonnes de gypse commun ou hydrate, de calcaire compacte, de thonschiefer, de grauwacke et de breches. C'est ainsi que chaque depot de sel, de houille et de minerai de fer, dans les terrains intermediaire et secondaire, renferme de petites formations locales, qu'il ne faut pas confondre avec les veritables termes de la serie geognostique. D'apres les observations de M. de Charpentier et M. Lardy, le gypse du terrain secondaire, en ne considerant que de grandes masses, est toujours hydrate (Thuringe), tandis que le gypse de transition (Bex) est anhydre ou hydrate epigene. Les opinions des geognostes sont d'ailleurs encore partagees sur l'age du depot salifere de la Suisse. M. de Buch, dans ses lettres a M. Escher, publiees en 1809, semble placer le gypse muriatifere de Bex entre le grauwacke de la Dent de Chamossaire et le conglomerat de Sepey: MM. de Bonnard et Beudant le regardent comme secondaire et appartenant soit au gres houiller soit au zechstein. Il nous avoit paru tel aussi, a M. Freiesleben et a moi, lorsque nous avons examine ces contrees en 1795. Dans la chaeine des Pyrenees, la limite entre les terrains de transition (Pic long, 1668 toises; Pic d'Estals, 1550 toises) et les terrains de gres rouge (montagnes de Larry, 1100 toises) et de calcaire alpin (Montperdu, 1747 toises) est tres-nettement tracee. Partout ou il y a du gres rouge, on peut distinguer deux calcaires, un qui recouvre le gres rouge et un qui le supporte. Le premier de ces calcaires, quelles que soient sa composition et sa couleur, est, pour le geognoste qui nomme les formations d'apres le gisement, un calcaire alpin (zechstein); le second est un calcaire de transition. Dans la haute chaeine des Alpes, et nous reviendrons plus tard sur cet objet interessant, le gres rouge n'est pas plus caracterise qu'il ne l'est dans une grande partie de la Cordillere des Andes; on peut meme revoquer en doute s'il y existe. Il est donc assez naturel que la limite entre le calcaire alpin ou zechstein et le calcaire de transition le plus recent ne puisse pas y etre reconnue avec certitude. Les calcaires de la bande meridionale des Alpes, savoir, de la Dent du Midi de Saint-Maurice, de la Dent de Morcle, des Diablerets (si l'on en excepte la sommite tres-coquilliere au nord-est de Bex), de l'Oldenhorn, du Gemmi, de la Jungfrau, du Titlis et du Tödi, sont aussi evidemment de transition, que les calcaires de Longhope, de Dudley ou de Derbyshire, en Angleterre; que ceux des vallees de Campan et de Luchon dans les Pyrenees; que ceux de Namur en Belgique, de Blankenbourg, d'Elbingerode, de Scharzfeld et du Schneeberg pres de Vienne, en Allemagne. Cette evidence est beaucoup moins grande pour la bande calcaire septentrionale des Alpes, pour la roche du Mole, de la Dent d'Oche, du Molesson, de la Tour d'Ay, de la Dent de Jament, du Stockhorn, du Glarnisch et du Sentis, que quelques geognostes celebres prennent pour du zechstein, d'autres pour la formation la plus recente des calcaires de transition. Les roches de la bande meridionale et septentrionale des Alpes ont ete souvent confondues sous une denomination commune, celle de calcaire des hautes montagnes (Hochgebirgskalkstein); denomination qui seroit plus vague encore que celle de calcaire alpin, si l'on y attachoit une idee de gisement geographique et si elle n'exprimoit que la position de certaines roches a de tres-grandes hauteurs. Le mot calcaire alpin, regarde dans son origine comme synonyme de zechstein, indique un gisement geognostique, une formation placee, que ce soit dans les plaines ou dans des chaeines de montagnes tres-elevees, immediatement au-dessus du gres rouge. C'est un fait assez remarquable que le calcaire a encrinites (mountain-limestone), et meme le conglomerat de transition (old red sandstone) qui supporte ce calcaire, contiennent, en Angleterre et en Ecosse, quelques traces de houille qui differe de l'anthracite. Les veritables variolithes (Durance, Mont-Rose), qui offrent des nodules de feldspath compacte, dissemines dans un melange intime presque homogene d'amphibole, de chlorithe (?) et de feldspath, appartiennent soit au groupe que nous venons de decrire, soit au groupe suivant. Peut-etre ne sont-elles que des bancs intercales a un grünstein porphyroide, bancs dans lesquels une portion du feldspath s'est degagee du tissu de la masse. On n'a long-temps connu ces variolithes que comme galets ou en gros fragmens detaches: il ne faut pas les confondre avec les variolithes a noeuds de spath calcaire (blattersteine), subordonnees au thonschiefer vert de transition, ni avec les variolithes qui naissent par infiltration dans le mandelstein du gres rouge. Quoique nous soyons bien loin encore de pouvoir completer l'histoire de chaque terrain intermediaire et secondaire par l'enumeration des especes de corps fossiles qui s'y trouvent, nous allons pourtant indiquer quelques-uns de ces debris organiques qui semblent caracteriser le groupe §. 22. Dans le thonschiefer et le grauwacke, surtout dans le grauwacke schisteux: plantes monocotyledones (arundinacees ou bambousacees), anterieures peut-etre aux animaux les plus anciens; entroques, corallites, ammonites (vallees de Castillon dans les Pyrenees; base de la montagne de Fis, en Savoie; duche de Nassau et Harz, en Allemagne); hysterolithes, orthoceratites, beaucoup plus rares que dans le calcaire intermediaire; pectinites (Gerolstein, en Allemagne); trilobites aveugles de M. Wahlenberg, dans lesquels on ne voit aucune trace d'yeux (Olstorp, en Suede); ogygies de M. Brongniart, dans lesquels les yeux ne sont pour ainsi dire qu'indiques par deux tuberosites sur le chaperon (Angers et Amerique septentrionale); calymene de Tristan et calymene macrophtalme de Brongniart (Bretagne, Cotentin). Dans le calcaire, savoir, dans les couches plus anciennes: entroques, madrepores, belemnites (Bex, en Suisse; Pic de Bedillac, dans les Pyrenees); quelques ammonites, jamais par bancs, mais isoles; des orthoceratites, Asaphus Buchii, A. Hausmanni (pays de Galles, Suede); tres-peu de coquilles bivalves. Dans les couches plus recentes du calcaire: Calymene Blumenbachii (Dudley en Angleterre, et Miami dans l'Amerique du nord), Asaphus caudatus de Brongniart; des ammonites, des terebratules, des orthoceratites, quelques gryphites (Namur, Avesnes); des encrinites. En Allemagne, le calcaire de transition est quelquefois (Eiffel et duche de Bergen) tout petri de coquilles. Le calcaire grenu de l'eile de Paros ( Link, Urwelt, pag. 2) doit, d'apres un passage de Xenophane de Colophon, conserve dans Origene ( Philosophumena, c. 14, T. I, p. 893, B. edit. Delarue ), renfermer des debris organiques; mais il reste bien douteux, selon qu'on lit daphne ou aphue, si ces debris sont du regne vegetal (du bois de laurier), ou du regne animal (l'empreinte d'un anchois). Nous n'insistons pas sur cette determination; car il seroit possible que le marbre de Paros faut aussi peu primitif que le marbre de Carare, sur lequel je partage les doutes de plusieurs geognostes celebres. Le phenomene des grottes ne s'oppose cependant pas a la haute antiquite des calcaires de l'Archipel: il y en a dans quelques pays (Silesie, pres Kaufungen; Pyrenees, vallees de Naupounts et montagne de Meigut) qui paroissent appartenir au calcaire primitif. IV et V. Porphyres, Syenites et Grünstein posterieurs au Thonschiefer de transition, quelquefois meme au calcaire a orthoceratites. §. 23. Je reunis en deux groupes, qui peut-etre n'en forment qu'un seul, les porphyres, les grünstein porphyriques et les syenites que, dans les deux hemispheres, j'ai vus recouvrir le thonschiefer de transition. Ces roches, par leur composition et leurs rapports avec les trachytes qui leur sont immediatement superposes, offrent beaucoup d'analogie avec le groupe plus ancien §. 21. C'est dans ces porphyres et grünstein porphyriques que l'on a decouvert, au nord de l'equateur, au Mexique et en Hongrie, d'immenses richesses de minerais d'or et d'argent; car, quoique la roche metallifere de Schemnitz (saxum metalliferum de Born) soit peut-etre posterieure a des calcaires de transition renfermant quelques foibles debris organiques, ce gisement, d'apres l'opinion d'un geognoste celebre, M. Beudant, est trop incertain, pour separer des formations aussi etroitement unies que celles de la Nouvelle-Espagne et de la Hongrie. Les syenites a zircons, les granites de transition et les porphyres de Norwege, que MM. de Buch et Hausmann nous ont fait connoeitre, sont non-seulement posterieurs (Stromsoe, Krogskoven) au grauwacke et a un thonschiefer qui alterne avec le calcaire a orthoceratites, mais ces roches recouvrent aussi (Skeen) immediatement un quarzite (quarzfels) qui represente le grauwacke et qui repose sur un calcaire noir depourvu de couches alternantes de thonschiefer. Il resulte de ces considerations qu'on auroit des motifs tres-valables pour reunir les groupes §§. 23 et 24, en ne distinguant, parmi les porphyres de transition, que deux formations independantes, anterieures et posterieures au thonschiefer, et une troisieme formation (§. 22) subordonnee a cette roche. La propriete qu'ont certains porphyres et syenites porphyriques d'etre eminemment metalliferes, ne doit pas s'opposer, je pense, a la reunion des roches du Mexique, de la Hongrie, de la Saxe et de la Norwege. Les minerais d'or et d'argent n'y forment pas des couches contemporaines, mais des filons qui atteignent une puissance extraordinaire. Des porphyres de transition, dont on seroit tente de placer plusieurs parmi les trachytes, parce qu'ils renferment de veritables couches de phonolithe avec feldspath vitreux, participent a cette richesse minerale que parmi les terrains posterieurs aux terrains primitifs l'on a crue trop long-temps exclusivement propre aux thonschiefer carbure et micace, au grauwacke et au calcaire de transition. Dans ces memes regions, il existe des groupes de porphyres et de syenites tres-analogues, par leur composition mineralogique et leur gisement, aux roches des plus riches mines de Schemnitz ou de la Nouvelle-Espagne, et qui neanmoins se trouvent entierement depourvus de metaux. C'est presque le cas de tous les porphyres de transition (et des roches trachytiques) de l'Amerique meridionale. Les grandes exploitations du Perou, celles de Hualgayoc ou Chota, et de Llauricocha ou Pasco, ne sont pas dans le porphyre, mais dans le calcaire alpin. Dans la republique de Buenos-Ayres, le fameux Cerro del Potosi est compose de thonschiefer (de transition?) recouvert de porphyre qui contient des grenats dissemines. Si les grands depots argentiferes et auriferes qui font depuis des siecles la richesse de la Hongrie et de la Transylvanie, se trouvent uniquement au milieu des syenites et des grünstein porphyriques, il ne faut point en conclure qu'il en est de meme dans la Nouvelle-Espagne. Sans doute les porphyres mexicains ont offert des exemples isoles d'une prodigieuse richesse. A Pachuca, le seul puits de tirage de l'Encino a fourni pendant long-temps annuellement plus de 30,000 marcs d'argent: en 1726 et 1727, les deux exploitations de la Biscaina et du Xacal ont donne ensemble 542,000 marcs, c'est-a-dire presque deux fois autant qu'en ont donne, dans le meme intervalle, toute l'Europe et toute la Russie asiatique. Ces memes porphyres de Real del Monte, qui par leurs couches superieures se lient aux trachytes porphyriques et aux perlites avec obsidiennes du Cerro de las Navajas, ont fourni par l'exploitation de la mine de la Biscaina au comte de Regla (de 1762 a 1781) plus de onze millions de piastres. Cependant ces richesses sont encore inferieures a celles que l'on retire, dans le meme pays, de formations de transition non porphyriques. La Veta negra de Sombrerete, qui traverse un calcaire compacte rempli de rognons de pierre lydienne, a offert l'exemple de la plus grande abondance de minerais d'argent qu'on ait observee dans les deux mondes: la famille de Fagoaga ou du marquis del Apartado en a retire en peu de mois un profit net de quatre millions de piastres. La mine de Valenciana, exploitee dans du schiste de transition, a ete d'un produit si constant que, jusqu'a la fin du dernier siecle, elle n'a pas cesse de fournir annuellement, pendant quarante annees consecutives, au-dela de 360,000 marcs d'argent. En general dans la partie centrale de la Nouvelle-Espagne, ou les porphyres sont frequens, ce n'est point cette roche qui fournit les metaux precieux aux trois grandes exploitations de Guanaxuato, de Zacatecas et de Catorce. Ces trois districts de mines, qui donnent la moitie de tout l'or et l'argent mexicain, sont situes entre les 18° et 23° de latitude boreale. Les mineurs y travaillent sur des gites de minerais contenus presque entierement dans des terrains de thonschiefer intermediaire, de grauwacke et de calcaire alpin: je dis, presque entierement; car la fameuse Veta madre de Guanaxuato, plus riche que le Potosi, et fournissant jusqu'en 1804, annee commune, un sixieme de l'argent que l'Amerique verse dans la circulation du monde entier, traverse a la fois le thonschiefer et le porphyre. Les mines de Belgrado, de San- Bruno et de Marisanchez, ouvertes dans la partie porphyritique au sud-est de Valenciana, ne sont que de tres-peu d'importance. D'autres exploitations, dirigees sur les porphyres du groupe §. 23 (Real del Monte, Moran, Pachuca et Bolannos), ne fournissent aujourd'hui pas au-dela de 100,000 marcs ou un vingt-cinquieme de l'argent exporte (1803) du port de la Vera-Cruz. J'ai cru devoir consigner ici ces faits, parce que la denomination de porphyres metalliferes, dont je me suis souvent servi dans mes ouvrages, peut donner lieu a l'erreur de regarder les richesses metalliques du nouveau monde comme dues en tres-grande partie aux porphyres de transition. Plus on avance dans l'etude de la constitution du globe sous les differens climats, plus on reconnoeit qu'il existe a peine une roche anterieure au calcaire alpin, qui, dans de certaines contrees, n'ait ete trouvee tres-argentifere. Le phenomene de ces filons anciens dans lesquels se trouvent deposees nos richesses metalliques (peut-etre comme le fer oligiste speculaire et le muriate de cuivre sont deposes et remontent encore de nos jours dans les crevasses des laves), est un phenomene qui paroeit pour ainsi dire independant de la nature specifique des roches. Pour donner une idee precise de la composition du terrain de porphyre, syenite et grünstein, posterieur au thonschiefer de transition, il est necessaire, dans l'etat actuel de la science, de distinguer quatre formations partielles, savoir, celles de la region equinoxiale du nouveau continent, de la Hongrie, de la Saxe et de la Norwege. Malgre les rapports qui unissent ces formations partielles, chacune d'elles offre des differences assez remarquables. Nous les designerons par des noms purement geographiques, selon les lieux qui en presentent les types les plus distincts, sans vouloir indiquer par la qu'on ne puisse trouver la formation de Hongrie dans le nouveau continent, ou celle de Guanaxuato, avec toutes les circonstances qui l'accompagnent, dans quelques parties de l'Europe. A. Groupes de la region equinoxiale du nouveau continent. a. Dans l'hemisphere boreal. Ce qui caracterise en general les porphyres, en partie tres-metalliferes, de l'Amerique equinoxiale (ceux du groupe §. 23, comme ceux du groupe §. 21), c'est l'absence presque totale du quarz, la presence de l'amphibole, du feldspath vitreux, et quelquefois du pyroxene. J'ai insiste sur ces caracteres distinctifs dans tous les ouvrages que j'ai publies depuis 1805; on les retrouve en grande partie dans les porphyres ou grünstein porphyriques, egalement metalliferes, de la Hongrie et de la Transylvanie. Les porphyres mexicains, comme nous l'avons fait observer plus haut, presentent souvent a la fois deux varietes de feldspath, le commun et le vitreux; le premier resiste beaucoup moins a la decomposition que le second. La forme de leurs cristaux, larges ou effiles, les fait reconnoeitre presque autant que l'eclat et la structure lamelleuse plus ou moins nettement prononcee. Le quarz, si parfois il se montre, n'est point cristallise, mais en petits grains informes: le pyroxene et le grenat, qui se trouvent egalement dans les grünstein porphyriques de la Hongrie, sont tres-rares. Le groupe argentifere mexicain abonde moins en amphibole: le mica, que l'on retrouve dans quelques trachytes, manque toujours dans les porphyres de la Nouvelle-Espagne. La plupart de ces roches sont tres-regulierement stratifiees; et, qui plus est, la direction de leurs strates est souvent (entre la Moxonera et Sopilote au nord d'Acapulco; au Puerto de Santa Rosa pres de Guanaxuato) concordante avec la direction des roches primitives et intermediaires auxquelles elles sont superposees. Dans la Nouvelle-Espagne, comme en Hongrie, le terrain trachytique est place immediatement sur les porphyres metalliferes: mais, dans le premier de ces pays, les porphyres sont recouverts sur quelques points (Zimapan, Xaschi et Xacala) de calcaire gris-noiratre de transition; sur d'autres points (Villalpando), de gres rouge; sur d'autres encore (entre Masatlan et Chilpanzingo, entre Amajaque et la Magdalena; entre San Francisco Ocotlan et la Puebla de los Angeles; entre Cholula et Totomehuacan), de calcaire alpin. Les porphyres de transition de la Hongrie, de la Saxe et de la Norwege ont une structure tres-compliquee: ils alternent avec des syenites, des granites, des grünstein; et lorsqu'il n'y a pas d'alternance, ces trois dernieres roches, et meme des micachistes ou des calcaires steatiteux, se trouvent renfermes, comme couches subordonnees, dans les porphyres. La frequence de ces bancs intercales eloigne d'une maniere tresprononcee les porphyres de la Hongrie ou de la Norwege des roches trachytiques; elle les eloigne aussi des porphyres de la Nouvelle-Espagne, qui leur ressemblent par leur composition mineralogique (par la nature de leur pate et des cristaux enchasses). La structure des porphyres mexicains est d'une grande simplicite: ils forment un immense terrain non interrompu par des bancs intercales. J'ai vu des syenites dans les thonschiefer de transition de Guanaxuato (§. 22); je les ai vues, au-dessus de ce thonschiefer, alterner avec des grünstein: mais je n'ai vu ni syenite, ni micaschiste, ni grünstein, ni calcaire dans les porphyres de la Moxonera, de Pachuca, de Moran et de Guanaxuato. Ce n'est qu'a Bolannos que l'on trouve du mandelstein dans le porphyre. Ce developpement uniforme et non interrompu des porphyres metalliferes et non metalliferes de la Nouvelle-Espagne est un phenomene tresfrappant: il rend plus difficile la separation systematique des terrains de porphyre et de trachyte, la ou ces terrains se supportent immediatement. Lorsqu'on evalue l'epaisseur des deux terrains reunis, c'est-a-dire, lorsqu'on s'eleve des couches les plus basses d'un porphyre que l'on peut croire de transition, parce qu'il est recouvert de grandes formations calcaires, analogues au zechstein (Guasintlan, a la pente occidentale, et Venta del Encero, a la pente orientale de la Cordillere), jusqu'au sommet trachytique du grand volcan de la Puebla (Popocatepetl), on trouve, d'apres mes mesures barometriques et trigonometriques, une epaisseur, non interrompue par des roches intercalees, de plus de 13,000 pieds (2233 toises). L'epaisseur des seules couches de porphyre metallifere, en comptant depuis Guasintlan et Puente de Istla (ou les porphyres se cachent sous les mandelstein poreux de Guchilaque et de la vallee de Mexico) jusqu'a l'affleurement des filons argentiferes de Cabrera (Real de Moran), est de 5000 pieds (817 toises). Ces dimensions ont ete determinees en comparant les hauteurs absolues des stations; car, d'apres l'inclinaison variable des couches, et d'apres le rapport entre la direction des coupes et la direction de la roche, il est probable que les epaisseurs apparentes (les differences entre le maximum et le minimum de hauteurs) s'eloignent tres-peu des epaisseurs veritables, qui sont la somme des epaisseurs evaluees perpendiculairement aux fissures de stratification. Voici les circonstances locales, les plus interessantes, du gisement des porphyres du Mexique entre les 17° et 21° de latitude boreale. a. Chemin d'Acapulco a Mexico. Le porphyre, a la pente occidentale de la Cordillere d'Anahuac, ne descend que jusqu'a la vallee du Rio Papagallo, un peu au nord de la Venta de Tierra colorada, a 230 toises de hauteur au-dessus du niveau de l'ocean Pacifique. Sur la pente orientale de la Cordillere d'Anahuac, entre la vallee de Mexico et le port de la Vera-Cruz, je n'ai vu aucune trace de cette roche audessous de l'Encero, a 476 toises de hauteur. Le porphyre s'y cache sous un gres argileux qui enchasse des fragmens d'amygdaloide trachytique. Les deux groupes principaux de porphyres, dans le chemin d'Acapulco a Mexico, sont ceux de la Moxonera et de Zumpango. La vallee granitique du Papagallo est bordee au sud (Alto del Peregrino) par une formation de calcaire compacte (de 85 toises d'epaisseur), bleu-noiratre, traverse par de petits filons blancs de spath calcaire. Elle est remplie de grandes cavernes, mais analogues plutot au calcaire alpin qu'au calcaire de transition. Au nord la vallee est bordee par une masse de porphyre (Alto de la Moxonera et de Los Caxones) qui a 355 toises d'epaisseur. Ce porphyre est assez regulierement stratifie (dir. N. 35° E., inclin. 40° au N. O.); quelquefois il est divise en boules a couches concentriques. Sa base est verdatre et argileuse, enchassant du feldspath vitreux et des pyroxenes decomposes, qui ont presque la couleur de l'olivine: point de quarz, point de mica, point de feldspath lamelleux. De grandes masses d'argile blanc-rougeatre sont intercalees dans ce porphyre terreux; il repose immediatement, comme le calcaire du Peregrino (dont les strates ont dir. N. 45° E.; incl. 60° au N. O.), sur le granite primitif. Ce dernier, qui a ete decrit plus haut (§. 7), renferme, au pied de la colline porphyritique de Los Caxones, dans la vallee meme du Papagallo, des filons d'amphibolite noir et des boules de granite a couches concentriques, semblables a celles que j'ai observees au Fichtelgebirge pres de Seissen. La plus grande masse de ce granite a gros grains est tres-regulierement stratifiee (dir. N. 40° E.) et inclinee par groupes d'une vaste etendue, le plus souvent au N. O., quelquefois au S. E. Les cimes (porphyriques?) voisines (Cerros de las Caxas et del Toro) ont des formes bizarres; et si, a cause de la composition mineralogique du porphyre de la Moxonera et de l'Alto de los Caxones, et a cause de son isolement, on etoit tente de le prendre pour du trachyte, le parallelisme de direction de ses strates avec ceux du calcaire et du granite, et le recouvrement d'un porphyre tressemblable et tres-voisin (Masatlan) par de puissantes formations de calcaire secondaire, s'opposeroient a cette hypothese. En descendant de la montagne porphyrique de Los Caxones, vers le sud, c'est-a-dire vers les cotes de l'ocean Pacifique, j'ai vu venir au jour alternativement: le granite primitif de la vallee du Papagallo, le calcaire alpin de l'Alto del Peregrino, le granite primitif de la vallee du Camaron, la syenite de l'Alto del Camaron, enfin le granite primitif de l'Exido et des cotes d'Acapulco. La syenite du Camaron, renfermant des cristaux d'amphibole de huit lignes de long, ne me paroeit pas liee aux porphyres mexicains. Ce n'est qu'un changement de composition dans la masse du granite, qui, dans cette region, se mele a l'amphibole, et devient porphyroide sur tous les sommets des collines. Le second groupe de porphyre intermediaire dont j'ai pu examiner la superposition avec soin, est celui de Zumpango. Ce groupe commence quelques lieues au nord de l'Alto de los Caxones, et supporte, en s'etendant vers Mescala, un vaste plateau compose de calcaire, de gres et de gypse (entre Masatlan et Chilpanzingo). C'est dans ce plateau, dont la hauteur absolue (c'est-a-dire, au-dessus du niveau de la mer) est de 700 toises, qu'un porphyre semblable par sa composition a celui de la Moxonera supporte des terrains secondaires d'une structure tres-compliquee. En descendant de l'Alto de los Caxones (haut. 585 toises) vers le nord, on voit d'abord de nouveau reparoeitre au jour le granite primitif de la vallee du Papagallo; puis l'on decouvre un lambeau de calcaire alpin, semblable a celui du Peregrino (lambeau de 200 toises de large, qui se trouve superpose immediatement au granite); puis paroeit encore le granite, et enfin l'on atteint le groupe porphyrique de Zumpango, dans lequel se conserve tres-regulierement la direction des strates, N. 30° a 45° E., avec une inclinaison tres-frequente au N. O. Ce porphyre, rempli de feldspath vitreux, depourvu d'amphibole, et recouvrant le granite primitif, sert d'abord de base (Acaguisotla) a une formation d'amygdaloide brun-rougeatre, semi-vitreuse, presque sans cavites, renfermant des amandes de calcedoine decomposee, des lames de mica noir et du melanite. Bientot le mandelstein disparoeit, et le porphyre se montre de nouveau sur un espace de terrain considerable, jusqu'a ce qu'il se cache sous le calcaire de Masatlan et de Chilpansingo, c'est-a-dire, sous deux formations poreuses tres-distinctes, dont la superieure est blanchatre, argileuse et friable, l'inferieure bleu-grisatre, intimement melee de spath calcaire grenu et en masse. Ces deux calcaires semblent, au premier abord, moins anciens que le calcaire alpin du Peregrino; mais ils n'appartiennent certainement pas a des terrains tertiaires qui en Hongrie reposent sur des trachytes. Je n'y ai trouve aucune trace de petrifications: ils sont diriges N. 35° E., et generalement inclines de 40°, non au N. O., mais au S. E. Cette uniformite de direction (non d'inclinaison), observee parmi des roches qui paroissent d'un age si different, est un phenomene tres-rare. Il ajoute peut-etre aux motifs que l'on a de ne pas considerer comme des trachytes les porphyres dont nous venons de faire connoeitre le gisement. Les calcaires de Chilpansingo ont des cavites qui varient de quatre lignes jusqu'a huit pouces de diametre. La formation inferieure, qui est bleu-grisatre, recouvre immediatement le porphyre; elle perce quelquefois la formation blanchatre, et forme a la surface du sol de petits rochers cylindriques ou coralliformes de trois ou quatre pieds de haut, qui presentent l'aspect le plus bizarre. Ces circonstances de composition et de structure indiquent beaucoup d'analogie entre le calcaire caverneux trouve depuis Masatlan et Petaquillas jusqu'a Chilpansingo, et les couches inferieures du calcaire du Jura (höhlenkalk; schlackiger, blasiger kalkstein) qui, egalement caverneuses dans le Haut-Palatinat (entre Laber et Ettershausen) et en Franconie (entre Pegnitz et Muggendorf), donnent, par leurs asperites, a la surface du sol une physionomie particuliere. Non loin de Zumpango le porphyre sort de nouveau audessous des calcaires caverneux de Chilpansingo, ou plutot sous un conglomerat calcaire qui, renfermant a la fois de gros fragmens de la formation bleue et de la formation blanche, recouvre cette derniere sur plusieurs points. Comme dans les groupes de Los Caxones et de Zumpango les porphyres s'elevent a peu pres au meme niveau (560 et 585 toises), on peut supposer, avec quelque probabilite, que les calcaires caverneux qu'ils supportent dans le plateau de Chilpansingo, ont 800 pieds d'epaisseur. En avancant au nord vers Sopilote, Mescala et Tasco, on perd de nouveau de vue le porphyre. Le granite primitif reparoeit; mais bientot il se trouve cache par un porphyre dont la composition mineralogique offre des caracteres tresremarquables: il est gris-bleuatre, un peu argileux par decomposition, et enchasse de grands cristaux de feldspath jaune-blanchatre (plutot lamelleux que vitreux), du pyroxene presque vert-poireau et un peu de quarz non cristallise. Ce porphyre stratifie est recouvert, vers le sud, du meme conglomerat calcaire qui abonde sur le plateau de Chilpansingo; vers le nord (Sopilote, Estola, Mescala), d'un calcaire compacte, grisatre et traverse de filons de carbonate de chaux. Le calcaire d'Estola n'est pas spongieux ou bulleux dans sa masse entiere, comme la formation de Masatlan, mais il renferme de grandes cavernes isolees, comme le calcaire du Peregrino que nous avons decrit plus haut. Il ne m'est reste aucun doute, en voyageant dans ces montagnes, que les roches de la Cannada de Sopilote et de l'Alto del Peregrino sont identiques avec notre calcaire alpin (zechstein) de l'Europe, avec celui qui succede, selon l'age de sa formation, au gres rouge, ou, lorsque celui-ci manque, aux roches de transition. Pres de Mescala, un peu au nord de Sopilote, de riches filons argentiferes, analogues aux filons de Tasco et de Tehuilotepec, traversent le calcaire alpin. Dans la vallee de Sopilote, la roche qui recouvre le porphyre du groupe de Zumpango, presente ces memes couches sinueuses et contournees que l'on voit a l'Achsenberg, au bord du lac de Lucerne, et dans d'autres montagnes de calcaire alpin en Suisse. J'ai observe que les couches superieures de la formation de Sopilote et de Mescala passent progressivement au gris-blanchatre, et que, depourvues de filons de spath calcaire, elles offrent une cassure matte, compacte ou conchoide. Elles se divisent, presque comme le calcaire de Pappenheim, en plaques tres-minces. On diroit d'un passage du calcaire alpin au calcaire du Jura, deux formations qui se recouvrent immediatement en Suisse, dans les Apennins et dans plusieurs parties de l'Amerique equinoxiale, mais qui, dans le Sud de l'Allemagne, sont separees l'une de l'autre par plusieurs formations intercalees (par le gres de Nebra ou bunte sandstein, par le muschelkalk et le gres blanc ou quadersandstein). Pres du village de Sochipala, le calcaire alpin est couvert de gypse, et entre Estola et Tepecuacuilco, on voit sortir sous le calcaire alpin (dirige tantot N. 10° E. avec incl. 40° a l'est, tantot N. 48° E. avec incl. 50° au sud-est) un porphyre vert d'asperge a base de feldspath compacte, divise en strates tres-minces, comme celui d'Achichintla, et presque depourvu de cristaux dissemines. Cette roche ressemble au porphyre phonolitique (porphyrschiefer) du terrain de trachyte. Si l'on avance vers les mines de Tehuilotepec et de Tasco, on trouve cette meme roche recouverte d'un gres quarzeux a ciment argilo-calcaire, et analogue au weiss liegende (couche inferieure arenacee du zechstein) de la Thuringe. Ce gres quarzeux annonce de nouveau la proximite du calcaire alpin: aussi, sur ce gres et peut-etre immediatement sur le porphyre (comme c'est le cas a Zumpango et a l'Alto de los Caxones), on voit reposer, pres du lac sale de Tuspa, une masse immense de calcaire alpin souvent caverneux, renfermant quelques petrifications de trochus et d'autres coquilles univalves. Ce calcaire de Tuspa, indubitablement posterieur a tous les porphyres que je viens de decrire, renferme des couches de gypse speculaire et des strates d'argile schisteuse et carburee qu'il ne faut pas confondre avec du grauwackeschiefer. Il est generalement gris-bleuatre, compacte, et traverse par des filons de carbonate de chaux. Sur beaucoup de points, loin d'etre caverneux, il fait passage a une formation blanche, tres-compacte, analogue au calcaire de Pappenheim. J'ai ete tres-frappe de ces variations de texture, que nous avons observees egalement, M. de Buch et moi, dans les Apennins (entre Fosombrono, Furli et Fuligno), et qui semblent prouver que, la ou les membres intermediaires de la serie n'ont pu se developper, les formations de calcaire alpin et de calcaire du Jura sont plus intimement liees qu'on ne l'admet generalement. Les riches filons d'argent de Tasco, qui ont donne jadis 160,000 marcs d'argent par an, traversent a la fois le calcaire et un thonschiefer qui passe au micaschiste; car, malgre l'identite des formations calcaires, egalement argentiferes, de Tasco et de Mescala, la premiere de ces formations, partout ou elle a ete percee dans les travaux des mines (Cerro de S. Ignacio), n'a pas ete trouvee superposee au porphyre comme le calcaire de Mescala, mais recouvrant une roche plus ancienne que le porphyre, un micaschiste (dir. N. 50° E.; incl. 40° -- 60°, le plus souvent au N. O., quelquefois au S. E.) depourvu de grenats et passant au thonschiefer primitif. J'ai dau entrer dans ces details sur les terrains qui succedent aux porphyres, parce que ce n'est qu'en faisant connoeitre la nature des roches superposees qu'on peut mettre les geognostes en etat de prononcer sur la place que doivent occuper les porphyres mexicains dans l'ordre des formations. L'esquisse d'un tableau geognostique n'a de valeur qu'autant qu'on rattache la roche qu'on veut faire connoeitre, a celles qui lui succedent immediatement au-dessus et audessous. Les seuls faits oryctognostiques peuvent etre presentes isolement: la geognosie positive est une science d'enchaeinemens et de rapports, et l'on ne peut, en decrivant une portion quelconque du globe, borner son horizon et s'arreter a telle ou telle couche qu'on veut etudier de preference. b. Plateau central. Vallee de Mexico; terrain entre Pachuca, Moran et La Puebla . Une enorme masse de porphyre de transition s'eleve a la hauteur moyenne de 1200 a 1400 toises au-dessus du niveau de la mer. Elle est recouverte, dans la vallee de Mexico et au sud vers Cuernavaca et Guchilaque, de mandelstein basaltique et celluleux (en mexicain tetzontli); vers l'est et le nord-est (entre Tlascala et Totonilco), de formations secondaires. Il est probable que le porphyre, qui se cache d'abord sous le calcaire alpin de Mescala, puis dans les Llanos de San-Gabriel (pres du pont d'Istla), sous des conglomerats trachytiques et sous un mandelstein poreux, est identique avec celui qui reparoeit, 15 lieues plus au nord et 800 toises plus haut, sur les bords du lac de Tezcuco. C'est dans la belle vallee de Mexico que la roche porphyrique perce l'amygdaloide celluleuse dans les collines de Chapoltepec, de Notre-Dame de la Guadeloupe et du Pennol de los Bannos. Elle presente plusieurs varietes tres-remarquables: 1. ° grisrougeatres, un peu argileuses, sans stratification distincte, renfermant en parties egales des cristaux d'amphibole et de feldspath commun (galerie creusee dans le rocher de Chapoltepec); 2.° noires ou gris-noiratre (quelquefois fendillees et bulleuses), stratifiees par couches de 3 -- 4 pouces d'epaisseur, a base de feldspath compacte, a cassure matte, unie ou imparfaitement conchoide (ressemblant plus a la cassure de la lydienne qu'a celle du pechstein), renfermant de petits cristaux de feldspath vitreux et de pyroxene vert d'olive, presque depourvues d'amphibole, souvent recouvertes a leur surface de superbes masses de hyalithe mamelonne ou verre de Müller (Pennol de los Bannos, dir. N. 60° O., incl. 60° N. E.); 3.° rouges, terreuses, avec beaucoup de grands cristaux de feldspath commun decompose (salines du lac de Tezcuco, la ou d'anciennes sculptures azteques couvrent le Pennol). Le porphyre de la vallee de Mexico offre non-seulement des sources d'eau potable qui sont amenees a la ville par de longs et somptueux aqueducs, mais aussi des eaux thermales acidulees, les unes chaudes et les autres froides. On y trouve, et ce fait est bien remarquable, comme dans le micaschiste primitif des environs d'Araya et de Cumana, du naphte et du petrole (promontoire du Sanctuaire de Guadeloupe). Quoique ce porphyre sorte audessous de l'amygdaloide poreuse, et qu'il se montre au jour (Cerro de las Cruces et Tiangillo, Cuesta de Varientos et Capulalpan, Cerro Ventoso et Rio Frio) dans tout le pourtour circulaire du bassin de Tenochtitlan, fond d'un ancien lac en partie desseche, ce n'est que vers le nord-nord-est seulement (Pachuca, Real del Monte et Moran) qu'il a ete trouve argentifere. De riches filons traversent, depuis la mine de San-Pedro a la cime du Cerro Ventoso (1461 toises) jusqu'au fond de l'ancien puits de l'Encino (1170 toises) dans le Real de Pachuca, une masse de porphyre qui a plus de 1700 pieds d'epaisseur. Cette roche, que jadis on auroit appelee petrosiliceuse ou hornsteinporphyr, est generalement gris-verdatre, quelquefois vert de prase, a cassure ecailleuse, offrant des fragmens a bords aigus. Sa pate est probablement un feldspath compacte, charge de silice: elle renferme, non du quarz et du mica, mais des cristaux de feldspath commun et d'amphibole. La derniere substance n'est generalement pas tres-abondante, et lorsque le porphyre est argileux ou plutot terreux, on ne reconnoeit l'amphibole que par des taches a surface striee et d'un vert tres-fonce. Les couches presque argileuses et plus tendres (thonporphyr de Moran) paroissent inferieures aux couches plus dures et plus tenaces. On trouve intercales aux unes et aux autres des strates de phonolithe (klingstein) gris de fumee ou vert-poireau, divises en tables ou feuillets tres-sonores. Ce n'est cependant pas entierement un porphyrschiefer du terrain trachytique; car la masse phonolithique n'offre pas des cristaux effiles de feldspath vitreux, mais des cristaux de feldspath commun blanc grisatre, constamment accompagnes d'un peu d'amphibole. Tous ces porphyres argentiferes de Moran et de Real del Monte sont tres-regulierement stratifies (direction generale, comme dans la vallee de Mexico, N. 60° O., incl. 50° -- 60° au N. E.): ils n'offrent des divisions en colonnes informes que dans les Organos de Actopan (Cerro de Mamanchota, sommet 1527 toises) et les Monjas de Totonilco el Chico, si toutefois la roche des Organos, dont la masse a 3000 pieds d'epaisseur, en ne comptant que les porphyres visibles au-dessus des plaines voisines, est identique avec la roche de Moran. La derniere renferme un peu moins de cristaux d'amphibole; l'une et l'autre de ces roches ne sont ni fendillees ni poreuses, et c'est au pied des pics grotesques des Monjas que se trouvent les riches filons de Totonilco el Chico. Jusque-la tous les porphyres argentiferes de Pachuca et de Moran, que je viens de decrire, ne nous ont rien offert qui les eloigne du terrain de transition: ils sont meme recouverts, entre les bains de Totonilco el Grande et la caverne de la Madre de Dios ou Roche percee, d'enormes masses de formations calcaires, de gres et de gypse. La formation calcaire, de 1000 pieds d'epaisseur, est gris-bleuatre, compacte, non poreuse, renfermant des filons de galene et des couches de calcaire blanc presque saccharin a gros grains. C'est pour le moins la formation alpine (alpenkalkstein), si ce n'est pas un calcaire de transition, et les rapports de gisement qu'on observe entre cette roche calcaire et les porphyres de Moran et de la Magdalena semblent caracteriser ceux-ci comme decidement non trachytiques. En avancant a quatre ou cinq lieues de distance des mines de Moran, par Omitlan, par les savanes de Tinaxas, et par une vaste foret de chenes vers le Jacal, dont l'Oyamel ou la Montagne des Couteaux (Cerro de los Navajas) forme la pente occidentale, on entre dans un pays qui offre, dans sa composition geognostique, la trace tres-recente des feux souterrains. On trouve d'abord au pied de l'Oyamel un porphyre terreux blanc-grisatre, renfermant des cristaux de feldspath vitreux, et presentant presque la meme direction (le meme angle avec le meridien, N. 30° O.) que les porphyres argentiferes, mais une inclinaison (75° au S. O.) diametralement opposee. L'etat de la vegetation ne permet pas de fixer les rapports de gisement entre les roches de l'Oyamel et les porphyres de transition des mines d'argent de Moran. Les premieres, qui sont encore depourvues d'obsidienne, servent de base a une roche blanc-rougeatre, a eclat emaille, a cassure unie, quelquefois grenue, renfermant un peu de feldspath vitreux, et divisee en une infinite de petites couches paralleles, souvent ondulees. Cette roche est une perlite porphyrique lithoide, ou plutot un porphyre trachytique non spongieux, non fendille, dont la base passe au perlstein. Un tel passage de la pate pierreuse a une masse composee de globules agglutines, se manifeste meme dans des couches qu'a leur seul aspect on croiroit d'abord composees de feldspath compacte ou d'un kieselschiefer terne et grisatre. Aux cristaux effiles de feldspath vitreux, dissemines dans la pate, ne se trouvent meles ni le mica noir, ni le quarz, melange que l'on observe dans la perlite de Tokai et de Schemnitz en Hongrie. L'abondance d'obsidienne que renferment les porphyres de la montagne des Couteaux, et qui les rapproche des perlstein de Cinapecuaro, ne laisse pas de doute sur leur nature volcanique. Ils constituent des montagnes isolees, souvent jumelles, a couches perpendiculaires, rappelant, par leur aspect, les collines de basalte et de trachyte des Monts Euganeens. Ces masses volcaniques sont-elles sorties du sein des porphyres de transition de Moran, ou existe-t-il un passage des unes aux autres? Les roches de l'Oyamel sont-elles seulement superposees aux porphyres metalliferes, comme le sont les basaltes colonnaires de Regla? On se demande de meme si les porphyres noirs, souvent bulleux, de la vallee de Mexico (Pennol de los Bannos), recouverts d'amygdaloide, basaltiques et cellulaires, sont d'une origine differente des porphyres qui se cachent (Totonilco el Grande) sous le calcaire alpin? Dans cette meme vallee de Mexico (en avancant du lac de Tezcuco au nord vers Queretaro), on voit sortir, a la Cuesta de Varientos, sous le mandelstein volcanique, un porphyre terreux, rouge-brunatre, sans amphibole, mais abondant en cristaux effiles de feldspath vitreux. C'est sur la prolongation des strates de cette roche d'un aspect trachytique que reposent les formations secondaires et tertiaires (calcaire du Jura, gypse et marnes avec ossemens d'elephans, a 1170 toises de hauteur), qui remplissent les bassins de l'Hacienda del Salto, de Batas et du Puerto de los Reyes. Dix lieues plus loin, a Lira, on trouve des roches porphyriques a base semi-vitreuse et vert-olive, recouvertes d'hyalithe mamelonnee et depourvues de pyroxene. Ces roches enchassent, outre un peu de feldspath, des grains de quarz: elles offrent en meme temps de petites couches d'obsidienne intercalees. C'est, a n'en pas douter, un trachyte (roche a laquelle en Hongrie le quarz n'est pas non plus entierement etranger). Or, comment distinguer les couches de porphyre trachytique des porphyres de transition qui les supportent immediatement, lorsque les uns et les autres, au melange pres d'obsidienne et de perlite, ont une composition mineralogique si analogue? Cette difficulte embarrasse encore plus le voyageur geognoste, lorsqu'il sort de la vallee de Mexico, vers l'est, pour traverser l'arete de montagnes sur laquelle s'elevent les deux volcans de la Puebla, l'Iztaccihuatl ( Femme-blanche, 2456 toises) et le Popocatepetl ( Montagne fumante, 2770 toises). Les roches porphyriques qu'on voit au jour pres de la Venta de Cordova et de Rio frio, sont intimement liees aux trachytes du Grand-Volcan encore enflamme. Elles sont recouvertes de breches ponceuses et de perlites avec obsidienne (entre Ojo del Agua et le fort de Perote), et servent de base (entre San Francisco Ocotlan, la Puebla de los Angeles, Totomehuacan, Tecali et Cholula; entre Venta de Soto, El Pizarro et Portachuelo) a une puissante formation calcaire, tantot compacte et bleu-grisatre, tantot a petits grains et blanche ou a couleur melangee. Ce calcaire (de transition ou alpin?) n'est certainement pas tertiaire, comme le sont les formations tres-recentes de calcaire coquillier, de marnes et de gypse, que dans differentes parties du globe on voit placees, par lambeaux, sur le terrain trachytique. M. Sonneschmidt a vu, pres de Zimapan, Xaschi et Xacala, un veritable calcaire de transition, gris-noiratre et fortement carbure, reposer sur des porphyres entierement semblables a ceux que nous venons de decrire dans le plateau central de la Nouvelle-Espagne. Quelques strates de ces porphyres de Zimapan, de Xaschi et d'Ismiquilpan, renferment, comme les grünstein porphyriques et les perlites de la Hongrie, et comme le porphyre superpose au thonschiefer (de transition?) de la fameuse montagne de Potosi, des grenats dissemines dans la masse. Ils sont traverses de filons qui presentent cette magnifique variete d'opale jaune-orange que nous avons fait connoeitre, M. Sonneschmidt et moi, sous le nom d'opale de feu (feueropal), et qui a ete retrouvee par M. Beudant parmi les trachytes de Telkebanya. J'ai vu enchasses dans la pate porphyrique de Zimapan, des globules rayonnes de perlite gris-bleuatre, ressemblant par leur couleur a de la thermantide jaspoide (porzellan-jaspis). On n'a point encore eclairci les rapports de gisement entre ces porphyres, qu'on croiroit trachytiques, et ceux qui supportent les grandes formations calcaires. Il est plus aise de separer les porphyres metalliferes des trachytes dans nos classifications artificielles qu'a la vue meme des montagnes. g. Groupe de porphyres de Guanaxuato. C'est ce groupe qui determine le plus clairement l'age relatif, ou, pour m'exprimer avec plus de precision, le maximum de l'anciennete des porphyres mexicains, si toutefois ceux dont nous venons d'indiquer les gisemens sont d'une meme formation que les porphyres de Guanaxuato. La superposition de ces porphyres sur des roches appartenant au terrain intermediaire est manifeste. Pres de la ferme de la Noria et dans la Cannada de Queretaro, un porphyre vert d'olive schisteux, rempli de feldspath vitreux en cristaux microscopiques, est superpose a un thonschiefer de transition qui renferme de la lydienne. Pres de Guanaxuato, et surtout pres de Santa Rosa de la Sierra, cette superposition est egalement certaine. Les porphyres de ce district ont en general un gisement concordant (une direction et une inclinaison paralleles) avec les strates du thonschiefer. Ils sont eminemment metalliferes, et le fameux filon de Guanaxuato (Veta madre), faisant le meme angle avec le meridien que les filons de Zacatecas, de Tasco et de Moran (N. 50° O.), a ete exploite successivement sur une longueur de 12,000 toises et une largeur (puissance) de 20 a 25 toises. Il a fourni en 230 ans plus de 180 millions de piastres, et il traverse a la fois le porphyre et le schiste de transition. La premiere de ces roches forme, a l'est de Guanaxuato, des masses gigantesques qui se presentent de loin sous l'aspect le plus etrange, comme des murs et des bastions. Ces cretes, taillees a pic et elevees de plus de 200 toises au-dessus des plaines environnantes, portent le nom de buffas; elles sont depourvues de metaux, paroissent soulevees par des fluides elastiques, et sont regardees par les mineurs mexicains, qui a Zacatecas les voient aussi placees sur un thonschiefer de transition eminemment metallifere, comme un indice naturel de la richesse de ces contrees. Lorsqu'on embrasse sous un meme point de vue les porphyres de la Buffa de Guanaxuato, et ceux des mines jadis celebres de Belgrado de San Bruno, de la Sierra de Santa Rosa et de Villalpando, on croit reconnoitre dans leurs strates les plus recens des passages a des roches que l'on est generalement convenu en Europe de placer parmi les trachytes. Dans les environs de Guanaxuato dominent les porphyres a pate de feldspath compacte, vert de gris et vert d'olive, enchassant du feldspath lamelleux (non vitreux), soit en cristaux presque microscopiques (Buffa), soit en cristaux tres-grands (Mines de San Bruno et du Tesoro). L'amphibole decompose, qui teint probablement en vert la masse entiere de ces roches, ne se distingue que par des taches informes. En s'elevant vers la Sierra (Puerto de Santa Rosa, Puerto de Varientos), le porphyre est souvent divise en boules a couches concentriques: sa pate devient vert-noiratre, semi-vitreuse (pechsteinporphyr), et renferme a la fois un peu de mica cristallise et des grains de quarz. Pres de Villalpando les filons auriferes traversent un porphyre vert de prase, a base de phonolithe, dans lequel on ne reconnoeit que quelques petits cristaux effiles de feldspath vitreux. C'est une roche qu'on a de la peine a distinguer du porphyrschiefer trachytique: je l'ai vue couverte et d'un porphyre terreux blanc-jaunatre (mine de Santa-Cruz), et d'un conglomerat ancien (boca de la mina de Villalpando), qui represente evidemment le gres rouge et dont les couches inferieures passent au grauwacke. Les porphyres de la region equinoxiale du Mexique renferment, quoique bien rarement, outre quelques grenats dissemines (Izmiquilpan et Xaschi), du mercure sulfure (San Juan de la Chica; Cerro del Fraile pres de la Villa de San- Felipe; Gasave, a l'extremite septentrionale de la vallee de Mexico); de l'etain (El Robedal, et la Mesa de los Hernandez); de l'alunite (Real del Monte, d'apres M. Sonneschmidt). Cette derniere substance semble rapprocher encore davantage ces roches porphyriques des veritables trachytes; quoique, dans l'Amerique meridionale (peninsule d'Araya, Cerro del Distiladero et de Chupariparu), j'aie vu un thonschiefer, qui appartient plutot au terrain primitif qu'au terrain intermediaire, traverse par des filons, je ne dirai pas, d'alunite (alaunstein), mais d'alun natif dont les Indiens vendent au marche de Cumana des morceaux de plus d'un pouce de grosseur. Le cinabre des porphyres de San-Juan de la Chica, les couches argileuses du Durasno, melees a la fois de houille et de cinabre, et placees sur un porphyre tres-amphibolique, sont des phenomenes bien dignes d'attention. Ceux des geognostes qui mettent (comme moi) plus d'importance au gisement qu'a la composition oryctognostique des roches, rapprocheront sans doute les porphyres et argiles du Durasno des depots de mercure que presente dans les deux mondes la formation de gres rouge et de porphyre (duche de Deux-ponts, et Cuenca, entre Quito et Loxa). Les dernieres couches du terrain de transition se trouvent partout dans une liaison intime avec les couches les plus anciennes du terrain secondaire. Le celebre filon argentifere de Bolannos a offert sa plus grande richesse dans une amygdaloide intercalee au porphyre. En Hongrie, en Angleterre, en Ecosse et meme en Allemagne, des roches d'amygdaloide et de porphyres appartiennent a la fois aux grauwackes, aux thonschiefer et calcaires de transition et au gres rouge ou gres houiller. Le porphyre metallifere de Guanaxuato recouvre simplement le thonschiefer: il n'y forme pas en meme temps des couches intercalees (comme dans le groupe §. 22); mais une syenite analogue a celle que l'on voit dans la mine de Valenciana, au milieu du thonschiefer intermediaire, alterne des milliers de fois, sur une surface de plus de vingt lieues carrees, avec du grünstein de transition, entre la mine de l'Esperanza et le village de Comangillas. Dans cette region, la roche syenitique est depourvue de metaux; mais a Comanja elle est argentifere, comme elle l'est aussi en Saxe et en Hongrie. b. Dans l'hemisphere austral. Entre les 5° et 8° de latitude j'ai vu des roches porphyritiques, intimement liees entre elles, couvrir les pentes orientales et occidentales des Andes du Perou. Ces roches reposent, soit sur un thonschiefer (de transition?) traverse par des filons argentiferes (Mandor, El Pareton), soit, quand le thonschiefer manque, sur du granite. Les unes sont ou divisees en colonnes gigantesques (Paramo de Chulucanas), ou tres-regulierement stratifiees (Sondorillo). Leur base noire est presque basaltique; elles renferment plus de pyroxene que de feldspath, et alternent (Quebrada de Tacorpo) avec des couches de jaspe et de feldspath compacte. Ce dernier, depourvu de cristaux dissemines, est noir comme de la pierre lydienne, et rappelle, par sa couleur et son homogeneite, certains basanites des monumens anciens. D'autres porphyres (N.tra S.ra del Carmen, au nord du village indien de San Felipe) ont une apparence moins trachytique; ils offrent de riches filons argentiferes, et sont recouverts tantot de couches de quarz de trois ou quatre toises de large, tantot d'un calcaire (alpin?) compacte, bleu-noiratre, traverse par de petits filons de spath calcaire et rempli de coquilles petrifiees (hysterolithes, anomies, cardium, et fragmens de grandes coquilles polythalames, qui sont plutot des nautilites que des ammonites). En descendant (toujours sur la pente orientale des Andes) vers Tomependa, aux bords de la riviere des Amazones, j'ai vu entre Sonanga et Chamaya, le gres ancien (todtes liegende) superpose a un porphyre terreux grisatre, renfermant (comme celui de Pucara) beaucoup d'amphibole et un peu de feldspath commun. Sur la pente occidentale des Andes, en approchant des cotes de la mer du Sud, on trouve (entre Namas et Magdalena) des porphyres entierement depourvus d'amphibole, et supportant cette grande formation de quarz qui remplace dans cette region le gres rouge. J'ai indique plus haut (§. 18) que ce porphyre, loin d'etre primitif, m'a paru le plus ancien des porphyres de transition. Ce resultat n'a pu etre enonce qu'avec doute; car, entre Ayavaca, Zaulaca, Yamoca (§. 8) et Namas (province de Jaen de Bracamoros et intendance de Truxillo), il est bien difficile de determiner avec certitude l'age des granites, des syenites et des thonschiefer sur lesquels reposent les porphyres intermediaires et les trachytes porphyriques. Lorsque les rapports de superposition ne sont pas entierement connus, l'on ne doit prononcer qu'avec reserve sur un terrain d'une constitution geognostique si compliquee. B. Groupe de la Hongrie. C'est le terrain de syenite et de grünstein porphyrique qui renferme la principale richesse minerale de la Hongrie et de la Transylvanie (Schemnitz, Kremnitz, Hochwiesen et Koenigsberg; le Bannat, Kapnak et Nagyag). Nous faisons connoeitre ce terrain d'apres les belles observations, encore inedites, de M. Beudant. La formation de Hongrie est beaucoup moins simple que celle du Mexique, avec laquelle on lui trouve d'ailleurs de grandes analogies. Les roches qui constituent sa masse principale, sont des roches porphyriques a base de feldspath compacte, coloree en vert: elles renferment, comme les porphyres de l'Amerique equinoxiale que j'ai fait connoeitre plus haut, de l'amphibole, et sont presque depourvues de quarz. Cette derniere substance ne se montre que dans les couches subordonnees de syenite, de granite, de gneis et de grünstein compacte, auxquelles passe la roche porphyrique. Dans la Nouvelle-Espagne, les porphyres a filons auriferes et argentiferes ont une pate en apparence homogene, le plus souvent foiblement coloree; en Hongrie, ce ne sont pas les vrais porphyres qui dominent, mais les grünstein porphyriques. D'apres de simples considerations oryctognostiques, c'est-a-dire de composition, le terrain aurifere de Hongrie ressemble bien plus a la formation mexicaine d'Ovexeras, dans laquelle alternent des syenites et des grünstein plus ou moins porphyriques, qu'a ces grandes masses de porphyres que traversent les celebres filons de Pachuca, Real del Monte, Moran et Guanaxuato (au sudest de la mine de Belgrado); mais, considerees geognostiquement, toutes ces roches de porphyre et de syenite, celles du Mexique et de la Hongrie, ne constituent qu'une seule formation, tantot simple, tantot composee (avec alternance). Les roches porphyriques et syenitiques de Hongrie, les plus compactes comme les plus melangees, renferment du carbonate de chaux, et font effervescence avec les acides. Ce caractere se retrouve dans les roches d'un gisement analogue du Mexique, mais non dans les trachytes qui leur sont superposes. Le feldspath vitreux est beaucoup plus rare dans les porphyres a base de grünstein de la Hongrie que dans les porphyres mexicains: il ne se rencontre (Hochwiesen, Bleihütte) que dans les strates superieurs et terreux, surtout la ou commence le terrain trachytique. Le fer oxidule abonde lorsque l'amphibole se montre en cristaux tres-distincts; le grenat (que nous avons deja indique plus haut dans les porphyres mexicains de Zimapan et dans ceux de Potosi, sur le revers oriental des Andes du Perou) penetre jusqu'au milieu des prismes d'amphibole. Quoique dans la grande formation de syenites et de grünstein porphyriques de la Hongrie les diverses varietes de roches passent frequemment les unes aux autres, on remarque pourtant en general le type suivant d'association et de superposition: la partie inferieure de tout le systeme est formee par des syenites a gros et a petits grains, passant a un granite talqueux (Hodritz) et au gneis; la partie moyenne est composee tantot de grünstein compacte, a pate noire presque depourvue de cristaux dissemines, tantot de roches porphyriques, a base de feldspath pur, ou a base melangee de feldspath et d'amphibole, enchassant des cristaux de feldspath commun (lamelleux), de l'amphibole, un peu de mica et des grenats, tres-rarement du quarz; la partie superieure offre des grünstein porphyriques terreux et particulierement auriferes. C'est seulement cette derniere assise qui renferme quelquefois du feldspath vitreux, de la laumonite, du mica et (comme dans l'Amerique equinoxiale) des filons de jaspe rouge. Dans les grünstein terreux qui sont d'une structure plus simple, parce qu'ils n'alternent pas avec des syenites, des granites ou gneis de transition, on trouve (vallee de Glashütte) des masses compactes basaltiformes (divisees en prismes) et un grünstein porphyrique noir a base de feldspath amphiboleux. Ce grünstein enchasse des aiguilles tres-petites d'amphibole, des lamelles nombreuses de mica noir et des druses de quarz blanc et rouge. Les couches subordonnees a la grande formation de syenite et grünstein porphyrique de Hongrie sont: des micaschistes (vallee d'Eisenbach); du quarz compacte, tantot feuillete et micace, tantot grenu, passant partiellement a un silex terne a cassure unie (bassin occidental de Schemnitz); du calcaire steatiteux, jaune de soufre, verdatre ou rougeatre, avec grenats dissemines dans la masse, et accompagne de serpentine (Hodritz). Tout ce systeme de roches syenitiques et porphyriques est tres-distinctement stratifie en Hongrie comme au Mexique; mais, dans le premier de ces deux pays, la direction et l'inclinaison des strates ne sont uniformes que dans un meme groupe de montagnes. La nature du terrain sur lequel reposent les syenites et grünstein porphyriques de la Hongrie, n'est pas facile a determiner avec certitude. M. Beudant les croit d'une formation plus recente que les grauwackes, qui ne se sont pas developpes en Hongrie la ou dominent les grünstein porphyriques. Des schistes talqueux, alternant avec des calcaires cristallins grisatres, et appartenant probablement au terrain de transition le plus ancien, ont paru a ce savant geognoste, de meme qu'a M. Becker, servir de base a la formation syenitique et porphyrique. Ce seroit une analogie de plus qu'offriroit cette formation avec le terrain homonyme du Mexique. En Hongrie, comme dans le nouveau continent, les porphyres, les syenites et les grünstein sont immediatement recouverts de trachytes et de conglomerats trachytiques avec obsidiennes et perlites. En Auvergne (Mont-d'or, Cantal); dans les eiles de la Grece (Argentiera, Milo, Santorino), visitees par un excellent observateur, M. Hawkins; a Unalaska, explore recemment par M. de Chamisso et par l'expedition du capitaine Kotzebue, ces memes rapports de gisement s'observent entre les trachytes et les porphyres de transition. A la montagne du Kasbek, dans la chaeine Caucasique, un porphyre intermediaire, qui alterne avec de la syenite, du granite, du gneis et du thonschiefer de transition, renferme aussi du feldspath vitreux: il offre meme dans quelques strates toutes les apparences d'un trachyte poreux. C'est ainsi que sur les points les plus eloignes du globe, en Amerique, en Europe et en Asie, nous voyons osciller les porphyres entre des roches de transition et des roches volcaniques tresanciennes. C. Groupe de la Saxe. Nous ne parlons point ici du porphyre qui forme avec le grünstein et le calcaire gris-noiratre des couches subordonnees (Friedrichswalde, Seidwitzgrund) dans le schiste de transition (§. 22), mais de la grande formation de syenite et porphyre que Werner designoit par le nom de formation principale (Hauptniederlage). Ce savant illustre distinguoit quatre terrains de porphyres: le premier formant des couches (ou plutot des filons?) dans le gneis et le micaschiste primitifs; le second alternant avec la syenite; le troisieme appartenant au gres houiller, et renfermant des grünstein, des retinites et des amygdaloides agathiferes; le quatrieme intercale a des roches trappeennes (volcaniques). Ces quatre terrains, dont le premier ne constitue vraisemblablement pas une formation independante, sont, comme je l'ai expose ailleurs ( Voyage aux regions equinoxiales, T. I, p. 155), les porphyres intercales aux roches primitives, les porphyres de transition, les porphyres secondaires et les trachytes (trapporphyre). La formation principale de porphyre et de syenite de Saxe repose sur des schistes de transition (avec grauwacke), et par consequent, la ou les thonschiefer ne se sont pas developpes, sur des roches plus anciennes. La syenite qui alterne avec le porphyre (Meissen, Leuben et Prasitz; Suhl) passe au granite et au gneis. Ce granite de transition est generalement a gros grains, compose de feldspath rougeatre, de quarz gris de fumee, et de mica noir bien cristallise (Dohna, Posewitz et Wesenstein). Le gneis de transition (Meissen) est plus rare que le granite, et forme des couches dans la syenite, comme en forment aussi le calcaire grenu et blanc (Naundorf) et un grünstein qui passe au basalte (Wehnitz). La presence de la formation de syenite qui renferme, dans la vallee de Plauen (comme en Norwege), quelques cristaux dissemines de zircon, ne se manifeste souvent que par des bancs de granite; car la substitution, frequente et locale, du mica a l'amphibole et de l'amphibole au mica, caracterise la formation syenitique, abondante en sphene brun (braunmenakanerz), qui est un silicate de titane et de chaux. Le porphyre non stratifie de Saxe a generalement une base rouge, grisatre et argileuse (thonporphyr, resultat d'une decomposition du feldspath compacte); d'apres M. Boue, quelquefois (vallee de Tharandt) cette base prend l'aspect du klingstein. Ce porphyre ne renferme presque pas d'amphibole, et n'est point depourvu de quarz comme ceux du Mexique et de la Hongrie. On y trouve du feldspath commun, du quarz cristallise en doubles pyramides hexaedres, et quelquefois un peu de mica. Le groupe de porphyres et syenites de Saxe est un peu metallifere; la syenite stratifiee a bancs epais de Scharfenberg offre des filons d'argent, et le porphyre d'Altenberg contient quelquefois de l'etain. C'est dans la vallee de Plauen, pres de Dresde, que se trouve la roche a laquelle Werner a donne, le premier, le nom de syenite, croyant par erreur que les obelisques egyptiens conserves a Rome contenoient tous de l'amphibole. M. Wad ( Foss. aegypt. Musei Borgiani, 1794, p. 6 et 48; Zoega, de Obeliscis, p. 648) a prouve que ces obelisques, dont le plus beau, mineralogiquement parlant, est celui de Piazza Navona, sont un veritable granite avec mica noir agglomere, sans amphibole. En effet, il n'existe point a Syene de formation independante de syenite et de porphyre intermediaires; mais le granite primitif, peut-etre d'une formation pas tresancienne, y renferme de l'amphibole (comme a l'Orenoque; au Spitzberg pres Krummhübel en Silesie; pres Wiborg en Finlande) dissemine dans des couches subordonnees, non etendues et d'un prolongement peu regulier. Pour le geognoste classificateur la roche de Syene est un granite qui contient de l'amphibole: ce n'est point de la syenite. Quelques fragmens de cette roche, que l'on trouve isoles parmi les monumens egyptiens, ont trompe Werner par l'analogie oryctognostique qu'ils presentent avec la syenite de la vallee de Plauen. Des formations de porphyre et de syenite entierement semblables a celle de Saxe, et placees sur le schiste de transition et le grauwacke, sont communes au Thüringerwald: d'apres M. Boue, en Moravie (entre Blansko, Brünn et Znaim); d'apres M. Roziere, dans la peninsule du Mont Sinai. Ces dernieres meritent une attention particuliere. Des roches intermediaires schisteuses et arenacees couvrent une partie de l'Arabie petree. Au milieu de ces roches, qui renferment des conglomerats avec fragmens de granite et de porphyre (breche universelle d'Egypte, dans le langage des antiquaires), sortent des syenites, et des porphyres a base de feldspath compacte silicifere, enchassant des cristaux de feldspath lamelleux, un peu d'amphibole et, d'apres M. Burckhardt, du quarz. Les porphyres sont generalement inferieurs a la syenite, et cette derniere, dont se composent probablement les tables de la loi que l'on croit enterrees a Djebel Mousa, est accompagnee de grünstein compacte noiratre (golfe d'Akaba) et de grünstein porphyrique. Tout ce terrain de l'Arabie petree, dont j'ai pu examiner de nombreux echantillons, ressemble de la maniere la plus frappante au terrain porphyrique et syenitique d'Ovexeras et de Guanaxuato, au Mexique. En substituant avec M. Roziere le mot sinaite a celui de syenite, on auroit donne a la roche de transition qui est composee d'amphibole et de feldspath, et melee quelquefois d'un peu de quarz et de mica, un nom geographique plus exact, un nom qui (comme celui de calcaire du Jura) auroit rappele non-seulement des rapports de composition, mais aussi des rapports de gisement. D. Groupe de la Norwege. §. 24. C'est le terrain decrit par deux geognostes celebres, le professeur Haussmann et M. Leopold de Buch; c'est celui dans lequel la formation de granite posterieure a des roches calcaires, remplies de debris de corps organises, s'est le mieux developpee, et qui par consequent a repandu le plus de jour sur la veritable nature des roches de transition. On n'avoit d'abord regarde cette classe de roches que comme une association de grauwacke, de schistes carbures et de calcaires noirs: peu a peu l'on reconnut que la grande masse de porphyres appeles long-temps porphyres primitifs appartenoit, soit au terrain de transition, soit meme au gres rouge. On reunissoit aux porphyres intermediaires les syenites de Meissen; mais, quoique ces dernieres perdent l'amphibole et passent insensiblement au granite de transition (Dohna), la generalite de ce phenomene, l'apparition nouvelle de roches granitoides, entierement analogues aux roches primitives, et recouvrant a la fois des porphyres noirs avec pyroxene et des calcaires a orthoceratites, ne commenca a bien fixer l'attention des geognostes que lorsque les rives du golfe de Christiania furent decrites dans tous leurs merveilleux rapports de superposition. Les zircons, qui ont donne tant de celebrite a la syenite de Holmstrand et de Stromsoe, se retrouvent abondamment dans les syenites du Groenland meridional (d'apres M. Giesecke, pres cap Comfort, a Kittiksut et a Holsteensberg): ils sont aussi dissemines en tres-petites masses dans les syenites de Meissen et de la vallee de Plauen. Cette substance, dans d'autres localites, appartient plutot aux roches primitives (par exemple, au gneis); car, quoique le zircon, le fer titane, le sphene, l'epidote, le feldspath vitreux, le chiastolithe, la pierre lydienne, la diallage, l'amphibole et le pyroxene accompagnent de preference certaines formations, il ne faut point considerer ces associations comme des caracteres d'une valeur absolue. L'accumulation des zircons dans les syenites de Christianiafiord est, sous le rapport des questions geogoniques, beaucoup moins remarquable que la multiplicite de vacuoles, la structure caverneuse et gercee de ces memes syenites de transition, qui sont liees a des porphyres basaltiques et pyroxeniques. Depuis que, par les analogies frequentes que l'on a observees entre le terrain de porphyre et de syenite de Christiania et les terrains de transition du Caucase, de la Hongrie, de l'Allemagne, de la France occidentale, du Groenland et du Mexique, les geognostes ne sont plus etonnes de la succession de roches feldspathiques et cristallisees aux grauwackes et aux calcaires petris d'entroques et d'orthoceratites, l'apparition de ces memes roches cristallines dans le plus ancien membre de la serie des roches secondaires commence a fixer leur attention. On a reconnu que, dans les deux mondes, des masses cristallines, composees de feldspath et d'amphibole, ou de feldspath et de pyroxene, oscillent entre le terrain volcanique, le terrain intermediaire et le gres rouge. Ces oscillations, ces intercalations de roches problematiques, que l'on est tente de regarder comme les effets d'une penetration successive de bas en haut, prouvent la liaison intime qui existe entre les couches les plus recentes du terrain de transition et les plus anciennes couches des terrains secondaires et volcaniques. Dans la partie meridionale du Tyrol, des masses de granite et de porphyre syenitique semblent meme deborder du gres rouge dans le calcaire alpin; et ces phenomenes curieux d'alternance, lies a tant d'autres plus anciennement connus, semblent condamner a la fois et la separation du gres houiller des porphyres du terrain intermediaire, et la denomination historique et trop exclusive de terrains pyrogenes. La grande formation des porphyres, des syenites et des granites de la Norwege, repose sur un terrain de schiste de transition qui renferme des couches alternantes de calcaire noir, de pierre lydienne et peut-etre meme (car le gisement dans ce point est moins evident) de granite. Le calcaire noir (Aggerselv, Saasen) est petri d'orthoceratites de plusieurs pieds de longueur, d'entroques, de madrepores, de pectinites et (quoique tres-rarement) d'ammonites. Des filons de porphyre et de grünstein porphyriques de 2 a 15 toises d'epaisseur traversent le thonschiefer et le calcaire (Skiallebjerg) et preludent pour ainsi dire aux masses analogues de porphyres qui reposent, non immediatement sur le thonschiefer, mais sur une roche arenacee (grauwacke) dont le thonschiefer est recouvert. Entre Stromsoe, Maridal et Krogskovn, le grauwacke, au lieu de se trouver en couches dans le thonschiefer auquel il appartient (§. 22), en forme comme une assise superieure, de sorte que l'on y voit suivre de bas en haut: gneis primitif; thonschiefer de transition, alternant avec du calcaire a orthoceratites; grauwacke; porphyre avec des couches subordonnees de grünstein; granite; syenite a zircons, alternant avec quelques couches de porphyres. Pres de Skeen et de Holmstrand le calcaire a orthoceratites a pris un tel developpement, que le thonschiefer y manque entierement; le grauwacke y est remplace par une roche de quarz micace. On y voit de bas en haut: du gneis primitif; du calcaire de transition; la roche de quarz; le porphyre dont l'assise inferieure est du mandelstein; la syenite a zircons. Les porphyres de Christianiafiord, melanges par infiltration de carbonate de chaux, sont generalement brun-rougeatre: ils offrent des cristaux quelquefois tres-effiles de feldspath lamelleux, et sont presque depourvus de quarz et d'amphibole. Le quarz cristallise ne se montre qu'entre Angersklif et Revo. La pate du porphyre devient parfois noire et boursouflee (Viig, Holmstrand). Dans cet etat, la roche ressemble a du basalte, comme la syenite de la peninsule du mont Sinai, et renferme des cristaux de pyroxene. M. de Buch, auquel j'emprunte tous ces faits importans, observe que les cristaux de feldspath disparoissent a mesure que la masse prend une teinte plus noire, phenomene que m'ont offert aussi plusieurs porphyres de transition du Mexique. Le mandelstein, dont les cavites alongees sont remplies de carbonate de chaux, et qui forme l'assise inferieure des porphyres norwegiens de Skeen et de Klaveness, rappelle le mandelstein du porphyre de Bolannos (province mexicaine de la Nouvelle-Galice), qui est traverse par un des plus riches filons argentiferes. Les syenites de Christianiafiord, toujours places au-dessus des porphyres, quoique alternant d'abord avec eux, sont composes (Waringskullen, Hackedalen) de beaucoup de grands cristaux de feldspath rouge, et de peu d'amphibole en trespetits cristaux. Le mica et le quarz n'y sont qu'accidentels. Quelques vacuoles anguleuses de la syenite offrent des cristaux de zircons et d'epidote. Le titane ferrifere, commun dans les deux mondes aux roches d'euphotide primitive et aux trachytes, se trouve parfois dissemine dans la masse des syenites a zircons. VI. Euphotide de transition. §. 25. Il faut distinguer, comme parmi les syenites, entre les bancs intercales et les formations independantes. Des couches de serpentine se trouvent intercalees dans le weisstein (§. 4), dans le micaschiste primitif (§. 11) et dans le thonschiefer de transition (§. 22). Quant aux terrains independans d'euphotide (gabbro), qui souvent sont d'une structure trescompliquee, on peut en compter pour le moins deux, meme en rejetant la formation non recouverte et assez douteuse de Zöblitz en Saxe. La premiere de ces formations independantes se trouve (§. 19) sur la limite des terrains primitifs et intermediaires: c'est celle que M. de Buch a fait connoitre en Norwege (Maggeroe, Alten), et M. Beudant en Hongrie (Dobschau). La seconde formation appartient aux terrains de transition les plus nouveaux; elle se trouve sur la limite des roches intermediaires et secondaires. On a regarde comme plus recente encore la serpentine liee a la formation d'ophite, observee par M. Palassou dans les Pyrenees (vallee de Baigorry, Riemont) et dans le departement des Landes. Mais cet ophite est un grünstein, melange intime de feldspath, d'epidote et d'amphibole, auquel sont intercales des bancs de serpentine (Pousac); il passe, par le changement dans la proportion des elemens, tantot a la syenite, tantot au granite graphique. M. Boue, qui a recemment examine cet ophite sur les lieux, le croit une formation de transition, recouverte de gres bigarre, d'argile et de gypse secondaire. Dans l'Amerique equinoxiale, la grande formation d'euphotide de transition (celle qui constitue le dernier membre de la serie des roches intermediaires) semble presque constamment liee (comme dans le Piemont, entre le Mont Cervin et le Breuil) a des roches amphiboliques. Sur le bord septentrional des Llanos de Venezuela, recouvertes de gres rouge, entre Villa de Cura et Malpasso, on voit des masses considerables de serpentine reposer sur un thonschiefer vert et sur un calcaire de transition, quelquefois immediatement sur le gneis primitif. Un grünstein a petits grains forme des couches a la fois dans le thonschiefer et dans la serpentine. Celle-ci est meme quelquefois melee de feldspath et d'amphibole. Les schistes verts et bleus, le grünstein, le calcaire noir, et la serpentine traversee par des filons de cuivre, ne forment qu'un seul terrain, qui est recouvert et intimement lie a des amygdaloides pyroxeniques et a de la phonolithe. J'ai decrit ce gisement remarquable des roches serpentineuses de Venezuela dans le 16.e chapitre de mon Voyage aux regions equinoxiales de l'Amerique. Dans l'eile de Cuba la baie de la Havane separe le calcaire du Jura d'une formation d'euphotide dont les couches les plus basses alternent, non avec du grünstein, mais avec une veritable syenite de transition composee de beaucoup de feldspath blanc, d'amphibole decompose et d'un peu de quarz. Les strates alternans de la syenite et de la serpentine ont jusqu'a trois toises d'epaisseur; l'assise superieure de cette formation mixte est de la serpentine, formant des collines de 30 a 40 toises de hauteur, abondant en diallage metalloide, et traversee de filons remplis de belles calcedoines, d'amethystes et de minerais de cuivre. Cette roche est confusement stratifiee (par groupes, N. 55° E.; incl. de 60° au S. O. ou N. 90 E.; incl. de 50° au N.); il en sort des sources de petrole et d'eau chargee d'hydrogene sulfure. A ce meme terrain d'euphotide de transition (§. 25) semblent appartenir et la formation d'Ecosse (Girvan et Bellantrae), composee, d'apres M. Boue, de serpentine, de roches hyperstheniques et de syenite, et la celebre formation du Florentin (Prato, Monteferrato), decrite par MM. Viviani, Bardi, Brocchi et Brongniart. L'hypersthene remplace souvent (Ecosse, et Gernerode en Allemagne) la diallage. Quant aux euphotides du Florentin, elles ont ete recemment l'objet de discussions interessantes. Elles renferment des lits de jaspe rougeatre, quelquefois rubane, et paroissent superposees, d'apres M. Brocchi, comme celles de Styrie, a des grauwackes et a des calcaires de transition. M. Brongniart pense que le terrain arenace, ou, comme il le nomme, le terrain calcareo-psammitique des Apennins, qui sert de base aux euphotides jaspiferes, est ou une roche secondaire tresancienne, ou une roche de transition tres-moderne. Ce savant a fait connoeitre la liaison intime qui existe entre la serpentine d'Italie et le terrain jaspique. Ce dernier terrain constitue generalement l'assise inferieure des euphotides. Ici se termine la serie des formations intermediaires. Nous avons donne plus d'etendue a leur description, parce que, tout en essayant de les presenter d'apres une nouvelle classification par groupes, nous avons voulu fixer l'attention des geognostes sur divers phenomenes de gisement qu'offrent les montagnes peu connues du Mexique et de l'Amerique du Sud. Terrains secondaires. I. Grand depot de houille, gres rouge et porphyre secondaire. (Amygdaloide, grünstein, retinite.) II. Zechstein (calcaire alpin, magnesian limestone), quelquefois intercale au gres rouge. (Gypse hydrate, sel gemme.) III. Depots alternans, arenaces et calcaires (marneux et oolithiques). places entre le zechstein et la craie. Nous ne citerons ici que deux types tres-analogues dans leurs rapports geognostiques, et en commencant chaque serie par les roches les plus anciennes. 1.er Type. Gres bigarre (a oolithes), et argile avec gypse fibreux et traces de sel gemme. Muschelkalk (calcaire de Goettingue). Quadersandstein. Calcaire du Jura en plusieurs assises: calcaire spongieux et caverneux; calcaire marneux avec ossemens d'ichthyosaures (lias); oolithes; calcaires a madrepores et a polypiers (coral rag); calcaire a poissons et crabes fossiles. Argile avec lignites. Gres et sables verts (craie chloritee ou plänerkalk). 2.e Type. Red marl, terrain marneux avec gypse et sel gemme. Terrain d'oolithes, dont l'assise inferieure est le lias. Sables verts (green sand), qui representent la craie chloritee. IV. Craie blanche et grise, ou craietuffeau. Terrains exclusivement volcaniques. I. Formations trachytiques. Trachytes granitoides et syenitiques. Trachytes porphyriques (feldspathiques et pyroxeniques). Phonolithes des trachytes. Trachytes semi-vitreux. Perlites avec obsidienne. Meulieres trachytiques celluleuses, avec nids siliceux. (Conglomerats trachytiques et ponceux, avec alunites, soufre, opale et bois opalise.) II. Formations basaltiques. Basaltes avec olivine, pyroxene et un peu d'amphibole. Phonolithes des basaltes. Dolerites. Mandelstein celluleux. Argile avec grenats-pyropes. Cette derniere formation semble liee a l'argile avec lignites du terrain tertiaire sur lequel se sont souvent repandues des coulees de basalte. Terrains tertiaires. Depots superieurs a la craie. Leur ordre de succession differe selon l'alternance des formations partielles qui se trouvent plus ou moins developpees. Nous presentons le type le plus complique et le mieux connu: Argiles plastiques avec lignites, succin et gres quarzeux. (Une formation a peu pres parallele, peut-etre plus neuve encore, est la formation de molasse et nagelfluhe d'Argovie avec lignites et ossemens fossiles). Calcaire (grossier) de Paris. Les couches superieures et inferieures sont du gres. Marnes et gypse a ossemens. Les assises inferieures sont du calcaire siliceux. Gres et sables de Fontainebleau. Terrain lacustre, ou d'eau douce, superieur. (Meulieres siliceuses. Calcaire d'OEningen, peut-etre lie a la molasse. Travertin.) Depots d'alluvion. Suite des Terrains exclusivement volcaniques. (Conglomerats et scories basaltiques.) III. Laves sorties d'un cratere volcanique. (Laves anciennes a larges nappes, generalement abondantes en feldspath. Laves modernes a courans distincts et de peu de largeur. Obsidiennes et ponces des obsidiennes.) IV. Tuffs des volcans avec coquilles. [Depots de calcaire compacte, de marne, de gypse et d'oolithes superposes aux tuffs volcaniques les plus modernes. Ces petites formations locales appartiennent peut-etre aux terrains tertiaires. Plateau de Riobamba; Isles Fortaventura et Lancerote.] J'ai expose plus haut les raisons pour lesquelles je fais succeder a la fois, comme par bisection, les terrains secondaires et volcaniques aux terrains de transition. Ces derniers se lient, par leurs grauwackes et leurs porphyres, comme par une grande accumulation de carbone, au gres rouge, aux porphyres secondaires et aux depots de houilles; ils se lient par leurs porphyres et syenites aux trachytes. Ces liaisons sont si intimes qu'on a souvent de la peine a separer les porphyres, les amygdaloides bulleuses et les roches pyroxeniques appartenant au terrain de transition, soit des gres rouges avec bancs intercales de porphyre et de grünstein, soit des formations exclusivement volcaniques. Je me sers de l'expression terrain exclusivement volcanique, pour rappeler que hors de ce terrain il peut y avoir des roches d'origine ignee, mais que nulle part ailleurs on n'en trouve une suite moins interrompue et moins contestee. Terrains secondaires. Ces terrains se sont tres-inegalement developpes sur le globe, et la cause de cette inegalite de developpement est un des problemes les plus interessans de la geogonie ou geologie historique. Il est assez rare de trouver tous les membres de la serie des formations secondaires et tertiaires reunis dans un meme pays (Thuringe, Hanovre, Westphalie; Baviere; France septentrionale; centre et sud de l'Angleterre): souvent de grandes formations, par exemple, le gres rouge ou le calcaire alpin, manquent entierement; d'autres fois le second est contenu dans le premier comme une couche subordonnee; d'autres fois encore tous les termes de la serie geognostique entre le calcaire alpin et le Jura, ou ceux qui sont posterieurs a la craie, se trouvent supprimes. Dans la peninsule Scandinave, sur les cotes de la Mer de Behring, et (si l'on excepte le gres des lignites que recouvrent les basaltes) meme dans le Groenland, cette suppression s'etend sur tous les terrains secondaires et tertiaires. On a cru long-temps que ce phenomene bizarre etoit exclusivement propre a la zone la plus boreale, surtout a celle qui est contenue entre les 60° et 70° de latitude; mais, dans un immense espace de la Sierra Parime, pres de l'equateur, entre le bassin de l'Amazone et celui du Bas-Orenoque (lat. 2° -- 8°, long. 65° -- 70°), j'ai aussi vu la formation primitive de granite-gneis non recouverte de terrains intermediaires, secondaires et tertiaires. Lorsque l'absence des formations posterieures au developpement des etres organises sur le globe n'est pas totale, ce sont plutot les terrains calcaires que ceux de gres qui se trouvent supprimes; car chaque formation non schisteuse a des breches et des conglomerats a fragmens ou grains plus ou moins gros, qui lui sont propres. Ces conglomerats sont de petits depots partiels qu'il ne faut pas confondre avec les grandes formations independantes de grauwacke, de gres rouge, de gres bigarre et de quadersandstein. I. Houille, Gres rouge et Porphyre secondaire (avec amygdaloide, grünstein et calcaires intercales). §. 26. Le gres houiller et le porphyre constituent une meme formation (rothes todtes liegende), variable d'aspect, et d'une structure souvent tres-compliquee. Des mandelstein celluleux, du grünstein, des roches grenues feldspathiques et pyroxeniques, des retinites (pechstein) et quelques calcaires fetides appartiennent a cette formation comme bancs intercales. Les mineralogistes anglois nomment nouveau conglomerat rouge (new red conglomerate d'Exeter et Teignmouth) notre formation de gres rouge et de porphyre, pour la distinguer de leur gres rouge ancien (old red sandstone de Mitchel Dean, dans le Herefordshire), qui est une roche arenacee (grauwacke) de transition, placee entre deux calcaires de transition, ceux du Derbyshire et de Longhope. Cette nomenclature, que le savant professeur d'Oxford, M. Buckland, a recemment eclaircie, a ete la cause de beaucoup de meprises geologiques. Il seroit, je crois, tres-utile pour les progres de la science des gisemens, que l'on abandonnat peu a peu ces denominations vagues de gres anciens, intermediaires et nouveaux, de gypses et de gres inferieurs et superieurs, de calcaires de premiere, seconde et troisieme formation. Elles n'ont qu'une verite relative dans tel ou tel lieu; elles enumerent ce qui est numeriquement variable, selon les alternances et les suppressions des differens termes de la serie. Le terrain de transition n'offre pas seulement de l'anthracite; il offre deja de la veritable houille. On en trouve de petits depots en Angleterre dans l'old red sandstone (Bristol), dont les couches inferieures passent d'un conglomerat fin et marneux a un grauwacke tres-compacte, et dans le mountain-limestone (Cumberland), qui est analogue au calcaire de transition de Namur en Belgique et de Prague en Boheme. Mais le grand depot de houille (coal measures) se trouve, comme nous l'avons dit plus haut, sur la limite des roches intermediaires et secondaires. A cause de cette position meme, la houille est quelquefois (Angleterre, Hongrie, Autriche au sud du Danube, Belgique) melee de couches arenacees liees a de veritables grauwackes; d'autres fois (et c'est la le type le plus generalement reconnu sur le continent depuis les observations de Fuchs et de Lehman, faites vers l'an 1750), d'autres fois elle appartient a la grande formation de porphyre et de gres rouge. Dans le premier cas (Angleterre), les depots de houille suivent l'inclinaison des roches de transition auxquelles (comme l'ont judicieusement prouve MM. Conybeare et Phillips) ils sont plus particulierement lies; on les trouve tout aussi inclines que les calcaires noirs et les grauwackes qu'ils surmontent. La serie des formations horizontales et secondaires ne paroeit alors commencer qu'avec le calcaire magnesien, qui represente le zechstein ou calcaire alpin. Dans le second cas (Allemagne; est de France), le depot houiller accompagne le gres rouge et le porphyre, quels que puissent etre les terrains primitifs ou intermediaires sur lesquels ces deux roches sont immediatement placees. Cette union constante avec des roches superposees, et cette indifference pour le terrain inferieur, sont les caracteres geognostiques les plus saurs de la dependance ou de l'independance d'une formation. Souvent le grand depot de houille n'est ni recouvert de porphyre et de gres rouge, ni mele de couches arenacees appartenant au terrain intermediaire. Souvent il est place dans des bassins entoures de collines de gres rouge et de porphyre, et n'offre dans son toit que des couches alternantes d'argile schisteuse (schieferthon), tantot gris-bleuatre, tendres et remplies d'empreintes de fougeres, tantot compactes, carburees (brandschiefer) et pyriteuses. De minces strates de gres charbonneux (kohlenschiefer), de gres quarzeux passant au quarz grenu, de conglomerats a gros fragmens (steinkohlen-conglomerat) et de calcaire fetide, se rencontrent au milieu du schieferthon avant qu'on atteigne la houille. Ce sont de petites formations locales que presentent egalement, et dans des circonstances entierement analogues, les depots d'argile muriatifere (salzthon), de sel gemme, de fer hydrate et de calamine, qui ne sont pas recouverts immediatement par la grande formation de calcaire alpin. Malgre ces apparences d'isolement et d'independance, les houilles et le sel gemme n'en appartiennent pas moins, geognostiquement, les unes au gres rouge et l'autre au calcaire alpin ou zechstein. Les empreintes de fougeres, comme l'ont observe tres-bien MM. Voigt et Brongniart, caracterisent l'epoque des veritables houilles, tandis que les argiles des lignites en sont depourvues. Dans la zone temperee de l'ancien continent la houille descend jusque dans les lieux les plus bas du littoral. Pres de Newcastle-on-Tyne on trouve, au niveau et au-dessous du fond de la mer, cinquante-sept couches d'argile endurcie et de conglomerat, alternant avec vingt-cinq couches de houille. Au contraire, dans la region equinoxiale du nouveau continent, j'ai vu la houille intercalee au gres rouge s'elever, dans le plateau de Santa-Fe de Bogota (Chipo entre Canoas et le Salto de Tequendama; montagne de Suba; Cerro de los Tunjos), a 1360 toises de hauteur au-dessus du niveau de l'ocean. L'hemisphere austral offre aussi des houilles dans les hautes Cordilleres de Huarocheri et de Canta: on m'a meme assure que pres de Huanuco elles se trouvent (intercalees au calcaire alpin?) tres-pres de la limite des neiges perpetuelles, a 2300 toises de hauteur, par consequent audessus de toute vegetation phanerogame. Les depots de houille abondent hors des tropiques dans le Nouveau-Mexique, au centre des plaines saliferes du Moqui et de Nabajoa, et a l'est des montagnes rocheuses, comme aussi vers les sources du Rio Sabina, dans cet immense bassin couvert de formations secondaires que parcourent le Missoury et l'Arkansas. Des masses rhomboidales fibreuses a eclat soyeux et colorant les doigts se trouvent enchassees dans la houille compacte des deux continens; elles forment une espece de breche que les mineurs regardent comme renfermant des fragmens de bois charbonne. Quelquefois ces masses lustrees sont presque incombustibles, et deviennent une espece d'anthracite a texture fibreuse (faserkohle d'Estner; mineralische holzkohle de Werner). On les trouve, selon les observations de MM. de Buch et Karsten, accumulees (Lagiewnick dans la haute Silesie) en bancs de 4 a 5 pouces d'epaisseur. Ce phenomene merite une attention particuliere; car les houilles qui enchassent les fragmens a eclat soyeux, appartiennent au gres rouge le mieux caracterise, et non aux lignites des argiles placees immediatement au-dessous ou au-dessus de la craie. Dans la peninsule de la Crimee de vastes terrains presentent des alternances sans nombre de couches d'argile schisteuse depourvues de houilles, de conglomerats, de grünstein et de calcaires compactes. Est-ce la une formation de gres rouge, renfermant des roches amphiboliques et alternant avec le zechstein? Il est difficile d'assigner un type general a l'ordre des differentes assises qui constituent la grande formation §. 26. La houille paroeit le plus souvent au-dessous du gres rouge; quelquefois elle est placee evidemment ou dans cette roche ou dans le porphyre. Le porphyre penetre et deborde de differentes manieres dans la formation du gres houiller: on le voit parfois recouvrir immediatement la houille; plus generalement il surmonte le gres, et s'eleve en domes, en cloches ou en rochers a pentes abruptes. Lorsque les terrains de transition sont immediatement recouverts de gres rouge (Saxe), il est souvent assez difficile de decider si les porphyres que l'on rencontre dans la proximite des houilles sont des porphyres de transition, ou s'ils appartiennent au gres rouge. Il paroeit d'ailleurs que les porphyres forment moins souvent de veritables couches, que des amas transversaux et entrelaces (stehende Stöcke et Stockwerke) dans le terrain houiller. Ils varient beaucoup de couleur: ils sont violatres, gris et brun-rougeatre ou tirant sur le blanc (Petersberg pres de Halle, Giebichenstein, Wettin), infiltres de chaux fluatee, non stratifies, divises quelquefois en tables minces, et accompagnes de breches porphyriques. La pate de ces porphyres, qui enchassent, outre le feldspath lamelleux, quelquefois steatiteux, du quarz noiratre, un peu de mica brun et d'amphibole, est generalement formee par du feldspath compacte. Cette pate passe au kaolin (Morl pres Halle); d'autres fois elle devient noire et presque basaltique (Lobegün en Saxe, Schulzberg en Silesie), bulleuse et comme scorifiee (Plizgrund pres Schmiedsdorf en Silesie), ou passant a la phonolithe (Zittau en Saxe). Dans les porphyres, les amygdaloides, les grünstein et les roches pyroxeniques du gres rouge, on remarque quelquefois (Saxe, Silesie, Palatinat, Ecosse) ces memes analogies avec les roches exclusivement appelees volcaniques, qu'on trouve dans les porphyres et syenites du terrain intermediaire (Hongrie, Norwege, Mexique, Perou). M. de Buch a vu en Silesie des porphyres du gres rouge abonder en cristaux d'amphibole (Reichmacher pres Friedland), ou enchasser a la fois (Wildenberg pres Jauer) du quarz et des cristaux effiles de feldspath vitreux. M. Boue observe que dans le gres rouge d'Ecosse, qui, en general, est assez depourvu de houille (a l'exception du comte de Dumfries), les roches trapeennes intercalees ont des vacuoles a enduit lustre, et alongees. Ces mandelstein bulleux du gres rouge prennent toute l'apparence de coulees volcaniques intercalees. L'Allemagne offre, a son extremite septentrionale (eile de Rugen), de la craie et des terrains tertiaires; a son extremite meridionale, dans le Tyrol (vallee de l'Eisack, Collmann, Botzen, Pergine, Neumarkt), les porphyres du gres rouge. La composition de ces porphyres du Tyrol est identique avec celle des porphyres du Mansfeld: ils renferment, outre le feldspath, le mica noir et le quarz brun-de-girofle, un peu d'amphibole. La couleur rouge de leur pate penetre quelquefois jusque dans les cristaux de feldspath qu'ils enchassent. Dans un voyage geognostique fait en 1795, j'ai trouve ces porphyres assez regulierement stratifies, pres de Botzen et de Brandsol (N. 25° O. incl. de 30° au S. E.). Ils offrent de petits depots de houille sur les bords de l'Adige, entre Saiss et S. Peter. Dans toutes les parties de l'Europe, les porphyres secondaires offrent l'apparence d'un passage progressif au gres rouge. Quelques geognostes admettent que des cristaux isoles de feldspath se trouvent empates dans le ciment de la roche arenacee, ou qu'ils s'y sont developpes; d'autres assurent (et avec plus de raison peut-etre) que ces pretendus passages des porphyres aux breches porphyriques et au gres rouge ne sont que l'effet d'une illusion produite par des porphyres regeneres, c'est-a-dire, par des agglomerats qui se sont formes a une epoque ou les fragmens empates etoient encore dans un etat de ramollissement peu propre a conserver leurs contours au milieu du ciment interpose. Une breche porphyrique (trümmerporphyr) pres de Duchs en Boheme, que nous avons decrite, M. Freiesleben et moi, en 1792, et dans laquelle des grains informes de quarz sont meles a des cristaux brises de quarz et de feldspath, peut repandre quelque jour sur un phenomene qui n'est point encore suffisamment eclairci. Il est bien remarquable, et cette observation a ete faite depuis long-temps, que les porphyres manquent au nord des Alpes de la Suisse et du Tyrol, tandis qu'ils sont tres-communs a la pente meridionale des Alpes, entre le lac Maggiore et la Carinthie. Le gres rouge est generalement compose de fragmens de roches qui tirent leur origine des montagnes les plus voisines. Dans l'Allemagne septentrionale, ces fragmens sont plus souvent le quarz, la lydienne, le silex (hornstein), le porphyre, la syenite et le thonschiefer, que le gneis, le granite et le micaschiste. La couleur du gres rouge est tres-variable: elle passe du brun-rougeatre au gris (graue liegende); elle est meme quelquefois melangee par couches tres-minces, comme dans le gres bigarre. La teinte rouge de cette formation est due, selon l'opinion de plusieurs geologues celebres, aux parties ferrugineuses des porphyres voisins. Sans vouloir infirmer la justesse de cette observation pour ce qui regarde une partie de l'ancien continent, je dois pourtant enoncer quelques doutes relativement a l'influence des porphyres sur la formation du gres rouge dans les regions equinoxiales du nouveau continent. Le gres des vastes steppes de Venezuela est brun-rougeatre, comme le todte liegende de Mansfeld; il ne renferme pas de fragmens de porphyre, et a plusieurs centaines de lieues de distance on n'y connoeit aucune couche de porphyre intermediaire ou secondaire. Il en est de meme des gres rouges de Fünfkirchen et de Vasas en Hongrie, decrits par M. Beudant. Partout ou, dans la formation §. 26, des conglomerats grossiers alternent avec des roches arenacees a petits grains, ces derniers passent au gres houiller schisteux et fortement micace (sandsteinschiefer). Ces masses alternantes renferment de l'argile schisteuse grise, verdatre ou brune. Lorsque cette argile est fortement carburee (kohlenschiefer) et bitumineuse, elle contient quelquefois (Suhl, Goldlauter) des minerais argentiferes (du cuivre gris, de la galene et des pyrites cuivreuses). Elle offre des empreintes de poissons fossiles, et prend l'aspect du kupferschiefer appartenant au calcaire alpin. D'un autre cote, la desagregation de roches arenacees a petits grains forme des bancs de sable quarzeux et brunatre (triebsand) au milieu des gres rouges les plus compactes (Walkenried et Bieber). Le ciment du gres houiller est quelquefois calcaire, et-les parties de chaux carbonatee deviennent si frequentes, qu'elles donnent a la roche une apparence de calcaire grenu et arenace (montagnes houilleres sur les limites de la Hongrie et de la Galicie). Ce sont la les gres calcariferes de M. Beudant, meles de grains verts chloriteux. Quant aux fragmens enchasses dans les gres rouges, ils sont ou anguleux et fondus dans la masse, ou arrondis et aplatis comme les cailloux roules de la nagelfluhe la plus recente. La formation de gres rouge qui constitue la majeure partie de l'Irlande, et qui est si commune dans l'Allemagne septentrionale, dans la Foret-noire et dans les Vosges, manque (de meme que la formation des porphyres) presque entierement dans les hautes Alpes de la Suisse. Le Niesen appartient probablement deja au grauwacke, et M. de Gruner croit que les environs de Mels, Bregentz et Sonthofen offrent les seuls conglomerats qui, par leur structure et leur gisement, se rapprochent du gres rouge. Dans les hautes Alpes, comme dans plusieurs parties de la Silesie (Schweidnitz) et de la Hongrie (Dunajitz), le gres rouge enchasse pour ainsi dire le calcaire alpin et alterne avec lui: dans le cercle de Neustadt, en Saxe, le gres rouge manque entierement. Les couches subordonnees au gres rouge ou alternant avec lui sont les suivantes: calcaires fetides et schistes fortement carbures et bitumineux (kohlenschiefer de Freiesleben), qui annoncent la liaison intime du gres rouge avec le zechstein et avec les schistes marno-bitumineux (kupferschiefer): grünstein, melange de feldspath et d'amphibole (Noyant et Figeac en France), quelquefois meme pyroxenique (Ecosse): mandelstein celluleux, quelquefois comme boursoufle, renfermant (Ihlefeld au Harz; rives de la Nahe, Oberstein et Kirn; Exeter, Heavitree) des agathes, de la calcedoine, de la prehnite et de la chabasie, et penetrant comme par des crevasses dans la masse du gres rouge (Planitz en Saxe): houilles alternant avec des argiles schisteuses a fougeres; anthracites (Schönfeld entre Altenberg et Zinnwald) appartenant plus particulierement, d'apres M. Beudant, au porphyre intercale au gres rouge qu'a cette derniere roche: porphyres alternant d'abord avec le gres rouge et puis le surmontant en grandes masses rocheuses: pechstein (quarz resinite ou retinite). Le vrai gisement du pechstein en Saxe a ete reconnu par MM. Jameson, Raumer, Przystanowsky et Schenk. Cette substance forme un porphyre a base semi-vitreuse, renfermant du feldspath souvent fendille, et tres-peu de mica, d'amphibole et de quarz cristallise (vallee de Triebitch). Le pechstein enchasse des fragmens de gneis (Mohorn et Braunsdorf); il est traverse par de petits filons d'anthracite fibreuse (Planiz pres Zwickau), et il alterne avec le porphyre commun du gres rouge. Ces porphyres et ces retinites reposent (Nieder-Garsebach) sur la syenite de transition. M. Beudant, qui a recemment donne une description detaillee de ce gisement, a reconnu que le pechstein de Herzogswalde est enclave dans un depot arenace a pate d'argilolithe (thonstein), depot qui enchasse des fragmens anguleux de gneis et de micaschiste, et qui appartient au gres rouge. Le pechstein de Grantola au lac Maggiore offre le meme gisement: celui d'Ecosse contient du naphte. Au Perou il y a des pechstein (gris de fumee, presque depourvus de feldspath, renfermant du mica cristallise), dans le chemin de Couzco a Guamanga. Ils y forment des montagnes entieres; mais ce terrain, d'apres les observations de M. de Nordenflycht, est subordonne, comme en Europe, au terrain porphyrique. Toute la formation §. 26, que nous decrivons, est generalement caracterisee par l'absence des coquilles fossiles. Si l'on en trouve quelques-unes, elles appartiennent aux couches calcaires et aux schistes carbures (kohlenschiefer) qui sont intercales au gres rouge, et non a la masse de celui-ci, qui n'abonde dans les deux hemispheres (plaines de la Thuringe, Kiffhäuser, Tilleda; plaines de Venezuela entre Calabozo et Chaguaramas; plateau de Cuenca, au sud de Quito) qu'en troncs de bois fossile et autres debris de monocotyledonees. M. Brongniart fils croit cependant que les impressions de vrais palmiers manquent dans les houilles. Dans la region equinoxiale du nouveau continent j'ai eu l'occasion d'observer le terrain de gres rouge au nord et au sud de l'equateur sur six points differens; savoir: dans la Nouvelle-Espagne (de 1100 a 1300 toises de hauteur), dans les steppes ou Llanos de Venezuela (30--50 toises), dans la Nouvelle-Grenade (50--1800 toises), sur le plateau meridional de la province de Quito (1350--1600 toises), dans le bassin de Caxamarca au Perou (1470 toises), et dans la vallee occidentale de l'Amazone (200 toises). 1. ° Nouvelle-Espagne. Les schistes et les porphyres de transition de Guanaxuato (plateau d'Anahuac), dont nous avons donne plus haut (§§. 22, 23) une description detaillee, sont couverts d'une formation de gres rouge. Cette formation remplit les plaines de Celaya, de Salamanca et de Burras (900 toises); elle y supporte un calcaire assez analogue a celui du Jura et un gypse feuillete. Elle remonte par la Cannada de Marfil aux montagnes qui entourent la ville de Guanaxuato, et se montre par lambeaux dans la Sierra de Santa Rosa pres de Villalpando (1330 toises). Ce gres mexicain offre la ressemblance la plus frappante avec le rothe todte liegende du Mansfeld en Saxe; il enchasse des fragmens constamment anguleux de lydienne, de syenite, de porphyre, de quarz et de silex (splittriger hornstein). Le ciment qui lie ces fragmens, est argilo-ferrugineux, tres-tenace, brun-jaunatre, souvent (pres de la mine de Serena) rouge de brique. Des couches de conglomerat grossier, renfermant des fragmens de deux a trois pouces de diametre, alternent avec un conglomerat tres-fin, quelquefois meme (Cuevas) avec un gres a grains de quarz uniformement arrondis. Les conglomerats grossiers abondent plus dans les plaines et dans les ravins que sur les hauteurs. Dans les couches les plus anciennes (mine de Rayas) j'ai cru voir un passage du gres rouge au grauwacke: les morceaux de syenite et de porphyre enchasses deviennent tres-petits; leurs contours sont peu distincts, et ils paroissent comme fondus dans la masse. Il ne faut pas confondre ce conglomerat (frijolillo de Rayas) avec celui de la mine d'Animas, qui est gris-blanchatre et renferme des fragmens de calcaire compacte. Souvent dans le gres rouge de Guanaxuato, comme dans celui d'Eisleben en Saxe, le ciment est si abondant (chemin de Guanaxuato a Rayas et a Salgado), que l'on n'y distingue plus de fragmens empates. Des couches argileuses de 3 a 4 toises d'epaisseur alternent alors avec le conglomerat grossier. Generalement, la grande formation de gres rouge, superposee au thonschiefer metallifere, ne paroeit (Belgrado, Buffa de Guanaxuato) qu'adossee au porphyre de transition; mais a Villalpando on la voit clairement reposer sur cette derniere roche. Je n'ai point trouve de coquilles petrifiees, ni de traces de houille et de bois fossile, dans les gres rouges de Guanaxuato. Ces substances combustibles se trouvent frequemment en d'autres parties de la Nouvelle-Espagne, surtout dans celles qui sont moins elevees audessus du niveau de la mer. On connoeit la houille dans l'interieur du Nouveau-Mexique, non loin des rives du Rio del Norte. D'autres depots sont probablement caches dans les plaines du Nuevo-Sant-Ander et du Texas. Au nord de Natchitoches, pres de la houillere de Chicha, une colline isolee fait entendre de temps en temps, peut-etre par l'inflammation du gaz hydrogene mele a l'air atmospherique, des detonations souterraines. Le bois fossile est commun dans les gres rouges qui s'etendent vers le nord-est de la ville de Mexico. On le trouve egalement dans les immenses plaines de l'intendance de San-Luis Potosi, et pres de la Villa de Altamira. La houille du Durasno (entre Tierra-Nueva et San-Luis de la Paz) est placee sous une couche d'argile renfermant du bois fossile, et sur une couche de mercure sulfure qui recouvre le porphyre. Appartient-elle a des lignites tres-recens? ou ne doit-on pas plutot admettre que ces substances combustibles du Durasno, ces argiles et ces porphyres semi-vitreux (pechstein-porphyre), globuleux et couverts d'hyalithe mamelonnee, porphyres qui, dans d'autres parties du Mexique (San-Juan de la Chica; Cerro del Fraile pres de la Villa de San-Felipe) renferment des depots de mercure sulfure, sont lies a la grande formation du gres rouge? Il n'est pas douteux que cette formation ne soit tout aussi riche en mercure dans le nouveau continent, que dans l'Allemagne occidentale; elle l'est meme la ou manquent les porphyres (Cuenca, plateau de Quito); et, si la reunion de filons d'etain a des filons de cinabre, dans les porphyres de San-Felipe, paroeit eloigner au premier abord les roches porphyriques qui abondent en mercure, de ceux du gres rouge, il faut se rappeler que les thonschiefer et porphyres de transition (Hollgrund pres Steben, Hartenstein) sont aussi en Europe quelquefois stanniferes. Je place a la suite du gres houiller de Guanaxuato une formation un peu problematique, que j'ai deja decrite, dans mon Essai politique sur la Nouvelle-Espagne, sous le nom de lozero ou d'agglomerat feldspathique: c'est une roche arenacee, blanc-rougeatre, quelquefois vert de pomme, qui se divise, semblable au gres a dalles (Leuben- ou Waldplattenstein de Suhl), en plaques tres-minees (lozas): elle renferme des grains de quarz, de petits fragmens de thonschiefer, et beaucoup de cristaux de feldspath en partie brises, en partie restes intacts. Ces diverses substances sont liees ensemble dans le lozero du Mexique, comme dans la roche a aspect porphyrique de Suhl, par un ciment argilo-ferrugineux (Cannada de Serena et presque toute la montagne de ce nom). Il est probable que la destruction du porphyre a eu la plus grande influence sur la formation du gres feldspathique de Guanaxuato. Le mineralogiste le plus exerce seroit tente de le prendre au premier abord pour un porphyre a base argileuse ou pour une breche porphyrique. Autour de Valenciana le lozero forme des masses de 200 toises d'epaisseur: elles excedent en elevation les montagnes formees par le porphyre intermediaire. Pres de Villalpando, un agglomerat feldspathique a tres-petits grains alterne par couches d'un a deux pieds d'epaisseur, vingt-huit fois, avec de l'argile schisteuse brun-noiratre. Partout j'ai vu reposer cet agglomerat ou lozero sur le gres rouge, et a la pente sud-ouest du Cerro de Serena, en descendant vers la mine de Rayas, il m'a paru meme assez evident que le lozero forme une couche dans le conglomerat grossier de Marfil. Je doute par consequent que cette formation remarquable puisse appartenir a des conglomerats trachytiques ponceux, comme M. Beudant semble l'admettre d'apres l'analogie de quelques roches de Hongrie. Souvent le ciment argileux devient si abondant que les parties enchassees sont a peine visibles, et que la masse passe a l'argilolithe (thonstein) compacte. Dans cet etat le lozero offre la belle pierre de taille de Queretaro (carrieres de Caretas et de Guimilpa), qui est si recherchee pour les construetions. J'en ai vu des colonnes de quatorze pieds de haut et de deux pieds et demi de diametre, rouge de chair, de brique ou de fleurs de pecher. Ces belles couleurs, en contact avec l'atmosphere, passent au gris, probablement par l'action de l'atmosphere sur le manganese dendritiforme que renferme la roche dans ses fissures. La cassure des colonnes de Queretaro est unie, comme celle de la pierre lithographique du Jura. Ce n'est qu'avec peine que l'on decouvre dans ces argilolithes quelques fragmens extremement petits de thonschiefer, de quarz, de feldspath et de mica. Je ne deciderai pas si les cristaux non brises du lozero ou gres feldspathique se sont developpes dans la masse meme, ou s'ils s'y trouvent accidentellement. Je me borne a rappeler ici qu'en Europe le gres rouge et ses porphyres sont aussi quelquefois caracterises par une suppression locale de cristaux et de fragmens enchasses. Le lozero me paroeit une formation de gres superposee, peutetre meme subordonnee au gres rouge; et si l'ancien continent ne nous offre pas une roche entierement semblable, nous voyons du moins les premiers germes de ce genre de structure pseudo-porphyrique dans les bancs de gres a cristaux de feldspath, brises ou intacts, qu'enchasse quelquefois la grande formation de gres rouge du Mansfeld et du Thuringerwald. ( Freiesleben, Kupf., B. IV, p. 82, 85, 95, 194.) 2. ° Venezuela. Dans l'Amerique meridionale, les immenses plaines de Venezuela (Llanos du Bas-Orenoque) sont en grande partie recouvertes de gres rouge et de terrains calcaires et gypseux. Le gres rouge y est dispose en gisement concave (muldenförmige Lagerung) entre les montagnes du littoral de Caracas et celles de la Parime ou du Haut-Orenoque. Il s'adosse au nord a des schistes de transition; au sud il repose immediatement sur le granite primitif. C'est un conglomerat a fragmens arrondis de quarz, de pierre lydienne et de kieselschiefer, reunis par un ciment argilo-ferrugineux, brun-olivatre et extremement tenace. Ce ciment est quelquefois (pres de Calabozo) d'un rouge si vif, que les gens du pays l'ont cru mele de cinabre. Le conglomerat a gros grains y alterne avec un gres quarzeux a grains tres-fins (Mesa de Paja). L'un et l'autre enchassent de petites masses de fer brun et du bois petrifie de monocotyledonees. Cette formation arenacee est recouverte (Tisnao) par un calcaire compacte gris-blanchatre, analogue au calcaire du Jura. Audessus de ce calcaire on trouve (Mesa de San-Diego et Ortiz) du gypse lamelleux alternant avec des couches de marne. Je n'ai vu de coquilles fossiles dans aucune de ces couches arenacees, calcaires, gypseuses et marneuses. Le ciment du conglomerat ne fait nulle part effervescence avec les acides; et par son gisement et sa composition le gres des steppes de Venezuela m'a paru tres-eloigne du nagelfluhe (gres a lignites) du terrain tertiaire, avec lequel il a une certaine analogie d'aspect par la forme arrondie des fragmens enchasses. Ces formations arenacees et calcaires ne s'elevent pas au-dessus de 30 a 50 toises de hauteur absolue. Dans la partie orientale du Llano de Venezuela (pres Curataquiche) on trouve disperses, a la surface du sol, de beaux morceaux de jaspe rubane ou cailloux d'Egypte. Appartiennent-ils au gres rouge, ou sont-ils dus, comme pres de Suez, a un terrain plus moderne? 3. ° Nouvelle-Grenade. Une formation de gres d'une etendue prodigieuse couvre, presque sans interruption, non-seulement les plaines septentrionales de la Nouvelle-Grenade, entre Mompox, le canal de Mahates et les montagnes de Tolu et de Maria, mais aussi le bassin du Rio de la Magdalena (entre Teneriffe et Melgar) et celui du Rio Cauca (entre Carthago et Cali). Quelques fragmens epars de gres schisteux et charbonneux (kohlenschiefer) que j'ai trouves a l'embouchure du Rio Sinu (a l'est du golfe de Darien), rendent probable que cette formation s'etend meme vers le Rio Atrato et vers l'isthme de Panama. Elle s'eleve a de grandes hauteurs, non sur le rameau intermediaire ou central de la Cordillere (Nevados de Tolima et de Quindiu), mais sur les rameaux oriental (Paramos de Chingasa et de Suma Paz) et occidental (montagnes entre le bassin du Rio Cauca et le terrain platinifere du Choco). J'ai pu suivre ce gres de la Nouvelle- Grenade, sans le perdre de vue un seul instant, depuis la vallee du Rio Magdalena (Honda, Melgar, 130--188 t.), par Pandi, jusqu'au plateau de Santa-Fe de Bogota (1365 t.), et meme jusqu'au-dessus du lac de Guatavita et de la chapelle de Notre- Dame de Montserrate. Il s'adosse a la Cordillere orientale (celle qui separe les affluens du Rio Magdalena des affluens du Meta et de l'Orenoque) jusqu'a plus de 1800 toises de hauteur audessus du niveau de l'ocean. J'insiste sur ces notions de geographie mineralogique, parce qu'elles fournissent de nouvelles preuves de l'enorme epaisseur qu'atteignent les roches dans les regions equinoxiales de l'Amerique. Plusieurs terrains secondaires (gres avec couches de houille, gypse avec sel gemme, calcaire presque depourvu de petrifications), que dans le plateau de Santa-Fe de Bogota on seroit tente de prendre pour un groupe de formations locales remplissant un bassin, descendent jusque dans des vallees dont le niveau est de 7000 pieds plus bas que ce plateau. En allant de Honda a Santa-Fe de Bogota, le gres est interrompu, pres de Villeta, par des thonschiefer de transition; mais la position des sources salees de Pinceima et de Pizara pres de Muzo me porte a croire qu'aussi de ce cote-la, sur les rives du Rio Negro (entre les schistes amphiboliques et carbures de Muzo, renfermant des emeraudes, et les schistes de transition avec filons de cuivre de Villeta), le gres houiller et le gypse muriatifere du plateau de Bogota et de Zipaquira se lient aux terrains homonymes qui remplissent le bassin du Rio Magdalena entre Honda et le detroit de Carare. Ce gres de la Nouvelle-Grenade (la ou j'ai pu l'examiner entre les 4° et 91/2° de lat. bor.) est compose de couches alternantes de gres quarzeux et schisteux a petits grains, et de conglomerats qui enchassent des fragmens anguleux (ayant 2 a 3 pouces de largeur) de pierre lydienne, de thonschiefer, de gneis et de quarz (Honda, Espinal). Le ciment est argileux et ferrugineux, quelquefois siliceux. Les couleurs de la roche varient du gris-jaunatre au rouge-brunatre. Cette derniere couleur est due au fer: aussi trouve-t-on partout de la mine de fer brun, tres-compacte, enchassee en nids, en petites couches et en filons irreguliers. Le gres est stratifie en bancs plus ou moins horizontaux. Quelquefois ces bancs inclinent par groupes et d'une maniere assez constante. Pres de Zambrano, sur la rive occidentale du Rio Magdalena, au sud de Teneriffe, la roche prend une structure globuleuse. J'y ai vu des boules de gres a tres-petits grains de deux a trois pieds de diametre: elles se separent en douze ou quinze couches concentriques. La pierre lydienne du plus beau noir, rarement traversee de filets de quarz, est beaucoup plus abondante dans les conglomerats grossiers que ne le sont les fragmens de roches primitives. Partout le gres schisteux a petits grains l'emporte, pour sa masse, sur les conglomerats a gros fragmens. Sur les hauteurs (au-dessus de 800 a 1000 toises) les derniers disparoissent presque en entier. Le gres du plateau de Bogota et celui que l'on observe en montant aux deux chapelles placees au-dessus de la ville de Santa-Fe, a 1650 et 1687 toises d'elevation, sont uniformement composes de tres-petits grains quarzeux. On n'y remarque presque plus de fragmens de lydienne; les grains de quarz se rapprochent tellement que la roche prend quelquefois l'aspect d'un quarz grenu. C'est ce meme gres quarzeux qui forme le pont naturel d'Icononzo. Nulle part ces roches arenacees ne font effervescence avec les acides. Outre la mine de fer brun et (ce qui est assez curieux) outre quelques nids de graphite tres-pur, cette formation renferme aussi, et a toutes les hauteurs, des couches d'argile brune, grasse au toucher et non micacee. Cette argile (Gachansipa, Chaleche, Montagne de Suba) devient quelquefois fortement carburee et passe au brandschiefer. Le sel purgatif d'Honda (sulfate de magnesie), si celebre dans ces contrees, se montre en efflorescence sur ces couches argileuses (Mesa de Palacios pres Honda). Nulle part le gres ne presente differentes couleurs melangees par zones, ni ces masses d'argile non continues et a forme lenticulaire qui caracterisent le gres bigarre (bunte sandstein), c'est-a-dire, le gres qui couvre le calcaire alpin ou zechstein. J'ai vu reposer immediatement la formation de gres que nous venons de decrire, sur un granite rempli de tourmalines (Pennon de Rosa au nord de Banco, vallee de la Magdalena; cascade de la Penna pres Mariquita), sur le gneis (Rio Lumbi, pres des mines abandonnees de Sainte-Anne), sur le thonschiefer de transition (entre Alto de Gascas et Alto del Roble au nord-ouest de Santa-Fe de Bogota). On ne connoeit aucune autre roche secondaire sous le gres de la Nouvelle-Grenade. Il renferme des cavernes (Facatativa, Pandi) et offre des couches puissantes, non de lignite, mais de houille feuilletee et compacte, melee de jayet (pechkohle), entre la Palma et Guaduas (600 toises), pres de Velez et la Villa de Leiva, comme aussi dans le plateau de Bogota (Chipo pres Canoas; Suba; Cerro de los Tunjos), a la grande hauteur de 1370 toises. Les restes de corps organises du regne animal sont extremement rares dans ce gres. Je n'y ai trouve qu'une seule fois des trochilites (?) presque microscopiques dans une couche d'argile intercalee (Cerro del Portachuelo, au sud d'Icononzo). Il se pourroit que ces houilles de Guaduas et de Canoas fussent un terrain plus recent, superpose au gres rouge; mais rien ne m'a paru annoncer cette superposition. La houille piciforme (jayet, pechkohle) appartient sans doute de preference aux lignites du gres tertiaire et des basaltes; mais elle forme aussi incontestablement de petites couches dans la houille schisteuse (schieferkohle) du terrain de porphyre et gres rouge. Les formations qui recouvrent le gres de la Nouvelle- Grenade, et qui le caracterisent, je crois, plus particulierement comme gres rouge dans la serie des roches secondaires, sont le calcaire fetide (confluent du Canno Morocoy et du Rio Magdalena), et le gypse feuillete (bassins du Rio Cauca pres de Cali, et du Rio Bogota pres de Santa-Fe). Dans ces deux bassins du Cauca et du Bogota, dont la hauteur differe de pres de 900 toises, on voit se succeder de bas en haut, tres-regulierement, les trois formations de gres houiller, de gypse et de calcaire compacte. Les deux dernieres ne semblent constituer qu'un meme terrain qui represente le calcaire alpin ou zechstein, et qui, generalement depourvu de petrifications, renferme quelques ammonites a Tocayma (vallee du Rio Magdalena). Le gypse manque souvent; mais a la grande elevation de 1400 toises (Zipaquira, Enemocon et Sesquiler) il est muriatifere, offrant dans l'argile (salzthon) des depots de sel gemme qui, depuis des siecles, sont l'objet de grandes exploitations. D'apres l'ensemble des observations que je viens de presenter sur le gisement du gres de la Nouvelle-Grenade, je n'hesite pas de regarder cette roche, qui a pris un developpement de cinq ou six mille pieds d'epaisseur, et qui va bientot etre examinee de nouveau par deux voyageurs tresinstruits, MM. Boussingault et Rivero, comme un gres rouge (todtes liegende) et non comme un gres bigarre (gres de Nebra). Je n'ignore pas que des couches frequentes d'argile et de mine de fer brun appartiennent plus particulierement au gres bigarre, et que les oolithes manquent souvent aussi dans ce gres. Je n'ignore pas qu'en Europe le gres bigarre (place au-dessus du zechstein) presente quelques traces de houille, de petites couches de gres extremement quarzeux (quarz grenu) et du sel gemme, et que cette derniere substance lui appartient meme exclusivement en Angleterre. Toutes ces analogies me paroeitroient tres-importantes, si des couches de conglomerat grossier alternant (dans les basses regions) avec des couches de gres a petits grains, si des fragmens anguleux de pierre lydienne, et meme de gneis et de micaschiste, enchasses dans des conglomerats grossiers, ne caracterisoient pas le gres de la Nouvelle-Grenade comme parallele au gres rouge ou gres houiller, c'esta-dire comme parallele a celui qui supporte immediatement le calcaire alpin (zechstein), renfermant le gypse et le sel gemme. Lorsque le gres bigarre (nord de l'Angleterre et Wimmelburg en Saxe) presente quelquefois des fragmens de granite et de syenite, ces fragmens sont arrondis et simplement enveloppes d'argile; ils ne forment pas un conglomerat compacte et tenace a fragmens angulaires comme le gres rouge. Cette derniere roche abonde, dans le Mansfeld comme dans la Nouvelle-Grenade, en masses intercalees d'argile (Cresfeld, Eisleben, Rothenberg), et en petites couches de mine de fer brun et rouge (Burgörner, Hettstedt). La structure globuleuse qu'offre le gres de la vallee du Rio Magdalena se retrouve dans le gres houiller de la Hongrie (Klausenburg), dans le conglomerat blanchatre de Saxe (weiss-liegendes de Helbra) qui lie le gres houiller au zechstein, et, selon des observations que nous avons faites, M. Freiesleben et moi, en 1795, meme pres de Lausanne, dans la molasse d'2 (gres tertiaire a lignites). C'est l'ensemble des rapports de gisement qui determine l'age d'une formation, ce n'est pas sa composition et sa structure seules. Les geognostes qui connoissent les differens terrains de gres, non d'apres des echantillons de cabinet, mais par de frequentes excursions dans les montagnes, savent tres-bien que, si (par la suppression du calcaire alpin, du muschelkalk, du calcaire du Jura et de la craie) le gres rouge, le gres bigarre mele d'argile, le quadersandstein qui n'est pas toujours blanc et tresquarzeux, et la molasse alternant avec des poudingues grossiers (nagelfluhe) etoient immediatement superposes les uns aux autres, on auroit de la peine a prononcer sur les limites de ces quatre terrains arenaces, d'un age si different. Le gres rouge de la Nouvelle-Grenade semble plonger, dans la partie septentrionale du bassin du Rio Magdalena (entre Mahates, Turbaco et la cote de la mer des Antilles), sous un calcaire tertiaire rempli de madrepores et de coquilles marines, et constituant, pres du port de Carthagene des Indes, le Cerro de la Popa. Mais, lorsqu'on s'eleve a la hauteur de 1400 toises, la formation de calcaire et de gypse que supporte le gres rouge, est couverte (Campo de Gigantes, a l'ouest de Suacha dans le bassin de Bogota) de depots d'alluvion dans lesquels j'ai trouve d'enormes ossemens de mastodontes. D'apres la tendance, peut-etre trop generale, de la geognosie moderne a etendre le domaine des terrains intermediaire et tertiaire aux depens du terrain secondaire, on pourroit etre tente de regarder le gres de Honda, le gypse avec sel gemme de Zipaquira, et le calcaire de Tocayma et de Bogota, comme des formations posterieures a la craie. Dans cette hypothese, les houilles de Guaduas et de Canoas deviendroient des lignites, et le sel gemme de Zipaquira, d'Enemocon, de Sesquiler et de Chamesa, entierement depourvu de debris vegetaux, seroit une formation parallele aux depots saliferes (avec lignites) de la Galicie et de la Hongrie, que M. Beudant croit appartenir au terrain tertiaire. Mais l'aspect du pays; le manque presque total de corps organises fossiles, observe jusqu'a 10,000 pieds de hauteur perpendiculaire; la puissance de ces couches arenacees et calcaires, uniformement repandues, depourvues de rognons de silex et d'infiltrations siliceuses, tres-compactes, et nullement melangees de sables et d'autres matieres incoherentes, s'opposent a ces idees, j'aurois presque dit, a ces empietemens du terrain tertiaire sur le terrain secondaire. L'ensemble des phenomenes que j'ai exposes me fait croire que le gres de la Nouvelle-Grenade, enchassant des fragmens de lydienne et des roches primitives, est le veritable gres rouge de l'ancien continent. On ignore si ce gres, que j'ai vu monter jusqu'a 1700 toises de hauteur a la pente occidentale de la Cordillere de Chingasa (Cordillere qui separe la ville de Santa-Fe de Bogota des plaines du Meta), depasse le sommet de cette grande chaeine de montagnes, en se prolongeant vers les plaines de Casanare. On pourroit le soupconner; car les depots de sel gemme et les sources de muriate de soude se suivent, en traversant la Cordillere orientale de la Nouvelle-Grenade, depuis Pinceima jusqu'aux Llanos du Meta (par Zipaquira, Enemocon, Tausa, Sesquiler, Gachita, Medina, Chita, Chamesa et El Receptor), du sud-ouest au nord-est, dans une meme direction, sur une distance de plus de cinquante lieues. Dans toutes les regions du globe on observe cette disposition des sources salees par bandes (ou crevasses?) plus ou moins prolongees. Lorsque des plaines saliferes de Casanare on avance vers l'Orenoque, les formations secondaires disparoissent peu a peu, et dans la Sierra Parime le granite-gneis se montre partout a decouvert. Seulement sur les bords de l'Orenoque, pres des grandes cataractes d'Atures et de Maypures, on retrouve de petits lambeaux de conglomerat ancien superposes a la roche primitive. Ce conglomerat enchasse des grains de quarz et meme (Isla del Guachaco) des fragmens de feldspath reunis par un ciment brun-olivatre argileux et tres-compacte. Le ciment, la ou il abonde, offre une cassure conchoide et passe au jaspe. Cette roche arenacee, que je crois appartenir au gres rouge des steppes de Venezuela, renferme des masses tres-aplaties de mine de fer brun. Elle rappelle ces gres qui, dans la Haute-Egypte et en Nubie, reposent aussi immediatement sur le granite-gneis des cataractes du Nil. 4. ° Plateau de Quito. Dans l'hemisphere austral, les Cordilleres de Quito m'ont offert la formation de gres rouge la plus etendue de celles que j'ai observees jusqu'ici. Cette roche couvre, a 1300 et 1500 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer, sur une longueur de vingt-cinq lieues, tout le plateau de Tarqui et de Cuenca, devenu celebre par les operations des astronomes francois. Elle s'eleve dans le Paramo de Sarar jusqu'a 1900 toises, et l'epaisseur de sa masse entiere excede plus de 800 toises. Elle repose au nord (Cannar, pente meridionale de l'Assuay) et au sud (Alto de Pulla pres Loxa) sur du schiste micace primitif. La formation de gres rouge de la province de Quito est coloree par de la mine de fer brun et jaune, dont elle renferme de nombreux filons. Le gres est generalement tres-argileux, a petits grains de quarz peu arrondis; mais quelquefois aussi il est schisteux, et alterne, comme dans la Thuringe, avec un conglomerat qui enchasse des fragmens de porphyre de trois, de cinq et meme de neuf pouces de diametre. On trouve dans cette formation: des couches d'argile, tantot brune (Tambo de Burgay et rives de Vinayacu), tantot blanche et steatiteuse, passant a l'argilolithe (thonstein) des porphyres du gres rouge (Rio Uduchapa et Cerro de Coxitambo), et se couvrant, au contact avec l'air atmospherique, de nitrate de potasse (Cumbe); des trones de bois petrifie de monocotyledones (ravin de Silcayacu, ou j'en ai vu des morceaux de 4 pieds de long et de 14 pouces d'epaisseur); du goudron mineral fluide et endurci en asphalte a cassure conchoide (Parche et Coxitambo); des silex (splittriger hornstein) passant au silex pyromaque ou a l'agathe (Delay); des filons de mercure sulfure (Cerros de Guazun, et Upar au nord-est du village d'Azogues); des couches de manganese oxide noiratre et pulverulent (a l'ouest de la ville de Cuenca); du calcaire grenu et lamelleux (Portete, au bord occidental du Llano de Tarqui). Cette formation calcaire, que dans ce pays on appelle tres-improprement jaspe rubane, presente des couches alternantes de calcaire opaque et saccharoide, semblable au marbre de Carare, et de calcaire fibreux et ondule, en stries laiteuses. La masse entiere est diaphane comme le plus bel albatre oriental (le marbre memphitique ou phengites des anciens). J'aurois ete tente de prendre cette roche de Tarqui, qui est recherchee par les marbriers comme l'albatre de Florence et le marbre de Tolonta (entre Chillo et Quito), pour une variete de travertin ou formation d'eau douce, si au sud de Cuenca, au bord du Rio Machangara, elle ne m'avoit paru (d'apres l'inclinaison de ses couches) intercalee au gres rouge que je viens de decrire. Il faut toutefois distinguer de ce marbre translucide et rubane de Tarqui, le calcaire grenu et opaque du Cebollar, qui vient au jour un peu au nord de Cuenca, et qui, recouvert du gres rouge, est vraisemblablement (§. 10) superpose au micaschiste du Cannar. Dans les parties volcaniques des Andes, des plateaux ou bassins eleves sont remplis, les uns, de formations secondaires, couvrant des porphyres de transition; les autres, de formations tertiaires et d'eau douce, superposees a des tuffs trachytiques. Ce n'est que lorsque des geognostes instruits se seront etablis dans les grandes villes placees sur le dos des Cordilleres, villes qui deviendront les centres de la civilisation americaine, que l'on pourra prononcer avec certitude sur ces lambeaux de terrains calcaires, gypseux et arenaces, que l'on trouve entre 1200 et 1600 toises de hauteur. 5. ° Perou. La formation de gres rouge de Cuenca, qui est recouverte sur plusieurs points de couches de gypse feuillete (Muney, Juncay et Chalcay, a l'ouest de Nabon), se trouve repetee dans le Haut-Perou, a 1460 toises de hauteur, dans le grand plateau de Caxamarca. Ce gres de Caxamarca est egalement argileux, depourvu de coquilles et rempli de minerai de fer brun. Il m'a paru appuye sur des porphyres d'un aspect trachytique (Cerros de Aroma et de Cundurcaga). Il supporte le calcaire alpin de Montan et de Micuipampa, qui est celebre par ses richesses metalliques. Les eaux thermales hydrosulfureuses qui sortent des gres de Cuenca (lat. austr. 2° 53') et de Tollacpoma pres Caxamarca (lat. austr. 7° 8'), ont presque la meme temperature, 72° et 69° cent. L'analogie qu'offrent les gres rouges de la Nouvelle-Grenade, du Perou et de Quito, avec les gres rouges du pays ou Füchsel (Historia terrae et maris ex historia Thuringiae eruta) a donne la premiere description de la grande formation houillere, doit frapper tous les geognostes experimentes. Je n'insisterai pas sur les phenomenes si connus de l'alternance des conglomerats grossiers et des gres a grains tres-fins; ni sur l'absence de tout fragment calcaire, fragmens dont on ne trouve qu'un exemple tres-rare dans des poudingues du gres rouge des Pyrenees (vallee de Barillos); ni sur les couches intercalees de houille, d'argile, de fer brun et de calcaire: je me bornerai a rappeler dans les gres rouges de l'Allemagne les mines de mercure (Mörsfeld et Moschellandsberg dans le duche de Deux-ponts, comme Dombrava en Hongrie); les bois petrifies de plantes monocotyledonees (Siebigkerode, Kelbra et Rothenburg, en Thuringe); les agathes, les silex communs et les silex pyromaques (hornet feuerstein) passant a la calcedoine (Kiffhäuser, Wiederstädt, Goldlauter et Grossreina, en Saxe, dans le conglomerat grossier du gres rouge; Oberkirchen et Tholey dans le duche de Deux-ponts; Netzberg pres Ilefeld, au Harz, dans le mandelstein du gres rouge); du bitume mineral (Naundorf et Gnölzig dans le comte de Mansfeld). Tous ces phenomenes se retrouvent dans la partie de l'Amerique equinoxiale que j'ai parcourue. 6. ° Rives de l'Amazone. Le grand bassin de la riviere des Amazones offre, du moins dans sa partie occidentale, les memes phenomenes que nous avons indiques en tracant le tableau geognostique des Llanos de Venezuela ou du bassin de l'Orenoque. Lorsqu'on descend du sommet des Andes granitiques de Loxa par Guancabamba aux rives du Chamaya, on trouve superpose aux porphyres de transition de Sonanga un gres a ciment argileux, couvert (entre Sonanga et Guanca) d'un calcaire qui renferme du gypse et du sel gemme. Ce gres de Chamaya remplit, a 190 et 260 toises de hauteur au-dessus du niveau de l'ocean, les plaines de Jaen de Bracamoros. Il forme des collines a pentes abruptes, ressemblant a des fortifications en ruines. On y distingue des couches a petits grains arrondis de quarz, et des conglomerats grossiers, composes de galets de porphyre, de pierre lydienne et de quarz, de deux a trois pouces de diametre. Les conglomerats grossiers sont assez rares: ils forment cependant le pongo de Rentema, et d'autres digues rocheuses qui traversent le Haut-Maragnon et entravent la navigation du fleuve. Parmi les fragmens enchasses dans le gres de Chamaya, je n'en ai jamais pu decouvrir un seul qui faut de roche calcaire. Cette circonstance, la presence des lydiennes empatees dans la masse, l'alternance du gres a petits grains avec les conglomerats grossiers, partout si rares (Schochwitz en Saxe) dans le gres bigarre, enfin la superposition du zechstein et du gypse avec sel gemme au gres de l'Amazone, me font admettre l'identite de cette formation et de celles de Cuenca et de Caxamarca, malgre la difference de hauteur absolue de plus de 1000 toises. Nous avons deja vu, dans la Nouvelle-Grenade, le gres houiller descendre du grand plateau de Bogota aux plaines du Rio Magdalena. Une particularite bien remarquable, et qui paroeit, au premier abord, eloigner le gres de l'Amazone et du Chamaya du gres rouge de l'Europe, est l'intercalation de quelques couches de sable a parties entierement desagregees. J'ai vu, entre Chamaya et Tomependa, des bancs de gres quarzeux, de trois a quatre pieds d'epaisseur, alterner avec des bancs de sable siliceux de sept a huit pieds. Le parallelisme de ces couches peu inclinees se soutient a de grandes distances. Je n'ignore pas que le melange de sable et de gres solide caracterise plus particulierement le gres bigarre, celui qui recouvre le zechstein (Wimmelburg et Cresfeld en Saxe), et le gres tertiaire audessus du gypse a ossemens (Fontainebleau pres de Paris); mais MM. Voigt et Jordan ont aussi trouve des bancs de sable (triebsand) dans le gres rouge ou houiller (Röhrig pres de Bieber, et le Kupferberg pres Walkenried). On pourroit croire que l'analogie que nous venons d'indiquer avec les gres et sables marins du terrain tertiaire, se trouve fortifiee jusqu'a un certain point par la frequence des oursins petrifies que nous avons vus epars a la surface du sol, a la fois sur les plages de l'Amazone, a 195 toises, et pres de Micuipampa, a plus de 1800 toises de hauteur; mais il se peut que, dans ces regions si peu examinees jusqu'ici, des formations calcaires tres-neuves reposent sur le zechstein, et rien ne semble annoncer que le gres de Chamaya, alternant a la fois avec des bancs de sable et des conglomerats a fragmens de porphyre et de pierre lydienne, soit un gres tertiaire semblable a celui du terrain parisien. Je devrois peut-etre placer immediatement apres le gres houiller le zechstein ou calcaire alpin, parce que ces deux roches ne constituent quelquefois qu'une seule formation; mais j'aime mieux decrire d'abord le terrain de quarz de Guangamarca (flözquarz), parce qu'il est parallele au gres houiller. C'est un equivalent geognostique propre a l'hemisphere austral. Roche de quarz secondaire. §. 27. Cette formation remarquable et entierement inconnue aux geognostes de l'Europe domine, dans les Andes du Perou, entre les 7° et 8° de latitude australe. Je l'ai vue reposer indifferemment sur des porphyres de transition (a la pente orientale des Cordilleres, Cerro de N. S. del Carmen pres S. Felipe, 982 toises; Paramo de Yanaguanga entre Micuipampa et Caxamarca, 1900 toises: a la pente occidentale des Cordilleres, Namas et Magdalena, 690 toises), et sur du granite primitif (Chala, pres des cotes de l'ocean Pacifique, 212 toises). Cette superposition sur des roches d'un age tres-different prouve l'independance de la formation que nous faisons connoeitre. Elle est beaucoup moins developpee a la pente orientale qu'a la pente occidentale des Andes. A la seconde, elle atteint une epaisseur de plusieurs milliers de pieds, comptee perpendiculairement aux fentes de stratification: elle y remplace le gres rouge, supportant immediatement (villages indiens de la Magdalena et de Contumaza) le zechstein ou calcaire alpin. C'est, ou la plus recente des formations de transition, ou la plus ancienne des formations secondaires: c'est un veritable quarz compacte ou grenu, non carie ou celluleux, le plus souvent blanc-grisatre ou jaunatre et opaque; il n'est melange ni de talc ni de mica. Cette formation est tantot compacte et a cassure ecailleuse, comme le quarz en bancs (lagerquarz du granite-gneis primitif); tantot a grains tresfins, semblable au quarz du terrain calcaire de transition de la Tarantaise. Ce n'est par consequent ni une roche arenacee, ni une variete de ces gres quarzeux a ciment silicifere, dans lesquels le ciment disparoeit peu a peu, et qui appartiennent a la fois au gres bigarre (Detmold), au quadersandstein, au gres vert (green sand), a l'argile plastique (trappsandstein) et au terrain tertiaire (foret de Fontainebleau). Les ravins profonds dont la pente des Cordilleres est sillonnee, et le nombre immense de blocs arraches de leur geite naturel, facilitent l'observation de cette formation de quarz, qui est tres-homogene et depourvue de coquilles, comme aussi de couches subordonnees. Je l'ai examinee pendant plusieurs jours, croyant trouver dans une roche recouverte de zechstein et remplacant le gres rouge, des traces de ciment, de grains ou de fragmens aglutines: toutes mes recherches ont ete inutiles; nulle part je n'ai pu me convaincre que ce quarz compacte ou grenu faut une roche arenacee ou fragmentaire. Elle est quelquefois tres-regulierement separee en bancs de huit pouces a deux pieds d'epaisseur, diriges (Aroma, Magdalena et Cascas) N. 53°--68° O. , et inclines de 70° a 80° au S. E. A la pente orientale des Andes, aux rives du Chamaya, une couche de quarz semblable a celle que je viens de decrire, paroeit intercalee a une formation de calcaire compacte, bleu-grisatre. Ce calcaire n'est pas une roche de transition (comme on pourroit le croire a cause de la position du quarz compacte de Pesay et de Tines en Tarantaise, §. 20); le nombre et la nature de ses coquilles, comme la sinuosite de ses couches, semblent le rapprocher au contraire du zechstein ou calcaire alpin. Il n'est pas extraordinaire de voir une roche siliceuse, qui supporte un calcaire, penetrer dans celui-ci et y former une couche intercalee. Cette penetration s'observe aussi quelquefois, mais en filons (Cerro de N. S. del Carmen pres San-Felipe), dans la formation sur laquelle repose la roche de quarz. Le calcaire alpin de San-Felipe recouvre cette roche, et celle-ci est placee sur un porphyre vert de transition, qui est traverse de filons de quarz de trois pieds d'epaisseur. Il sera utile de rappeler, a la fin de cet article, qu'il ne faut pas confondre neuf formations de quarz et de gres quarzeux des terrains primitif, intermediaire, secondaire et tertiaire, dont seulement la seconde et la quatrieme sont independantes, tandis que les autres ne forment que des bancs subordonnes: 1. ° quarz (lagerquarz) des granites-gneis, des micaschistes et des thonschiefer primitifs; 2.° quarz chloriteux ou talqueux de Minas-Geraes du Bresil et de Tiocaxas dans les Andes de Quito: formation independante primitive, succedant au thonschiefer (§. 16), ou le remplacant, comme en Norwege; 3.° quarz compacte de transition, decrit par MM. Brochant, Haussmann et Leopold de Buch, et subordonne (§. 20) aux roches calcaires et schisteuses de la Tarantaise, de Kemi-Elf en Suede, et de Skeen en Norwege (§. 23); 4.° quarz secondaire (§. 27), parallele au gres rouge, et penetrant dans le calcaire alpin des Andes de Contumaza et de Huancavelica. A ces formations de quarz pur on peut joindre les masses entierement quarzeuses, 5.° du gres bigarre; 6.° du quadersandstein; 7.° du gres vert ou gres secondaire a lignites, place entre le calcaire jurassique et la craie; 8.° du gres appartenant au gres tertiaire a lignites (argile plastique) au-dessus de la craie; 9.° du gres de Fontainebleau. On determine une roche avec d'autant plus de saurete, que l'on a sous les yeux le tableau des formations qui sont analogues par leur composition, mais tres-differentes par leur gisement. II. Zechstein ou calcaire alpin (magnesian limestone); Gypse hydrate; Sel gemme. §. 28. Le mot de zechstein n'est ordinairement applique par les mineurs et les geognostes d'Allemagne qu'a une seule assise de la formation que nous allons decrire: on distingue alors le calcaire compacte (zechstein) du schiste cuivreux qu'il recouvre immediatement, et des gypses et des calcaires fetides qui lui sont superposes. J'appelle zechstein tout le groupe dont cette roche est le representant geognostique. C'est une grande formation calcaire qui succede immediatement au gres rouge ou gres houiller, et qui est quelquefois si intimement liee avec ce gres qu'elle s'y trouve intercalee. La limite superieure du zechstein est plus difficile a fixer: en Allemagne et dans plusieurs parties de la France orientale, cette roche se termine la ou commence le gres bigarre ou gres a oolithes (bunte sandstein). En Angleterre, le magnesian limestone, representant par sa position le zechstein, est recouvert d'une formation marneuse et muriatifere (red marl), qui offre beaucoup d'analogie avec le gres bigarre d'Allemagne; car dans ce dernier on rencontre aussi plus de couches d'argile et de marne que de veritable gres. Comme, d'un autre cote, le sel gemme d'Angleterre appartient au red marl, tandis que le sel gemme de la majeure partie du continent appartient au zechstein, on peut admettre que, des deux formations, a peu pres paralleles, de red marl et de gres bigarre, renfermant des marnes, des argiles et des oolithes, la premiere est plus intimement liee au zechstein, tandis que la seconde l'est plus au muschelkalk, et, quand celui-ci et le quadersandstein ne se sont pas developpes, au calcaire egalement marneux et oolithique du Jura. C'est peut-etre d'apres des inductions analogues que, dans son excellent Tableau des formations d'Angleterre, publie en 1816, M. Buckland avoit reuni, dans un meme terrain, le magnesian limestone et le red marl ou new red sandstone. Quelque grande que soit l'importance que nous attachons a ces affinites geognostiques, comme aux phenomenes d'alternance et de penetration observes dans des roches qui se succedent immediatement, nous ne nous en croyons pas moins en droit de separer les diverses formations de gres rouge, de zechstein et de gres bigarre, la ou, dans les deux hemispheres, nous les avons vues prendre un developpement extraordinaire. Dans le cours de ce travail je me suis souvent servi, a l'exemple de beaucoup de geognostes celebres, pour designer le zechstein, du mot plus sonore de calcaire alpin, quoique je sache tres-bien que, d'apres les belles recherches de MM. de Buch et Escher, la majeure partie des calcaires qui constituent les hautes Alpes de la Suisse, sont des calcaires de transition (§. 22). A une epoque ou l'on a tant embrouille la geognosie par la creation de denominations vagues et qui ne sont adoptees que par un tres-petit nombre de savans, je n'ai rien voulu changer a la nomenclature recue, quelque vicieuse ou barbare qu'elle me paraut. Les imperfections du langage des geognostes ne sont dangereuses pour la science, que lorsqu'on ne definit pas avec clarte la position de chaque formation et les limites entre lesquelles ces formations se trouvent circonscrites. Dans la Baviere meridionale, dans le Tyrol, dans la Styrie et le pays de Salzbourg, les hautes Alpes de Benedictbaiern, de Chiemsee, de Hall, d'Ischel, de Gmünden et de l'Untersberg, sont tres-probablement du zechstein. Au Montperdu, dans la chaeine des Pyrenees, cette roche, melee de calcaire fetide, s'eleve a plus de 1750 toises de hauteur. Dans les Andes du Perou, le zechstein, tres-distinct du calcaire de transition, renferme des coquilles petrifiees sur la crete des montagnes entre Guambos et Montan, et pres Micuipampa (1400--2000 toises); entre Yauricocha et Pasco (2100 toises); pres de Huancavelica, Acoria et Acobamba (2100--2207 toises). On voit par ces exemples que le zechstein atteint au nord et au sud de l'equateur de tres-grandes elevations. On le trouve bien certainement dans la region alpine des Pyrenees, du Tyrol et des Andes; mais le mot calcaire alpin n'indique pas plus que toutes les Alpes calcaires dans les deux mondes sont composees de zechstein, que le mot gres houiller n'annonce que les houilles appartiennent uniquement au gres rouge. La question de savoir quelles cimes alpines de la Suisse et du Tyrol sont de zechstein, quelles cimes sont de calcaire de transition, est plutot une question de geographie mineralogique, qu'un probleme de geognosie generale. La science des formations se borne a decrire une roche placee dans la serie des terrains secondaires, entre le gres houiller et le gres bigarre alternant avec des argiles: elle ne prononce pas sur ce grand nombre de roches dont le gisement n'offre aucun caractere diagnostique certain, par exemple, sur des roches calcaires non recouvertes et placees immediatement sur du micaschiste ou des grauwackes. Partout ou le gres houiller manque, on ne peut juger de l'age des roches calcaires que d'apres des analogies de composition et de couches intercalees: on les rapproche de tel ou tel groupe, comme le botaniste rapproche prealablement de telle famille ou de tel genre connus, une plante dont il n'a pu examiner le fruit. Ces hesitations et ces doutes, loin de prouver l'incertitude des classifications, parlent plutot en faveur de la marche methodique que doit suivre la geognosie positive. Le zechstein, en le considerant dans sa plus grande generalite, est tantot (dans les montagnes les plus elevees) un terrain d'une grande simplicite, tantot (dans les plaines) il est compose de plusieurs petites formations partielles, qui alternent les unes avec les autres (Thuringe; Figeac, Autun, Villefranche). Sa couleur est le plus souvent grisatre et bleuatre, quelquefois rougeatre: il passe, et surtout dans les hautes regions, du compacte au grenu a tres-petits grains, et dans ce cas il est traverse par de petits filons de spath calcaire. Ces caracteres de couleur et de cassure ne sont cependant pas d'une grande importance; car, selon que la matiere colorante (carbure d'hydrogene et fer) se trouve diversement repartie, le zechstein et le calcaire de transition prennent quelquefois des teintes semblables: le premier devient noiratre, et le second blanc-grisatre. C'est ainsi que la couleur noire se trouve (duche d'Anhalt- Dessau; Hettstädt; Osnabrück) jusque dans le muschelkalk. M. Freiesleben observe tres-bien que le zechstein n'est generalement pas mat, mais un peu brillant (schimmernd), a cause d'un melange intime de petites lames de spath calcaire. Cet eclat, bien moindre sans doute que dans les calcaires de transition, se remarque non-seulement dans les montagnes tres-elevees, mais jusque dans les zechstein des plaines. C'est la aussi que cette roche devient parfois grenue a petits grains (au Deister et pres de Hameln; entre Bolkenhayn et Waldenbourg, et pres de Tarnowiz en Silesie). J'ai trouve cette meme tendance a la structure cristalline dans le zechstein du Mexique et dans celui des Llanos de Venezuela: elle n'est pas causee, comme dans le calcaire du Jura, par un entassement de debris organiques, et ce seroit a tort qu'on attribueroit cette tendance exclusivement au calcaire de transition. De petits filets de spath calcaire blanc traversant un calcaire bleuatre, passant du compacte au grenu, caracterisent sans doute plutot le terrain de transition que le zechstein des plaines; mais dans les deux continens ces petits filons se retrouvent aussi dans les calcaires des hautes montagnes calcaires que, par leur gisement et par leurs bancs intercales de sel gemme et d'argile bitumineuse, je crois appartenir au zechstein. D'ailleurs, dans toutes les formations superieures au gres rouge, on observe que (par une action probablement galvanique) les calcaires gris-noiratre perdent leur principe colorant dans le voisinage des fentes de stratification. Cette decoloration a lieu dans les roches restees en place. L'accumulation du carbone ne se conserve que dans le centre des couches, et l'on diroit que la pierre ait ete exposee au contact de la lumiere et de l'oxigene de l'atmosphere. De toutes les formations secondaires le zechstein est celle dont les diverses assises ont ete le plus minutieusement etudiees: c'est aussi celle qui a le plus contribue a faire naeitre dans le Nord de l'Allemagne, dans cette terre classique de la geognosie, les premieres idees precises sur l'age relatif des terrains et sur la regularite avec laquelle ils se succedent. Comme les schistes bitumineux et cuivreux du zechstein sont un objet tres-important d'exploitation, il a fallu percer cinq formations, le muschelkalk, le gypse fibreux et argileux, le gres bigarre ou oolithique, le gypse feuillete et salifere, et le zechstein, pour parvenir a la couche argentifere placee entre le zechstein et le gres rouge. On peut dire que les travaux des mineurs sur les schistes bitumineux du Mansfeld, en Allemagne, et sur les roches de houille en Angleterre, ont singulierement favorise les progres de la geognosie de gisemens, dont Stenon a eu la gloire d'avoir indique, le premier, les veritables principes. Le zechstein ou calcaire alpin, la plus ancienne des formations secondaires, renferme, comme couches subordonnees: des argiles schisteuses, carburees et bitumineuses; de la houille; du sel gemme; du gypse; du calcaire fetide, compacte ou en parties desagregees (asche); du calcaire magnesifere; du calcaire a gryphites; du calcaire ferrifere (eisenkalk); du calcaire celluleux a grains cristallins (rauchwacke); du gres; de la calamine, du plomb, du fer hydrate et du mercure. Nous joindrons a ces indications les substances qui se trouvent quelquefois disseminees dans le zechstein, sans y former des couches continues, telles que le soufre, le silex (hornstein) et le cristal de roche. On distingue facilement dans l'ensemble de ces masses trois series bitumineuses ou carburees, muriatiferes et metalliques. Le schiste cuivreux, rempli de poissons petrifies; le calcaire fetide, le sel gemme et le gypse, la calamine et le plomb sulfure sont les types les plus importans de ces trois series: ils servent jusqu'a un certain point, par leur concomitance geognostique, a reconnoeitre la formation que nous decrivons, lorsque les rapports de gisement sont douteux. Argiles ou marnes schisteuses, carburees ou bitumineuses. L'accumulation de carbone qui caracterise les terrains de transition, surtout ceux qui sont les plus modernes, atteint son maximum dans le gres rouge: le carbone ne s'y montre plus comme graphite ou comme anthracite, mais comme houille bitumineuse. La formation de calcaire alpin, si intimement liee a celle du gres rouge ou gres houiller, participe jusqu'a un certain point a cette abondance de carbone hydrogene: tantot c'est toute la masse de la roche (Baviere meridionale, et Merlingen sur le lac de Thun; dans l'Amerique meridionale, montagnes de la Nouvelle-Andalousie) qui est penetree de parties bitumineuses; tantot ce ne sont que des couches d'argile et de marnes intercalees qui contiennent le bitume. La plus celebre de ces couches est le schiste cuivreux (kupferschiefer) du Mansfeld, que l'on retrouve dans le nouveau monde, renfermant des poissons fossiles, pres de Ceara (plaines du Bresil), pres de Pasco (a 2000 toises de hauteur; Andes du Perou), pres de Mondragon (plateau du Potosi), et pres du Pongo de Lomasiacu (rives de l'Amazone, province de Jaen). Le plus souvent il n'y a qu'une seule couche de schiste cuivreux, et cette couche se trouve comme repoussee vers la limite inferieure du zechstein. C'est cette position qui l'a fait prendre long-temps pour une formation independante placee entre le zechstein et le gres rouge. D'autres fois (Conradswalde, Prausnitz et Hasel, en Silesie) il y a plusieurs bancs qui alternent avec les couches du zechstein et qui meritent egalement d'etre exploitees. Le cuivre et le plomb argentiferes ne se trouvent qu'accidentellement accumules dans cette formation partielle, et j'ai vu dans les deux continens (Chiemsee et Wallersee dans la Baviere meridionale; mines de Tehuilotepec au Mexique, montagne du Cuchivano pres Cumanacoa) ces marnes cuivreuses du Mansfeld representees par de petites couches d'argile schisteuse carburee, brun-noiratre, foiblement chargee de bitume et remplie de pyrites. Ce phenomene paroeit lier le zechstein des plaines a celui des hautes montagnes, dont la superposition au gres houiller est moins evidente. Dans les Andes de Montan (a 1600 toises de hauteur; Perou septentrional) des argiles noires de cinq a dix-huit pouces d'epaisseur alternent avec le zechstein. Les argiles schisteuses et marneuses oscillent, du zechstein ou calcaire alpin, d'un cote vers le gres rouge et le calcaire de transition, de l'autre vers le calcaire du Jura. Dans le gres rouge se trouve repete le schiste cuivreux et argentifere, mais avec une grande accumulation de carbone (Suhl et Goldlauter en Saxe). Dans le calcaire de transition (Schwatz en Tyrol) les argiles deviennent plus micacees et passent au thonschiefer de transition, renfermant (Glaris), comme les schistes du zechstein (Eisleben) et comme ceux du gres rouge (mine de Saint-Jacques pres Goldlauter), des poissons petrifies. Dans le calcaire du Jura les marnes sont plus calcariferes, d'une teinte plus claire, blanchatres ou gris-bleuatre. Malgre les analogies que presentent quelquefois les argiles schisteuses fortement carburees du zechstein avec celles du gres houiller, ce n'est pourtant que dans ces derniers, qui recouvrent immediatement les houilles, qu'on trouve des empreintes de veritables fougeres du groupe des polypodiacees. Les schistes cuivreux ne presentent que des lycopodiacees, famille que Swartz, depuis long-temps, a separee des fougeres. Houille. Quoique, comme nous venons de l'indiquer, l'accumulation du carbone caracterise particulierement la formation du gres rouge, de meme le bitume caracterise la formation du calcaire alpin: cette derniere offre cependant aussi des traces de veritable houille, soit en couches (entre Nalzon et Pereilles dans les Pyrenees; a Huanuco dans les Andes du Perou, a 2000 et 2200 toises de hauteur), soit comme parties disseminees dans le schiste cuivreux (Eisleben, Thalitter, en Saxe). C'est un fait bien remarquable et anciennement observe, que la houille piciforme (jayet) se montre de preference sur les empreintes du corps des poissons petrifies: elle remplace dans ces empreintes organiques le sulfure de fer, et (entre Mörsfeld et Münsterappel, dans le duche de Deux-ponts) le mercure natif et le cinabre. Les couches de houille melees de coquilles marines et d'ambre (Hering et Miesbach en Tyrol; Entrevernes sur le lac d'Annecy en Savoie) ne se trouvent pas dans le zechstein: ce sont des lignites qui appartiennent a des formations beaucoup plus recentes. Ils sont superposes au zechstein dans des bassins isoles, et ont, comme toutes les formations locales, leurs gres et leurs argiles. Sel gemme et argile muriatifere. Les masses de sel gemme dans le calcaire alpin ou zechstein sont moins subordonnees a des couches de gypse lamelleux, qu'a une formation particuliere d'argile, qui a ete long-temps negligee par les geognostes et que j'ai fait connoeitre sous le nom de salzthon (argile muriatifere). Elle caracterise, dans les deux continens, les depots de sel gemme, de meme que l'argile schisteuse (schieferthon) ou argile a fougeres caracterise les depots de houilles. Cette formation muriatifere, dans laquelle le gypse ne se trouve pour ainsi dire qu'accidentellement, a ete l'objet principal de mes recherches dans les voyages que j'ai entrepris par ordre du Gouvernement prussien, pendant les annees 1792 et 1793, dans les mines de sel gemme de la Suisse, de l'Allemagne meridionale et de la Pologne. Je l'ai retrouvee, avec toutes ses nuances d'analogie les plus petites, dans les Cordilleres de l'Amerique equatoriale, et l'on ne sauroit douter que sa connoissance physionomique ne soit du plus grand interet pour ceux qui travaillent a decouvrir des depots de sel dans les pays que l'on en a cru depourvus jusqu'a ce jour. Les couleurs de l'argile muriatifere sont generalement (Hall, Ischel, Aussee) le gris de fumee, le gris blanchatre et le gris bleuatre (Berchtolsgaden et Wieliczka); quelquefois cette argile est brun-noiratre, brun-rougeatre (leberstein des mineurs du Tyrol et de la Styrie), et meme rouge de brique. On la trouve ou en masses tres-puissantes, ou disseminee en petites parties rhomboides, soit dans le sel gemme (Zipaquira, dans la Nouvelle-Grenade), soit dans un gypse (Neustadt an der Aisch, en Franconie; Reichenhall en Baviere) qui est subordonne au calcaire alpin. Les couleurs de l'argile muriatifere sont beaucoup plus variees et plus melangees que celles de l'argile schisteuse qui couvre les houilles. La premiere fait un peu d'effervescence avec les acides; ses couleurs sont dues a la fois au carbone et a l'oxide de fer. Sur le plateau de Bogota je l'ai vue melee d'asphalte et tachant les doigts en noir. Elle absorbe rapidement l'oxigene de l'atmosphere, tant sous des cloches que dans ces grandes excavations circulaires (Sinkwerke, Wöhre), qui sont destinees a etre remplies d'eau douce pour lessiver la roche salifere. Sa consistance est extremement variable; elle s'eleve du tendre a la durete du schiste cuivreux. Souvent des masses tenaces (schlief) paroissent melees de silice et donnent feu avec l'acier; leurs pieces separees sont alors testacees et courbes (krummschalig abgesonderte Stücke). Empatees dans une argile friable, elles forment une espece de breche porphyroide. L'argile muriatifere n'offre ni les paillettes de mica, ni les empreintes de fougeres de l'argile schisteuse des houilles: on y trouve cependant quelquefois (Hallstadt, Wieliczka) des coquilles pelagiques. Le sel gemme se presente de deux manieres, ou dissemine en parcelles plus ou moins visibles dans le salzthon, ou formant des couches epaisses alternant avec des couches argileuses. Cette disposition differente determine le maximum (Wieliczka) ou le minimum (Ischel) de richesse dans les mines; elle decide si le sel doit etre exploite en grandes masses (lapidicinorum modo, dit Pline, caeditur sal nativum), ou en lessivant la roche par l'introduction des eaux douces dans des chambres souterraines. Lorsque le muriate de soude gris de fumee est dissemine en grains arrondis ou en petites lames, ou d'une maniere insensible a l'oeil, il n'en forme pas moins des croautes continues autour des pieces separees du salzthon. Il remplit toutes les fentes qui divisent les masses en fragmens polyedriques. Il en resulte des breches argileuses (Haselgebirge) cimentees par du sel gemme. Quelquefois de grandes masses d'argile (Hall en Tyrol) sont absolument depourvues de muriate de soude; on les croit lessivees par l'action des eaux qui circulent dans la terre, et ce phenomene curieux semble favoriser l'hypothese la plus anciennement adoptee sur l'origine des sources salees. Le gypse grenu, blanc-grisatre, rarement anhydre (muriacite), se trouve par couches plus ou moins epaisses dans le salzthon; il y abonde plus que dans le sel gemme; toujours son volume est de beaucoup inferieur a celui de l'argile. Quelquefois le gypse est mele de calcaire fetide et de cristaux de chaux carbonatee magnesifere (rauten- ou bitterspath). Lorsque le sel ne forme pas de veritables bancs ou des masses cristallines continues, il se trouve dans l'argile comme amas entrelace (Stockwerk), c'est-a-dire, en petits filons qui se croisent, se renflent et se traeinent dans tous les sens. Ses fibres sont perpendiculaires au mur et au toit des filons (Berchtolsgaden). D'autres fois le sel est reparti par couches tres-minces, paralleles entre elles, variees de couleur, sinueuses, generalement verticales (Hallstadt et Hallein), rarement inclinees de moins de 30° (Aussee). Partout ou le gypse grenu manque entierement dans le salzthon, on le trouve remplace par des cristaux epars de gypse speculaire. Toute cette formation salifere renferme quelquefois disseminees des pyrites, de la blende brune et de la galene. A Zipaquira, dans l'Amerique meridionale (mine de Rute), les pyrites et la chaux carbonatee ferrifere forment des concretions particulieres en spheroides aplatis, de 18 a 20 pouces de diametre: ces spheroides sont empates dans le salzthon, et ont au centre des creux de 3 a 4 pouces, remplis de fer spathique cristallise. Je n'ai point observe ce phenomene singulier dans les mines de sel gemme d'Allemagne, de Pologne et d'Espagne, que j'ai visitees; mais la frequence des pyrites dans l'argile muriatifere jette quelque jour sur l'odeur d'hydrogene sulfure qu'exhalent si souvent les sources salees. La galene ne se montre qu'en parcelles dans le depot salifere de Hall en Tyrol; mais elle s'est developpee en grandes masses dans les montagnes de sel gemme (rouge-blanc et gris-noiratre) a travers lesquelles se sont fraye un chemin, sur une distance de deux lieues, le Rio Guallaga et le Rio Pilluana (province peruvienne de Chachapoyas, sur la pente orientale des Andes). Les depots de sel dans les deux continens se trouvent generalement a decouvert, comme les formations d'euphotide et de serpentine. Quelquefois ils supportent de petites couches de gypse et de calcaire fetide qui leur appartiennent exclusivement. Il n'est par consequent pas facile de prononcer sur l'age relatif des depots muriatiferes. La formation principale (Hauptsalzniederlage) me paroeit evidemment appartenir au zechstein ou calcaire alpin; mais cette assertion n'exclut pas la probabilite que d'autres formations partielles se trouvent intercalees aux terrains de transition, peut-etre meme aux terrains tertiaires. Les houilles, les oolithes et les lignites se sont aussi developpes a des epoques tres-differentes les uns des autres; et cependant les geites principaux de ces trois substances sont le gres rouge, le calcaire du Jura et l'argile plastique. Pour traiter cet objet dans sa plus grande generalite, je vais indiquer successivement, d'apres l'etat actuel de nos connoissances, les diverses formations de sel gemme dans le calcaire de transition, dans le zechstein et le gres bigarre avec argile. Le gypse anhydre de Bex, qui renferme du sel gemme dissemine et de petites couches subordonnees de grauwacke, appartient, selon les observations de MM. de Buch et Charpentier, au calcaire de transition, mais probablement aux dernieres couches des terrains intermediaires. De ce meme age paroissent etre aussi le gypse salifere de Colancolan (a l'est d'Ayavaca, Andes du Perou), mele, comme le calcaire de transition de Drammen (Norwege), de tremolithe asbestoide; les petits depots de S. Maurice (Arbonne en Savoie), et, d'apres M. Cordier, la montagne de sel de Cardona en Espagne. Le gypse anhydre caracterise particulierement ces depots saliferes du terrain de transition. Dans l'Allemagne meridionale, sur les bords du Necker (Sulz au-dessus de Heilbronn; Friedrichshall, entre Kochendorf et Jaxtfeld; Wimpfen, audessous de Heilbronn), on a decouvert par des sondes de 245 et de 760 pieds de profondeur, du sel gemme dans le zechstein. Les beaux travaux de MM. Glenk et Langsdorf ne laissent pas de doute a ce sujet. A Sulz on a perce successivement le muschelkalk, la formation d'argile et de gres bigarre, un zechstein poreux, mais de tres-peu d'epaisseur, et le gres rouge, reposant sur le granite de la Bergstrasse et du Schwarzwald. A Friedrichshall et a Wimpfen, d'apres les observations judicieuses de M. de Schmitz, les couches superieures au zechstein manquent entierement, et l'on a trouve dans celui-ci, qui est gris-bleuatre et que, par cette raison, on a souvent confondu avec le calcaire de transition, des couches alternantes de sel gemme, d'argile salifere, et de gypse blanc et grisatre. Dans le grand-duche de Bade, le depot salifere paroeit recouvert (Heinsheim pres Wimpfen, sur le Necker; Stein, Mühlbach et Beyerthal, dans la vallee du Rhin; Kandern, dans le Schwarzwald) des memes roches dont on a reconnu la serie a la saline de Sulz. Je crois pouvoir citer encore comme une preuve bien evidente du gisement de la grande formation de sel gemme dans le zechstein ou calcaire alpin, la partie septentrionale du plateau de Santa-Fe de Bogota, ou la mine de Zipaquira (Rute, Chilco et Guasal) se trouve a 1380 toises d'elevation au-dessus du niveau de la mer. Ce depot salifere, de plus de 130 toises d'epaisseur, est recouvert de grandes masses de gypse grenu, gypse que l'on voit intercale, sur plusieurs points tres-voisins de la mine, au zechstein supporte par le gres rouge ou houiller. Il n'y a que sept lieues de distance depuis la mine de charbon de terre de Canoas et la mine de sel gemme de Zipaquira. D'autres depots de houilles (Suba, Cerro de Tunjos) sont plus rapproches encore, et l'on voit le gres rouge, qui est tres-quarzeux, sortir immediatement sous l'argile salifere de Zipaquira. Dans le Salzbourg, en Tyrol et en Styrie, il ne m'est reste jamais aucun doute, depuis les premiers temps que j'ai visite ces contrees, sur la liaison intime du sel gemme avec le zechstein. Beaucoup de geognostes celebres (MM. de Buch et Buckland) partagent cette opinion: mais il faut convenir que, partout ou l'age du calcaire n'est pas suffisamment caracterise par la presence du gres houiller, et partout ou le recouvrement du depot salifere par des couches d'un age connu n'est pas evident, le resultat des observations ne peut offrir une entiere conviction. Dans la mine de Hall pres d'Inspruck, on voit (galerie de Mitterberg) le depot de sel gemme immediatement recouvert par la formation calcaire qui constitue la chaeine septentrionale des Alpes du Tyrol. Ce calcaire passe du blanc grisatre au gris bleuatre; les nuances plus obscures sont souvent fetides. Il est generalement compacte, quelquefois un peu grenu a petits grains, et traverse par des veines de spath calcaire blanc. Ces veines sont considerees par quelques geognostes, et peut-etre d'une maniere trop absolue, comme caracterisant le calcaire de transition. La roche n'alterne nulle part ni avec le thonschiefer intermediaire, ni avec le grauwacke: elle forme (Wallersee) des couches sinueuses et arquees, comme le calcaire du lac de Lucerne. M. de Buch y a trouve frequemment des petrifications de turbinites tres-petites. C'est le seul endroit en Europe ou j'ai vu une grande formation calcaire recouvrir immediatement le sel gemme. Je la crois du zechstein, d'apres des analogies de position et de structure; je l'ai vue passer quelquefois (Schlossberg pres Seefeld; Scharnitz) a un calcaire compacte ayant la cassure matte, egale ou conchoide, a cavites tres-aplaties, semblable au calcaire lithographique de la formation du Jura (lias). Les poissons petrifies qu'on rencontre entre Seefeld et Schönitz dans une marne bitumineuse, eloignent encore plus le calcaire de Hall des calcaires de transition; cependant, pour le caracteriser indubitablement comme zechstein, il faudroit le voir reposer sur le gres rouge (todtliegende), qui, d'apres les observations de MM. Uttinger et Keferstein, paroeit superpose aux roches intermediaires entre le Ratenberg et Hering, comme pres des anciennes mines de Schwatz. A Hallstadt (Törringer Berg) et a Ischel, nous avons vu, M. de Buch et moi, le calcaire alpin analogue a celui de Hall, mais avec des teintes plus claires, souvent rougeatres, et plus abondant en petrifications, superpose au gypse qui couvre les depots de sel gemme. Cette superposition est moins evidente a Hallein (mine du Durrenberg) et a Berchtesgaden: le gypse qui couvre l'argile salifere, se cache sous une poudingue calcaire (nagelfluhe) du terrain tertiaire. Les depots de Hallein et de Berchtesgaden m'ont paru, comme celui de Wieliczka en Pologne, non intercales au zechstein, mais superposes a cette formation. Je les crois posterieurs a la grande formation de houille; mais le gres rouge manque dans leur voisinage, et le calcaire du pays de Salzbourg est immediatement superpose (vallee de Ramsau) au grauwacke. M. Buckland regarde les calcaires qui couvrent l'argile salifere a Hallstadt, et meme a Bex, comme appartenant au lias, qui est l'assise inferieure du Jura. Apres le sel gemme des gypses anhydres de transition et apres celui du zechstein vient, selon l'age des formations, le sel du gres bigarre, ou, comme on dit plus exactement, du terrain d'argile et de gres bigarre. Ce terrain arenace, appele par les geognostes anglois nouveau gres rouge et marne rouge (new red sandstone and red marl), renferme les depots de sel (Northwich) de l'Angleterre: il en renferme aussi en Allemagne, soit pres de Tiede (entre Wolfenbüttel et Brunswick), ou MM. Haussmann et Schulze ont trouve de petites masses de sel disseminees dans l'argile rouge du gres bigarre oolithique; soit a Sulz (royaume de Wurtemberg), ou, avant d'avoir atteint les sources salees dans le zechstein, on a rencontre immediatement sous le muschelkalk, a 460 pieds de profondeur, des rognons ou nids de sel dans une argile marneuse (red marl). Cette argile recouvre, dans une epaisseur de 210 pieds, le gres bigarre auquel elle appartient. Comme tout pres de Sulz (a Friedrichshall et Wimpfen) le sel gemme alterne avec des marnes et du gypse intercales au zechstein, on ne peut douter de l'affinite geognostique qui existe entre les deux formations du zechstein et du gres bigarre. Les marnes et argiles saliferes avec gypse grenu se trouvent placees tantot entre le zechstein et le gres, tantot dans l'une et l'autre de ces formations. C'est aussi au terrain d'argile et de gres bigarres qu'appartiennent et le sel gemme de Pampelune en Espagne, examine par M. Dufour, et le riche depot decouvert, en 1819, en Lorraine pres de Vic. Ce terrain d'argile bigarree de Vic renferme de petites couches de muschelkalk, et est recouvert a son tour de calcaire jurassique. L'influence qu'une connoissance plus approfondie du gisement des roches a eue dans ces derniers temps sur les decouvertes du sel en Souabe, en France et en Suisse (Eglisau, canton de Zuric), est un phenomene bien digne de remarque. Je doute qu'on ait jusqu'ici des preuves bien certaines de la presence du sel gemme dans le muschelkalk; car il ne faut pas, comme nous le verrons bientot, deduire ce gisement de la seule presence des sources salees. Le muschelkalk, dans ses couches inferieures, alterne avec la formation d'argile et de gres bigarre: comme il renferme aussi quelquefois (Sulzbourg pres Naumbourg) des marnes avec gypse fibreux, il ne seroit pas bien surprenant que l'on y decouvreit quelques depots saliferes. Des traces de ces depots ont ete observes, pres de Kandern, dans le calcaire jurassique. Existe-t-il des couches de sel dans les terrains tertiaires au-dessus de la craie? Plusieurs phenomenes geognostiques peuvent le faire supposer; et l'on devroit presque etre surpris que les dernieres irruptions de l'ocean dans les continens n'aient pas produit sinon des couches de sel gemme, du moins de l'argile salifere. Cependant, dans l'etat actuel de nos connoissances, le probleme que nous agitons n'est pas suffisamment eclairci. M. Steffens regarde les gypses a boracites de Lunebourg et de Seegeberg (Holstein) comme superieurs a la craie. Le second de ces gypses contient de petites masses de sel gemme disseminees; le premier donne naissance a des sources salees tres-riches et tres-abondantes. D'autres geognostes croient la formation gypseuse a boracites beaucoup plus ancienne que le gypse a ossemens du terrain tertiaire, et presque identique avec les gypses du zechstein et du gres bigarre. Les immenses depots saliferes de Wieliczka et de Bochnia, ceux qui s'etendent depuis la Galicie jusqu'a la Bukowine et en Moldavie, paroissent reposer immediatement sur le gres houiller, renfermant a la fois (et ce fait est assez extraordinaire) du gypse anhydre, des tellines, des coquilles univalves cloisonnees, des fruits a l'etat charbonneux, des feuilles et des lignites; ces depots ne sont recouverts que de sables et de gres micaces. M. Beudant, dans son important ouvrage sur la Hongrie, semble pencher vers l'opinion que ces sables et ces gres sont analogues a la molasse d'Argovie, et que toutes les formations saliferes avec lignites de la Galicie pourroient bien etre contemporaines avec l'argile plastique (gres a lignites) du terrain tertiaire, placee entre la craie et le calcaire grossier de Paris (calcaire a cerites). Ces bois bitumineux de Wieliczka, exhalant l'odeur de truffes, meritent sans doute beaucoup d'attention; et si l'on veut admettre qu'ils ne se sont meles qu'accidentellement au sel gemme et qu'ils sont venus des couches sablonneuses superposees, il faut encore en conclure que le sel gemme et les sables sont d'une origine tresrapprochee. Mais la presence des lignites est-elle une preuve bien convaincante de la grande nouveaute d'une couche? J'en doute. Nous savons que des lignites et des empreintes de feuilles dicotyledones se trouvent bien au-dessous de la craie, et dans les couches inferieures du calcaire du Jura (calcaire a gryphees arquees; Le Vay, Issigny, pres de Caen), et dans le quadersandstein, et dans les petites couches charbonneuses et marneuses (lettenkohle) du muschelkalk, et dans le gres bigarre de l'Allemagne, auquel appartiennent aussi les schistes argentiferes du Frankenberg (Hesse). Il faut distinguer avec soin les bois siliceux et petrifies des vrais lignites ou bois bitumineux (braunkohle); et si l'on ne reconnoeit que bien rarement ceux-ci dans les argiles du gres bigarre, on les trouve bien moins encore dans le zechstein, dont les marnes cuivreuses renferment seulement des fruits petrifies. Dans la Toscane on voit les sources salees du Volterrannois sourdre, d'apres M. Brongniart, de couches marneuses qui alternent avec du gypse grenu (albatre) et qui sont immediatement recouvertes d'un terrain tertiaire. Quoiqu'il paroisse presque impossible de prononcer sur l'age des formations non recouvertes, plusieurs rapports de gisemens que j'ai eu occasion d'observer dans le nouveau continent, me rendent probable l'existence des depots de sel dans le terrain tertiaire. Je ne citerai pas les montagnes de sel gemme dans les vastes plaines au nord-est du Nouveau-Mexique, que M. Jefferson a fait connoeitre le premier, et qui paroissent liees au gres houiller; mais d'autres depots tres-problematiques, savoir, les argiles saliferes superposees a des conglomerats trachytiques de la Villa d'Ibarra (plateau de Quito, a 1190 toises de hauteur), les enormes masses de sel exploitees a la surface de la terre (deserts du Bas-Perou et du Chili) dans les steppes de Buenos- Ayres et dans les plaines arides de l'Afrique, de la Perse et de la Transoxane. Pres de Huaura (entre Lima et Santa, sur les cotes de la mer du Sud) j'ai vu le porphyre trachytique percer les couches du sel gemme le plus pur. L'argile muriatifere d'Araya (golfe de Cariaco), melee de gypse lenticulaire, paroeit placee entre le calcaire alpin de Cumanacoa, et le calcaire tertiaire du Barigon et de Cumana. Sur tous ces points le sel est accompagne de petrole et d'asphalte endurci. En comparant les depots de sel gemme d'Angleterre (a 30 toises), de Wieliczka (160 t.), de Bex (220 t.), de Berchtolsgaden (330 t.), d'Aussee (450 t.), d'Ischel (496 t.), de Hallein (620 t.), de Hallstadt (660 t.), d'Arbonne en Savoie (750 t.?) et de Hall en Tyrol (800 t.), M. de Buch a judicieusement observe que la richesse des depots diminue en Europe avec la hauteur au-dessus du niveau de l'ocean. Dans les Cordilleres de la Nouvelle-Grenade, a Zipaquira, d'immenses couches de sel gemme, non interrompues par de l'argile, se trouvent jusqu'a 1400 toises d'elevation. Il n'y a que la mine de Huaura, sur les cotes du Perou, qui m'ait paru encore plus riche: j'y ai vu exploiter le sel en dales, comme dans une carriere de marbre. En Thuringe, un des pays dans lesquels on a reconnu, le premier, la succession et l'age relatif des roches, on a cru long-temps que les sources salees sont plus frequentes dans le gypse grenu du zechstein que dans le gypse fibreux et argileux du gres bigarre, et on a regarde le premier comme exclusivement salifere. Les cavernes naturelles du gypse inferieur (salzgyps et schlottengyps) ont meme ete considerees comme des cavites jadis remplies de sel gemme. En hasardant ces hypotheses, fondees sur un trop petit nombre d'observations, l'on a oublie que les depots de sel sont beaucoup moins caracterises par le gypse grenu que par une argile (salzthon) tres-analogue a l'argile du gypse superieur ou fibreux. Les sources salees, ou jaillissent reunies par groupes, ou se succedent par bandes (traeinees) sinueuses et diversement alignees. La direction de ces fleuves souterrains paroeit independante des inegalites de la surface du sol. Telle est la circulation des eaux dans l'interieur du globe, que les plus salees peuvent souvent etre les plus eloignees du lieu ou elles dissolvent le sel gemme. Un haut degre de salure ne prouve pas plus la proximite de cette cause, que la violence des tremblemens de terre ne prouve la proximite du feu volcanique. Les sources s'engoufrent tantot dans des couches inferieures; tantot, par des pressions hydrostatiques, elles remontent vers les couches superieures. Ce n'est pas leur position seule qui peut nous eclairer sur le gisement des depots saliferes. Nous connoissons des sources salees, en Allemagne, dans le grauwacke schisteux du terrain de transition (Werdohl en Westphalie); dans le porphyre du gres rouge (Creuznach); dans le gres rouge meme (Neusalzbrunnen pres Waldenburg); dans le gypse du zechstein (Friedrichshall pres Heilbronn; Wimpfen sur le Necker; Durrenberg? en Thuringe); dans la formation d'argile et de gres bigarre (Dax, en France; Schönebeck, Stasfurth, Salz der Helden, en Allemagne), et dans le muschelkalk (Halle? en Saxe; Süldorf, Harzburg). On peut ajouter a cette enumeration le calcaire du Jura (Butz, dans le Frickthal), et peut-etre la molasse (gres tertiaire a lignites) de Suisse (Eglisau; essais de sonde de M. Glenck). Dans la recherche du sel gemme il ne faut pas confondre de veritables depots avec ces petites masses que des sources tres-salees peuvent avoir deposees accidentellement, par evaporation, sur les fentes des rochers. Gypse et calcaire fetide. Des formations de gypse posterieur au gypse de transition (§. 20) se montrent dans toutes les formations calcaires au-dessus du gres rouge, dans le zechstein, dans le gres rouge meme, dans le musckelkalk (tres-rarement), dans le calcaire du Jura et dans le terrain tertiaire. Le gypse (unterer gyps, schlottengyps de Werner) qui appartient au zechstein, se trouve moins en couches tres-etendues qu'en amas irreguliers; souvent (Thuringe) il est superpose au zechstein et recouvert par le gres bigarre. Il est compacte ou grenu, et alterne avec le calcaire fetide (stinkstein), tandis que le gypse du gres bigarre (oberer gyps, thongyps de Werner) est plutot fibreux et mele d'argile. Ces caracteres de structure et de melange ne sont cependant pas generaux. Nous avons rappele plus haut que, dans les gypses saliferes du zechstein, l'argile (salzthon) prend un developpement extraordinaire. D'un autre cote, le gypse fibreux et argileux du gres bigarre offre aussi quelquefois des masses grenues (albatre de Reinbeck, en Saxe), des breches de calcaire fetide, et des cavites spacieuses (gypsschlotten): trois phenomenes qui caracterisent plus generalement le gypse du zechstein. Tous ces phenomenes prouvent l'intimite des rapports qui lient les deux grandes formations saliferes, le calcaire alpin et le gres bigarre avec argile. Sous la zone equinoxiale du nouveau continent j'ai vu de frequens exemples de couches de gypse intercalees ou superposees au zechstein: dans les Llanos de Venezuela (Ortiz, Mesa de Paja, Cachipo); dans la province de Quito (plateau de Cuenca pres Money et entre Chulcay et Nabon); dans le plateau de Bogota (Tunjuellos, Checua, et a plus de 1600 toises de hauteur au-dessus du niveau de la mer, a Cucunuva); dans les plaines de l'Amazone (Quebrada turbia pres Tomependa); au Mexique, entre Chilpansingo et Cuernavaca (pres de Sochipala), et dans les montagnes metalliferes de Tasco et de Tehuilotepec. Les couches de calcaire fetide sont ou subordonnees au gypse et a l'argile muriatifere que renferme le zechstein, ou elles se presentent comme le resultat d'une accumulation accidentelle de bitume dans la roche du zechstein meme. Cette accumulation donne lieu a des sources de goudron mineral, et peut-etre aussi a ces feux d'hydrogene qui sortent du calcaire alpin, en Europe, dans les Apennins (Pietra Mala, Barigazzo); en Amerique, dans les montagnes de Cumanacoa (Cuchivano, lat. 10°6'). Le calcaire fetide se trouve aussi, mais beaucoup plus rarement, dans le gres bigarre et dans le muschelkalk (couches a belemnites de Goettingue?). La cendre (asche) et le rauhkalk des mineurs de Thuringe ne sont que des varietes pulverulentes ou cristallines et poreuses du calcaire fetide appartenant au zechstein. Comme le calcaire fetide est en Europe constamment depourvu de petrifications, je rappellerai ici que dans les plaines de la Nouvelle-Grenade (vallee du Rio Magdalena, entre Morales et l'embouchure du Canno Morocoyo), M. Bonpland a trouve, dans une variete de cette meme roche, qui etoit noir-grisatre, un peu brillante a l'exterieur, fortement bitumineuse et traversee de veines de spath calcaire blanc, des terebratulites et des pectinites. Calcaire magnesifere. Il faut distinguer, en geognosie, entre les couches intercalees au zechstein (gypse, sel gemme, sulfure de plomb), dont la composition chimique differe entierement de celle de la roche principale, et les modifications partielles de cette meme roche. Les modifications qui affectent la structure (le grain plus ou moins cristallin, la forme oolithique, la porosite) et le melange (calcaire magnesifere, calcaire ferrifere), sont moins importantes qu'on ne pourroit le supposer au premier abord. On en trouve des analogies dans des formations d'un age tres-different: elles caracterisent certains terrains dans des cantons de peu d'etendue; mais, lorsqu'on compare des regions tres-eloignees, on voit qu'elles ne les caracterisent pas meme autant que les couches intercalees qui sont chimiquement heterogenes. En Angleterre, la grande masse de calcaire magnesifere (magnesian limestone, red-land-limestone de M. Smith), souvent petrie de madrepores (Mendiphills pres Bristol) et liee a une breche calcaire ou a des couches celluleuses (Yorckshire) semblables au rauchwacke, est sans doute parallele au zechstein; elle est placee entre les formations de houille et de sel gemme: cependant, en Angleterre, comme dans quelques parties du continent, d'apres les recherches de MM. Buckland, Brongniart, Beudant, Conybeare, Greenough et Philipps, le melange de magnesie et de chaux carbonatee, dont Arduin a reconnu l'existence dans le Vicentin des l'annee 1760, se rencontre egalement dans le gres bigarre avec argile (red-marl), dans le calcaire oolithique du Jura, dans la craie et dans le calcaire grossier (parisien) du terrain tertiaire. Peut-etre meme qu'en Hongrie et dans une partie de l'Allemagne les calcaires magnesiferes appartiennent plutot au gres bigarre et aux formations oolithiques du Jura qu'aux zechstein. Ces roches sont en general jaune de paille (de Sunderland a Nottingham) ou blancrougeatre, tantot compactes, tantot un peu grenues, nacrees et brillantes dans la cassure; quelquefois on les trouve celluleuses et traversees par des veines de spath calcaire. Elles font une effervescence lente avec les acides, et, comme la veritable dolomie des terrains primitifs, elles ne forment souvent que de minces couches dans un calcaire non magnesifere. Si, dans le magnesian limestone et dans le red-marl avec sel gemme, deux formations placees entre le depot houiller et le depot oolithique, on reconnoeit en Angleterre le zechstein et le gres bigarre du continent, il ne faut pas oublier qu'en Allemagne et en Hongrie le zechstein est lie au gres rouge ou gres houiller, tandis qu'en Angleterre le depot de houille se trouve generalement en gisement discordant avec le magnesian limestone, et qu'il y appartient presque encore au terrain de transition. Les trois grands depots de houille, de sel et d'oolithes, qui servent, pour ainsi dire, de repaires au geognoste, lorsqu'il essaie de s'orienter dans un pays inconnu, sont partout places de meme; mais l'enchaeinement mutuel des formations et le degre de leur developpement varient selon les localites. Lorsqu'en Angleterre, par la suppression du nouveau conglomerat rouge (todtes liegende), le calcaire magnesifere (zechstein) repose immediatement sur le depot de houilles (Durham, Northumberland), la houille est regardee comme d'une qualite inferieure. Calcaire ferrifere, rauchwacke et calcaire a gryphites. Le calcaire ferrifere (eisenkalk, zuchtwand) est une roche brunatre ou jaune-isabelle, tantot compacte, tantot grenue et caverneuse, penetree de fer spathique, formant des couches dans l'assise superieure du zechstein (Cammsdorf, Schmalkalden, Henneberg). Elle est quelquefois traversee par les schistes cuivreux, et prend un tel developpement qu'elle remplace toutes les assises inferieures du zechstein. Lorsqu'elle devient gris-noiratre, chargee de bitume et caverneuse, on lui donne en Allemagne le nom de rauchwacke. Les cavites du rauchwacke sont anguleuses, longues et etroites, tapissees de cristaux de carbonate de chaux. Cette petite formation partielle, que M. Karsten, dans sa Classification des Roches, avoit confondue avec la partie caverneuse et spongieuse du calcaire du Jura, est quelquefois magnesifere, imparfaitement oolithique (Cresfeld), et melee de quarz grenu. La pierre fetide, le calcaire ferrifere et le rauchwacke sont intimement lies entre eux. C'est au rauchwacke aussi qu'appartient en grande partie cet amas de gryphites (G. aculeatus) que l'on appelle calcaire a gryphees epineuses (gryphitenkalk), qui caracterise le zechstein et qui (comme nous le verrons plus bas) forme une couche plus ancienne que le calcaire a gryphees arquees, qui est une des assises inferieures du calcaire du Jura. Gres. Partout ou le zechstein ou calcaire alpin s'est developpe seul en grandes masses, et n'est par consequent pas intercale au gres rouge, les couches de gres sont tres-rares. J'en ai reconnu cependant quelques-unes dans les montagnes de Cumana (Impossible, Tumiriquiri). Ce gres intercale au zechstein est extremement quarzeux, depourvu de petrifications, et alterne avec des argiles brun-noiratre. M. de Buch a observe un phenomene entierement analogue en Suisse, dans le calcaire alpin du Molesson et dans celui du Jaunthal pres de Fribourg. Dans les Cordilleres du Perou, pres de Huancavelica, a plus de 2000 toises d'elevation au-dessus du niveau de l'ocean (mine de Santa-Barbara), une immense couche de gres aussi quarzeux que le gres de Fontainebleau, et renfermant un depot de mercure, forme une couche dans le calcaire alpin. Meme le zechstein de Thuringe offre quelquefois de petites couches de gres, extremement quarzeuses, qui traversent le schiste cuivreux. Une marne arenacee (weissliegende) se trouve sur les limites du zechstein et du gres rouge. Elle varie beaucoup dans sa composition, et rappelle les bancs de gres du Tumiriquiri dans l'Amerique meridionale. Le weissliegende de Thuringe est generalement calcarifere, et renferme des gres et des conglomerats siliceux. M. Freiesleben y a trouve (Helbra) des concretions globuleuses semblables a celles que j'ai recueillies dans l'argile salifere du zechstein de Zipaquira. Nous rappellerons, a cette occasion, que le calcaire alpin des Pyrenees n'est pas seulement mele de sable et de mica, mais qu'il renferme aussi des bancs de gres argileux. Plomb sulfure, fer hydrate, calamine, mercure. Ces quatre petites formations metalliques caracterisent le zechstein dans les deux hemispheres. La galene argentifere commence deja a se montrer en petites masses dans le schiste cuivreux de la Thuringe: mais, en Silesie et en Pologne, elle forme (Tarnowitz, Bobrownik, Sacrau, Olkusz, Slawkow) des couches tres-etendues dans le zechstein, par consequent au-dessus du riche depot de houille de Ratibor et de Beuthen. Dans ces memes contrees les couches de fer hydrate (Radzionkau) et de calamine (Piekary), paralleles entre elles, sont d'une origine plus recente que la couche de fer sulfure argentifere de Tarnowitz. Deja dans le calcaire grenu et depourvu de coquilles, qui couvre cette derniere couche, on trouve dissemine dans des cavites alongees de petites masses de fer brun et de zinc oxide concretionne. Pres d'Ilefeld au Harz tout le zechstein est impregne de cette derniere substance. Quant aux couches de galene et de calamine du Sauerland, de Brilon, d'Aix-la-chapelle et de Limbourg, elles semblent, d'apres les discussions judicieuses de MM. de Raumer et Noeggerath, malgre leur analogie apparente avec les formations de la Haute-Silesie, appartenir aux terrains de transition les plus recens. On diroit que dans les deux continens il existe une affinite geognostique (ou de gisement) bien remarquable entre les roches calcaires et le plomb sulfure plus ou moins argentifere: nous voyons ce dernier en Europe dans le calcaire intermediaire (filons de Schwatz en Tyrol, et du mountain-limestone de Northumberland, de Yorck et du Derbyshire), et dans le calcaire alpin (couches de la Haute-Silesie et de la Pologne; magnesian limestone de Durham). Sur le plateau de la Nouvelle-Espagne les minerais de plomb du district de Zimapan (Real del Cardonal, Lomo del Toro), de meme que celles de Linnares et du Nouveau-Saint-Ander, appartiennent aussi a des calcaires qui sont meles de pierre fetide et qui succedent immediatement a la formation houillere. La calamine se rencontre dans le calcaire magnesifere de l'Angleterre (Mendiphills) comme dans le zechstein de la Haute-Silesie. Quant aux couches argileuses de fer hydrate, elles offrent, dans le calcaire alpin des Andes du Perou, un caractere particulier; elles sont intimement melees d'argent natif filiforme et de muriate d'argent. Ce melange de fer oxide et d'argent, que nous avons fait connoeitre, M. Klaproth et moi, est connu sous le nom de pacos: il se trouve dans la partie equinoxiale des deux Ameriques, remplissant la partie superieure des filons, et presente dans cette position une analogie bien remarquable avec les masses terreuses et ochracees (non argentiferes) que les mineurs de l'Europe designent vulgairement par le nom de chapeau de fer des filons (eiserne Hut). Le plus riche exemple que je connoisse d'une couche de pacos dans le calcaire alpin, est le depot de la montagne de Yauricocha (Cerro de Bombon, Cordillere peruvienne de Pasco), situe a plus de 1800 toises de hauteur absolue. Quoique les exploitations de ce geite de fer oxide, qui abonde en argent, n'aient generalement atteint jusqu'ici que la profondeur de 15 a 20 toises, elles ont fourni, dans les dernieres vingt annees du dix-huitieme siecle, plus de cinq millions de marcs d'argent. Aux yeux du geognoste experimente ce geite remarquable n'est qu'un developpement particulier des couches de fer hydrate que presente le zechstein de la Haute-Silesie, et qui passent quelquefois (Pilatus et Wallensee en Suisse) au fer lenticulaire. La presence simultanee du mercure dans le gres houiller et dans le calcaire alpin ajoute aux rapports que nous avons indiques entre ces deux formations. En Carniole (Idria), le minerai de mercure se trouve, d'apres MM. Heron de Villefosse et Bonnard, dans un schiste marneux semblable aux marnes cuivreuses du Mansfeld. Au Perou, pres de Huancavelica, le cinabre est en partie dissemine dans le gres extremement quarzeux qui forme une couche (Pertinencias del Brocal, de Comedio et de Cochapata, mine de Santa-Barbara) dans le calcaire alpin; en partie il remplit des filons (montagne de Sillacasa) qui se reunissent en amas et traversent immediatement le calcaire alpin. Apres avoir nomme cette grande variete de veritables couches que renferme la formation dont nous tachons de faire connoeitre les rapports de gisement, de structure et de composition, il me reste a indiquer les substances qui s'y trouvent simplement disseminees. Je me bornerai a nommer le silex, le cristal de roche et le soufre. Le silex commun (hornstein), tres-rare dans le zechstein des plaines (Thuringe), caracterise ce meme terrain dans la region alpine des Pyrenees, de la Suisse (Mont Bovon, la Rossiniere), du Salzbourg et de la Styrie (au-dessus de Hallstadt; Potschenberg; Goisern); il passe souvent au jaspe et au silex pyromaque (feuerstein). En Europe, le silex du calcaire alpin ne se trouve que par rognons ou par nodules souvent disposes sur une meme ligne; mais, dans les Cordilleres du Perou, au milieu des riches mines d'argent de Chota (pres de Micuipampa, lat. austr. 6° 43' 38"), le silex forme une couche d'une epaisseur prodigieuse. La montagne de Gualgayoc, qui s'eleve comme un chateau fort sur un plateau de 1800 toises de hauteur, en est entierement composee. Le sommet de cette montagne est termine par une innombrable quantite de petits rochers pointus, ayant chacun de larges ouvertures que le peuple appelle fenetres (ventanillas). Le silex (panizo) de Gualgayoc est un hornstein ecailleux, blanc-grisatre, a cassure matte, souvent unie, intimement mele de fer sulfure. Il passe tantot au quarz, tantot a la pierre a fusil. Dans le premier cas il est celluleux, a cavites irregulieres, tapissees de cristaux de quarz. De grandes masses de ce panizo, dans lequel des filons d'argent gris et rouge et des filons de fer magnetique forment des amas entrelaces d'une richesse extraordinaire, ressemblent au calcaire siliceux du terrain tertiaire de Paris; mais on voit clairement, dans plusieurs de ces mines (Choropampa, a l'est du Purgatorio pres du ravin de Chiquera), que ce hornstein metallifere est une couche de forme irreguliere, intercalee au zechstein ou calcaire alpin. Il enchasse de grandes masses calcaires, et alterne quelquefois (Socabon de Espinachi) avec cette meme argile brun-noiratre et schisteuse que l'on trouve dans le calcaire alpin de Montan, et qui rend les filons entierement steriles. Le hornstein est depourvu des coquilles qui abondent dans la roche principale et qui remplissent meme quelquefois les filons. Une enorme masse de matiere siliceuse, qu'on trouve comme fondue au milieu d'un calcaire secondaire, a couches arquees et renfermant des ammonites de 8 -- 10 pouces de diametre, est sans doute un phenomene geognostique bien remarquable. Existe-t-il (environs de Florence) des rognons de silex corne dans les calcaires de transition? De quel age sont les calcedoines et les jaspes dissemines dans les Monti Madoni de Sicile? Le calcaire alpin de Cumanacoa (Amerique meridionale) renferme, comme celui de Grosörner (Thuringe), des cristaux de roche dissemines. Ces cristaux ne se trouvent pas dans des cavites, mais enchasses dans la roche, comme le feldspath l'est dans le porphyre, et comme le cristal de roche ou le boracite le sont dans des gypses modernes. Le soufre natif, que nous avons deja vu dans le quarz grenu du terrain primitif et dans le gypse de transition (Sublin pres de Bex), reparoeit dans le calcaire alpin (Pyrenees, pres d'Orthes et pres de la forge de Bielsa; Sicile, Val de Noto et Mazzara), et dans le gypse feuillete (Nouvelle-Espagne, Pateje pres Tecosautla) qui appartient a cette derniere formation. Cependant la majeure partie du soufre dont abondent les regions equinoxiales de l'Amerique, se rencontre dans les trachytes porphyriques et dans les argiles du terrain pyrogene. Les operations de Bouguer et de La Condamine ayant ete faites dans une portion des Andes ou dominent les formations de trachytes, il s'est repandu en Europe, parmi beaucoup de fausses idees sur la structure des Cordilleres, celle de l'absence des coquilles et des formations calcaires dans la region equinoxiale. Encore vers la fin du dix-huitieme siecle, l'Academie des sciences invita M. de La Peyrouse (Voyage, T. I, p. 169) de rechercher, "s'il est vrai que pres de la ligne, ou plus que l'on s'en approche, les montagnes calcaires s'abaissent jusqu'a n'etre plus qu'au niveau de la mer." Dans des ouvrages plus recens ( Greenough, Crit. examination of Geology, p. 288) on revoque en doute l'existence des ammonites et des belemnites dans l'Amerique du Sud. En faisant connoeitre la superposition des roches en differentes parties du nouveau continent, j'ai indique a quelle hauteur prodigieuse s'elevent les couches coquillieres de zechstein dans les Cordilleres du Perou et de la Nouvelle- Grenade. Il ne faut pas croire que les grandes revolutions qui ont enseveli les animaux pelagiques, se soient bornees a tel ou tel climat. Dans les regions les plus eloignees les unes des autres nous trouvons, dans la formation du zechstein ou calcaire alpin, des gryphites (G. aculeata), des entroques (formant d'apres l'observation curieuse de M. de Buch, dans beaucoup de parties de l'Allemagne, une couche distincte sur la limite du calcaire alpin et du gres houiller); des terebratulites (T. alatus, T. lacunosus, T. trigonellus); des pentacrinites d'une grande longueur; un trilobite du schiste cuivreux, qui, generiquement, n'est peut-etre point encore suffisamment examine (T. bituminosus); des ammonites (plus rares que dans le muschelkalk et dans les marnes du calcaire du Jura); quelques orthoceratites; des poissons qui avoient deja fixe l'attention des anciens ( Aristot., Mirab. auscultat., ed. Beckmanniana, c. 75; Livius, lib. 42 ,c. 1); des ossemens de monitor, peut-etre meme (Tocayma et Cumanacoa dans l'Amerique meridionale) de crocodiles; des empreintes de lycopodiacees et de bambusacees; point de vraies fougeres, mais, ce qui est tres-remarquable (marnes bitumineuses de Mansfeld), des feuilles de plantes dicotyledones analogues aux feuilles du saule. On observe que les coquilles du calcaire alpin (Ammonites ammonius, A. amaltheus, A. hircinus, Nautilites ovatus, Pectinites textorius, Pectinites salinarius, Gryphites gigas, G. aculeatus, G. arcuatus, Mytulites rostratus) sont moins disseminees dans la masse entiere de la roche, comme c'est le cas dans les deux formations du muschelkalk et du calcaire du Jura, qu'accumulees sur certains points, et souvent a de grandes hauteurs. Sur des etendues de pays tres-considerables, le calcaire alpin paroeit quelquefois depourvu de debris organiques. Nous avons indique dans les pages precedentes les formations de l'Amerique equinoxiale qui appartiennent au zechstein. Ce sont, dans la chaeine du littoral de Caracas, les calcaires de Punta Delgrada, de Cumanacoa et du Cocollar, renfermant, non du grauwacke, mais du gres quarzeux et des marnes carburees; dans la Nouvelle-Grenade, le calcaire de Tocayma et du plateau de Bogota, supportant le sel gemme de Zipaquira; dans les Andes de Quito et du Perou, les calcaires de la province de Jaen de Bracomoros, de Montan et de Micuipampa, places sur le gres houiller et enchassant d'enormes masses de silex; dans la Nouvelle-Espagne, les calcaires du Peregrino, de Sopilote et de Tasco, entre Mexico et Acapulco. Plusieurs de ces masses calcaires d'une enorme epaisseur, et supportant des formations de gypse et de gres, sont superposees, non au gres houiller, mais a des porphyres de transition tres-metalliferes et lies, du moins en apparence, sur quelques points, a un terrain decidement trachytique. On observe, dans le nouveau continent comme dans l'ancien, que, la ou le calcaire alpin a pris un grand developpement, le gres houiller manque presque entierement, et vice versa. Cet antagonisme dans le developpement de deux formations voisines m'a frappe surtout a Guaxanuato (plateau central du Mexique) et a Cuenca (plateau central de Quito), ou abondent les gres houillers: il m'a frappe dans les Cordilleres de Montan (Perou) et a Tasco (Nouvelle- Espagne), ou abonde le calcaire alpin. Quand le gres houiller, nous le repetons ici, n'est point visible ou qu'il ne s'est pas developpe, les limites entre le calcaire alpin et le calcaire de transition sont tres-difficiles a tracer. En excluant du terrain secondaire tous les calcaires bleu-grisatre traverses par des veines de spath calcaire blanc et par des couches d'argeile et de marnes, les formations de Cumanacoa, de Tasco et de Montan (Venezuela, Perou et Mexique), comme celles des Alpes les plus septentrionales du Tyrol et du Salzbourg, deviendroient des formations de transition. J'incline a croire que les formations que nous venons de nommer, de meme que celles du Mole, du Haacken et du Pilatus, sont les plus anciennes couches du zechstein, qui se lient au calcaire de transition de la Dent de Midi, de l'Oldenhorn et de l'Orteler. Beaucoup de roches se succedent par un developpement progressif, et il paroeit tout naturel que les dernieres assises d'une formation plus ancienne offrent une grande analogie de structure avec les premieres assises de la formation superposee. On a recemment voulu placer parmi les couches intercalees au zechstein ou calcaire alpin des grünstein et des dolerites, que nous connoissons deja comme subordonnees au gres houiller dans plusieurs parties de l'Europe; on a meme indique, comme superpose aux calcaires alpin et jurassique, des syenites, des porphyres et des granites secondaires. Ce sont la les roches de la partie sud-est du Tyrol (vallees de Lavis et de Fassa; Recoaro) sur lesquelles le comte Marzari- Pencati a publie de si curieuses observations. Le gisement de ces substances etant encore un point de geologie tresconteste, je dois me borner ici a presenter les donnees du probleme et l'etat d'une question si digne de l'attention des geognostes. Deja M. de Buch avoit remarque, en 1798, qu'entre Pergine et Trento (Lago di Colombo, Monte-Corno) le porphyre de transition (ou plutot celui du gres rouge?) alterne avec le calcaire alpin du terrain secondaire. Ce calcaire est rempli d'ammonites et de terebratulites. L'alternance est evidente, et les porphyres, si communs partout ailleurs dans le gres houiller, debordent ici dans le calcaire alpin, de meme que sur le revers oriental des Andes du Perou (Chamaya) j'ai vu deborder dans cette meme formation la roche de quarz compacte qui represente le gres houiller. C'est une penetration du terrain inferieur dans un terrain superpose: phenomene qui peut d'autant moins nous surprendre, qu'en Silesie, en Hongrie et dans plusieurs parties de l'Amerique equinoxiale le gres rouge ou gres houiller est intimement lie au zechstein. Les porphyres du Tyrol meridional s'elevent (montagne de Forna) jusqu'a 1500 toises de hauteur. ( Buch, Geogn. Beob., T. I, p. 303, 309, 315, 316.) M. de Marzari, dont les recherches ont commence en 1806, croit avoir vu se succeder de bas en haut, dans les environs de Recoaro, du micaschiste, de la dolerite (remplissant en meme temps les filons qui traversent le micaschiste, et renfermant du pyroxene et du fer titane); du gres rouge avec houille et marnes bitumineuses; du zechstein, dont les couches inferieures sont un calcaire a gryphites; une formation de porphyres syenitiques avec des amygdaloides intercalees. Dans la vallee de Lavis (Avisio), M. de Marzari indique, toujours de bas en haut, du grauwacke, du porphyre, du gres rouge, du calcaire alpin, du calcaire du Jura, du granite et des masses noires pyroxeniques depourvues d'olivines. D'apres l'interessant memoire publie par M. Breislak, le granite secondaire place sur le calcaire alpin est entierement semblable au plus beau granite d'Egypte: il renferme (Canzacoli delle coste, Pedrazzo) de grandes masses de quarz avec tourmaline; il rend grenu a son contact (a plusieurs toises de profondeur) le calcaire qui le supporte, et passe tantot a une roche pyroxenique, tantot a un porphyre a base feldspathique noire, tantot a la serpentine. ( Marzari, Cenni geologici, 1819, p. 45; Id., Nuevo osservatore Veneziano, 1820, n.° 113 et 127; Breislak, Sulla giacitura delle rocce porfiritiche e granitose del Tirolo, 1821, p. 22, 25, 52; Marzari, Lettera al signor Cordier, 1822, p. 3; Maraschini, Obs. geogn. sur le Vicentin, 1822, p. 17.) Entre la Piave et l'Adige un mandelstein agathifere, qui rappelle ceux du gres rouge, surmonte le calcaire alpin: c'est, dit-on, une formation parallele aux couches du granite secondaire. Un excellent geognoste, M. Brocchi, qui a publie des l'annee 1811 un memoire sur la vallee de Fassa, n'a pas seulement vu des grünstein en partie pyroxeniques couvrir des calcaires qu'il croit de transition, mais qui passent dans leurs couches superieures au calcaire alpin avec silex; il a reconnu aussi ces grünstein pyroxeniques comme alternant avec les calcaires (Melignon, Fedaja). Recemment M. de Marzari a annonce avoir vu (Grigno de la Piave, Cimadasta) le granite et le mandelstein agathifere surmonter le terrain de craie, et se ranger parmi les roches tertiaires. Je consigne ici des faits de gisement bien extraordinaires, et sur lesquels sans doute M. de Buch, qui a visite recemment la vallee de Fassa, va repandre un nouveau jour. Les rapports de gisement de ces contrees paroissent tres-compliques. La roche dans laquelle les grünstein et les dolerites se trouvent intercales, est-elle bien certainement du zechstein, ou appartient-elle au terrain de transition? Ces grünstein et ces dolerites se trouvent-ils en couches ou en filons? Les roches feldspathiques grenues (appelees syenites et granites a trois elemens) sont-elles oryctognostiquement analogues aux roches homonymes de Christiania, ou sont-elles des trachytes? En admettant que la superposition des roches ait ete observee avec precision, et que les divers terrains aient ete bien nommes, on verroit se repeter ici, dans des formations secondaires, les phenomenes que MM. de Buch et Haussmann ont fait connoeitre les premiers dans la serie des formations intermediaires. L'alternance de roches sedimentaires, arenacees et cristallines, continueroit, comme par series periodiques, jusque vers les terrains les plus modernes. Nous savions deja, par les belles observations de MM. Mac-Culloch et Boue, qu'en Ecosse et dans plusieurs parties du continent des roches grenues, porphyriques, syenitiques et pyroxeniques, penetrent du terrain de transition dans le gres houiller. Le calcaire alpin est immediatement superpose a la formation de porphyre et de gres rouge; il est geognostiquement lie avec cette formation. D'apres ces donnees il ne seroit pas tres-surprenant, ce me semble, de voir intercale au calcaire alpin ces memes couches cristallines (amphiboliques et feldspathiques) que l'on a deja reconnues dans le gres houiller. La geognosie positive doit offrir un enchaeinement de faits bien observes et judicieusement compares entre eux. Elle n'enseigne pas que la repetition de certains types cristallins s'arrete necessairement au gres houiller. Les observations de M. de Marzari ne renverseront par consequent aucune loi geognostique. Si elles sont confirmees par des recherches ulterieures, elles agrandiront plutot nos vues sur ce phenomene curieux d'alternance dans des formations les plus eloignees les unes des autres. Comme des filons remplis de grünstein, de syenites et de masses pyroxeniques, traversent, dans plusieurs parties des deux continens, les granites primitifs, les thonschiefer, les porphyres de transition, les calcaires secondaires et meme les formations superieures a la craie, plusieurs geognostes celebres ont soupconne que les roches problematiques des rives de l'Avisio (Lavis) pourroient bien etre des masses volcaniques, des coulees de laves venues d'en-bas (de l'interieur de la terre) par des crevasses. Ce soupcon paroeit fortifie par l'analogie des roches cristallines, que l'on assure etre indifferemment superposees a des formations d'un age tres-different (au calcaire alpin, au calcaire du Jura et a la craie); mais les grandes masses de quarz qui entrent dans la composition des roches appelees par MM. de Marzari et Breislak granites secondaires, semblent eloigner ces roches problematiques des productions modernes des volcans. Il faut esperer que des observations souvent repetees sur les lieux vont bientot lever tous ces doutes. L'incredulite dedaigneuse est aussi funeste aux sciences qu'une trop grande facilite a adopter des faits incompletement observes. Il faudra surtout distinguer entre des masses (trachytiques?) qui se sont repandues sur des formations secondaires et qui seulement leur sont superposees, et des masses (amphiboliques, pyroxeniques, syenitiques) qui pourroient leur etre intercalees. Cette difference de gisement seule peut etre l'objet d'une observation directe; le probleme de l'origine des couches cristallines superposees ou intercalees appartient a la geogonie. Beaucoup de roches tres-anciennes ne sont peut-etre aussi que des nappes de matieres fondues; et les questions geogoniques auxquelles donnent lieu les roches de Fassa, peuvent en partie s'appliquer aux porphyres et aux grünstein pyroxeniques intercales au gres houiller. Il faut decrire dans chaque formation ce qu'elle renferme et ce qui la caracterise. La geognosie positive s'arrete a la connoissance des gisemens. III. Depots arenaces et calcaires (marneux et oolithiques) places entre le zechstein et la craie, et lies a ces deux terrains. En remontant depuis le terrain de transition par les roches secondaires au terrain tertiaire, le phenomene de l'alternance entre des couches calcaires et arenacees devient de plus en plus frappant. On voit alterner d'abord des calcaires intermediaires blancs et cristallins (Tarantaise), ou compactes et carbures, avec des grauwackes; puis se succedent le gres rouge, le calcaire alpin ou zechstein, le gres bigarre (red marl), le muschelkalk (calcaire de Goettingue), le quadersandstein (gres de Königstein), le calcaire du Jura (formation oolithique), le gres vert ou gres secondaire a lignites (green sand), la craie, le gres tertiaire a lignites (argile plastique), le calcaire parisien, etc. Je rappelle ici six alternances de douze formations intermediaires, secondaires et tertiaires (arenacees et calcaires), d'apres leur anciennete relative, comme si, dans un seul point de la terre, ces roches s'etoient toutes simultanement developpees. Par la suppression frequente de quelques-unes d'elles, surtout du gres bigarre, du muschelkalk et du quadersandstein, le calcaire (oolithique) du Jura repose parfois immediatement sur le calcaire alpin (Andes du Mexique et du Perou, Pyrenees, Apennins). Les depots que nous reunissons dans cette troisieme grande division (§§. 29--33), forment a peu pres tout le terrain de sediment moyen de M. Brongniart. J'ai craint d'employer les denominations qui ont rapport a des limites si differemment tracees par les geognostes modernes. M. Conybeare, dans l'excellent ouvrage qu'il a recemment publie avec M. Philipps sur la Geologie de l'Angleterre, distingue les terrains en surmoyens, moyens et sousmoyens (supermedial, medial et submedial). Tant de divisions systematiques ajoutent peut-etre a la difficulte qu'offre deja la synonymie des roches. Argile et Gres bigarre (Gres a oolithes; Gres de Nebra; New red sandstone et Red marl) avec gypse et sel gemme. §. 29. Le gres de Nebra ou gres bigarre (Thuringe) et le red marl de l'Angleterre (depuis les rives du Tees en Durham jusqu'aux cotes meridionales du Devonshire) ne sont pas seulement des formations paralleles, c'est-a-dire, du meme age et occupant la meme place dans la serie des roches: ce sont des formations identiques. Le premier, assez pauvre en petrifications (Strombites speciosus, Pectinites fragilis, Mytulites recens, Gryphites spiratus, Schl.), est un terrain compose de trois series de couches alternantes; savoir: 1. ° d'argiles; 2. ° de gres micaces et schisteux, avec masses de glaise a formes aplaties et lenticulaires (thongallen); 3. ° d'oolithes generalement brun-rougeatres. On trouve dans le gres bigarre du continent, en bancs subordonnes, du gypse (thongyps), quelquefois lamelleux, le plus souvent fibreux, et depourvu de calcaire fetide. Nous avons vu plus haut qu'en Allemagne et en France un grand nombre de sources salees coulent sur ces bancs d'argile et de gypse, et qu'a Thiede, entre Wolfenbüttel et Brunswic, comme a Sulz pres Heilbronn, de petites masses de sel gemme sont disseminees dans cette formation, qui, a Sulz, a ete atteinte par la sonde apres le muschelkalk et avant le zechstein. Le red marl (red ground, red rock, red ford), si bien examine par MM. Winch et Greenough, depourvu de petrifications et de bancs d'oolithes, et coupe par des fissures en masses rhomboidales, est en Angleterre le veritable geite du sel gemme: il se compose dans ses assises superieures d'argiles marneuses, de gypse (albatre) et de sel (Witton pres Northwich; Droitwich); dans ses assises inferieures, soit de conglomerats avec galets de roches primitives et de transition, soit de gres a petits grains (entre Exeter et Exminster). Le sel gemme d'Angleterre, de Lorraine et du Wurtemberg, lie la formation de gres et d'argiles bigarres, vers le bas, au zechstein et au calcaire alpin; vers le haut, dans le nord de l'Allemagne, cette formation passe au muschelkalk, dont les couches les plus anciennes sont un peu arenacees. On pourroit dire aussi que les oolithes du gres bigarre (Eisleben, Endeborn, Bründel) et ses marnes preludent a la formation du Jura: mais ces oolithes brun-rougeatres se perdent insensiblement en une roche arenacee; elles different essentiellement des oolithes blanches et blanc-jaunatres du calcaire du Jura. Sur le continent, le gres bigarre est tresdistinct du zechstein, malgre les traces de sel qui le lient a cette derniere formation: en Angleterre, le red marl, le calcaire magnesien et les conglomerats d'Exeter et de Teignmouth (Devonshire), qui, sous le nom de nouveau conglomerat rouge, representent le gres houiller du Mansfeld, sont aussi intimement lies entre eux que le sont les depots de houille avec les roches de transition (mountain limestone et old red sandstone). En decrivant plus haut le gres rouge de la Nouvelle-Grenade, j'ai discute les nuances de composition et de structure qui distinguent cette formation houillere du gres bigarre (bunte sandstein), par rapport aux couches intercalees de sables, d'argiles schisteuses et de conglomerats a gros grains. Ces conglomerats, qui caracterisent les assises inferieures du red marl, se retrouvent dans la chaine des Vosges. Les strates superieurs du gres bigarre sont verts; on les croit colores par le nickel et le chrome. Ils sont quelquefois meles de petites lames de baryte sulfatee (Mariaspring pres Goettingue). Couches subordonnees: 1. ° Gypse argileux un peu chloriteux, avec des aragonites (Bastene pres de Dax), avec des cristaux de roche incolores (Langensalze, Wimmelburg), ou rouges (Dax), et avec du soufre, dissemines (entre Gnölbzig et Naundorf); ce gypse a ete regarde jadis comme une formation particuliere placee entre le gres bigarre et le muschelkalk (Cresfeld et Helbra en Saxe, Dölau en Franconie, Neuland pres Löwenberg en Silesie; Amajaque au Mexique): 2. ° calcaires en lits minces, tantot marneux, tantot magnesiferes: 3. ° argile impregnee de goudron mineral (Kleinscheppenstedt pres Brunswic): 4. ° sables (triebsand) avec de grands chamites et du bois petrifie (Burgörner): 5. ° gres extremement quarzeux, presque sans ciment visible, tres-caracteristique tant pour le gres bigarre que pour l'argile plastique qui environne les coulees de basaltes: 6. ° mine de fer brune souvent en geodes: 7. ° traces de houilles, peut-etre meme de lignites, qu'il ne faut point confondre avec les depots analogues du quadersandstein et des gres secondaires et tertiaires a lignites (au-dessous et au-dessus de la craie). On assure avoir trouve des branches d'arbre charbonisees dans les argiles avec gypse d'Oberwiederstedt en Thuringe; aussi les schistes argentiferes de Frankenberg (Hesse), qui ne sont que des phytolithes charbonises, enduits et penetres de metaux, paroissent a plusieurs geognostes appartenir au gres bigarre. M. Boue, dont les obligeantes communications ont si souvent enrichi mes travaux, observe que le gres bigarre existe par lambeaux dans le sudouest de la France: il y est represente par des marnes et des gypses fibreux ou compactes (Cognac, S. Froult pres Rochefort), et quelquefois immediatement recouvert de calcaire jurassique et de craie grossiere. Au pied des Pyrenees, entre S. Giron et Rimont, le gres bigarre a pris un developpement considerable. Comme dans la partie des Andes que j'ai parcourue, les formations du terrain secondaire, c'esta-dire, celles qui sont superieures au calcaire alpin, ne se sont presque pas developpees, je ne crois avoir bien reconnu le gres bigarre que dans les points suivans. Au Mexique, en descendant des montagnes composees de porphyres intermediaires et eminemment metalliferes (Real del Monte et de Moran) vers les bains chauds de Totonilco el Grande, on trouve une formation puissante de calcaire gris-bleuatre, presque depourvue de coquilles, generalement compacte, mais enchassant des couches tres-blanches et grenues a gros grains. Ce calcaire, celebre par ses cavernes (Dantö ou la Montagne percee), et rempli de filons de plomb sulfure, me paroeit un terrain de transition. Il est couvert d'une autre formation, gris-blanchatre et entierement compacte, qui ressemble au zechstein. Sur cette derniere repose le gres argileux (bunte sandstein), dont les assises superieures sont (pres d'Amajaque) des argiles avec gypse feuillete. Je pense que le gres enchassant des masses aplaties d'argile (thongallen), pres de La Veracruz, et renfermant (Acazonica) un beau gypse feuillete, appartient aussi, comme le gypse d'Amajaque, au gres bigarre. Peut-etre cette formation de Veracruz fait-elle le tour des cotes orientales, et se lie-t-elle aux depots calcaires de Nuevo-Leon, riche en galenes foiblement argentiferes. Dans les Llanos ou steppes de Venezuela, les gypses argileux (Cachipo, Ortiz) sont certainement posterieurs au gres houiller; mais, si le calcaire qui les separe (entre Tisnao et Calabozo), loin d'etre du zechstein, est, comme sa cassure unie et son aspect de calcaire lithographique sembleroient l'indiquer, de formation jurassique, ces gypses des Llanos seroient plus modernes encore que ceux du gres bigarre. A Guire (cotes orientales de Cumana), un gypse blanc et grenu (jurassique?) contient de grandes masses de soufre. Les argiles saliferes melees de gypses et de petrole de la peninsule d'Araya, vis-a-vis l'eile de la Marguerite, sont placees entre le zechstein et un terrain tertiaire. Comme des gypses sont renfermes dans ce dernier terrain (colline du chateau S. Antoine, a Cumana; plaines entre Turbaco et Carthagene des Indes), on pourroit croire que les argiles saliferes d'Araya sont aussi beaucoup plus recentes que le red marl ou gres bigarre. Mais je n'ose prononcer avec certitude sur l'age de ces formations, dans l'absence de tant de roches que l'on trouve placees ailleurs entre le zechstein et les terrains tertiaires. Les gypses que j'ai examines dans l'interieur de la Nouvelle- Grenade (plateau de Bogota; Chaparal, a l'ouest de Contreras) m'ont tous paru de la formation du calcaire alpin. Lorsqu'on examine le terrain §. 29 dans des contrees si eloignees les unes des autres, on trouve la denomination de gres bigarre tout aussi bizarre que la denomination de gres rouge. On peut substituer a la derniere celle de gres houiller, en rappelant un des resultats les plus generaux et les plus positifs de la geognosie moderne. Il seroit a desirer qu'un geognoste d'une grande autorite substituat un nom geographique a celui de gres bigarre ou gres a oolithes brunes. Je continuerai jusque-la a me servir de la denomination de gres de Nebra. Muschelkalk (Calcaire coquillier; Calcaire de Goettingue). §. 30. Formation peu variable, et que la denomination beaucoup trop vague de calcaire coquillier a fait confondre, hors de l'Allemagne, avec les assises inferieures ou superieures du calcaire jurassique (avec le lias ou le forest marbre et portlandstone). Elle est bien caracterisee par sa structure plus simple, par la prodigieuse quantite de coquilles en partie brisees qu'elle renferme, et par sa position au-dessus du gres de Nebra (bunte sandstein) et au-dessous du quadersandstein qui la separe du calcaire jurassique. Elle remplit une vaste partie de l'Allemagne septentrionale (Hanovre, Heinberg pres de Goettingue; Eichsfeld, Cobourg; Westphalie, Pyrmont et Bielfeld), ou elle est plus puissante que le zechstein ou calcaire alpin. Dans l'Allemagne meridionale elle s'etend sur tout le plateau entre Hanau et Stutgard. En France, ou, malgre les grands et utiles travaux de M. Omalius d'Halloy, les formations secondaires qui sont inferieures a la craie, ont ete si long-temps negligees, MM. de Beaumont et Boue l'ont reconnue tout autour de la chaeine des Vosges. Le muschelkalk a generalement des teintes pales, blanchatres, grisatres ou jaunatres: sa cassure est compacte et matte; mais le melange de petites lames de spath calcaire, provenant peut-etre de debris de petrifications, le rend quelquefois un peu grenu et brillant. Plusieurs couches sont marneuses, arenacees, ou passant a la structure oolithique (Seeberg pres de Gotha; Weper pres Goettingue; Preussisch-Minden; Hildesheim). Des hornstein, passant au silex pyromaque et au jaspe (Dransfeld, Kandern, Saarbrück), sont ou dissemines par nodules dans le muschelkalk, ou y forment de petites couches peu continues. Les assises inferieures de cette formation alternent avec le gres bigarre (entre Bennstedt et Kelme), ou se lient insensiblement au gres, en se chargeant de sable, d'argile et meme (a l'est de Cobourg) de magnesie (bancs magnesiferes du muschelkalk). Couches subordonnees. Les marnes et argiles, si frequentes dans le calcaire jurassique, le gres bigarre et le zechstein, sont assez rares dans le muschelkalk. En Allemagne, cette roche renferme du fer hydrate, un peu de gypse fibreux (Sulzbourg pres Naumbourg), et de la houille (lettenkohle de Voigt; a Mattstedt et Eckardsberg pres Weimar) melee de schiste alumineux et de fruits (de coniferes?) charbonnes. Plus les houilles avancent vers le terrain tertiaire, plus elles se rapprochent, du moins dans quelques-uns de leurs strates, de l'etat de lignite et de terre alumineuse. Petrifications. D'apres les recherches de M. de Schlottheim, et en rejetant les couches qui n'appartiennent pas au muschelkalk: Chamites striatus, Belemnites paxillosus, Ammonites amalteus, A. nodosus, A. angulatus, A. papyraceus, Nautilites binodatus, Buccinites gregarius, Trochilites laevis, Turbinites cerithius, Myacites ventricosus, Pectinites reticulatus, Ostracites spondyloides, Terebratulites fragilis, T. vulgaris, Gryphites cymbium, G. suillus, Mytulites socialis, Pentacrinites vulgaris, Encrinites liliiformis, etc. Quelques couches isolees du calcaire jurassique renferment peut-etre plus de petrifications encore que le muschelkalk; mais dans aucune formation secondaire les debris de corps organises n'abondent si uniformement que dans celle que nous venons de decrire. Une immense quantite de coquilles, en partie brisees, en partie bien conservees, mais adherant fortement a la matiere pierreuse (entroques, turbinites, strombites, mytulites), est accumulee en plusieurs strates de 20 a 25 millimetres d'epaisseur, qui traversent le muschelkalk. Beaucoup d'especes se trouvent reunies par familles (belemnites, terebratulites, chamites). Entre ces strates eminemment coquilliers sont dissemines des ammonites, des turbinites, quelques terebratulites avec leur test nacre, le Gryphaea cymbium, et de superbes pentacrinites. Les coraux, les echinites et les pectinites sont rares. L'abondance des entroques dans le muschelkalk a fait donner a cette formation, dans quelques parties de l'Allemagne, le nom de calcaire a entroques (trochitenkalk). Comme une couche d'entroque caracterise souvent aussi le zechstein et le separe du gres houiller, cette denomination peut faire confondre deux formations tres-distinctes. La denomination de calcaire a gryphees (graphytenkalk du zechstein et du calcaire du Jura), et toutes celles qui font allusion a des corps fossiles, sans indication d'especes, exposent a ce meme danger. On assure que le muschelkalk renferme des ossemens de grands animaux (quadrupedes ovipares? Freiesleben, T. I, p. 74; T. IV, p. 24, 305) et d'oiseaux (ornitholithes du Heimberg: Blumenbach, Naturgesch., 3te Aufl., p. 663); mais ces ossemens pourroient bien appartenir, de meme que les dents de poisson, a des breches ou a des marnes superposees au muschelkalk. De celebres geognostes anglois, MM. Buckland et Conybeare, ont cru reconnoeitre, dans leur voyage en Allemagne, le muschelkalk de Werner comme identique avec le lias, qui est l'assise inferieure du calcaire jurassique. J'incline a croire, malgre les oolithes gris-bleuatres observees dans le muschelkalk sur les bords du Weser, qu'il y a plutot parallelisme qu'identite de formation. Le muschelkalk occupe la meme place que le lias: il abonde egalement en ammonites, terebratulites et encrinites; mais les especes fossiles different, et sa structure est beaucoup plus simple et plus uniforme. Les strates du muschelkalk ne sont pas separes par ces argiles bleues qui abondent dans les assises superieures et inferieures de la formation du lias. Les assises mitoyennes de cette derniere formation ont une cassure matte et unie, et ressemblent bien plus aux varietes lithographiques du calcaire du Jura qu'au muschelkalk de Goettingue, de Jena et de l'Eichsfeld. M. d'Aubuisson croit que cette derniere formation est representee en Angleterre par le portlandstone, le cornbrash et le forestmarble: mais, quelque analogie que puissent offrir tous ces lits de calcaire marneux petris de coquilles en partie brisees (forestmarble), il faut se rappeler qu'ils alternent avec des formations entierement oolithiques, et qu'ils sont separes du red marl par le lias, tout comme le calcaire oolithique du Jura est separe par le muschelkalk du gres bigarre. En France, M. Boue a reconnu le muschelkalk dans le plateau de Bourgogne, pres de Viteaux et de Coussy-les-Forges, pres de Dax dans la commune de S. Pan de Lon, etc. Je ne l'ai point reconnu dans la partie equinoxiale de l'Amerique. Les couches tres-arenacees, remplies de madrepores et de coquilles bivalves des cotes de Cumana et de Carthagene des Indes, que j'ai voulu jadis y rapporter, sont probablement des terrains tertiaires. Quadersandstein (Gres de Königstein). §. 31. Formation tres-distincte (rives de l'Elbe, au-dessus de Dresde entre Pirna, Schandau et Königstein; entre Nuremberg et Weissenburg; Staffelstein en Franconie; Heuscheune, Adersbach; Teufelsmauer au pied du Harz; vallee de la Moselle et pres de Luxembourg; Vic en Lorraine; Nalzen, dans le pays de Foy, et Navarreins, au pied des Pyrenees), caracterisee par M. Hausmann, et confondue long-temps, soit avec les varietes quarzeuses du gres bigarre et du gres de l'argile plastique (trappsandstein), soit avec le gres de Fontainebleau, superieur au calcaire grossier de Paris: c'est le gres blanc de M. de Bonnard, le gres de troisieme formation de M. d'Aubuisson. Preferant les denominations geographiques, je nomme souvent cette formation gres de Königstein, le gres bigarre gres de Nebra, le muschelkalk calcaire de Goettingue . Le quadersandstein a une couleur blanchatre, jaunatre ou grisatre, a grains tres-fins, agglutines par un ciment argileux ou quarzeux presque invisible. Le mica y est peu abondant, toujours argentin et dissemine en paillettes isolees. Il est depourvu, et de bancs intercales d'oolithes, et de ces masses aplaties ou lenticulaires d'argile (thongallen) qui caracterisent le gres bigarre. Il n'est jamais schisteux; mais divise en bancs peu inclines, tres-epais, qui sont coupes a angle droit par des fissures, et dont quelques-uns se decomposent tres-facilement en un sable tres-fin. Il renferme du fer hydrate (Metz) dispose par nodules. Les debris organiques dissemines dans cette formation offrent, d'apres MM. de Schlottheim, Haussmann et Raumer, un melange extraordinaire de coquilles pelagiques tres-analogues a celles du muschelkalk, et de phytolithes dicotyledones. On y a trouve des mytulites, des tellinites, des pectinites, des turritelles, des hueitres (pas d'ammonites, mais des cerites; Habelschwerd, Alt-Lomnitz en Silesie), et en meme temps des bois de palmier, des empreintes de feuilles appartenant a la classe des dicotyledones et de petits depots de houille (Deister, Wefersleben pres Quedlinbourg), tres-bien decrits par MM. Rettberg et Schulze, et passant au lignite. Ces debris de bois, d'un aspect bitumineux, ont sans doute de quoi nous surprendre dans une formation si eloignee de la grande formation de lignites qui est placee entre la craie et le calcaire grossier parisien; mais des observations recentes nous montrent des traces de veritables lignites jusque dans les calcaires a gryphees arquees au-dessous du lias (Le Vay, cotes de Caen) et jusque dans le gres bigarre. Les mauvaises houilles du muschelkalk, par consequent d'une formation plus ancienne que le quadersandstein, passent aussi au lignite. Deja M. de Raumer avoit reconnu que le quadersandstein est separe du gres bigarre par le muschelkalk (calcaire de Goettingue); il est place entre ce calcaire et le calcaire du Jura, et par consequent inferieur aux grandes formations oolithiques de l'Angleterre et du continent. Dans cette position nous ne pouvons gueres le considerer, avec M. Keferstein (voyez son interessant Essai sur la geographie mineralogique de l'Allemagne, T. I, p. 12 et 48), comme parallele a la molasse d'Argovie (mergelsandstein), qui represente l'argile plastique (gres tertiaire a lignites) au-dessus de la craie. La nature des debris vegetaux que renferme le quadersandstein, et ses rapports avec le plänerkalk qui appartient aux assises chloritees et arenacees de la craie, le font regarder par plusieurs geognostes celebres comme d'une formation posterieure au calcaire jurassique: c'est ainsi que MM. Buckland, Conybeare et Philipps le placent entre la craie et les dernieres couches oolithiques. Mais, d'apres les observations de M. Boue et de plusieurs autres geognostes celebres d'Allemagne, le quadersandstein (gres de Königstein), alternant quelquefois avec des couches marneuses et des conglomerats, repose immediatement sur le gneis pres de Freiberg, sur le gres houiller en Silesie et en Boheme; sur le gres bigarre (gres de Nebra), pres de Nuremberg, en Franconie; sur le muschelkalk (calcaire de Goettingue), entre Hildesheim et Dickholzen pres de Helmstädt, et pres de Schweinfurt sur le Mein. Il est recouvert de calcaire du Jura, et alterne avec les couches marneuses de ce calcaire, en Westphalie, entre Osnabrück, Bielfeld et Bückebourg. Calcaire du Jura (Lias, Marnes et grands depots oolithiques). §. 32. Formation tres-complexe, composee de couches alternantes de calcaires, marneuses et oolithiques, renfermant du gypse et un peu de gres. Le mode d'alternances partielles, tres-constant dans chaque localite, varie dans des pays d'une etendue considerable; cependant sur les points les plus eloignes de l'Europe on reconnoeit une analogie frappante entre les grandes divisions ou assises principales. Dans la serie des formations les plus neuves du terrain secondaire le calcaire du Jura (Jurassus) est place entre le quadersandstein et la craie. Cette derniere y passe meme insensiblement, et peut souvent etre regardee, par l'analogie de ses fossiles, comme une continuation du calcaire jurassique. La superposition de ce calcaire au quadersandstein, si long-temps contestee, se montre en Allemagne, d'apres M. de Schmitz, pres de Wilsbourg; d'apres M. Boue, pres Blumenroth, Staffelstein, et entre Osnabrück et Bückebourg. Lorsque les trois formations de quadersandstein, de muschelkalk et de gres bigarre ne se sont pas developpees simultanement, le calcaire jurassique, par la suppression des membres intermediaires de la serie geognostique, recouvre immediatement le zechstein ou calcaire alpin. Dans ce cas (pente septentrionale des Pyrenees; Apennins, entre Fossombrono, Furli et Nocera; Cordilleres du Mexique, entre Zumpango et Tepecuacuilco), on voit ce dernier passer insensiblement a un calcaire blanchatre, a cassure matte egale (ou conchoide a cavites tres-aplaties), qu'on ne sauroit distinguer des couches compactes du calcaire du Jura depourvues d'oolithes. Ce passage, dont M. de Charpentier a aussi ete frappe dans le Midi de la France, merite un examen tresattentif. Malgre la grande difference qui existe entre les debris fossiles du muschelkalk et du calcaire jurassique, les dernieres formations du terrain secondaire sont etroitement liees entre elles, et il ne faut pas etre surpris que dans une serie a, b, g, d, e .... le terrain a (zechstein) fasse passage a e (calcaire du Jura), a cause de la suppression frequente des termes b, g et d (c'est-a-dire, du gres bigarre, du muschelkalk et du quadersandstein). Les formations arenacees b et d alternent avec des argiles et des marnes plus ou moins abondantes, de sorte que, par un grand developpement de leurs couches desagregees, celles-ci reduisent a l'etat de simples bancs intercales les assises pierreuses, et finissent, comme c'est le cas dans l'Ouest de la France, par remplir tout l'intervalle entre a et e. Le calcaire jurassique couvre, sans interruption, une grande etendue de pays, depuis la chaeine des Alpes jusque dans le centre de l'Allemagne, depuis Geneve jusqu'a Streitberg et Muggendorf, en Franconie. Comme, vers le nord, il renferme des cavernes a ossemens fossiles, cette formation a singulierement fixe l'attention des geognostes allemands. M. Werner la croyoit identique avec le muschelkalk: j'ai reconnu, des l'annee 1795, qu'elle en differoit essentiellement, et j'ai propose de la designer par le nom de calcaire du Jura, a cause de l'analogie parfaite que presentent les montagnes occidentales de la Suisse avec celles de la Franconie. Cette denomination est aujourd'hui generalement recue; mais il a ete constate que le calcaire du Jura, au lieu d'etre place sous le gres bigarre (comme je l'avois cru, par erreur, avec le plus grand nombre des geognostes, en confondant ce gres avec la molasse d'Argovie et le gres de Dondorf et de Misselgau pres Bareuth), est plus recent que le gres bigarre, que le muschelkalk (Bindloch) et le quadersandstein (Schwandorf; Phantaisie (?); Nuremberg). Cette intercalation entre le quadersandstein et la craie, qui se fonde sur des observations directes, explique tres-bien le passage graduel (Montagne de S. Pierre pres de Maestricht), de la craie tuffeau a la formation jurassique. Le nom de calcaire caverneux (höhlenkalk), donne souvent a cette derniere, peut donner lieu a des rapprochemens errones. Il faudroit distinguer entre des formations dont la masse entiere est spongieuse, caverneuse ou criblee de trous, et des roches a cavernes. Plusieurs, sans etre poreuses ou celluleuses, en renferment de tresvastes. Le calcaire de transition (mountain limestone de Derbyshire) meriteroit, en Angleterre et au Harz, presque autant que celui du Jura, le nom de calcaire a cavernes. Au contraire, le rauchkalk et le rauchwacke, qui forment les assises moyennes du zechstein en Thuringe, et que l'on a crus a tort paralleles au calcaire du Jura, sont, comme ce dernier, et dans des etendues de couches tres-considerables, remplis de petites cavites de 2 -- 10 lignes de diametre, sans offrir pour cela de veritables grottes. Le phenomene des grottes et celui de la porosite (cavernosite generale) de la masse ne se trouvent pas necessairement reunis; ce sont des modifications qui, loin de caracteriser telle ou telle formation, se rencontrent dans des formations tres-differentes. Quoique sur le continent les couches partielles qui composent le calcaire du Jura se soient tres-inegalement developpees, et que l'ordre de leur succession varie souvent, on remarque toujours un certain nombre d'assises distinctes et repandues sur des etendues de terrain tres-considerables. Nous les nommerons en commencant par les plus anciennes: calcaire marneux (et marnes calcaires tres-dures), bleu-grisatre, analogue (d'apres MM. Boue et Buckland, Essai geogn. sur l'Ecosse, pag. 201, et Struct. of the Alps, pag. 17) au lias de l'Angleterre, quelquefois traverse par des veines de spath calcaire, rempli de gryphees arquees; oolithes grisjaunatres, alternant avec des marnes en partie bitumineuses et avec du gypse; calcaire compacte a cassure unie et matte, et oolithes blanches; couches remplies de madrepores analogues au calcaire a polypier de Normandie et au coral-rag de l'Angleterre; calcaire schisteux avec poissons et crustaces (Pappenheim et Solenhoffen). L'assise inferieure de cette formation si complexe est particulierement designee, en France (Bourgogne) et dans l'Allemagne meridionale (Wurtemberg), sous le nom de calcaire a gryphites; mais quelques geognostes penchent meme pour l'idee de separer cette assise du calcaire du Jura, en la regardant, avec MM. de Buch et Brongniart, comme appartenant au zechstein, ou avec M. Keferstein, comme parallele au muschelkalk. Ici se presente la question importante de savoir dans quel rapport de gisement et de composition se trouve le calcaire a gryphites du Jura avec celui qui porte le meme nom dans le Nord de l'Allemagne, et que M. Voigt a fait connoeitre des l'annee 1792? Une grande analogie entre les couches les plus voisines de deux formations qui quelquefois se trouvent immediatement superposees l'une a l'autre, n'a sans doute rien de bien surprenant: les memes especes de gryphees pourroient se rencontrer dans des formations tres-distinctes et plus eloignees encore entre elles; mais la liaison geognostique observee entre le calcaire a gryphees arquees, alternant avec les marnes, et les autres couches inferieures du Jura, me fait pencher pour l'opinion que ce calcaire, et le calcaire a gryphees epineuses (gryphitenkalk de Voigt), place sous le gres bigarre, ne sont pas d'une meme formation. M. Merian, dans son excellente Monographie des environs de Bale, enonce aussi cette opinion, et regarde avec M. Haussmann le gres argileux de Rheinfelden, sur lequel repose le calcaire jurassique, comme gres bigarre, tandis que M. de Buch ( Merian, Umgeb. von Basel, p. 110) le prend pour le gres houiller, et suppose que, par le non-developpement du gres bigarre, les couches oolithiques et lithographiques du Jura reposent, dans cette localite, immediatement sur les couches a gryphites qui appartiennent au zechstein. J'ai cru de mon devoir d'exposer dans ce travail les opinions des plus celebres geognostes, lors meme qu'elles sont opposees a celles auxquelles je me suis arrete. Ce qui est indubitable et ce que nous croyons utile de rappeler de nouveau, c'est que le calcaire jurassique qui repose pres de Laufenbourg sur du granite, au Schwarzwald sur le gres rouge ou houiller, et pres de Geneve sur le calcaire alpin, est place, dans le centre et le nord de l'Allemagne, sur le quadersandstein. La superposition d'une roche sur la formation la plus jeune determine sa place comme terme de la serie geognostique. En Franconie et dans le Haut-Palatinat on ne voit generalement au jour que les assises superieures du calcaire jurassique, qui sont en meme temps les plus compactes. Les marnes et les oolithes y sont beaucoup plus rares que dans la Suisse occidentale et en France (Caen, Lons-le-Saulnier). Entre Eichstädt et Ratisbonne on trouve, de bas en haut, d'apres M. de Schmitz, du calcaire entierement spongieux et bulleux; des couches grenues renfermant des druses remplies de sable; du calcaire compacte et conchoide avec des nodules de silex; du calcaire schisteux et fissile, analogue a celui de Sohlenhofen et aux dales lithographiques du Heuberg pres de Kolbingen. Ces assises spongieuses, remplies de vacuoles (vallee du Laber pres Berodhausen; Pegnitz, Creussen, Tumbach), que j'ai retrouvees en Italie (vallee de la Brenta, entre Carpane et Primolano), a l'eile de Cuba (entre le Potrero de Jaruco et le port du Batabano), au Mexique (plateau de Chilpansingo), donnent a la surface du sol, qui est herisse de petits rochers pointus, un aspect tres-particulier. Dans la France occidentale, une bande non interrompue de calcaire jurassique s'etend, d'apres M. Boue, du S. E. au N. O., depuis Narbonne et Montpellier jusqu'a la Rochelle, separant vers le nord les terrains de transition de la Vendee et le terrain primitif du Limousin. Sur les cotes de Normandie, les assises marneuses et oolithiques ont pris un developpement beaucoup plus grand qu'en Allemagne. Nous citerons, d'apres les recherches interessantes de M. Prevost, les couches superposees entre Dieppe et le Cotentin, en commencant, comme toujours, par les couches les plus anciennes: 1. ° calcaire a gryphees arquees et calcaire lithographique (Le Vay, Issigny), renfermant quelques lignites et superpose au terrain de transition: 2. ° argiles inferieures et oolithes (argile des Vaches-noires, alternant avec du lias a debris d'ichthyosaures; oolithes grises de Dive, ferrugineuses, melees d'argile avec lignites et avec petrifications nombreuses de madrepores, de modioles, de Gryphaea cimbium et d'ammonites; oolithes blanches): 3. ° calcaire de Caen; les couches inferieures avec des nodules de silex, avec peu de coquilles (ammonites, belemnites), et avec quelques ossemens de crocodiles; les couches superieures a polypiers (coral-rag) et a trigonies renfermant des cerites entierement analogues a celles trouvees au-dessus de la craie; 4.° argiles superieures du cap la Heve, de couleur bleuatre, avec lignites, debris de crocodiles (Honfleur) et bancs calcaires moins developpes qu'a Caen. On voit que dans cette partie de l'Europe les lignites percent a travers toutes les couches du calcaire jurassique, et que cette formation, en faisant abstraction des argiles intercalees, se compose de trois grandes assises, savoir, de calcaire a gryphees arquees, d'oolithes, et de calcaire a polypiers et a trigonies. En Angleterre, la formation du Jura, se prolongeant sans interruption du Yorckshire au Dorsetshire, remplit tout l'espace entre le red marl (gres bigarre) et la craie; car on n'y connoeit entre le calcaire du Jura et le red marl aucune formation qui soit analogue de composition au muschelkalk et au quadersandstein, deux roches qui souvent manquent egalement sur le continent. Les geognostes anglois et ecossois, qui, dans ces derniers temps, ont etudie la charpente de leur pays avec un zele infatigable, distinguent les assises du calcaire jurassique par des denominations en partie tres-caracteristiques, et dont plusieurs rappellent les subdivisions reconnues sur le continent: 1. ° Lias, avec peu de silex, couvrant le red marl salifere, analogue au calcaire a gryphees arquees du continent; les deux tiers d'en-haut sont une masse argileuse bleue alternant avec des lits calcaires; vers le bas ces lits augmentent d'epaisseur, deviennent blancs et passent a des couches lithographiques (ossemens d'ichthyosaures, pres de vingt especes d'ammonites, belemnites). 2. ° Systeme inferieur d'oolithes, savoir: oolithes melees de sable, terre a foulon, grand banc oolithique (great oolithe) avec debris de coquilles, schiste oolithique de Stonesfield, forestmarble, cornbrash et kelloway-rock, calcaires coquilliers et arenaces. 3. ° Systeme moyen d'oolithes, savoir: argile d'Oxford (clunchclay de M. Smith), sables et conglomerats calcaires (calcareous grit), coral rag ou calcaire a polypiers, avec madrepores et echinites. 4. ° Systeme superieur des oolithes, savoir: argile bleue de Kimmeridge, un peu bitumineuse, analogue aux argiles bleues du cap la Heve en Normandie, qui sont aussi superieures au calcaire a polypier et aux oolithes; portlandstone, avec ammonites; purbeckstone, calcaire argileux petri de coquilles, alternant avec des marnes et des gypses. J'ai suivi les divisions de MM. Smith, Philipps et Conybeare, qui different un peu de celles qu'a adoptees M. Buckland. Les trois systemes d'oolithes d'Angleterre sont separes par des formations argileuses. Quant a la structure oolithique meme, nous avons deja fait observer plus haut qu'on en trouve des traces dans les formations les plus differentes: il y a quelques bancs d'oolithes, d'apres MM. de Gruner et Escher ( Alpina, T. IV, p. 369), dans le calcaire de transition de la Suisse, dans le gres houiller ( Freiesleben, Kupfersch., B. IV, p. 123), dans le calcaire alpin ou zechstein (Hartlepool dans le Northumberland), dans le gres bigarre (Thuringe; Vic en Lorraine), et dans le muschelkalk. Couches subordonnees: hornstein (silex) en petits bancs continus; calcaire magnesifere (Nice); calcaire fetide et gypse avec des traces de sel gemme (Kandern; voyez Merian, Umgeb. von Basel, p. 36); gres argileux et micace, quelquefois siliceux, intercale dans les assises a gryphites (Hemmiken, Waldburgstuhl; Lons-le-Saulnier); fer oxide globuliforme (bohnenerz), a la fois dans le calcaire du Jura (Neufchatel; Frickthal; Wartenberg en Souabe), et entre ce calcaire et la molasse ou gres tertiaire a lignite (Arau, Baden); houille avec impressions de fougeres (?) et melee de pyrites (Neue Welt, Bretzweil). Petrifications: apres les formations superieures a la craie, le calcaire du Jura est celle dont les debris fossiles ont ete le mieux determines en Angleterre, en France et dans la Suisse occidentale. Elle renferme, de meme que des terrains plus anciens encore (le quadersandstein et le zechstein avec schiste cuivreux), des coquilles pelagiques melees a du bois, a des ossemens de grands sauriens d'eau douce, et, si l'on ne s'est pas trompe dans la determination zoologique, a des ossemens de didelphes (marnes de Stonesfield). J'ignore si le melange de coquilles marines et fluviatiles, si evident dans la plupart des formations tertiaires, a ete observe avec certitude dans les terrains au-dessous de la craie. La ou la formation jurassique est presque depourvue de marnes et d'oolithes (Franconie, Haut-Palatinat; Carniole, entre S. Sesanne et Triest), des couches tres-puissantes sont entierement depourvues de petrifications. Les debris de quadrupedes ovipares, de poissons et de tortues, se trouvent presque dans toutes les assises, dans les plus recentes (purbeckstone), comme dans les plus anciennes (lias): cependant les dernieres en offrent le plus; et il paroeit qu'elles ne renferment que l'ichthyosaurus (proteosaurus de sir Everard Home) et le plesiosaurus, qui est un animal analogue, et non les veritables crocodiles. Cette difference dans la distribution des reptiles a ete egalement observee par M. Prevost sur les cotes occidentales de la France. Les ossemens de l'ichthyosaurus s'y trouvent (principalement?) dans les couches calcaires (lias) des argiles inferieures aux oolithes, tandis que les crocodiles ne se rencontrent qu'au-dessus des oolithes. En Angleterre on distingue, d'apres MM. Smith, Philipps et Conybeare, parmi le nombre prodigieux de coquilles petrifiees dont on n'a encore pu reconnoeitre que le genre, les especes suivantes: Ammonites giganteus, A. excavatus, A. Duncani, A. Banksii, A. angulatus, A. Grenoughi, Nautilus striatus, N. truncatus, Trochus dimidiatus, T. bicarinatus, Trigonia costata, T. clavellata, Terebratula intermedia, T. spinosa, T. digona, Ostrea gregaria, O. palmata, Modiola laevis, M. depressa, M. minima, Pentacrinites caput Medusae, P. basaltiformis, etc. Quoique les especes d'ammonites (au nombre de vingt), de belemnites et de pentacrinites, decrites dans le lias, ne soient pas identiques avec celles du muschelkalk, il me paroeit toujours bien remarquable de voir accumuler ces trois familles dans des roches d'un age si rapproche, entre les dernieres assises du zechstein (calcaire alpin) et les premieres ou plus anciennes du calcaire jurassique. MM. Prevost, Lamouroux et Brongniart vont enrichir la geognosie zoologique des recherches profondes qu'ils ont faites sur les coquilles et les zoophytes trouvees sur les cotes de France, entre Dieppe et le Cotentin, en Franche-Comte et en Suisse. Nous nous contenterons, en attendant, de consigner ici les corps fossiles qu'offre le calcaire jurassique du continent, depuis Geneve jusqu'en Franconie, d'apres un travail que j'ai fait sur les catalogues de M. de Schlottheim: Chamites jurensis, Belemnites giganteus, Ammonites planulatus, A. natrix, A. comprimatus, A. discus, A. Bucklandi, Myacites radiatus, Tellinites solenoides, Donacites hemicardius, Pectinites articulatus, P. aequivalvis, P. lens, Ostracites gryphaeatus, O. cristagalli, Terebratulites lacunosus, T. radiatus, Gryphites arcuatus, Mytulites modiolatus, Echinites orificiatus, E. miliaris, Asteriacites pannulatus, des Turritelles, des Hippurites (le Cornucopiae au cap Passaro en Sicile), Gryphites arcuatus, etc. Il est bien digne d'attention que cette gryphee arquee que M. Sowerby nomme Gryphites incurvus, et qui caracterise les assises inferieures de la formation jurassique en Suisse et sur les cotes occidentales de la France, est aussi, apres l'Ammonites Bucklandi et le Plagiostoma gigantea, la coquille qui caracterise le plus le lias en Angleterre. Les couches de calcaire blanc et grenu que l'on trouve frequemment dans cette formation (Neufchatel, Monte Baldo), sont dues a des petrifications de madrepores. Nous avons deja vu des poissons plus ou moins accumules, mais appartenant a des genres tres-distincts, dans le thonschiefer de transition (Glaris), dans les schistes carbures du gres rouge (Goldlauter et Allthal pres de Kleinschmalkalden), dans le calcaire alpin et ses marnes cuivreuses, et meme dans le muschelkalk (tres-rarement, Esperstedt, Obhaussen): ces ichthyolithes deviennent plus frequens dans le calcaire jurassique, surtout dans ses couches superieures. De la elles penetrent, au-dessus de la craie, dans le gres tertiaire a lignites (argile plastique), dans le calcaire grossier (Monte Bolca), le gypse a ossemens (Montmartre) et le calcaire d'eau douce (OEningen). J'indique dans l'ordre de leur age relatif les formations qui offrent des phenomenes analogues, pour prevenir les erreurs qui naissent de l'ignorance de ces analogies. Un geognoste justement estime, M. Buckland, incline a regarder les calcaires fissiles de Pappenheim et de Sohlenhofen, celebres par leurs empreintes de poissons et de crustaces, comme superposes au calcaire du Jura, et comme appartenant au calcaire grossier du terrain tertiaire: ces calcaires fissiles me paroissent au contraire entierement analogues au purbeckstone d'Angleterre, qui abonde aussi en petrifications de poissons, et qui forme, comme le calcaire de Pappenheim, la couche la plus recente du terrain jurassique. J'ai eu occasion d'examiner, en 1796, les belles carrieres de Sohlenhofen, conjointement avec M. Schöpf, et nous avons reconnu, en allant de Muggendorf par Ansbach a Pappenheim, une liaison intime entre les diverses assises d'une meme formation. MM. de Buch, Boue et Beudant partagent cette opinion sur les ichthyolithes de Franconie. Dans le Vicentin le calcaire jurassique et le calcaire grossier parisien existent a la fois. L'un et l'autre y renferment des polypiers; cependant, dans un premier voyage fait en Italie (1795), j'ai cru que les longues bandes de coraux rameux qui traversent, en formant des filons (entre l'hotellerie du Monte di Diavolo et le lac Fimon a l'ouest de Lungara), le sommet du Monte di Pietra nera, appartiennent plutot au calcaire du Jura, peut-etre a l'assise appelee en Angleterre coral-rag. Ces bandes de polypiers qui sont restes en place, ont deux pieds de largeur: elles offrent un aspect tres-extraordinaire, et parcourent des masses calcaires presque depourvues de petrifications, en se dirigeant tres-regulierement N. 80° E., et en s'elevant comme un mur au-dessus de la surface du sol. M. Boue a aussi observe ces polypiers en place dans le calcaire jurassique (coral-rag) qui entoure le bassin de Vienne, et dont les assises inferieures renferment des nagelfluhe analogues au calcareous grit de la grande formation oolithique d'Angleterre (Filey dans le Yorkshire). Sous la zone equinoxiale de l'Amerique j'ai cru reconnoeitre la formation du Jura dans beaucoup de calcaires blanchatres, en partie lithographiques, qui ont la cassure unie et matte, ou conchoide a concavites tres-aplaties. Ces calcaires sont ceux de la caverne de Caripe (au sud-est de Cumana), du littoral de Nueva Barcelona (Venezuela), de l'eile de Cuba (entre la Havane et le Batabano; entre la Trinidad et la boca del Rio Guaurabo) et des montagnes centrales du Mexique (plaines de Salamanca et defile de Batas). Le calcaire blanc de Caripe, qui ressemble entierement a celui des cavernes de Gailenreuth en Franconie, est superpose au calcaire alpin gris-bleuatre de Cumanacoa. Le terrain jurassique du littoral de Nueva Barcelona renferme de petites couches de hornstein passant a un kieselschiefer noir (phenomene qui se repete pres de Zacatecas au Mexique); il est recouvert (Aguas calientes del Bergantin), comme le calcaire alpin au sommet de l'Impossible, d'un gres tres-quarzeux. On pourroit croire que ce gres du Bergantin appartient aux assises quarzeuses du gres vert ou gres secondaire a lignites; mais, comme il forme egalement des couches dans le calcaire alpin (Tumiriquiri), il reste bien douteux si les gres du Bergantin et du Tumiriquiri sont des formations differentes, ou si des couches toutes semblables penetrent du calcaire alpin dans le terrain jurassique. Ce terrain abonde moins que toute autre formation secondaire en roches arenacees. Nous avons cependant cite plus haut des couches de gres dans les montagnes occidentales de la Suisse, a Waldburgstuhl, Eptigen, et Hemmiken pres de Bale. Dans les vastes steppes de Venezuela, pres de Tisnao, le gres rouge supporte, a ce qu'il m'a paru, immediatement (comme au Schwarzwald en Souabe) un calcaire lithographique tres-analogue au calcaire du Jura. Ce gisement se trouve repete au Mexique, dans les plaines de Temascatio, au sud-ouest de Guanaxuato. A l'extremite septentrionale de la vallee de Mexico (entre l'Hacienda del Salto, Batas et Puerto de Reyes), une formation calcaire bleu-grisatre, a cassure unie, renfermant du gypse et supportant une breche calcaire, m'a paru appartenir au terrain jurassique, malgre la proximite des marnes tertiaires (Desague de Huehuetoque), dans lesquelles sont enfouis des ossemens d'elephans fossiles. Je pourrois citer aussi le passage que l'on observe du calcaire alpin a un calcaire entierement semblable a celui d'Arau et de Pappenheim, a la pente occidentale des Cordilleres du Mexique, entre Sopilote, Mescala et les riches mines de Tehuilotepec; mais dans cette region le terrain du Jura est moins prononce qu'a l'eile de Cuba, qu'aux eilots du Cayman et dans les montagnes de Caripe pres de Cumana. Nulle part, dans la partie du nouveau monde que j'ai parcourue, je n'ai vu le gres bigarre, le muschelkalk ni le quadersandstein separer le calcaire alpin des formations que je viens de decrire. Depourvues d'oolithes, elles abondent aussi tres-peu en petrifications de coquilles et en couches marneuses. Leur cassure matte et unie leur donne tout l'aspect du calcaire jurassique de l'Allemagne et de la Suisse. Ces formations calcaires de l'Amerique, des Pyrenees et des Apennins, qui paroissent si etroitement liees au calcaire alpin (zechstein), ne sont-elles que les assises les plus recentes de ce dernier, et doit-on les separer du veritable calcaire jurassique, riche en coquilles, en oolithes et en marnes? Cette question importante ne peut etre resolue qu'en multipliant les observations de gisement, qui sont bien plus decisives que celles de composition et d'aspect exterieur. Gres et Sables ferrugineux, et Gres et Sables verts, Gres secondaire a lignites (Iron sand et Green sand). §. 33. Ce sont des gres et des sables avec lignites, places au-dessous de la craie: ce sont deux formations arenacees, colorees par le fer, separees par une couche d'argile (wealdclay) et superposees au calcaire du Jura (terrain d'oolithes). Elles atteignent en Angleterre jusqu'a mille pieds d'epaisseur, et se retrouvent dans toute la France occidentale, ou MM. Prevost et Boue en ont fait l'objet d'une etude approfondie. Les sables ferrugineux brun-jaunatre alternent avec des gres siliceux et de petits amas de mines de fer souvent exploitees avec avantage: ils renferment des bois fossiles et des lignites (Bedfordshire, Dorsetshire). Les sables verts, colores par un protoxide de fer, alternent avec des gres calcaires et siliceux, avec des agglomerats, des marnes jaunatres a cristaux de gypse, et meme avec de petits bancs de calcaire compacte, qui ont ete quelquefois confondus avec le portlandstone. On y trouve des nodules de hornstein et de calcedoine (Sarlat dans le Perigord), de petits depots de fer hydrate, une resine qui passe au succin (eile d'Aix pres de La Rochelle; Obora et Alstadt en Moravie), et un grand nombre de debris fossiles, dont plusieurs (cidaris, spatangus) ressemblent a ceux de la craie. Les gres siliceux de cette formation renferment des empreintes de feuilles dicotyledones. Vers le haut le sable vert passe a une marne crayeuse (chalk marle de Surrey). La terre verte ou chloritee, qui caracterise la couche de sable la plus rapprochee de la craie, se retrouve dans des formations d'un age tres-different, dans le gres houiller de la Hongrie (sur les frontieres de la Galicie), dans le gres bigarre et dans les gypses qui lui appartiennent, dans le quadersandstein et dans les couches inferieures du calcaire grossier de Paris. D'apres les belles recherches de M. Berthier sur les grains verts de la craie et du calcaire grossier, ces grains sont un silicate de fer; mais il est probable que les quantites de magnesie et de potasse varient dans les differens terrains, comme elles varient, d'apres les analyses de Klaproth et de Vauquelin, dans la terre verte de Verone (talc chlorite zoographique de Haüy) et dans la chlorite terreuse. L'analogie qu'offrent quelquefois avec le quadersandstein de l'Allemagne les bancs siliceux du gres vert (iron sand), soit a l'etat solide, soit dans un etat de desagregation, a porte plusieurs geognostes a confondre ces deux terrains. M. Boue, qui a explore avec tant de fruit les gisemens de l'Ecosse, de l'Angleterre et de l'Allemagne, a reconnu le gres vert (tout semblable a celui des environs d'Oxford) en France, le long de la Mayenne et du Loir, depuis la Ferte-Bernard jusqu'audela de la Fleche, dans le departement de la Charente, dans le Mans, la Saintonge et le Perigord. C'est a cette meme formation du §. 33 qu'appartiennent aussi les lignites de l'eile d'Aix, sur lesquels M. Fleuriau de Bellevue a fait de si interessantes recherches. D'apres ce savant geologue, la foret sous-marine des cotes de La Rochelle consiste en bois de dicotyledones aplatis, en partie petrifies, en partie bitumineux ou fragiles, quelquefois a l'etat de jaiet. Ces bois sont penetres de pyrites, et perces par une multitude de tarets et de vers marins. Les trous resultant de cette perforation sont remplis de quarz-agathe et de sulfure de fer. On trouve les troncs ou en couches horizontales, tantot dirigees parallelement, tantot accumules en desordre. Les bois qui sont petrifies en entier ou seulement en partie, reposent sur un sable verdatre: ceux qui sont a l'etat fibreux et bitumineux, reposent sur des bancs d'argile plastique d'un bleu fonce. Ils sont entoures d'algues marines et de petites branches de lignites. Parmi ces masses d'algues on trouve une resine qui passe au succin; elle est friable et offre diverses couleurs. Les troncs d'arbres entasses forment une bande d'une lieue et demie de largeur, depuis l'extremite nord-ouest de l'eile d'Oleron jusqu'a quatorze lieues dans l'interieur du continent, sur la rive droite de la Charente. Cette bande a plus de sept pieds d'epaisseur; elle est dirigee de O. N. O. a E. S. E., et se trouve a un metre au-dessus du niveau des basses mers. La ou les lignites sont couverts par l'ocean, ils sont incorpores (ainsi que des masses de succinasphalte et de grands ossemens d'animaux marins) a un gres grossier qui repose sur l'argile plastique. Le gisement de ces depots est, de bas en haut (d'apres un memoire inedit de M. Fleuriau de Bellevue): 1. ° calcaire compacte (lithographique) a cassure unie (La Rochelle, S. Jean d'Angely); 2.° couches d'oolithes (pointe de Chatelaillon et Matha); 3.° lumachelle et bancs de polypiers avec empreintes de Gryphaea angustata (ces trois couches constituent la formation jurassique, dont le banc a polypiers represente le coral-rag): 4. ° grande couche de lignite avec tourbes marines, succin-asphalte et argile plastique; 5.° sables ferrugineux et chloriteux; argile schisteuse; couches arenacees et calcaires avec trigonies et cerites; des fragmens de lignites. Au sud-ouest de la Charente, ou manquent les couches n.os 4 et 5, des bancs horizontaux d'un calcaire tres-blanc avec debris de coquilles (Saintonge) reposent immediatement sur les oolithes de la formation jurassique, et representent les assises inferieures de la craie. M. Boue a vu se prolonger les traces des lignites depuis Rochefort par Perigueux jusqu'a Sarlat. Ces sables et argiles avec lignites du gres vert sont liees vers le bas aux argiles bleues avec lignites du cap la Heve (pres du Havre); vers le haut ils preludent pour ainsi dire au grand depot de lignites du terrain tertiaire, c'est-a-dire aux lignites de l'argile plastique et de la molasse, qui sont superieures a la craie. Comme la craie dans ces assises inferieures (craie chloritee entre Fecamp et Dives) renferme elle-meme des lignites, et que, sous de certains rapports, elle peut etre regardee comme une continuation de la formation jurassique, les phenomenes que nous venons d'exposer sont bien dignes de l'attention des geognostes. Le plänerkalk de l'Allemagne, souvent mele de mica et de grains de quarz, forme une des assises superieures du gres vert, representant a la fois la craie chloritee et une partie de la craie grossiere ou craie tuffeau. IV. Craie. §. 34. A mesure que nous nous sommes eloignes du calcaire alpin, nous avons vu les formations devenir plus complexes. Il est vrai que le muschelkalk et le quadersandstein ont une structure assez simple; mais le calcaire du Jura et le gres vert, la ou ils se sont bien developpes, offrent une grande complication de couches et de frequentes alternances. Cette tendance a une composition variee, a un agroupement de masses heterogenes (tendance qui atteint son maximum dans le terrain tertiaire), se ralentit pour ainsi dire au terrain de craie. Placee entre le gres vert et l'argile plastique ou gres a lignites tertiaire, la craie, par une plus grande simplicite de structure, contraste avec les formations complexes que nous venons de nommer. Des couches argileuses (dief), calcaires et arenacees (tourtia), qui separent la formation jurassique (oolithique) de celle de la craie, ne doivent pas se confondre avec cette derniere formation, quoique souvent aussi il ne soit pas facile de fixer les limites entre les marnes avec lits d'oolithes du terrain jurassique, les strates du gres vert, et ces marnes crayeuses ou calcaires jaunatres, presque compactes, qui semblent appartenir aux assises inferieures de la craie. Ce dernier terrain se compose, d'apres les recherches de MM. Omalius et Brongniart, de trois assises assez distinctes. L'inferieure est la craie chloritee ou glauconie crayeuse, friable et parsemee de grains verts; la moyenne est la craie tuffeau ou craie grossiere, grisatre, sableuse, renfermant des marnes et, au lieu de silex pyromaques, des silex cornes, d'une couleur peu foncee. L'assise superieure est la craie blanche. Quelquefois les assises les plus anciennes prennent des couleurs gris-noiratre, et deviennent ou tres-compactes (environs de Rochefort), ou grenues et friables (montagne de Saint-Pierre pres de Maestricht). La craie chloritee passe souvent insensiblement au sable vert (green sand). La craie blanche est la plus pure des couches calcaires de differens ages: elle ne contient que quelques centiemes de magnesie; mais elle est melee d'une quantite de sable plus ou moins grande. La liaison du terrain de craie de Paris avec les autres terrains secondaires (entre Gueret et Hirson) a ete indiquee dans une coupe par M. Omalius (Bull. phil., 1814). Dans un nivellement barometrique, fait en 1805, de Paris a Naples, nous avons vu, M. Gay-Lussac et moi, sortir au jour, successivement sous la craie, le calcaire du Jura, le calcaire alpin, le gres rouge, le gneis et le granite (entre Lucy-le-Bois, Avallon, Autun et montagne d'Aussy). La formation de craie, trop long-temps negligee, est beaucoup plus repandue qu'on ne le pense generalement. On l'a reconnue dans plusieurs parties de l'Allemagne, par exemple, dans le Holstein, en Westphalie (d'Unna a Paderborn), dans le pays d'Hanovre, au pied du Harz pres Goslar, dans le Brandebourg pres Prentzlow, et a l'eile de Rugen. Souvent elle n'est reconnoissable que par les corps fossiles que presentent les lambeaux de terrains marneux et arenaces. Elle ne renferme que peu de couches heterogenes, par exemple, des lits d'argile (Isle de Wight; Anzin); des silex, soit en plaques ou en rognons bien alignes, soit en petits filons (Isle de Thanet; Brighton), et caracterisant les assises superieures de la craie. On y rencontre aussi des pyrites globuleuses et de la strontiane sulfatee (Meudon). Petrifications. Dans le bassin de la Seine on trouve, d'apres les observations de MM. Defrance et Brongniart, dans les couches superieures de la craie: beaucoup de belemnites (Belemnites mucronatus) et d'oursins (Ananchites ovata, A. pustulosa, Galerites vulgaris, Spatangus cor anguinum, S. bufo); des hueitres (Ostrea vesicularis, O. serrata); des terebratules (Terebratula Defrancii, T. plicatilis, T. alata); des peignes (Pecten cretosus, P. quinque-costatus); le Catillus Cuvieri, des Alcyonium, des asteries, des millepores, etc. La craie tuffeau et glauconeuse renferme (environs du Havre, de Rouen et de Honfleur; Perte du Rhone pres Bellegarde): Gryphaea columba, G. auricularis, G. aquila, Podopsis truncata, P. striata, Terebratula semiglobosa, T. gallina, Pecten intextus, P. asper, Ostrea carinata, O. pectinata, Cerithium excavatum, des trigonies, des crassatelles, des encrinites et des pentacrinites (Angleterre), et, ce qui est tres-remarquable, des nautilites et plusieurs ammonites (Nautilus simplex, Ammonites varians, A. Beudanti, A. Coupei, A. inflatus, A. Gentoni, A. rhotomagensis), tandis que les couches superieures de la craie, pres de Paris, ne renferment (a l'exception du Trochus Basteroti) pas une seule coquille univalve a spire simple et reguliere. D'apres les recherches de MM. Buckland, Webster, Greenough, Philipps et Mantell, comparees a celles de M. Brongniart, il existe la plus grande analogie entre les debris organiques trouves, en France et en Angleterre, dans les assises de la craie du meme age. Ce sont partout les assises les plus anciennes qui renferment des ossemens de grands sauriens (monitor) et de tortues de mer, des dents et des vertebres de poissons (squales). Malgre les analogies que presentent les gres a lignites (sables verts et argiles plastiques) au-dessous et au-dessus de la craie, cette formation pourtant appartient plutot au terrain secondaire qu'au terrain tertiaire, auquel plusieurs geognostes celebres le rapportent. Aussi, selon M. Brongniart, les coquilles de la formation crayeuse se rapprochent beaucoup plus de celles de la formation jurassique que des coquilles du calcaire grossier, dont la craie est separee geognostiquement de la maniere la plus tranchee. Terrains tertiaires. Les considerations que j'ai exposees plus haut sur la liaison intime entre les dernieres assises du terrain de transition et les premieres du terrain secondaire, peuvent s'appliquer en grande partie a la liaison que l'on observe entre les terrains secondaires et tertiaires. Les roches de transition sont cependant plus etroitement liees au terrain houiller que ne l'est la craie aux formations qui lui succedent. Ce qu'il y a de plus important en geognosie, c'est de bien distinguer les formations partielles; c'est de ne pas confondre ce que la nature a nettement limite; c'est d'assigner a chaque terme de la serie geognostique sa veritable position relative. Quant aux tentatives qui ont ete faites recemment pour reunir plusieurs de ces formations par groupes et par sections, elles ont eu le sort de toutes les generalisations diversement graduees. Les opinions des geognostes sont restees plus partagees a l'egard des grandes que des petites divisions. Presque partout les memes formations ont ete admises; mais on varie dans la nomenclature des groupes qui doivent les reunir. C'est ainsi que les botanistes s'accordent plus facilement sur la fixation des genres que sur la repartition de ces memes genres entre des familles voisines. J'ai prefere de conserver dans le tableau des formations les anciennes classifications les plus generalement recues. Dans cette longue serie de roches, dans cet assemblage de monumens de diverses epoques, on distingue surtout trois phenomenes bien marquans: la premiere lueur de la vie organique sur le globe, l'apparition de roches fragmentaires, et la debacle qui a enseveli l'ancienne vegetation monocotyledone. Ces phenomenes marquent l'epoque des roches intermediaires et celle du gres houiller, premier chaeinon des roches secondaires. Malgre l'importance des phenomenes que nous venons de signaler, les roches d'une epoque ont toujours quelque prototype dans les roches de l'epoque precedente, et tout annonce l'effet d'un developpement continu. Comme les noms, terrains de sediment moyen, calcaire alpin nouveau, etc., sont employes dans beaucoup d'ouvrages geognostiques modernes, sans que l'on designe chaque fois individuellement les roches que renferment ces terrains, il sera utile de rappeler ici la synonymie de cette nomenclature des gisemens. M. Brongniart, distinguant entre primitif et primordial, comprend avec M. Omalius d'Halloy, sous la denomination de terrains primordiaux, toutes les roches primitives et intermediaires cristallines de l'ecole de Freiberg: il divise les terrains secondaires (Flötzgebirge) en trois classes. Dans la premiere, celle de sediment inferieur (Descr. geol. des environs de Paris, p. 8; Sur le gisement des ophiolithes, p. 36), sont compris le mountain-limestone ou calcaire de transition, le gres rouge ou houiller, le calcaire alpin ou zechstein et le lias; dans la seconde, celle de sediment moyen, le calcaire du Jura et la craie; dans la troisieme, celle de sediment superieur, toutes les couches qui sont plus neuves que la craie. Le terrain de sediment superieur remplace par consequent le terrain tertiaire, denomination tout aussi impropre pour designer un quatrieme terrain, succedant aux terrains primitif, intermediaire et secondaire, que l'etoient les anciens noms de terrains a couches (roches secondaires) et de terrains a filons (roches primitives et de transition). M. de Bonnard, dans son interessant Apercu geognostique des formations, exclut des terrains primordiaux les porphyres, les syenites de transition et toutes les roches cristallines posterieures a celles qui renferment quelques debris de corps organises; il regarde, et nous preferons sa maniere de voir, le mot primordial comme synonyme de primitif. Les terrains secondaires superieurs de M. de Bonnard different beaucoup du terrain de sediment superieur de M. Brongniart: ce sont plutot ceux que ce savant estimable appelle terrain de sediment moyen. Toutes les formations, depuis la craie jusqu'au gres rouge, a l'exception des houilles, sont comprises dans l'ordre surmoyen de M. Conybeare, tandis que la liaison intime que l'on observe en Angleterre entre les depots de houilles et les roches qui les supportent, ont engage M. Buckland ( Structure of the Alps, 1821, p. 8 et 17) a etendre les formations secondaires depuis la craie jusqu'au mountain limestone et a la grauwacke (old red sandstone). Il nomme notre zechstein avec depots saliferes, calcaire alpin ancien (elder alpine limestone); le lias, les oolithes, le sable vert et la craie, calcaire alpin nouveau (younger alpine limestone). Ces indications suffiront, je pense, pour l'intelligence de la synonymie des grandes divisions geognostiques. Le melange frequent de couches pierreuses et de terrains meubles ou masses desagregees a fait confondre long-temps les formations tertiaires, c'est-a-dire, celles qui sont posterieures a la craie, avec les terrains d'alluvion et de transport, que Guettard (1746) avoit appeles la zone des sables. On a faussement considere les formations tertiaires comme peu importantes, comme irregulieres dans leur stratification et restreintes a de petites etendues de pays. L'ecole de Freiberg ne placoit d'abord (1805) au-dessus du muschelkalk et de la craie que quatre formations, savoir: les sables et argiles avec lignites, deja reconnues par Hollmann en 1760 ( Phil. Trans., vol. LI, p. 505); le nagelfluhe calcaire, le travertin, et le tuff d'eau douce ( Reuss, Geogn., T. II, p. 473, 630, 644). Bruguieres avoit deja observe que les meulieres de Montmorency ne renfermoient que des coquilles d'eau douce. Le gypse a ossemens de Montmartre, que Karsten croyoit encore analogue au gypse salifere du zechstein, avoit ete considere par Lamanon et par M. Voigt (1799) comme un depot d'eau douce. Werner le regarda (1806) comme entierement different des formations de gypse d'Allemagne, et comme d'une epoque beaucoup plus recente ( Freiesleben, Kupfersch., T. I, p. 174). Les observations recueillies par la Societe geologique de Londres et la Societe Wernerienne a Edimbourg, les utiles voyages de M. Omalius d'Halloy (1808) et de quelques geognostes italiens, avoient fourni une masse assez considerable de materiaux pour l'etude des terrains tertiaires; mais la connoissance plus approfondie des differentes formations qui constituent ce terrain et qui offrent les memes caracteres dans les pays les plus eloignes, ne date que de l'epoque ou a paru la Description geologique des environs de Paris, par MM. Brongniart et Cuvier (1.re edit., 1810; 2.e edition, 1822). C'est dans le bassin qui entoure cette capitale, que toutes les formations tertiaires (a l'exception peut-etre du gres a lignites, qui ne s'y montre que comme argile plastique) se trouvent le plus developpees. Toutes celles qui manquent dans d'autres parties de l'Europe, ou qui ne s'y rencontrent que par lambeaux, sont reunies sur les bords de la Seine. En caracterisant succinctement les termes de la serie tertiaire, je profiterai a la fois du grand ouvrage de M. Brongniart, de celui que MM. Conybeare et Philipps viennent de faire paroeitre sur le sol de l'Angleterre, du Voyage geologique de M. Beudant en Hongrie, et des observations recentes de MM. Boue et Prevost, qui, en remplissant la lacune entre les formations tertiaires et oolithiques, ont rendu de grands services a la geognosie positive. C'est par la comparaison de terrains treseloignes les uns des autres, qu'on peut eviter, jusqu'a un certain point, de confondre le tableau general des gisemens avec la description geographique d'un bassin isole. Il est assez remarquable de voir que la derniere assise du grand edifice geognostique, celle dont l'epoque de formation est le plus rapprochee de nos temps, ait ete examinee si tard. Comme les couches meubles du terrain tertiaire renferment des coquilles fossiles dans un haut degre de conservation, c'est ce terrain aussi qui a donne lieu au perfectionnement de la conchyliologie souterraine. La predilection que dans divers pays on a donnee a cette science, deviendra egalement utile a l'etude des formations secondaires et intermediaires, si on ne neglige pas de combiner les caracteres zoologiques avec ceux qu'offrent le gisement et l'age relatif des roches. J'ai expose plus haut les motifs pour lesquels j'ai cru devoir eviter les denominations de premier, de deuxieme et de troisieme terrain marin, ou d'eau douce. J'ai substitue le plus souvent des noms geographiques a ces denominations numeriques, tres-susceptibles de faire naeitre des idees erronees. Les formations les plus recentes sont celles dont les gisemens paroissent avoir ete le plus modifies par des circonstances locales. Une alternance periodique des matieres calcaires et siliceuses (l'argile meme renferme pres de 70 pour cent de silice) se manifeste jusque dans les strates qui appartiennent a une meme formation. Les couches heterogenes et les subdivisions des terrains calcaires ou gypseux prennent, dans quelques pays, un accroissement si considerable qu'on les prend pour des terrains particuliers ou independans. Il en resulte que la succession et le parallelisme des roches tertiaires, si recentes et d'une structure si complexe, peut differer quelquefois du type que nous leur assignons dans le tableau des formations. Argiles et Gres tertiaire a lignites (Argile plastique, Molasse et Nagelfluhe d'Argovie). §. 35. A l'entree du terrain tertiaire, comme aussi audessous de la craie, entre cette roche et le calcaire jurassique, nous trouvons des depots de lignites: c'est ainsi que sur la limite des terrains intermediaires et secondaires nous avons vu place un grand depot de houilles (coal-mesures). Les deux terrains secondaire et tertiaire commencent par des amas de vegetaux enfouis. A mesure que l'on avance du gres houiller vers les formations plus recentes, on voit les plantes monocotyledones peu a peu remplacees par des plantes dicotyledones; il y en a encore des premieres (endogenites de M. Adolphe Brongniart, mais non des fougeres) au-dessus de la craie jusque dans le gypse a ossemens: cependant, en general, les dicotyledones (exogenites) dominent dans les depots de lignites. Je suis moins surpris de ce melange que de l'uniformite de la vegetation monocotyledone de l'ancien monde, dont nous voyons les debris dans les terrains intermediaires et dans le gres houiller. Au milieu des forets de l'Orenoque, qui sont extremement riches en monocotyledones, la proportion de celles-ci aux dicotyledones est, quant a la masse, c'est-a-dire au nombre des individus, comme 1 a 40. La proportion que presentent les terrains houilliers n'est donc pas tropicale. Auroit-elle ete modifiee par la resistance inegale qu'opposent a la destruction les monocotyledones et les dicotyledones? Nous reunirons dans le gres a lignites superieur a la craie, les formations paralleles d'argiles plastiques, de marnes et sables avec lignites, de molasse et de nagelfluhe. Dans les environs de Londres et de Paris il n'y a qu'un lambeau de ce terrain, que l'on trouve beaucoup plus developpe dans la France meridionale, en Suisse et en Hongrie. La craie, en France et en Angleterre, est recouverte d'une couche d'argile plastique, sans coquilles et sans debris organiques, entierement depourvue de chaux, renfermant quelques silex et de la selenite. Une couche de sable separe l'argile plastique des fausses glaises, qui sont plus siliceuses et noiratres. Ces dernieres renferment du lignite ou bois fossile bitumineux, provenant de plantes monocotyledones et dicotyledones; du vrai succin (d'apres la decouverte de M. Bequerel); du bitume, et (Soissonnois, Montrouge, Bagneux) un melange de coquilles pelagiques et fluviatiles (cyrenes, cerites d'eau douce ou potamides, melanies, limnees, paludines). Ce melange ne s'observe ordinairement qu'a la limite superieure de l'argile plastique et des lignites. Les coquilles marines ressemblent, d'apres M. Prevost, a celles du calcaire grossier. Couches intercalees: sables et gres avec coquilles, masses de calcaire concretionne avec cristaux de strontiane sulfate. Fossiles, d'apres MM. d'Audebard de Ferussac et Brongniart: Planorbis rotundatus, Paludina virgula, P. unicolor, Melanopsis buccinoidea, Nerita globulosa, Melania triticea, -- Ceritium funatum, Ampullaria depressa, Ostrea bellovaca, etc. En Angleterre, l'argile plastique, qu'il ne faut pas confondre avec le London clay (representant le calcaire grossier de Paris) ni avec l' Oxford ou Clunch clay (de la formation jurassique), abonde plus en sables qu'en argile: elle renferme des lignites (Isle de Wight, Newhaven), et, ce qui est remarquable a cause de l'analogie de cette formation avec les molasses d'Argovie et de Hongrie, un gres friable (Stutland en Dorsetshire). On y a trouve, d'apres MM. Webster et Buckland, des impressions de feuilles, des fruits de palmier, des cyclades (Cyclas cuneiformis, C. deperdita), des turritelles, des cerites (Ceritium melanoides, C. intermedium) et des hueitres (Ostrea pulchra, O. tenuis). Le terrain a succin de la Pomeranie et de la Prusse, vraisemblablement superpose a la craie, est compose d'argile, de lignites et de nodules de succin. Les corps organises qu'il renferme, ont ete recemment examines par M. Schweigger. Par son gisement, comme l'observe judicieusement M. Brongniart, il appartient a la formation §. 35. Les gres a lignites (molasse et macigno) sont repandus dans les plaines de la Hongrie, comme dans le grand bassin de la Suisse, entre les Alpes et le Jura, ou plutot entre le lac d'Annecy et celui de Constance. La formation de Hongrie, que M. Beudant a fait connoeitre, est geognostiquement la plus importante, parce qu'on la voit superposee au calcaire jurassique (Sari Sap aux environs de Gran, et bords du lac Balaton). Elle est immediatement recouverte (pres de Bude) de calcaires coquilliers analogues au calcaire grossier de Paris. Elle est composee de poudingues (nagelfluhe) et de breches calcaires qui alternent avec des gres micaces, friables, schisteux, a petits grains anguleux de quarz, avec des sables et avec des lits d'argile. Elle renferme de grands depots de lignites (Csolnok, au sud de Gran, Wandorf pres de OEdenbourg), des sources de bitume, des minerais granuleux de fer hydrate, des coquilles d'eau douce et, au contact avec le calcaire grossier superpose, des coquilles marines. Le terrain arenace de la Suisse, qui comprend la molasse et le nagelfluhe, se compose, d'apres les nouvelles recherches de MM. de Charpentier et Lardy (en commencant par les couches inferieures), 1.° de calcaires sableux, un peu ferrugineux, passant souvent a un veritable gres a ciment calcaire; 2. ° de poudingue (nagelfluhe) enchassant des fragmens calcaires et siliceux, toujours arrondis et agglutines par un ciment calcaire; 3. ° de molasse ou gres a petits grains de quarz et a ciment argileux ou marneux. Des filons de spath calcaire traversent souvent le nagelfluhe, et la molasse (gres fin et friable) alterne avec des lits de marnes. Le nagelfluhe qui empate a la fois des galets de porphyre et de calcaire compacte (Rigi, Fribourg, Entlibuch), n'est pas toujours recouvert par la molasse; et M. de Buch a remarque depuis long-temps qu'entre Habkern et le petit Emmethal la molasse alterne plusieurs fois avec le nagelfluhe. Tout ce terrain, dont la surface est generalement a nu, git immediatement, vers le nord (Arau, Porentruy, Boudry), sur le calcaire jurassique; vers le sud, sur le calcaire alpin (environs de Geneve et Teufenbachtobel, au sud-ouest du Rigi). D'apres l'inclinaison des couches quelques geognostes celebres ont regarde long-temps le nagelfluhe comme anterieur au calcaire alpin. M. Keferstein croit encore la molasse (mergelsandstein) inferieure a la craie, et meme au calcaire jurassique. Un calcaire fetide et bitumineux, un gypse fibreux et argileux, alternant avec des marnes qui renferment des ammonites, un calcaire compacte brun-jaunatre, et des lignites, forment des couches subordonnees a la molasse de la Suisse. Le depot de lignites qu'on exploite pres de S. Saphorin, entre Vevay et Lausanne, est recouvert de nagelfluhe; celui de Paudex est intercale a la molasse. Tout ce terrain renferme, en Suisse, a la fois des coquilles marines (ammonites, cytherees, donax), des coquilles d'eau douce (lymnees, planorbes), des palmacites a feuilles flabelliformes (Montrepos), et des ossemens de quadrupedes (Aarberg, Estavayer, Kaepfnach sur les bords du lac de Zuric), ossemens qui, selon les recherches de M. Meisner, appartiennent a l'Anaplotherium, au Mastodon angustidens et au Castor. Dans la molasse de Cremin et Combremont une breche coquilliere marine repose sur un calcaire brun, rempli de planorbes. M. Brongniart, des l'annee 1817, a insiste sur l'analogie qu'offre l'argile plastique de Paris avec une partie de la formation de nagelfluhe et de molasse de Suisse, si long-temps confondue avec le gres bigarre d'Allemagne. Ce savant pense aussi que les molasses qui renferment des ossemens de mastodontes et d'anthracoterium (Cadibona pres de Savone) sont plus recentes encore que l'argile plastique; qu'elles sont peut-etre ou liees au calcaire grossier qui est souvent arenace, ou paralleles au gypse de Montmartre. Les ossemens d'animaux vertebres, trouves rarement dans l'argile plastique de Paris et de Londres (pres d'Auteuil et de Margate), n'ont point encore ete determines zoologiquement, et jusqu'ici M. Cuvier, dans la suite de ses importantes recherches sur le gisement des fossiles, n'a reconnu des debris de mammiferes terrestres que dans les terrains posterieurs au calcaire grossier. Il se pourroit, d'apres ces considerations, que les molasses ou gres a lignites de Hongrie fussent anterieurs a ceux de la Suisse; mais, comme dans ce dernier pays les formations de calcaire grossier (parisien) et de gypse a ossemens ne se sont presque pas developpees, et qu'en general l'alternance frequente des roches tertiaires rend leur parallelisme un peu incertain, il se pourroit aussi que la longue epoque de la formation de molasse et de nagelfluhe en Suisse (celle des couches inferieures et superieures, arenacees, marneuses, calcaires et gypseuses) eaut ete contemporaine aux trois formations d'argile plastique, de calcaire grossier et de gypse des environs de Paris. Le terrain qui nous occupe est, selon les observations recentes de M. Boue, extremement developpe dans le sudouest de la France, de Libourne a Agen, surtout au nord de la Dordogne et de la Gironde, ou il repose sur la craie. Il y est compose (en commencant par les couches superieures) de gres calcaires remplis de debris de coquilles et d'ossemens d'animaux vertebres, de petites couches de fer globulaire, de marnes grises et verdatres, de calcaires jaunatres avec cerites. Des depots de lignites y ont ete reconnus par M. Brongniart ( Descr. geol., art. II, §. 1); mais ils n'y sont pas nombreux, et la position de cette formation arenacee entre la craie et le calcaire grossier de Bordeaux la caracterise suffisamment comme molasse. Le gres a lignites peut localement etre depourvu de lignites, de meme que le gres rouge ou houiller est souvent depourvu de houilles. Comme presque toutes les formations secondaires ont leurs gres et leurs conglomerats, il ne faut pas regarder comme appartenant a la meme formation §. 35 tous les nagelfluhe de l'Europe (poudingues polygeniques de la classification de M. Brongniart): eil y en a qui ne paroissent que des formations locales et peu etendues; d'autres (Salzbourg et S. Gall?), selon l'observation judicieuse de M. Boue, sont peut-etre plus anciens que la craie et le calcaire du Jura. D'ailleurs l'analogie qu'offrent certaines couches placees entre le quadersandstein et la craie avec celles qui sont placees entre la craie et le gypse a ossemens, est un phenomene bien digne de l'attention des geognostes. D'immenses depots de sables, d'argile et de lignites avec mellite (Artern) et avec succin (bernstein de Muskau et bernerde de Zittau), couvrent une partie de l'Allemagne. On y trouve des lits de gres extremement quarzeux (Carlsbad, Habichtswald, Meissner, Wilhelmshöhe pres Cassel, Wolfseck), surtout la ou des coulees de basaltes sont superposees a l'argile avec lignites. A cause de cette proximite on a donne anciennement a ces gres, qu'on pourroit mineralogiquement confondre avec les gres egalement quarzeux du gres bigarre et avec ceux de Fontainebleau, la denomination impropre de gres trappeens (trapp-sandstein). Les sables a grenats (granatensand), c'est-a-dire les argiles et marnes de Meronitz et de Podsedlitz en Boheme, qui renferment des pyropes dissemines, appartiennent-ils a cette meme formation §. 35, ou, comme plusieurs phenomenes observes dans la Cordillere du Mexique et a l'eile de la Graciosa (archipel des Canaries) me le feroient supposer, appartiennent-ils a des argiles basaltiques du terrain igne? Calcaire de Paris (Calcaire grossier ou Calcaire a cerites), formation parallele a l'Argile de Londres et au Calcaire arenace de Bognor. §. 36. Cette formation tres-compliquee, retrouvee en Hongrie, en Italie et dans le nouveau continent, a ete entierement meconnue avant la publication de la Geographie mineralogique des environs de Paris. Le calcaire grossier, separe par une couche de sable de l'argile plastique, consiste, d'apres M. Brongniart, dans le bassin de la Seine, de bancs minces et tres-regulierement alternans, de calcaires plus ou moins durs, et de marnes argileuses ou calcaires. Sur des etendues de terrains tres-considerables, les coquilles fossiles sont generalement les memes dans les couches correspondantes, et presentent, d'un systeme de couches a un autre systeme, des differences d'especes assez notables. Ce phenomene d'uniformite dans la distribution des animaux caracterise surtout le terrain tertiaire; on commence deja a le reconnoeitre dans les differens bancs qui composent, en Suisse et en Angleterre, la formation jurassique. Les couches inferieures du calcaire grossier de Paris sont chloriteuses (glauconeuses), arenacees, remplies de madrepores et de nummulites. Dans les couches moyennes on trouve beaucoup d'empreintes de feuilles et de tiges de vegetaux (Endogenites echinatus, Flabellites parisiensis, Pinus Defrancii, d'apres le travail de M. Adolphe Brongniart sur la Vegetation fossile), des milliolites, des ovulites, des cytherees, mais presque point de cerithes. Les couches superieures offrent des lucines, des ampullaires, des corbules striees, et une grande variete (pres de soixante especes) de cerithes; mais, en general, cette derniere assise est moins abondante en corps fossiles que les assises moyenne et inferieure, dans lesquelles MM. Defrance et Brongniart ont recueilli pres de 600 especes de coquilles. Le fameux banc coquillier de Grignon et les fossiles du Falun de Tourraine appartiennent principalement aux assises moyennes. Dans celles-ci et dans le systeme des couches superieures les bancs calcaires sont quelquefois entierement remplaces par des gres ou des masses de silex corne (hornstein). Ce sont ces gres qui ont offert (entre Pierrelaie et Franconville pres Beauchamp), a MM. Gillet de Laumont et Beudant, un melange de coquilles marines avec des coquilles d'eau douce (limnees et paludines). Les fossiles du calcaire parisien, parmi lesquels on ne trouve jamais de belemnites, d'orthoceratites, de baculites ou d'ammonites, different entierement de ceux de la craie. Les depots coquilliers qui representent dans les differentes parties de l'Europe la formation que nous decrivons, sont les uns identiques de composition et d'aspect (plaines de Vienne decrites par M. Prevost; collines de Pest et de Teteny en Hongrie, decrites par M. Beudant), tantot seulement analogues par leur position geognostique et par les debris fossiles qu'ils renferment (Angleterre). Les calcaires grossiers de la Hongrie, petris de cerithes, de turritelles, d'ampullaires, de venus et de crassatelles, peu reconnoissables, parce qu'il n'en est reste que le moule, offrent jusqu'aux caracteres empyriques les plus minutieux auxquels on reconnoeit le calcaire parisien. Ils sont lies a des sables coquilliers (Czerhat, Raab), qui sont en partie meles de grains verts et qui ont beaucoup d'analogie avec les depots coquilliers des plaines de la Lombardie. Les calcaires grossiers de la Dordogne et de la Gironde, geographiquement plus rapproches du bassin de la Seine, ne montrent pas toujours cette ressemblance de composition que nous venons de signaler dans ceux de la Hongrie. Ils sont, d'apres les observations recentes de M. Boue, composes de deux assises bien distinctes. L'inferieure est peu coquilliere ou a corps fossiles brises; elle renferme du calcaire compacte blanc-jaunatre, quelquefois tachant comme la craie, des marnes et des bancs de galets quarzeux. L'assise superieure est un calcaire sableux, extremement coquillier, et ressemblant presque quelquefois a une molasse brunatre. En Angleterre, d'apres les recherches de MM. Buckland, Webster et Sowerby, l' argile de Londres (London clay) est non-seulement, par sa superposition a l'argile plastique, une formation parallele au calcaire de Paris; elle renferme aussi presque toutes les especes de coquilles qui semblent appartenir plus particulierement aux couches inferieures de ce calcaire. Dans le bassin de la Tamise, la formation que les geognostes anglois designent communement sous le nom de London clay, n'est qu'un depot d'argile et de marnes brunatres, renfermant du fer sulfure et quelques lames de selenite; mais, sur d'autres points de l'Angleterre, cette couche se rapproche beaucoup plus, par sa composition mineralogique, du calcaire grossier. Elle presente, d'apres MM. Conybeare et Philipps, sur les cotes de Sussex, a Bognor et pres de Harwich (Essex), des lits de calcaire compacte et sableux. On y a trouve, outre les corps fossiles propres a la formation qui lui est analogue dans le bassin de Paris, des empreintes de poissons, des ossemens de tortues et de crocodiles (Islington), une espece d'ammonites (Ammonites acutus, a Minstercliff) et des lignites. Le Cerithium giganteum, assez commun dans l'argile de Londres, n'appartient en France qu'a l'assise inferieure du calcaire grossier, qui est d'ailleurs depourvue de toute autre espece de cerithes. Le London clay, dans lequel on assure avoir trouve du succin (Holderness dans le Yorckshire), paroeit avoir des rapports plus intimes avec l'argile plastique (gres tertiaire a lignites) que le calcaire grossier de Paris. M. Brongniart rapporte a cette formation (§. 36) la majeure partie des terrains calcareo-trappeens du Vicentin (Val Ronca, Montecchio maggiore, Monte Bolca), la colline de la Supergue de Turin, le cap S. Hospice pres de Nice, la Grande-Terre de la Guadeloupe, etc. Les celebres impressions de poissons de Monte Bolca, sur lesquelles M. de Blainville a entrepris un travail interessant, ne se trouvent, d'apres les recherches de M. Maraschini, pas proprement dans le calcaire grossier, mais (comme on le reconnoeit surtout a Novale et a Lugo pres de Salceo) dans un calcaire fetide et schisteux, separe du calcaire grossier par une couche d'argile avec lignites. Cette position me semble lier les marnes bitumineuses (de Monte Bolca) avec empreintes de poissons et de feuilles aux marnes du gypse a ossemens de Montmartre. Dans l'Amerique equinoxiale, ou je n'ai point reconnu les formations de craie et de gres a lignites, les collines qui bordent sur quelques points la Cordillere de Venezuela, du cote de la mer (Castillo de San Antonio de Cumana, Cerro del Barigon dans la peninsule d'Araya, Vigia de la Popa pres du port de Carthagene des Indes), me paroissent appartenir au calcaire grossier. Ces collines sont composees, 1.° d'un calcaire compacte et arenace gris-blanchatre, dont les couches, tantot horizontales, tantot irregulierement inclinees, ont cinq a six pouces d'epaisseur (quelques bancs sont presque depourvus de petrifications, d'autres sont petris de madrepores, de cardites, d'ostracites et de turbinites, et meles de gros grains de quarz); 2. ° d'un gres calcaire, dans lequel les grains de sable sont plus frequens que les coquilles (plusieurs bancs de ce gres enchassent, non des paillettes de mica, mais des rognons de mine de fer brun, et deviennent si siliceux qu'ils ne font presque plus d'effervescence avec les acides, et que les corps fossiles y disparoissent entierement); 3. ° de bancs d'argile endurcie avec selenite. L'assise calcaire, dont j'ai depose de grands echantillons dans le cabinet d'histoire naturelle de Madrid, offre (entre Punta Gorda et les ruines du chateau de Santiago d'Araya) une innombrable quantite de solens, d'ampullaires, d'hueitres et de polypiers lithophytes, en partie disposes par familles. Cette formation tertiaire, composee de calcaires coquilliers, avec grains de quarz, de marnes argileuses et de gres calcaire, se trouve geographiquement liee aux terrains tertiaires des eiles opposees aux cotes de Cumana, par exemple, de celles de la Guadeloupe et de la Martinique. Elle repose tantot immediatement sur le calcaire alpin (Punta Delgada), tantot sur les argiles saliferes d'Araya, dont j'ai parle plus haut (§. 28, p. 275). Calcaire siliceux et Gypse a ossemens, alternant avec des marnes (Gypse de Montmartre). §. 37. D'apres les principes de classification que j'ai suivis dans ce travail, j'aurois pu separer le calcaire siliceux (Champigny) du gypse alternant avec des marnes appelees marines et d'eau douce; mais, n'ayant pu, dans le cours de mes voyages, faire des terrains superieurs a la craie un objet particulier de mes etudes, je n'ai rien voulu changer aux coupes generales indiquees dans l'ouvrage de MM. Brongniart et Cuvier. Le calcaire siliceux du bassin de Paris, qui est tantot tendre et blanc, tantot grisatre, a grains tres-fins et caverneux, est comme penetre dans toute sa masse de silex ou matiere quarzeuse. Il est intimement lie, vers le haut, au gypse, par les marnes argileuses et gypseuses qui alternent egalement avec le calcaire siliceux et le gypse a ossemens (butte de la Briffe de S. Denys; Crecy; Coulommiers); vers le bas, au calcaire grossier, dont les dernieres couches offrent aussi quelquefois des infiltrations siliceuses: maeis les silex cornes du calcaire grossier renferment des coquilles marines, tandis que les calcaires siliceux du terrain gypseux qui servent de meulieres, presentent dans leurs bancs superieurs des coquilles fluviatiles. J'ai deja fait observer plus haut (§. 28, p. 283) que sur le dos des Cordilleres du Perou, a 1800 toises de hauteur, une formation calcaire tres-ancienne (le calcaire alpin) offre ce meme phenomene curieux d'infiltrations siliceuses. Des modifications analogues dans la composition des roches et dans le melange chimique des matieres ont eu lieu a des epoques tres-differentes. Les marnes calcaires qui alternent avec le calcaire siliceux de Paris, renferment une magnesite remarquable, que MM. Brongniart et Berthier ont fait connoeitre, et qui est un silicate de magnesie hydrate presque pur. Les infiltrations siliceuses de cette formation passent quelquefois a une calcedoine divisee par plaques, et a un hornstein mamelonne colore en rouge, en violet et en brun. Le terrain gypseux est compose, dans le bassin de Paris, de couches alternantes de marnes schisteuses et de gypse saccharoide compacte ou feuillete. Il renferme au centre et dans sa plus grande masse des productions terrestres et d'eau douce, mais vers ses limites superieures et inferieures, tant dans le gypse que dans les marnes, il offre des productions marines. L'assise inferieure de la formation gypseuse est caracterisee par des silex menilites et de gros cristaux de selenite lenticulaires et jaunatres. Les bancs de marnes deviennent plus rares vers le milieu, ou l'on trouve plus particulierement la strontiane sulfatee et des squelettes de poissons. L'assise superieure est caracterisee par la multitude d'ossemens de mammiferes terrestres qui sont aujourd'hui inconnus sur le globe (Paloeotherium crassum, P. medium, P. magnum, P. latum, P. curtum, Anaplotherium commune, A. secundarium, A. marinum, le Chaeropotame et l'Adapis de M. Cuvier); par des os d'oiseaux, de crocodiles, de tryonix, de poissons d'eau douce: elle est recouverte de bancs de marnes calcaires et argileuses, renfermant, les uns du bois de palmier, des planorbes, des limnees et des cytherees (Cytherea elegans); les autres, des cerites (Cerithium plicatum, C. cinctum), des venus et de grandes hueitres tres-epaisses (Ostrea hippopus, O. pseudochama, O. longirostris, O. cyatula). Une couche de marne verte separe, vers la limite superieure de la formation gypseuse, les coquilles d'eau douce des coquilles pelagiques. Vers le bas le gypse meme (n.° 26 de la troisieme masse de Montmartre) offre des fossiles marins. Quelquefois cette formation ne s'est pas developpee en entier; les gypses manquent, et l'on ne reconnoeit sa place que par des marnes vertes accompagnees de strontiane. Comme le gypse a ossemens n'a encore ete etudie qu'en tres-peu d'endroits (bassin de Paris, Puy-en-Velay, Aix en Provence), les caracteres que nous attribuons a cette formation si importante pour la geogonie ou pour l'histoire des anciennes revolutions de notre planete, ne sont vraisemblablement pas assez generaux. Gres et Sables superieurs au gypse a ossemens (Gres de Fontainebleau). §. 38. Ce terrain est forme de deux assises: l'une, inferieure, sans coquilles; l'autre, superieure, renfermant des coquilles marines. Des sables siliceux et des gres forment des bancs tres-epais, tres-etendus, mais dont les surfaces ne sont pas paralleles. Dans l'assise depourvue de coquilles en place (celles de Villers-Cotterets et de Thury paroissent a M. Brongniart usees, comme si elles avoient ete roulees), on trouve sur quelques points beaucoup de paillettes de mica, des rognons de fer brun disposes par lits, un peu de gypse, beaucoup de marnes argileuses et des infiltrations de chaux carbonatee (foret de Fontainebleau). Les assises superieures, qui renferment des coquilles marines (Oliva mitreola, Cerithium cristatum, C. lamellosum, Corbula rugosa, Ostrea flabellula), passent quelquefois a un calcaire arenace (Romainville, Montmartre). L'immense terrain tertiaire de l'Italie, celui des collines subapennines, avec ossemens de cetaces et Ostrea hippopus, qui s'etend depuis Asti en Piemont jusqu'a Monteleone en Calabre, et que M. Brocchi a si bien decrit, appartient en grande partie, d'apres les discussions de MM. Prevost et Brongniart, aux gres et sables qui reposent sur le gypse de Montmartre. Terrain lacustre avec Meulieres poreuses, superieur au Gres de Fontainebleau (Calcaire a lymnees). §. 39. C'est le grand terrain d'eau douce superieur, compose sur quelques points de sables argilo-ferrugineux, de marnes et de meulieres siliceuses, criblees de cavites (avec coquilles, plateau de Montmorency; sans coquilles, La Fertesous-Jouarre); sur d'autres, de silex, de marnes et de calcaires compactes (Chateau-Landon). Ces calcaires renferment des potamides, des lymnees, des planorbes, des bulimes, des helix, et beaucoup d'empreintes de vegetaux (Culmites anomalus, Lycopodites squammatus, Chara medicaginula, Nymphaea Arethusae de M. Brongniart fils). Nous renvoyons pour l'histoire du grand terrain lacustre, qui a deja ete retrouve dans presque toutes les parties de l'Europe, a la 2.e edition de la Description geologique des environs de Paris(art. VIII). Une contree du globe ou la plupart des formations tertiaires ont acquis un grand developpement, et ou, pour cette meme cause, ces formations sont restees assez distinctes, nous a servi de type dans le tableau geognostique des formations tertiaires; mais il ne faut point oublier que dans d'autres contrees ce developpement s'arrete a l'argile plastique ou au calcaire grossier: alors le gypse de Montmartre et le gres de Fontainebleau ne paroissent indiques que par les places qu'occupent les marnes et les sables. Le terrain tertiaire reunit des formations qui se confondent partout ou elles n'ont pas pris un egal accroissement, et ou la frequente alternance des marnes tend a masquer les limites des differentes assises. Il me resteroit a parler des depots d'alluvion, qui presentent d'importans problemes sur l'origine des sables dans les deserts et les steppes (provenant du gres rouge, du gres bigarre, du quadersandstein, du terrain tertiaire?); mais ces depots si varies dans leur alternance, ne peuvent etre l'objet d'un travail sur la superposition des roches. Terrains volcaniques. J'ai fait succeder, par des motifs que j'ai exposes plus haut, au terrain intermediaire (Uebergangsgebirge), comme par mode de bisection, les formations secondaires et volcaniques. Cet arrangement offre l'avantage de rapprocher les porphyres et les syenites de transition, avec leurs couches bulleuses et pyroxeniques intercalees (§§. 23 et 24, Holmstrand en Norwege; Andes de Popayan; Cordilleres du Mexique), des porphyres, des amygdaloides et des dolerites du gres rouge (§. 26, Noyant et Figeac en France; Ecosse), des trachytes, des phonolithes et des basaltes du terrain exclusivement pyrogene. Dans un tableau de gisement, c'est deja gagner beaucoup que de ne pas separer ce qui se trouve lie dans la nature par des affinites vraiment geognostiques. On peut considerer le groupe de roches que l'on reunit generalement dans le terrain volcanique, sous un double point de vue, ou d'apres une certaine conformite observee dans leur gisement et leur superposition, ou d'apres les rapports de leur composition et de leur origine communes. Dans le premier cas, sans opposer le mode de formation des trachytes et des basaltes a celui des terrains primitifs et intermediaires, on examine la place que doivent occuper, comme termes de la serie geognostique, les grands systemes de roches composees de feldspath, de pyroxene, d'amphibole, d'olivine et de fer titane, que l'on trouve, au nord et au sud de l'equateur, non recouvertes et comme surajoutees a d'autres terrains plus anciens, dans des circonstances entierement analogues. Cette maniere d'envisager et de classer les roches volcaniques est la plus conforme aux besoins de la geognosie positive. On reunit les roches trachytiques et basaltiques, non d'apres leur composition mineralogique et la conformite apparente de leur origine, mais d'apres leur agroupement et leur position; on les distribue parmi les autres roches d'apres leur age relatif, comme on a fait, dans les terrains primitifs et intermediaires, avec les differentes formations de calcaires grenus (§§. 10 et 20), d'euphotides (§§. 19 et 25) et de porphyres (§§. 18, 22, 23 et 26). Dans le second cas, on isole, sous la denomination de terrain volcanique, tout ce que l'on croit etre incontestablement d'une origine ignee; on oppose les termes de la serie pyrogene a d'autres series de roches que l'on dit etre d'une origine aqueuse. Par la on separe d'une maniere absolue ce qui offre dans la nature des passages graduels; au lieu d'explorer le gisement, ou de placer les roches dans l'ordre de leur succession, on s'attache de preference aux questions historiques sur le mode de leur formation. J'avoue, et l'on ne sauroit se prononcer avec assez de franchise sur les premiers fondemens d'une science; j'avoue que ces classifications, d'apres les diverses hypotheses que l'on se forme sur l'origine des choses, ne me paroissent pas seulement vagues et arbitraires, mais aussi tres-nuisibles aux progres de la geognosie de gisement; elles prejugent, d'une maniere arbitraire et surtout trop absolue, ce qui est pour le moins encore extremement douteux. En divisant, d'apres un usage suranne, les formations en primitives, intermediaires, secondaires, tertiaires et volcaniques, on admet, pour ainsi dire, un double principe de division, celui de l'age relatif ou de la succession des formations, et celui de leur origine. Si l'on distingue entre des nappes de laves et des roches, ou bien entre des roches volcaniques, des roches d'une origine neptunienne, et des matieres formees par une pretendue liquefaction aquoso-ignee, on attribue tacitement aux granites, aux porphyres et aux syenites intermediaires, aux dolerites et aux amygdaloides du gres rouge, un mode de formation diametralement oppose a celui d'une fusion ignee. D'apres cette maniere de proceder, qui appartient plutot a la geogonie qu'a la geognosie positive, on considere tout ce qui n'est pas compris dans le terrain volcanique, dans les roches de trachyte et de basalte qui surmontent les autres terrains, comme forme par la voie humide, ou comme precipite d'une solution aqueuse. Il est presque inutile, dans l'etat actuel des sciences physiques, de rappeler combien l'hypothese d'une solution aqueuse est peu applicable aux granites et aux gneis, aux porphyres et aux syenites, aux euphotides et aux jaspes. Je ne hasarderai pas de prononcer ici sur les circonstances qui peuvent avoir accompagne la premiere formation de la croaute oxidee de notre planete; mais je n'hesite pas a me ranger du cote des geognostes qui concoivent plutot la formation des roches cristallines siliceuses par le feu que par une solution aqueuse, a la maniere des travertins et d'autres calcaires lacustres. Les mots laves et roches volcaniques sont d'ailleurs aussi vagues que l'est le mot volcan, qui designe tantot une montagne terminee par une bouche ignivome, tantot la cause souterraine de tout phenomene volcanique. Les trachytes qui surmontent le dos des Cordilleres, appartiennent indubitablement aux roches pyrogenes, et cependant le mode de leur formation n'est pas celui des courans de laves posterieurs au creusement des vallees. L'action du feu volcanique par un cone isole, par le cratere d'un volcan moderne, differe necessairement de l'action de ce feu a travers l'ancienne croaute crevassee de notre planete. En considerant les phenomenes volcaniques dans leur plus grande generalite, en reunissant ce qui a ete observe dans les differentes parties du globe, on voit differer ces phenomenes entre eux, meme de nos jours, de la maniere la plus frappante. Ce ne sont pas les volcans de la Mediterranee, les seuls que l'on a etudies avec soin, qui peuvent servir de type au geognoste et lui presenter la solution des grands problemes geogoniques. L'elevation absolue des bouches ignivomes, variant depuis cent a deux mille neuf cent cinquante toises (Stromboli et Cotopaxi), influe non-seulement sur la frequence des eruptions, elle modifie aussi la nature des masses rejetees. Quelques volcans n'agissent plus que par leurs flancs, quoiqu'ils offrent encore un cratere a leur sommet (Pic de Teneriffe); d'autres ont des eruptions laterales (j'en ai trouve a Antisana dans les Andes de Quito, a 2140 toises de hauteur), sans que leur cime ait jamais ete percee; d'autres encore, egalement creux dans leur interieur, comme l'indiquent beaucoup de phenomenes (dome trachytique du Chimborazo, 3350 toises), n'offrent aucune ouverture permanente au sommet et sur leur flanc (le Yana-Urcu, petit cone d'eruption, est place dans le plateau de Calpi meme), et n'agissent pour ainsi dire que dynamiquement, en ebranlant les terrains d'alentour, en fracturant les couches et en changeant la surface du sol. Rucu-Pichincha (2490 toises), qui a ete l'objet particulier de mes recherches, n'a jamais jete un courant de laves posterieur au creusement des vallees actuelles, pas plus que Capac-Urcu (pres Riobamba nuevo), qui, avant l'ecroulement de sa cime, a ete plus eleve que le Chimborazo. Le grand volcan mexicain de Popocatepetl (2771 toises), au contraire, a eu des epanchemens de laves sous la forme de bandes etroites, tout comme les petits volcans de l'Auvergne et de l'Italie meridionale. Les eiles qui sortent (dans quelques parages presque periodiquement) du fond des mers, ne sont pas, comme on le dit souvent par erreur, des amas de scories semblables au Monte novo de Pouzzole; ce sont des masses rocheuses soulevees, et dans lesquelles le cratere ne s'ouvre que posterieurement a leur soulevement. ( Relat. histor. de mon Voyage aux regions equin., T. I, p. 171, et Essai politique, T. I, p. 254.) Au Mexique, dans l'interieur des terres, sur un plateau trachytique a plus de trente-six lieues de distance de la mer, et loin de tout volcan braulant, des montagnes de 1600 pieds de hauteur sont sorties (29 Septembre 1759) sur une crevasse, et ont jete des laves qui enchassent des fragmens granitiques. Tout a l'entour, un terrain de quatre milles carres s'est souleve en forme de vessie, et des milliers de petits cones (hornitos de Jorullo), composes d'argile et de boules de basaltes a couches concentriques, ont herisse cette surface bombee. Tous les volcans braulans et toutes les cimes de la Nouvelle-Espagne qui s'elevent au-dessus de la limite des neiges perpetuelles, se trouvent sur une zone etroite (Parallele des grandes hauteurs, entre les 18° 59' et 19° 12' de latitude), qui est perpendiculaire a la grande chaeine des montagnes. C'est comme une crevasse de 137 lieues de long, qui s'etend depuis les cotes de l'ocean Atlantique jusqu'a celles de la Mer du Sud, et qui semble se prolonger encore 120 lieues plus loin, vers l'archipel de Revillagigedo, couvert de tuffs ponceux. Ces alignemens des volcans, ces soulevemens a travers des fentes continues, ces bruits souterrains (bramidos y truenos subteraneos de Guanaxuato, en 1784) qui se sont fait entendre au milieu d'un terrain de schistes et de porphyres de transition, rappellent, dans les forces encore actives du nouveau monde, les forces qui, dans les temps les plus recules, ont souleve les chaeines de montagnes, crevasse le sol, et fait faillir des sources de terres liquefiees (laves, roches volcaniques fluides) au milieu de strates plus anciennement consolides. Meme de nos jours ces terres liquefiees ne sortent pas constamment des memes ouvertures de l'orifice d'une montagne (cratere au sommet d'un volcan) ou de son flanc dechire; quelquefois (Islande, plateau de Quito) la terre s'ouvre dans les plaines, et l'on en voit sortir ou des nappes de laves qui s'entrecroisent, se refoulent et se surmontent, ou de petits cones d'une matiere boueuse (moya de Pelileo et de Riobamba viejo, 4 Fevrier 1797) qui semble avoir ete un trachyte ponceux, et qui, combustible et tachant les doigts en noir, est mele de carbure d'hydrogene. (Humb., Essai politique sur la Nouv. Espagne, T. I, p. 47, 254. Id., Relat. historique, T. I, p. 129, 148, 154, 315; T. II, p. 16, 20, 23. Klaproth, Chem. Unterr. der Min., T. IV, p. 289.) Les roches que l'on a l'habitude de reunir sous le nom de substances du terrain (exclusivement) volcanique, ont ete envisagees jusqu'ici beaucoup plus d'apres les rapports oryctognostiques et chimiques de leur composition, ou d'apres ceux de leur origine, que d'apres les rapports geognostiques de leur gisement et de leur age relatif. Le feu des volcans a agi a toutes les epoques, lors de la premiere oxidation de la croaute du globe, a travers les roches de transition, les terrains secondaires et tertiaires. A l'exception de quelques roches lacustres ou d'eau douce, les roches volcaniques sont les seules dont la formation continue, pour ainsi dire, sous nos yeux. Si les laves des memes volcans (sources intermittentes de terres liquefiees) varient a diverses epoques de leurs eruptions, on concoit combien des matieres volcaniques qui, pendant des milliers d'annees, se sont progressivement elevees vers la surface de notre planete, dans des circonstances de melange, de pression, de refroidissement, si differentes, doivent offrir a la fois de contrastes et d'analogies. Il y a des trachytes, des phonolithes, des basaltes, des obsidiennes et des perlites de differens ages, comme il y a differentes formations de granites, de gneis, de micaschistes, de calcaires, de grauwacke, de syenites et de porphyres. Plus on approche des temps modernes, plus les formations volcaniques paroissent isolees, surajoutees, etrangeres au sol sur lequel elles se sont repandues. Une longue intermittence de la source semble produire, meme dans les volcans actuels, une grande variete dans les produits, et s'opposer a l'agroupement de matieres analogues. Dans les formations de transition (Andes de la Nouvelle-Grenade et du Perou; Cordilleres du Mexique) les differens termes de la serie geognostique se lient les uns aux autres; ils se montrent dans cette dependance mutuelle que l'on observe entre les porphyres et les syenites, entre les thonschiefer, les grünstein et les calcaires de transition, entre les serpentines, les jaspes et les euphotides. Dans ce dedale de formations volcaniques de differens ages on n'a reconnu jusqu'a present que quelques lois de gisement qui paroissent, sinon generales, du moins en harmonie avec des phenomenes observes dans les deux continens sur une grande etendue de terrain. Ce sont ces rapports de gisement seuls qui peuvent etre discutes ici; tout ce qui regarde la composition des roches volcaniques, l'analyse mecanique de leur tissu et leurs classifications oryctognostiques, objets importans traites dans deux memoires celebres de M. Fleurian de Bellevue et de M. Cordier ( Journ. de physique, T. LI, LX et LXXXIII ), n'est pas du domaine de la geognosie des formations. On peut sans doute indiquer certains caracteres par lesquels des roches ressemblent d'une maniere plus evidente aux productions des volcans modernes: mais la couleur noire; la porosite a cellules alongees, couvertes d'un enduit lustre; la propriete de faire des gelees avec les acides; l'absence du quarz, du feldspath commun et des filons metalliques (auriferes et argentiferes); la presence du pyroxene, du fer titane, du feldspath vitreux et fendille, et des alcalis, ne peuvent plus, dans l'etat actuel de nos connoissances, etre considerees comme des caracteres generaux des roches volcaniques. (Voyez plus haut, §§. 21, 23, 26.) Les masses volcaniques, ou regardees comme telles (roches empyrodoxes de M. Mohs, Charakter der Classen, 1821, p. 177), se trouvent ou par filons (dykes, dans toutes les formations, depuis le granite primitif jusqu'a la craie et les formations tertiaires; Ecosse, Allemagne, Italie), ou en couches intercalees (calcaires et porphyres de transition; gres rouge), ou superposees, surajoutees a des terrains d'ages tres-differens. Le contraste entre les roches volcaniques ou empyrodoxes intercalees, et les roches qui les renferment, est d'autant plus frappant que les dernieres sont indubitablement non volcaniques, calcaires (Derbyshire) ou fragmentaires (grauwacke, gres houiller). Lorsque des masses empyrodoxes se trouvent, ou comme couches subordonnees, entre les strates de roches intermediaires cristallines (porphyres et syenites), ou comme filons traversant les strates de roches primitives (granite-gneis), ces roches primitives et intermediaires feldspathiques peuvent avoir, selon l'opinion de quelques geognostes, la meme origine ignee que la masse des couches intercalees ou des filons (mandelstein, dolerites, basaltes), sans que les epoques de formation et les circonstances dans lesquelles les forces volcaniques ont agi, aient ete identiques. Les limites entre les filons et les bancs intercales trappeens, pyroxeniques ou porphyriques, ne sont pas toujours si tranchees qu'on pourroit le croire d'apres les definitions que l'on a coutume de donner des geites particuliers des minerais. Plusieurs de ces bancs ne sont que des amas entrelaces et formes par la reunion d'un grand nombre de filons. Lorsque ceux-ci suivent dans une grande epaisseur (voyez mes coupes du celebre filon de Guanaxuato) la direction et l'inclinaison des strates de la roche, ils prennent tout l'aspect d'une couche. Nous insistons sur ces remarques, parce que la nouvelle geogonie a une tendance a faire monter, de bas en haut, des masses liquefiees a travers des crevasses, tandis que l'ancienne geogonie expliquoit tout par des precipitations, par des mouvemens dans un sens oppose. On peut croire que ces directions doivent avoir ete differentes selon la nature des matieres qui se sont consolidees, selon qu'elles etoient cristallines et siliceuses, calcaires ou fragmentaires. La geognosie positive a profite de ces discussions sur l'origine ignee ou neptunienne des roches: mais elle rend les classifications independantes des resultats geogoniques; elle ne separe pas les masses intercalees des terrains dans lesquels on les trouve, et elle ne laisse reunies, dans la division des roches dont nous nous occupons ici sous le nom de terrain volcanique, que des formations superposees, surajoutees a des formations primitives, intermediaires, secondaires et tertiaires. La place que doit occuper une roche d dans la serie geognostique, est determinee par la roche la plus recente, g, qu'elle recouvre, et par la roche la plus ancienne, e, dont elle est recouverte. Si d est superpose a e, il est tout naturel qu'on le trouve aussi place sur les roches plus anciennes a, b, g, qui sont les termes precedens de la serie. L'application de ce principe tres-simple de la geognosie de gisement exige beaucoup de circonspection, lorsqu'il s'agit de roches trachytiques, basaltiques et phonolithiques. Un meme courant de laves, une meme nappe de masses pyroxeniques repandues a la fois sur du granite, sur du micaschiste et sur un terrain d'eau douce, offrent sans doute des preuves incontestables d'une origine posterieure aux formations tertiaires les plus modernes: mais l'age d'une formation volcanique est plus difficile a determiner quand il n'y a pas continuite de masse, et quand on confond, sous une denomination generale, des matieres qui se sont epanchees lateralement, avec d'autres qui ont perce de bas en haut, par soulevement, a travers des roches preexistantes. La ou des trachytes et des basaltes se trouvent reunis, la formation la plus recente sur laquelle sont appuyes les basaltes, ne fixe pas necessairement l'age des trachytes: l'une et l'autre de ces roches ont, sans doute, ete produites d'une maniere differente et non simultanee. Il se pourroit meme que, dans une region de peu d'etendue, diverses masses trachytiques isolees, mais d'une composition analogue, ne fussent pas d'une meme formation, les unes sortant d'une syenite de transition, les autres de roches primitives. Le plus souvent l'accumulation des conglomerats trachytiques masque a tel point le gisement des trachytes, que l'on ne peut deviner leur superposition. C'est ainsi que l'on croit les trachytes du Siebengebirge, pres de Bonn, sortis du grauwacke, et ceux d'Auvergne sortis d'un plateau de granite qui pourroit bien deja appartenir au terrain intermediaire. De meme qu'il faut distinguer entre les veritables coulees basaltiques avec olivine et les masses pyroxeniques noires, bulleuses, intercalees aux trachytes et a quelques porphyres de transition, de meme aussi il ne faut pas confondre les veritables trachytes (Drachenfels, Chimborazo, Antisana) avec des laves feldspathiques (leucostiniques) qui ont coule par bandes etroites (ancien cratere de la Solfatare pres Naples) et qui peuvent se repandre sur des conglomerats tuffaces. ( Dolomieu, dans le Journ. des mines, n.os 41, 42 et 69; Nose, Niederrh. Reise, T. II, p. 428; Spallanzani, Voy. dans les deux Siciles, T. III, p. 196; Ramond, Nivell. geogn. de l' Auvergne, p. 11, 91; Buch, Geogn. Beob., T. II, p. 178, 205; Id., dans les Mem. de l' Acad. de Berlin, 1812, p. 129 -- 154; Beudant, Voy. en Hongrie, T. III, p. 508 -- 513, 521 -- 527 et 530 -- 544.) En Hongrie, le terrain trachytique paroeit s'etre forme entre l'epoque des terrains secondaires et celle des terrains tertiaires. M. Beudant, qui a donne sur les roches de trachyte le traite le plus complet que nous possedions, les a vues reposer sur des grünstein (Kremnitz, Dregely, Matra) et sur des calcaires de transition (Glashütte, Neusohl). Les conglomerats trachytiques recouvrent aussi en Hongrie des grauwackes schisteux, et meme un calcaire magnesifere, qui paroeit appartenir a la formation du Jura. Dans cette partie orientale de l'Europe, le gres a lignites, le calcaire grossier et d'autres roches tertiaires sont superposes a leur tour a ces conglomerats. Des superpositions semblables de gres, de gypse et de calcaires d'une origine tres-recente, ont ete observees par M. de Buch et par moi aux eiles Canaries et dans les Cordilleres des Andes. D'apres un excellent observateur, M. Breislak ( Atlas geol., pl. 39), les trachytes des Monts Euganeens reposent (Schivanoja, pres de Castelnuovo) sur le calcaire du Jura; mais dans la region du monde la plus abondante en roches trachytiques, dans la partie occidentale du nouveau continent, tant au nord qu'au sud de l'equateur, je n'ai vu nulle part les trachytes se faire jour a travers des formations si modernes. Les resultats de gisement les plus importans qu'ont offerts mes voyages dans la zone volcanique des Andes (1801 -- 1804), se reduisent aux faits suivans. Toutes les cimes les plus elevees des Cordilleres sont des trachytes. Les volcans actuels agissent tous par des ouvertures formees dans le terrain trachytique. Ce terrain embrasse par zones une grande partie des Cordilleres; mais il s'etend rarement vers les plaines, et les volcans encore enflammes, loin d'etre solitaires ou associes par groupes de forme irreguliere plus ou moins circulaire, comme en Europe ( Ramond, Niv., p. 45; Humb., Rel. hist., T. II, p. 16), se suivent, a la maniere des volcans eteints de l'Auvergne et des crateres braulans de l'eile de Java, par files, tantot dans une serie, tantot sur deux lignes paralleles. Ces lignes sont dirigees generalement (montagnes de Guatimala, de Popayan, de los Pastos, de Quito, du Perou et du Chili) dans le sens de l'axe des Cordilleres, quelquefois (Mexique) elles font avec cet axe un angle de 70°. La meme ou les trachytes, par leur accumulation, ne couvrent pas le sol entier, ils se trouvent comme eparpilles en petites masses sur le dos et la crete des Andes, s'elevant en forme de rochers pointus au sein des roches primitives et de transition. Les trachytes et les basaltes se montrent rarement reunis, et ces deux systemes de roches semblent se repousser mutuellement. De veritables basaltes avec olivine ne forment pas des couches intercalees dans le trachyte; mais lorsqu'ils se trouvent rapproches des trachytes (entre Quito et la Villa de Ibarra; Julumito a l'ouest de Popayan; vallee de Santiago dans la Nouvelle-Espagne; Cerros de las Cuevas et de Canoas pres du volcan de Jorullo), ce sont les basaltes et les mandelstein qui recouvrent ces derniers. Les roches trachytiques ont leur siege principal dans le terrain de transition, dans les grandes formations de syenites et de porphyres (§§. 21 et 23), anterieures et posterieures aux grauwackes et aux thonschiefer, surtout dans la premiere de ces formations, qui recouvre immediatement les roches primitives. Lorsque, dans les Andes, les trachytes paroissent couvrir des granites avec amphibole, ou des gneis et des micaschistes verts et steatiteux, il reste douteux si ces dernieres roches, loin d'etre primitives, n'appartiennent pas plutot au terrain de transition. On peut regarder comme egalement problematique, si ces apparences de recouvremens, ces superpositions des roches trachytiques sur des formations preexistantes ne sont pas plutot de simples appositions, et si le trachyte (Extentam tumefecit humum, ceu spiritus oris Tendere vesicam solet, aut direpta bicornis Terga capri; tumor ille loci permansit, et alti Collis habet speciem, longoque induruit aevo, dit Ovide, Metamorph., lib. IX, du cone souleve de Trecene dans l'Argolide), si le trachyte, dis-je, en soulevant et en brisant l'ancienne croaute du globe, n'est pas sorti perpendiculairement sous la forme de cloches (Chimborazo), ou bien sous celle de chateaux forts en ruines (sommet des Cordilleres du Perou, entre Loxa et Caxamarca). Les trachytes des Andes et du Mexique, qui renferment du perlite et de l'obsidienne, ne sont generalement recouverts que par d'autres roches volcaniques (phonolithes, basaltes, mandelstein, conglomerats et tuffs ponceux). Quelquefois de petites formations locales, calcaires et gypseuses, que l'on peut appeler tertiaires, parce qu'elles sont certainement posterieures a la craie, surmontent les trachytes; mais vers le bas ces memes trachytes des Cordilleres, surtout lorsqu'ils ne sont pas recouverts, sont geognostiquement lies de la maniere la plus intime avec les porphyres poreux et fendilles du terrain de transition: porphyres depourvus de quarz et renfermant du pyroxene et du feldspath vitreux, quelquefois riches en filons argentiferes et supportant sur d'autres points des formations secondaires, meme du calcaire de transition, noir et carbure (voyez plus haut, p. 151, 158 -- 181, 205 -- 213). Cette liaison pourra motiver un jour, dans nos methodes, la suppression du terrain volcanique, en tant qu'on le considere comme oppose, par le mode de sa formation et de son origine, aux roches de tous les autres terrains. Il y a des roches volcaniques dans le terrain de transition et dans le gres rouge, comme il y a des roches fragmentaires, agglomerees, remaniees par les eaux, dans le terrain volcanique. Ce dernier mot, pour lui donner un sens precis, seroit le mieux applique aux seules productions des volcans qui ont agi posterieurement a l'existence de nos vallees. Quoique, d'apres les observations faites dans les deux continens, les trachytes et d'autres roches analogues qui paroissent dus a la meme action des forces volcaniques, et dans lesquels le feldspath compacte ou vitreux domine sur l'amphibole et le pyroxene, se trouvent principalement dans le terrain de transition et sur les limites de ce terrain et des roches secondaires les plus anciennes, on ne peut etendre cette conclusion aux basaltes, qui sont souvent enclaves dans le granite primitif (Schneekoppe en Silesie; Roche rouge, pres de Serassac dans le Velay), et qui sont peut-etre anterieurs a certaines formations de trachytes? Dans une contree tres-circonscrite, dans un meme agroupement de roches volcaniques, les trachytes grenus ou porphyres trachytiques, qu'il ne faut pas confondre avec des roches fragmentaires ou des conglomerats de trachytes beaucoup plus modernes, sont generalement d'une formation plus ancienne que les basaltes qui les recouvrent en coulees ou en larges nappes. Au contraire, les basaltes, posterieurs aux conglomerats trachytiques et ponceux, sont le plus souvent anterieurs aux conglomerats et tuffs basaltiques; mais, nous le repetons, des que nous devons comparer des lambeaux epars d'un terrain de trachytes, de phonolithes ou de basaltes, lambeaux non recouverts et gisant dans des formations granitiques, intermediaires ou secondaires, ces roches de trachytes, de basaltes et de phonolithes ne peuvent plus etre rangees comme termes d'une meme serie geognostique. Ce qui sort du granite le plus ancien, peut etre posterieur a une roche analogue qui s'est fait jour a la fois a travers des roches de transition. L'oryctognosie ou mineralogie descriptive, qui analyse le tissu des substances volcaniques, parviendra a les classer d'apres les principes que M. Cordier a si bien etablis dans son memoire sur la composition des roches pyrogenes de tous les ages; mais la geognosie, qui ne considere que l'age relatif et les gisemens, sera forcee de compter un grand nombre de roches incertae sedis, meme lorsqu'une plus vaste partie de la terre aura ete examinee avec soin. Cette incertitude ne tient pas a l'imperfection des methodes, mais a l'impossibilite de comparer, sous le rapport de leur succession ou de l'epoque de leur origine, des masses rocheuses eparses et non recouvertes. L'historien de la nature, comme celui des revolutions du genre humain, recueille, compare et discute tous les faits; mais il ne peut coordonner par series ceux qui ne presentent aucun caractere chronologique. Dans cet etat des choses, loin de meler des considerations oryctognostiques aux classifications de la geognosie positive, il me paroeit convenable de ranger les roches volcaniques d'apres le type de gisement que l'on observe le plus generalement dans les deux hemispheres, la ou le plus grand nombre de ces roches se trouve agroupe. La grande masse des substances dans lesquelles le feldspath predomine (trachytes, leucostines), sera suivie, comme dans les tableaux oryctognostiques, de la grande masse des substances dans lesquelles predomine le pyroxene (basaltes, dolerites); mais cette harmonie apparente entre des methodes fondees sur deux principes differens, celui de la composition et celui de l'ordre des gisemens, disparoeit des que l'on examine les formations partielles ou in tercalees. Le geognoste distingue alors entre les phonolithes des trachytes et les phonolithes des basaltes; il place des leucostines compactes dans le terrain pyroxenique, comme il indique une formation de dolerites (melange de feldspath et de pyroxene, dans lequel la derniere substance est la plus frequente) au milieu des leucostines ou trachytes. C'est d'apres ces principes que j'ai esquisse la distribution des roches volcaniques, dont le tableau a ete place a la fin des terrains de transition (p. 232). Cette distribution se fonde sur les observations vraiment geognostiques publiees par MM. Leopold de Buch, Breislak, Boue et Beudant, et sur celles que j'ai eu occasion de faire moimeme en Italie, au Pic de Teneriffe, dans les Cordilleres de la Nouvelle-Grenade, de Quito et du Mexique. J'ajouterai a la nomenclature des terrains l'indication succincte des gisemens les plus interessans de l' Amerique equinoxiale. I. Formations trachytiques, comprenant les trachytes grenus (granitoides et syenitiques); les trachytes porphyriques ou porphyres trachytiques, en partie pyroxeniques, en partie celluleux, avec nids siliceux (meulieres trachytiques ou porphyres molaires de M. Beudant); les trachytes semi-vitreux; les perlites avec obsidienne, et les phonolithes des trachytes. On peut ajouter a cette serie les conglomerats trachytiques et ponceux, avec alunite, soufre, opale et bois opalise; car chaque terrain volcanique, comme chaque roche intermediaire et secondaire, a ses conglomerats, c'est-a-dire, ses roches fragmentaires, dont elle a fourni les premiers elemens. Les trachytes (granites chauffes en place des anciens mineralogistes, porphyres trappeens, beaucoup de laves petrosiliceuses de Dolomieu, domites de MM. de Buch et Ramond, necrolithes de M. Brocchi, leucostine granulaire de M. Cordier) n'offrent generalement, dans l'ancien continent, que peu de traces de stratification; mais dans les Cordilleres des Andes ils sont souvent tres-regulierement stratifies (Chimborazo, N. 60° E.; Assuay, N. 15° E.), mais variant par groupe et de direction et d'inclinaison, comme font les phonolithes du terrain basaltique (Mittelgebirge en Boheme). La structure en colonnes (prismes de 4 a 7 pans) est tres-commune dans les trachytes porphyriques des Cordilleres, non-seulement dans les roches noires a base de retinite (pechstein) avec feldspath vitreux et pyroxene (Passuchoa, pres de la ville de Quito, au sud des collines de Poingasi; Faldas de Pichincha; Paramos de Chulucanas, Aroma et Cunturcaga, dans les Andes du Perou, entre Loxa et Caxamarca); mais aussi dans les trachytes gris-verdatre du Chimborazo (prismes minces de 50 pieds de long; hauteur du plateau, 2180 toises), comme dans les trachytes granitoides de Pisoje, au pied du volcan de Purace. Ces derniers sont gris-verdatre, renferment du mica noir, du feldspath commun et un peu d'amphibole, et leur ressemblance avec les graniti colonnari des Monts Euganeens les eloigne beaucoup (p. 169) des porphyres du terrain de transition. La structure globulaire (en spheroides a couches concentriques) paroeit plutot appartenir aux formations basaltiques qu'aux veritables trachytes. Les teintes pales dominent dans les trachytes des Cordilleres, et les masses noires de cette roche m'ont paru en general posterieures aux masses blanches, grises et rouges. La meme difference de gisement paroeit avoir lieu en Hongrie. Les trachytes noirs prennent quelquefois (Rucu-Pichincha pres de Quito, surtout a l'arete de Tablahuma, 2356 toises) tout l'aspect du basalte; mais l'olivine y manque toujours, et l'on n'y reconnoeit que de petits cristaux de pyroxene qui penetrent jusque dans l'interieur des cristaux du feldspath vitreux. Dans les Andes, comme dans l'ancien continent, chaque cone ou dome trachytique (les premiers ne paroissent que des domes ou cloches percees a leur sommet et couvertes sur leurs flancs d'ejections ponceuses et scorifiees) presente des roches entierement differentes dans leur composition, selon que l'un des elemens predomine dans le tissu cristallin. Le mica noir est le plus commun dans les trachytes du Cotopaxi (entre le Nevado de Quelendanna et le ravin de Suniguaicu, 2263 t.), volcan qui abonde en meme temps en masses vitreuses et en obsidiennes; l'amphibole domine dans les trachytes souvent noirs de Pichincha et d'Antisana; le pyroxene dans la region inferieure et moyenne du Chimborazo, dont les trachytes renferment quelquefois des pyrites, du quarz, et deux varietes de feldspath, le vitreux et le commun. L'ancien volcan de Yana-Urcu, adosse au Chimborazo (du cote du village de Calpi), est depourvu de pyroxene et contient de grands cristaux d'amphibole. Dans les trachytes du Nevado de Toluca (Mexique) et d'Antisana on observe souvent, comme dans les trachytes du Puy-de-Dome, des parties bulleuses et scorifiees a cellules lustrees, enchassees dans des masses compactes et terreuses. Les phonolithes des trachytes sont plus caracterises dans le volcan de Pichincha (Pic des Ladrillos et Guagua-Pichincha), de meme qu'a la pente orientale du Chimborazo, pres de Yanacoche (hauteur, 2300 t.). A Antisana (Machay de San-Simon) et au nord de la Villa de Ibarra (Azufral de Cuesaca, plateau de Quito) les trachytes a base de feldspath compacte, mele d'amphibole, renferment du soufre natif, comme le trachyte du Puy-de-Dome et des bords de la Dordogne ( Ramond, Niv. geogn., p. 75, 86). Il ne faut pas confondre cette formation de soufre natif avec celles des solfatares ou crateres eteints, des mandelstein celluleux (entre Pate et Tecosautla au Mexique) et des argiles du terrain basaltique (province de los Pastos). L'epaisseur des couches de trachytes est telle que sur le plateau de Quito elle atteint indubitablement et en masses continues (Chimborazo, Pichincha) 14,000 a 18,000 pieds. Comme tres-peu de volcans des Andes ont donne de veritables coulees de laves lithoides, les trachytes y sont presque partout a decouvert. Il n'y a que les conglomerats trachytiques, et des formations problematiques argileuses (tepetate), dont nous parlerons bientot, qui les cachent quelquefois a l'examen des geognostes. J'ai trouve du feldspath commun et laiteux dans les trachytes poreux, legers et blancs, du Cerro de Santa Polonia (1532 toises, pres de Caxamarca, Andes du Perou); a la cime du Cofre de Perote au Mexique (le Penna del Nauhcampatepetl, 2098 toises), dans un trachyte gris-rougeatre, abondant en cristaux aciculaires d'amphibole et tres-regulierement stratifie (N. 28° E. avec 30° au N. O.); au volcan encore actif de Tunguragua, au sud de Quito (Cuchilla de Guandisava, 1658 t.), dans des trachytes rouge-de-brique et celluleux; enfin, a la base du Chimborazo, pres du petit volcan eteint de Yana-Urcu (1700 t.), dans des trachytes noirs et vitreux. M. de Buch, qui a examine avec soin ces dernieres roches, y a meme reconnu a la fois des cristaux de feldspath vitreux et de feldspath commun, phenomene que j'ai trouve repete dans plusieurs porphyres de transition du Mexique. Les petits cristaux aciculaires d'amphibole sont quelquefois places comme par files sur plusieurs lignes paralleles, et affectent tous la meme direction (vallee du Cer au Cantal; trachytes gris-blanchatre de Riobamba viejo, avec rhombes de feldspath decompose en une terre jaunatre). Le mica est beaucoup plus rare dans les trachytes du Mexique et des Andes que dans ceux du Siebengebirge, des Gleichen en Styrie, pres de Radkersburg, et de Hongrie: j'en ai trouve cependant de belles tables noires hexagones, tant a la base du volcan de Pichincha (pres de Javirac ou du Panecillo de Quito, 1600 t.), que dans les trachytes semivitreux gris-bleuatre de Cotopaxi, et dans les trachytes rouges et poreux du Nevado de Toluca (sommet du Fraile, 2372 toises). Le titane ferrifere ne manque pas dans les trachytes de Quito et du Mexique; mais les lames de fer oligiste speculaire, egalement communs dans les trachytes et les laves de l'Italie et de la France, sont assez rares dans les roches volcaniques fendillees de l'Amerique equinoxiale. En considerant les trachytes des Cordilleres sous un point de vue general, il n'y a pas de doute qu'on ne les trouve caracterises par une absence de quarz en cristaux et en grains. Ce caractere, comme nous l'avons vu plus haut, s'etend meme sur la plupart des porphyres metalliferes de l'Amerique equinoxiale (§§. 23 et 24), qui semblent lies aux trachytes; mais l'une et l'autre de ces roches offrent des exceptions frappantes a une loi que l'on auroit pu croire generale. Ces exceptions prouvent de nouveau que le geognoste ne doit pas attacher une grande importance a la presence ou a l'absence de certaines substances disseminees dans les roches. La plus grande masse du Chimborazo est formee par un trachyte semi-vitreux, vert-brunatre (a base cireuse, comme de resinite), depourvu d'amphibole, abondant en pyroxene, tres-compacte, tabulaire, ou divise en colonnes minces, irregulieres et tetraedres. Ce trachyte renferme, comme couche intercalee, un banc rouge pourpre, celluleux, a cristaux de feldspath a peine visibles, et parseme de nodules alonges de quarz blanc. Plus haut (a 3016 toises de hauteur, ou nous veimes descendre le mercure dans le barometre a 13 pouces 11 [Formel] lignes), le quarz disparoeit, et l'arete de rocher sur laquelle nous marchames etoit couverte d'une traeinee de masses rouges, bulleuses, desagregees et assez semblables aux amygdaloides de la vallee de Mexico. Ces masses, les plus elevees de celles qu'on a recueillies jusqu'ici a la surface de la terre, etoient rangees en file, et pourroient faire croire a l'existence d'une petite bouche pres du sommet du Chimborazo, bouche qui s'est vraisemblablement refermee, comme celles de l'Epomeo, a l'eile d'Ischia, et de Guambalo et d'Igualata, entre Mocha et Penipe (province de Quito). Sur le plateau central du Mexique les trachytes de Lira enchassent a la fois du quarz laiteux, de l'obsidienne et de l'hyalithe. M. Beudant a aussi reconnu recemment des cristaux de quarz dans les trachytes porphyriques (a globules vitro-lithoides), dans les trachytes meulieres et les perlites de Hongrie ( Voy. en Hongrie, T. III, p. 346, 365, 519, 575). Le meme phenomene se trouve repete dans quelques trachytes de l'Auvergne (Puy Baladou; Cantal, Col de Caboe), des Dardanelles et du Kamtschatka. Lorsqu'on se rappelle qu'il y a, d'apres l'analyse de M. Vauquelin, 92 pour cent de silice dans les trachytes du Sarcouy, que tous les basaltes et les laves en abondent, il faut plutot etre surpris que cette substance disseminee dans des silicates de fer et d'alumine n'ait pu se reunir plus souvent sans melange en cristaux ou grains de quarz pur. Ce n'est que la difficulte opposee a la concentration de la silice autour d'un noyau qui caracterise une grande partie des roches volcaniques. (Voyez plus haut, p. 164.) Le pyroxene a ete regarde jusqu'ici comme extremement rare dans les trachytes d'Europe. La couche de pyroxene que M. Weiss a decouverte entre Muret et Thiezac (au-dessus d'Aurillac en Auvergne; Buch, über Trapp-Porphyr, p. 135), semble plutot appartenir a une formation basaltique superposee au trachyte. Mais en Hongrie ( Beudant, T. III, p. 317, 519), comme dans la Cordillere des Andes, le pyroxene se trouve assez souvent dans les trachytes porphyroides: il y remplace l'amphibole (Chimborazo, Tunguragua, base du volcan de Pasto, region moyenne du volcan de Purace, pres de Popayan). L'espece de repulsion qu'on croit observer entre le pyroxene et l'amphibole, est d'autant plus frappante que dans le terrain basaltique ces deux substances se trouvent assez souvent reunies (Rhönegebirge en Allemagne). Les trachytes du Mexique m'ont paru assez generalement depourvus de pyroxene. Le grenat, que nous avons deja vu dans les porphyres de transition du Potosi et d'Izmiquilpan, reparoeit, quoique tres-rarement, dans les trachytes des Andes: j'en ai trouve dans le volcan de Yana-Urcu (trachyte noir); M. Beudant en a recueilli dans les perlites lithoides d'Hongrie. Je doute aujourd'hui de l'existence de l'olivine dans le terrain trachytique des Cordilleres: ce que j'avois pris pour cette substance, etoient des grains de pyroxene d'une teinte tres-peu foncee. L'olivine appartient peut-etre exclusivement aux terrains basaltiques et a quelques laves lithoides. M. de Buch l'a reconnue parmi les ejections du volcan de Jorullo, qui forment un tissu a petit grain d'olivine, de feldspath vitreux et de mica jaune. Il n'y a aucune trace d'amphibole ni de pyroxene, quoique ce volcan se soit fait jour a travers un terrain de trachyte. M. Beudant doute aussi de la presence de l'olivine dans les trachytes de Hongrie, meme dans ceux du groupe de Vihorlet. Lorsque des chimistes se seront occupes plus specialement des trachytes des Cordilleres, qui offrent une si grande variete de roches, on y decouvrira probablement aussi de l'acide muriatique (comme au Sarcouy en Auvergne) et du mica commun melange de titane oxide, comme au Vesuve. ( Soret, Sur les axes de double refraction, 1821, p. 59.) Les observations que l'on peut faire sur le gisement des roches volcaniques, offrent plus d'interet encore que l'etude de leur composition. Les trachytes du volcan eteint de Tolima (§. 7) semblent sortir d'un granite posterieur au gneis primitif. J'ai vu paroeitre (Alto del Roble) le micaschiste (p. 129) sous les trachytes des volcans encore braulans de Popayan. Les granites a travers lesquels les domes trachytiques du Baraguan et de Herveo (Erve) se sont fait jour, sont peut-etre d'un age plus recent que le micaschiste. L'observation de gisement la plus importante que j'aie faite dans l'immense plateau entierement trachytique de Quito (espece de volcan polystome), a rapport aux trachytes de Tunguragua. Apres avoir cherche en vain, pendant plus de six mois, quelque trace de roches vulgairement appelees d'origine neptunienne, j'ai trouve, pres du pont de cordage de Penipe (Rio Puela, 1240 toises), sous les trachytes noirs semivitreux, souvent colonnaires, du cone encore enflamme de Tunguragua, un micaschiste verdatre, a surface striee et soyeuse, renfermant des grenats et ressemblant aux micaschistes du terrain primitif (voyez plus haut, p. 119). Cette roche repose sur un granite syenitique, compose de beaucoup de feldspath verdatre lamelleux et a gros grains, de peu de quarz blanc, de tables hexagones de mica noir, et de quelques cristaux effiles d'amphibole. La cassure du granite offre un aspect steatiteux, et prend, au souffle, une teinte vert-d'asperge. Ces syenites et ces micaschistes avec grenats rappellent ceux que MM. de Buch et Escolar ont decouverts dans l'archipel des Canaries, en blocs, au milieu des terrains trachytiques de Fortaventura et de Palma. (Humboldt, Rel. hist., T. I, p. 640.) Il est tres-certain que les roches de Penipe, qui n'appartiennent peut-etre qu'au terrain de transition, sont en place; qu'elles viennent au jour sous un veritable trachyte grenu, et non sous une roche fragmentaire, sous un conglomerat trachytique, comme c'est le cas a Vic, a Aurillac et a S. Sigismond ( Buch, Trapp-Porphyr, p. 141): mais, sans percer une galerie dans le flanc de Tunguragua, il est impossible de decider s'il y a superposition, si le trachyte recouvre le micaschiste sur une grande etendue, comme la craie recouvre le calcaire du Jura, ou si le trachyte, en brisant les roches plus anciennes et en s'elevant perpendiculairement, s'est simplement incline vers les bords sur le micaschiste adjacent. Autour du cone trachytique de Cayambe on trouve aussi du micaschiste avec epidote, et un granite qui abonde en mica brun et jaune. Plus au nord, dans les Cordilleres du Popayan, en montant au village de Purace, j'ai vu, sous le grand volcan de ce nom, pres de Santa-Barbara, le trachyte semi-vitreux appuye sur une syenite porphyrique (avec feldspath commun): cette syenite est bien visiblement superposee sur un granite de transition abondant en mica (p. 167). Au pied des volcans mexicains encore actifs (le Popocatepetl et le Jorullo), nous n'avons pas ete assez heureux, M. Bonpland et moi, de decouvrir des roches de granite, de micaschiste ou de syenite en place; mais nous avons vu enchassees, au milieu des laves lithoides noires et basaltiques de Jorullo, des fragmens anguleux blancs ou blanc-verdatre de syenite, composes de peu d'amphibole et de beaucoup de feldspath lamelleux. La ou ces masses ont ete crevassees par la chaleur, le feldspath est devenu filandreux, de sorte que les bords de la fente sont reunis dans quelques endroits par les fibres alongees de la masse. Dans l'Amerique du Sud, entre Almaguer et Popayan, au pied du Cerro Broncaso, j'ai trouve de veritables fragmens de gneis compactes dans un trachyte abondant en pyroxene (p. 171). Ces phenomenes, auxquels je pourrois en ajouter beaucoup d'autres, prouvent que les formations trachytiques sont sorties au-dessous de la croaute granitique du globe. Les obsidiennes dont nous avons rapporte, M. Sonneschmidt et moi, de si curieuses varietes en Europe, m'ont paru appartenir, dans les Cordilleres, a deux sections bien distinctes du terrain trachytique, aux veritables trachytes noirs (Cerro del Quinche, au nord de Quito) et blancs (Cerro de las Novajas ou Oyamel, au nord-est de Mexico), et a la perlite (Cinapecuaro, entre Mexico et Valladolid). Il faut distinguer de ces deux formations les obsidiennes des courans de laves modernes (Pic de Teneriffe), formant la partie superieure de ces courans. Les fragmens de roches vomis par le cratere de Cotopaxi, et remplis de rognons d'obsidienne, paroissent arraches aux parois du cratere; mais les morceaux d'obsidienne lances par le volcan de Sotara, pres de Popayan, a des distances de plusieurs lieues, meritent plus d'attention. Les champs de los Serillos, des Uvales et de Palace, en sont couverts. On les trouve dissemines comme des fragmens de silex; ils reposent sur des roches basaltiques, auxquelles cependant ils sont entierement etrangers. Ces obsidiennes de Popayan ont souvent la forme de larmes ou meme de boules a surface tuberculeuse: elles offrent, ce que je n'ai vu nulle part ailleurs, toutes les nuances de couleurs, depuis le noir fonce, jusqu'a celle d'un verre artificiel entierement incolore. Elles sont quelquefois melees de fragmens d'emaux lances par le meme volcan de Sotara, et que l'on seroit tente de prendre pour de la porcelaine de Reaumur . La pate des trachytes semi-vitreux gris-bleuatre et a cassure conchoide (volcan de Purace, pres Popayan, dans la plaine du Cascajal, a 2274 toises de hauteur), passe sans doute quelquefois a l'obsidienne; mais les grandes masses de veritables obsidiennes, disposees par couches ou par rognons a contours bien prononces, se trouvent dans d'autres varietes de trachytes. Nous avons deja decrit plus haut les roches du Cerro de las Navajas (§. 23), ou se trouvent les obsidiennes chatoyantes, striees et argentees (plateadas), generalement disseminees par fragmens, mais formant quelquefois aussi des couches dans un trachyte blanc. Des couches analogues, mais d'une epaisseur de 14 a 16 pouces, sont intercalees aux trachytes noirs pyroxeniques du Cerro del Quinche (plateau de Quito). Elles offrent des obsidiennes noir-verdatre et veinees de bandes rouge-de-brique. Pres de l'Hacienda de Lira, au nord de Queretaro (plateau du Mexique, 995 toises), j'ai trouve dans des trachytes vert-d'olive et a base de retinite (trachytes qui renferment a la fois du feldspath vitreux et des grains de quarz dissemines), des couches d'obsidienne noire de trois pouces d'epaisseur. Sur d'autres points du plateau de la Nouvelle-Espagne; a Cinapecuaro, au pied du Cerro Ucareo (dans le chemin de Valladolid de Mechoacan a Toluca, hauteur 968 toises), et entre Ojo del agua et El Pinal (dans le chemin de la Puebla de los Angeles a Perote, hauteur 1180 toises), les obsidiennes se trouvent par rognons dans un perlite (perlstein) a eclat emaille, compose de petits globules semi-vitreux blanc-grisatre. Je n'y ai pas vu de mica, mais des infiltrations d'hyalithe et quelques petits cristaux de feldspath filandreux, presque ponceux. A Cinapecuaro, le perlite forme de petites collines coniques, entourees de pics de basaltes et de domes trachytiques. La roche est tres-regulierement stratifiee (N. 22° E., incl. de 80° au Nord-ouest): on la prendroit de loin pour un gres schisteux. L'obsidienne noire, vert-noiratre et vert-grisatre, s'y trouve par nids ou rognons de deux a cinq pouces d'epaisseur, de sorte que, par la juxtaposition de ces rognons, le perlite paroeit quelquefois enchasse dans une veritable roche d'obsidienne. Dans les plaines orientales du Mexique, entre Acaxete, Ojo del agua et El Pinal, l'obsidienne est moins abondante, mais souvent rubanee comme du jaspe. Le perlite y renferme beaucoup de tables hexagones de mica noir; il est souvent fibreux et passe a ce que M. Beudant appelle (T. III, p. 364, 389) perlite ponceux. En general, les obsidiennes du Mexique et des Andes de Quito offrent, et souvent sur une plus grande echelle, les memes phenomenes de composition que l'on observe dans ceux de Lipari et de Volcano, et que quelques geognostes ont attribues jadis a une devitrification (glastinisation). On y trouve enchasses de petits cristaux de feldspath vitreux; des masses polyedres de perlstein remplissant entierement les vacuoles dans lesquelles on les suppose formes; des agregations de grains cendres, d'un aspect terreux et distribues par zones paralleles souvent interrompues; enfin, des fragmens de trachyte brun-rougeatre, a demi-fondus, places tous d'un meme cote, a l'extremite de vacuoles tres-alongees et paralleles entre elles. M. de Buch, qui a fait un examen particulier des substances volcaniques recueillies dans la region equinoxiale du nouveau monde, observe que les masses de perlites, tantot spheroidales, tantot octogones dans leur coupe, ont constamment au centre un cristal tres-petit de feldspath vitreux ou d'amphibole, et que la position de ce cristal a determine la forme de tout le systeme. ( Buch, dans les Schriften Naturf. Freunde, 1809, p. 301. Humboldt, Rel. hist., T. I, p. 161.) M. Beudant a trouve des grenats rouges dans les perlites retinitiques de Hongrie (Vissegrad), qui ressemblent au pechstein-porphyr du terrain de transition: j'en ai vu d'egalement rouges au sommet du volcan de Purace, dans un trachyte bleuatre, semi-vitreux, a cassure conchoide, depourvu de mica et d'amphibole, mais enchassant, outre le pyroxene et le feldspath vitreux, des points cendres semblables a ceux que l'on remarque dans les obsidiennes de Lipari et du Cerro de las Navajas. La presence des grenats dans des roches generalement melees d'amphibole recoit quelque importance par les observations ingenieuses de M. Berzelius ( Nouv. Systeme de mineralogie, p. 301) sur les affinites chimiques du grenat et de l'amphibole renfermant des silicates d'alumine et d'oxidule de fer. C'est dans les obsidiennes que j'ai rapportees de la Nouvelle-Espagne, que M. Collet-Descotils a trouve le premier exemple de la presence simultanee de deux alcalis dans une meme substance minerale. Ce phenomene a ete observe depuis dans quelques varietes de feldspath, de wernerite, de sodalite, de chabasie et d'eleolithe (pierre grasse de Haüy). J'ai observe que beaucoup d'obsidiennes noires et rouges du Quinche et du Cerro de las Navajas ont des poles magnetiques, tout comme les porphyres (de transition?, p. 175), de Voisaco et comme un beau groupe de trachytes colonnaires du Chimborazo (hauteur 2100 toises). Ces trachytes etoient gris-verdatre et enchassoient quelques cristaux de feldspath lamelleux et laiteux. La derniere assise du terrain trachytique est formee par des conglomerats ou debris agglutines et remanies par les eaux. Ces conglomerats couvrent d'immenses surfaces, non au pied des Cordilleres, mais sur leurs flancs et sur des plateaux de 1200 a 1600 toises de hauteur. Dans une region ou presque tous les volcans actifs s'elevent au-dessus de la limite des neiges perpetuelles, et ou les eaux, lentement infiltrees dans des cavernes, et les neiges qui se fondent au moment de l'eruption, causent d'affreux ravages, l'etendue et l'epaisseur des terrains de transport et des roches fragmentaires regenerees doit necessairement etre en rapport avec les forces qui amenent encore de nos jours ces masses desagregees. Les conglomerats sont tantot friables et tuffaces (base de Cotopaxi et de l'Altar), tantot compactes et endurcies comme le gres (base de Pichincha). Les ponces en masses pulverulentes et en blocs de 25 a 30 pieds de longueur forment la partie la plus interessante de ces conglomerats du terrain trachytique. Nous ferons observer, a cette occasion, que le mot pierre-ponce est tres-vague en mineralogie: il ne designe pas un fossile simple, comme le font les denominations de calcedoine ou de pyroxene; il indique plutot un certain etat, une forme capillaire ou filandreuse sous laquelle se presentent des substances diverses, rejetees par les volcans. La nature de ces substances est aussi differente que l'epaisseur, la tenacite, la flexibilite et le parallelisme ou la direction de leurs fibres (Humboldt, Relat. hist., T. I, p. 162). Il existe des ponces noires d'une contexture bulleuse, a fibres croisees; on y reconnoeit beaucoup de pyroxene, et elles paroissent dues a des laves basaltiques scorifiees (plaine qui entoure le cratere de Rucu-Pichincha; tuff du Pausilippe pres de Naples). Quelques volcans rejettent des trachytes blancs, composes de feldspath compacte, de beaucoup d'amphibole, de tres-peu de mica, et dont une partie est devenue fibreuse (Rucu-Pichincha et Cotopaxi, sur le plateau de Quito; volcan de Cumbal pres Chilanquer, dans le plateau de los Pastos; Sotara pres de Popayan; Popocatepetl a l'est de Mexico). Souvent, dans des trachytes assez compactes et d'un tissu non fibreux, les fragmens rhomboidaux du feldspath deviennent creux et comme filandreux (plateau de Quito et du Mexique). Quelques varietes de perlstein offrent une texture fibreuse (plaine de la Nouvelle-Espagne, entre la Venta del Ojo del agua et la Venta de Soto; vallee de Gran et de Glashütte, en Hongrie). Enfin, des obsidiennes noirverdatre ou gris de fumee alternent avec des couches de pierre ponce a fibres asbestoides blanc-verdatre, rarement paralleles entre elles, quelquefois cependant perpendiculaires aux couches de l'obsidienne et semblables a une ecume filamenteuse de verre (Plaine des Genets, au Pic de Teneriffe). Ces dernieres varietes ont fait naeitre chez quelques geologues l'idee que toutes les ponces etoient dues a la fusion et au gonflement des laves vitreuses; on confondoit les obsidiennes ponceuses (asclerines de M. Cordier) avec les veritables ponces a fibres paralleles (pumites legeres de M. Cordier), caracterisees par de grandes tables hexagones de mica, et probablement dues a un mode d'action particulier que le feu des volcans exerce sur les trachytes blancs (granites des Isles Ponces de Dolomieu). Un savant qui a profondement etudie les roches trachytiques de l'Europe, a confirme ces apercus. "La ponce, dit M. Beudant, dans l'etat actuel de la science, ne peut pas meme etre regardee comme une espece distincte de roche: c'est un etat celluleux et filamenteux, sous lequel plusieurs roches des terrains trachytiques et volcaniques sont susceptibles de se presenter. ( Voyage mineral., T. III, p. 389.) Les immenses carrieres souterraines de pierre-ponce exploitees au pied du Cotopaxi, entre la ville de Tacunga (Llactacunga) et le village indien de San-Felipe (plateau de Quito, hauteur 1482 toises), m'ont paru les plus instructives pour decider la question du gisement de cette substance dans un terrain de rapport. Elles avoient deja fait naeitre chez Bouguer ( Figure de la terre, p. LXVIII ), dans un temps ou la geognosie n'existoit presque pas, plusieurs questions interessantes sur l'origine des ponces. Les petites collines de Guapulo et de Zumbalica, qui s'elevent jusqu'a 80 toises de hauteur, paroissent au premier abord entierement formees d'une roche blanche fibreuse, a couches horizontales et a fibres perpendiculaires: on pourroit en tirer des blocs depourvus de fentes de plus de 60 pieds de longueur. En examinant ces pretendues couches de plus pres, on voit que ce sont des masses de quatre pouces a trois pieds d'epaisseur, enchassees dans une terre blanche argileuse. Elles ne forment pas, a proprement parler, un conglomerat; les blocs ne sont que deposes dans l'argile, et recouverts de fragmens menus de ponces (de 8 a 9 toises d'epaisseur) qui sont divises en bancs horizontaux. Ces blocs de ponces blanches, quelquefois bleuatres, sont arrondis vers les bords; ils renferment du mica jaune et noir, des cristaux effiles d'amphibole (non de pyroxene) et un peu de feldspath vitreux. J'incline a croire que les collines de Zumbalica, qui ressemblent beaucoup a celles de Sirok en Hongrie ( Beudant, Voy. miner., T. II, p. 22), ne sont pas les parois interieures d'un ancien volcan ecroule: les grands blocs, qui ressemblent a des couches fracturees, sont geognostiquement lies aux petits fragmens des assises superieures; les uns et les autres ont sans doute ete deposes par les eaux, quoique dans des circonstances bien differentes de celles qui accompagnent les eruptions actuelles de Cotopaxi. L'aspect de tout le pays d'alentour nous prouve l'ancienne sphere d'activite de ce volcan, qui a une hauteur de 2952 toises et un volume enorme. A l'ouest du volcan, depuis l'Alto de Chisinche jusqu'a Tacunga, sur plus de quarante lieues carrees, tout le sol est couvert de pierre-ponce et de trachytes scorifies. Il est bien remarquable que le mode d'action volcanique propre a produire des ponces soit restreint, pour ainsi dire, a un certain nombre de montagnes ignivomes. L'Altar ou Capac-Urcu, anciennement plus eleve que le Chimborazo, est place dans la plaine de Tapia, vis-a-vis du volcan encore actif de Tunguragua. Le premier a vomi une immense quantite de ponces, le second n'en produit pas du tout. Cette meme difference existe entre les deux volcans voisins de la ville de Popayan, le Purace et le Sotara. Celui-ci a rejete a la fois des obsidiennes et des ponces, tout comme le volcan de Cotopaxi. A Rucu-Pichincha, ou je suis parvenu jusqu'a une des tours trachytiques (hauteur 2491 toises) qui dominent l'immense cratere du volcan, j'ai trouve beaucoup de ponces, et pas d'obsidiennes: aussi les ponces de Sotara et de Cotopaxi, qui renferment, outre le feldspath vitreux et un peu d'amphibole, de grandes tables hexagones de mica, ne sont certainement pas dues a l'obsidienne; elles different entierement de ces ponces vitreuses et capillaires que j'ai vues couvrir la pente du Pic de Teneriffe. Les superbes opales de Zimapan, au Mexique, ne paroissent pas appartenir, comme celles de Hongrie, aux conglomerats trachytiques, mais a des trachytes porphyriques qui renferment des globules rayonnes de perlite gris-bleuatre. (§. 23.) II. Formations basaltiques, comprenant les basaltes avec olivine, pyroxene et un peu d'amphibole; les phonolithes du basalte, les dolerites, l'amygdaloide celluleuse, les argiles avec grenats-pyropes, et les roches fragmentaires basaltiques (conglomerats et scories). Le terrain basaltique se lie d'un cote aux trachytes, dans lesquels le pyroxene devient progressivement plus abondant que le feldspath ( Cordier, sur les masses des Roches volcaniques, p. 25), en partie et, je crois, d'une maniere plus intime, aux laves des volcans qui ont coule sous forme de courans. Les phonolithes appartiennent a la fois au terrain trachytique et au terrain basaltique. Je doute qu'un veritable basalte avec olivine se trouve intercale comme couche subordonnee au trachyte. La phonolithe, qui forme de ces couches dans les trachytes des Cordilleres et de l'Auvergne, n'est que superposee aux basaltes. Lorsqu'elle ne s'eleve pas en pics isoles dans les plaines, elle couronne generalement les collines basaltiques. L'amphibole et le pyroxene se trouvent dissemines dans les trachytes et les basaltes; la premiere de ces substances appartient peutetre meme plus particulierement aux formations trachytiques. L'olivine caracterise les formations basaltiques, les laves tresanciennes de l'Europe et les laves tres-modernes (courant de 1759) du volcan de Jorullo au Mexique. Lorsqu'on ne considere que sous le rapport du volume les groupes de roches trachytiques et basaltiques repandues dans les deux continens, on observe que les grandes masses de ces groupes se trouvent tres-eloignees les unes des autres. Les pays qui abondent le plus en basaltes (la Boheme, la Hesse) n'ont pas de trachytes, et les Cordilleres des Andes, trachytiques sur d'immenses etendues, sont souvent entierement depourvues de basaltes. Ni le Chimborazo, ni le Cotopaxi, ni l'Antisana, ni le Pichincha, n'offrent de veritables roches basaltiques; tandis que ces roches, caracterisees par l'olivine, separees en belles colonnes de trois pieds d'epaisseur, se rencontrent sur le meme plateau de Quito, mais loin de ces volcans a l'est de Guallabamba, dans la vallee du Rio Pisque. Pres de Popayan les basaltes ne recouvrent pas les domes trachytiques de Sotara et de Purace; ils se trouvent isoles sur la rive occidentale du Cauca, dans les plaines de Julumito. Au Mexique, le grand terrain basaltique du Valle de Santiago (entre Valladolid et Guanaxuato), est tres-eloigne des volcans trachitiques du Popocatepetl et de l'Orizava. Tous ces basaltes que nous venons de nommer (Guallabamba, Julumito et Santiago) reposent probablement aussi, a de grandes profondeurs, sur un sol trachytique; mais nous ne considerons ici que l'isolement, la separation des montagnes de basaltes et de trachytes. En general, dans les Cordilleres du Mexique, de la Nouvelle-Grenade, de Quito et du Perou, les formations trachytiques l'emportent, pour la masse, de beaucoup sur les formations basaltiques; ces dernieres peuvent meme etre considerees comme tres-rares, en les comparant a celles qui traversent l'Allemagne de l'est a l'ouest, entre les paralleles de 50° et de 51°. Cette meme preponderance du terrain trachytique sur le terrain basaltique s'observe en Hongrie. "Partout, dit M. Beudant avec beaucoup de justesse, partout ou les masses de trachyte se sont developpees sur une grande echelle, on ne trouve que des lambeaux peu considerables de basalte, et reciproquement, dans les lieux ou le terrain basaltique est extremement developpe, il n'existe que peu ou meme point du tout de trachyte." ( Voyage miner. en Hongrie, t. III, p. 500, 587 -- 589.) On diroit que ces deux terrains se repoussent; et comme les crateres des volcans encore actifs se sont constamment ouverts dans les trachytes, il ne faut pas etre surpris que ces volcans et leurs laves restent aussi eloignes des basaltes anciens. (Humboldt, Rel. histor., t. I, p. 154.) Malgre cet antagonisme, ou plutot cette inegalite de developpement, que nous avons deja remarque dans les granites et les gneis-micaschistes, dans les calcaires et les schistes de transition, dans le gres rouge et le zechstein ou calcaire alpin, les trachytes et les basaltes offrent sur d'autres points du globe les affinites geognostiques les plus intimes. Si les grandes masses basaltiques (Hesse; Forez, Velay et Vivarais; Ecosse; Veszprim et lac Balaton) restent geographiquement eloignees des grandes masses de trachytes (Siebengebirge; Auvergne; montagnes de Matra, Vihorlet et Tokay; Cordillere occidentale des Andes de Quito), des lambeaux du terrain basaltique ne s'en trouvent pas moins pour cela superposes a ces memes trachytes. ( Buch, Briefe aus Auvergne, p. 289; Id., Trapp-Porphyr, p. 137 -- 141. Ramond, Niv. geologique, p. 18, 60 -- 73.) Les Monts Euganeens (basaltes du Monte Venda pres des cones trachytiques de Monte Pradio, Monte Ortone et Monte Rosso), les penchans des montagnes qui constituent le groupe du Mont Dore, les environs de Guchilaque au Mexique (Cerro del Marques, 1537 toises) et de Xalapa (Cerro de Macultepec, 788 toises), presentent des exemples frappans de cette reunion des deux terrains feldspathiques et pyroxeniques. Tantot ce sont des buttes de basalte prismatique qui sortent du terrain de trachyte; tantot ce sont de larges coulees de basaltes, souvent interrompues et formant des gradins et des plateaux, qui sillonnent et recouvrent ce terrain. Il resulte de ces observations, que les plus grandes masses de basaltes gisent immediatement dans les formations primitives intermediaires et secondaires, tandis que d'autres masses beaucoup moins considerables, d'un tissu entierement identique, et presentant le plus souvent l'apparence d'anciennes coulees de laves lithoides, sont superposees au terrain trachytique. Les uns et les autres enveloppent quelquefois des fragmens de granite, de gneis ou d'une syenite tresabondante en feldspath. Ce meme phenomene, comme nous l'avons vu tantot, s'observe (volcan de Jorullo) dans des laves recentes et d'une epoque connue; mais ces indices incontestables d'une fluidite ignee ne nous autorisent pas a admettre que les montagnes coniques de basaltes, dispersees dans des plaines ou couronnant la crete des montagnes primitives, se soient toutes formees comme les nappes de basalte qui couvrent les trachytes, ou comme les laves lithoides basaltiques (avec olivine) de quelques volcans tres-modernes. Le melange des matieres qui constituent les roches volcaniques se fait dans l'interieur du globe, et probablement a d'immenses profondeurs. Des matieres analogues et composees des memes elemens peuvent venir au jour (paroeitre a la surface du globe) par des voies tres-differentes, tantot par soulevement (en cloches, en domes ou en buttes coniques), tantot par des crevasses longitudinales, formees dans la croaute du globe, tantot par des ouvertures circulaires au sommet d'une montagne. La geognosie des volcans distingue ces modes de formations, et si elle s'oppose a confondre sous le nom de laves toutes les roches des terrains trachytiques et basaltiques, c'est parce qu'elle se refuse a admettre que les domes du Puy de Cliersou, du grand Sarcouy et du Chimborazo, de meme que toutes les montagnes coniques de basaltes, soient des portions de courans de laves. Des volcans, en partie tres-modernes, ont jete des laves feldspathiques (Ischia, Solfatare de Pouzzole) et pyroxeniques avec olivine (Jorullo), qui ressemblent aux trachytes et aux basaltes les plus anciens. Souvent des masses volcaniques (laves feldspathiques et pyroxeniques; trachytes; basaltes en cones isoles), considerees mineralogiquement, sont les memes; on peut supposer que les circonstances dans lesquelles elles ont ete produites dans l'interieur du globe, differoient tres-peu; mais, ce qui les eloigne geognostiquement les unes des autres, c'est la difference marquante dans le mode de leur apparition a la surface du sol. Parmi le grand nombre d'observations curieuses que presentent les environs du nouveau volcan de Jorullo au Mexique, aucune ne me paroeit plus importante et plus inattendue que celles qui concernent la double origine des masses basaltiques. On y voit a la fois de petits cones de basaltes, composes de boules a couches concentriques, et un promontoire de laves basaltiques, lithoides et compactes dans l'interieur, spongieuses a la surface. Ce courant de laves est une masse noire a tres-petits grains, renfermant, non de l'amphibole ou du pyroxene, mais indubitablement de l'olivine (peridote granuliforme de Haüy) et de petits cristaux de feldspath vitreux. M. de Buch a reconnu, dans des fragmens que j'ai rapportes, outre l'olivine disseminee (vert d'olive clair, conchoide et a pieces separees grenues), quelques tables hexagones de mica jaune de laiton. C'est dans ces laves que sont empates les fragmens anguleux et crevasses de syenite granitique dont j'ai parle plusieurs fois; elles tirent probablement leur origine d'un terrain de transition place sous le trachyte. Des morceaux extremement petits de trachyte grisatre, avec feldspath vitreux et cristaux effiles d'amphibole, que nous avons ete assez heureux de trouver sur le bord du cratere au milieu des scories, prouvent meme que l'eruption a agi a la fois a travers la syenite et le trachyte superpose. Les laves s'elevent jusqu'a 678 pieds d'epaisseur; et comme elles se sont epanchees non lateralement, mais du cratere du volcan actuel, c'est en suivant leur courant vers le S. S. E. que nous avons pu, M. Bonpland et moi, penetrer, non sans quelque danger, dans l'interieur du cratere encore braulant pour y recueillir de l'air. Il ne faut pas confondre avec ce courant de laves lithoides basaltiques, qui ne sont pas des scories entassees comme au Monte Novo de Pouzzole, les basaltes en boules (Kugelbasalt) qui composent les petits cones appeles par les indigenes fours (hornitos), a cause de leur forme, et parce qu'ils degagent par des crevasses des filets de vapeurs aqueuses, melees d'acides sulfureux. Il ne peut rester aucun doute, meme a l'observateur le moins accoutume a l'aspect de terrains bouleverses par le feu des volcans, que tout le sol du Mal-pais, qui a pour le moins 1,800,000 toises carrees, n'ait ete souleve. La ou ce terrain souleve est contigu a la plaine des Playas de Jorullo, qui n'a eprouve aucun changement et dont il a fait partie jadis, il y a (a l'est de San-Isidoro) un saut brusque de vingtcinq a trente pieds de hauteur perpendiculaire. Les couches noiratres et argileuses de Mal-pais y paroissent comme fracturees, et offrent, dans une coupe dirigee du N. E. au S. O., des fentes de stratification horizontales et ondulees. Apres avoir passe ce saut ou gradin, on s'eleve, sur un terrain bombe en forme de vessie, vers la crevasse sur laquelle sont sortis les grands volcans, dont un seul, celui du milieu (El volcan grande de Jorullo ), est encore enflamme. La convexite de ce terrain est, dans quelques endroits, de 78, en d'autres de 90 toises; c'est-a-dire que le pied du grand volcan, ou plutot la portion centrale de la plaine du Malpais , ou s'eleve brusquement (pres de l'ancienne Hacienda de San-Pedro de Jorullo) le Grand Volcan, est a peu pres de 510 pieds plus eleve que le bord du Mal-pais pres du premier saut ou gradin. Toute cette pente du sol bombe est si douce, qu'elle peut echapper a l'attention de ceux qui ne sont pas pourvus d'instrumens propres a la mesurer. C'est, comme disent tres-bien les indigenes, un terrain creux, une tierra hueca. Cette opinion est confirmee par le bruit que fait un cheval en marchant, par la frequence des crevasses, par des affaissemens partiels, et par l'engouffrement des rivieres de Cuitimba et de San-Pedro, qui se perdent a l'est du volcan et reparoissent au jour, comme des eaux thermales de 52° cent., au bord occidental du Mal-pais. Ce sont les bancs d'argile noire ou brun-jaunatre qui ont ete souleves eux-memes: la surface du sol n'est couverte que de quelques cendres volcaniques, et aucun entassement de scories ou de dejections sorties d'un cratere n'a cause la convexite du Mal-pais . Sur ce terrain souleve (Sept. 1759) sont sortis plusieurs milliers de petits cones ou buttes basaltiques a sommets tres-convexes (les fours ou hornitos). Ils sont tous isoles et dissemines, de maniere que, pour s'approcher du pied du grand volcan, on passe par des ruelles tortueuses (los callejones del Mal-pais ). Leur elevation est de 6 a 9 pieds. La fumee sort generalement un peu au-dessous de la pointe du cone, et reste visible jusqu'a 50 pieds de hauteur. D'autres filets de fumee sortent des larges crevasses qui traversent les ruelles; ils sont dus au sol meme de la plaine soulevee. En 1780, la chaleur des hornitos etoit encore si grande qu'on pouvoit allumer un cigarre en l'attachant a une perche et en le plongeant a deux ou trois pouces de profondeur dans une des ouvertures laterales. Les cones (hornitos) sont uniformement composes de spheroides de basaltes, souvent aplatis de huit pouces a trois pieds de diametre, et enchasses dans une masse d'argile a couches diversement contournees. L'aspect de ces cones est absolument le meme que celui des buttes coniques de basalte globuleux (Kugelbasalt-Kuppen) que l'on voit si frequemment en Saxe, sur les frontieres du Haut-Palatinat et de la Franconie, et surtout dans le Mittelgebirg de la Boheme: la difference ne consiste que dans les dimensions des buttes. Cependant en Boheme nous en avons aussi trouve, M. Freiesleben et moi, qui etoient parfaitement isolees et n'avoient que 15 a 20 pieds de hauteur. Le noyau des boules est dans les hornitos, comme dans les basaltes globulaires anciens, un peu plus frais et plus compacte que les couches concentriques qui enveloppent le noyau, et dont j'ai pu compter souvent 25 a 28. La masse entiere de ces basaltes, constamment traversee par des vapeurs acidules et chaudes, est extremement decomposee. Elles n'offrent souvent qu'une argile noire et ferrugineuse, a taches jaunes et peut-etre trop grandes pour etre attribuees a la decomposition de l'olivine. En approchant l'oreille d'un de ces cones, on entend un bruit sourd qui paroeit celui d'une cascade souterraine; il est peut-etre cause par les eaux du Rio Cuitamba qui s'engouffrent dans le Mal-pais . Voila donc bien certainement des spheroides aplatis de basalte, agglomeres en buttes coniques, qui ont ete souleves de terre de memoire d'hommes, et qui ne sont par consequent ni des lambeaux d'anciens courans de laves, ni le resultat d'une decomposition de prismes basaltiques articules, ni celui d'un entassement fortuit de dejections d'un cratere eloigne. Il est probable que c'est la force elastique des vapeurs qui a couvert de ces hornitos, en forme d'ampoules, la plaine bombee du Mal-pais, tout comme la surface d'un fluide visqueux se couvre de bulles par l'action des gaz qui tendent a se degager. La croaute qui forme les petits domes des hornitos est si peu solide, qu'elle s'enfonce sous les pieds de devant d'un mulet que l'on force d'y monter. Les faits que je viens d'exposer me paroissent d'autant plus importans pour la geognosie, qu'il existe dans les terrains basaltiques les plus anciens une grande analogie entre les buttes isolees de basaltes globuleux et les buttes de basaltes colonnaires. Depuis long-temps des geologues celebres ont combattu l'hypothese qui considere tant de montagnes basaltiques, d'une forme si reguliere et d'un agroupement symetrique, comme des restes d'un courant, d'une coulee de laves, qui a avance progressivement sur un terrain incline. Il faut distinguer, dans les plaines de Jorullo, trois grands phenomenes: le soulevement general du Mal-pais, herisse de plusieurs milliers de petits cones basaltiques; l'entassement des scories et d'autres matieres incoherentes dans les collines les plus eloignees du grand volcan, et les laves lithoides que ce volcan a vomies sous la forme ordinaire d'un courant. L'interieur du cratere du Vesuve offroit, au mois d'Aoaut 1805, epoque ou je l'ai visite plusieurs fois, conjointement avec MM. de Buch et Gay-Lussac, cette meme difference entre le fond du cratere souleve, c'est-a-dire plus ou moins bombe, selon que l'on s'approchoit de l'epoque de la grande eruption, et les cones de scories desagregees qui se forment autour de plusieurs soupiraux enflammes. Ce sont ces accumulations de matieres incoherentes seules qui ressemblent au Monte Novo de Pouzzole. La croaute de laves qui constitue le fond des crateres, s'eleve ou s'abaisse comme un plancher mobile. ( Buch, geogn. Beob., T. II, p. 124.) Au Vesuve, ce fond etoit tellement bombe (en 1805), que sa partie centrale depassoit le niveau du bord meridional du volcan. L'intumescence que l'on observe periodiquement dans les crateres accessibles des volcans enflammes, au fond de la vallee circulaire ou alongee qui termine leurs sommets, presente une analogie frappante avec le terrain souleve du Mal-pais de Jorullo: il en presente vraisemblablement aussi avec ces eilots volcaniques qui paroissent comme des roches noires au-dessus de la surface de l'Ocean, avant de se crevasser et de lancer des flammes. Il paroeit que M. d'Aubuisson n'a pas eu occasion de consulter les coupes que j'ai publiees du volcan de Jorullo (Humboldt, Essai politique, T. I, p. 253. Id., Nivellement barom. des Andes, n.° 370 -- 374. Id., Vues des Cordilleres, p. 242, pl. 43. Id., Atlas geographique et physique du Voyage aux reg. equin., pl. 28 et 29), lorsque, dans son interessant Traite de geognosie, T. I, p. 264, il suppose que j'ai confondu un terrain souleve avec un entassement de dejections dont l'epaisseur augmente a mesure qu'on approche de la bouche volcanique. La composition du basalte, ou plutot la frequence plus ou moins grande de certaines substances cristallisees, disseminees dans les basaltes, varie dans les differentes parties de l'Amerique equinoxiale, comme dans celles de l'Europe. L'olivine, si commune dans les basaltes d'Allemagne, de France et d'Italie, est tres-rare, d'apres MM. Macculloch et Boue, dans l'ouest de l'Ecosse et le nord de l'Irlande. L'amphibole abonde en grands cristaux, en Saxe (Oberwiesenthal et Carlsfeld), en Boheme, dans le pays de Fulde et en Hongrie (Medwe), tandis qu'elle manque le plus souvent dans les basaltes d'Auvergne et des Canaries. Le feldspath vitreux et l'olivine se trouvent presque constamment associes dans le terrain basaltique du Mexique et de la Nouvelle-Grenade; souvent (Valle de Santiago, Alberca de Palangeo) l'amphibole et le pyroxene manquent: d'autres fois (Cerro del Marques, au-dessus de San-Augustin de las Cuevas; Chichimequillo pres Silao) le basalte renferme a la fois de l'olivine, du feldspath vitreux, de l'amphibole et du pyroxene. Dans la belle vallee de Santiago (Nouvelle-Espagne) l'hyalite est si commune que, par une predilection bien difficile a expliquer, les fourmis en recueillent partout ou le basalte se decompose, et la transportent dans leurs nids. Je n'ai jamais vu de tres-grandes masses d'olivine dans la Cordillere des Andes: celles de l'Europe appartiennent plus particulierement aux breches basaltiques (Weissenstein pres de Cassel; Kapfenstein en Styrie). Les formations d'argiles et de marnes que nous avons indiquees dans le tableau precedent comme appartenant au terrain volcanique, meritent beaucoup d'attention dans la Cordillere des Andes, dans l'archipel des eiles Canaries et dans le Mittelgebirge de la Boheme (Trzeblitz, Hruvka). Dans ces trois regions, que j'ai visitees successivement, l'argile ne m'a point paru accidentellement englobee dans la masse liquide, comme c'est le cas quelquefois dans l'argile plastique (gres a lignites, §. 35) au-dessus de la craie, ou dans les calcaires secondaire et tertiaire (calcaire du Jura et calcaire grossier) du Vicentin, que j'ai trouves enchasses par fragmens anguleux dans le basalte, et qui penetrent tellement dans les basaltes que ces derniers meme font effervescence avec les acides. Les marnes argileuses des Cordilleres (Cascade de Regla et chemin de Regla a Totomilco el grande; Guchilaque, au nord de Cuernavaca; Cubilete pres Guanaxuato) et celles de l'eile de la Graciosa (pres Lancerote) alternent avec les couches de basaltes, et sont peut-etre d'une formation contemporaine, comme les argiles schisteuses qui alternent avec le calcaire alpin (Humboldt, Relat. hist., T. I, p. 88). Leur position meme semble prouver qu'ils ne sont pas dus a la decomposition des basaltes. On y trouve souvent des cristaux de pyroxene et des grenats-pyropes. Je ne deciderai pas si les masses d'argile qui entourent, dans les Andes de la Nouvelle-Grenade (entre Popayan, Quilichao et Almaguer), ces immenses amas de boules de dolerites et de grünstein a feldspath vitreux et fendille, appartiennent aux formations de basaltes, ou aux syenites et porphyres du terrain de transition; mais, ce qui est indubitable, c'est que les bancs d'argile (tepetate), qui rendent sterile une partie de la belle province de Quito, sont sortis du flanc des volcans, non meles a des matieres en fusion, mais suspendus dans l'eau. Les inondations qui accompagnent toujours les eruptions du Cotopaxi, de Tunguragua et d'autres volcans encore enflammes des Andes, ne sont pas dues, comme au Vesuve ( Memoires de l'Academie, 1754, p. 18), aux torrens d'eaux pluviales que repandent les nuages qui se forment pendant l'eruption (par le degagement de la vapeur d'eau dans le cratere): elles sont principalement le resultat de la fonte des neiges et des lentes infiltrations qui ont lieu sur la pente des volcans, dont la hauteur depasse 2460 toises (celle de la limite des neiges perpetuelles). Les secousses de violens tremblemens de terre, qui ne sont pas toujours suivies d'eruptions de flammes, ouvrent des cavernes remplies d'eau, et ces eaux entraeinent des trachytes broyes, des argiles, des ponces et d'autres matieres incoherentes. C'est la peut-etre ce que l'on pourroit appeler des eruptions boueuses, si cette denomination ne rapprochoit pas trop un phenomene d'inondation des phenomenes essentiellement volcaniques. Lorsque (le 19 Juin 1698) le Pic du Carguairazo s'affaissa, plus de quatre lieues carrees d'alentour furent couvertes de boues argileuses, que dans le pays l'on appelle lodazales. De petits poissons, connus sous le nom de prennadillas (Pimelodes cyclopum), et dont l'espece habite les ruisseaux de la province de Quito, se trouvoient enveloppes dans les ejections liquides du Carguairazo. Ce sont la les poissons que l'on dit lances par les volcans, parce qu'ils vivent par milliers dans des lacs souterrains, et parce que, au moment des grandes eruptions, ils sortent par des crevasses, entraeines par l'impulsion de l'eau boueuse qui descend sur la pente des montagnes. Le volcan presque eteint d'Imbaburu a vomi, en 1691, une si grande quantite de prennadillas, que les fievres putrides, qui regnoient a cette epoque, furent attribuees aux miasmes qu'exhaloient les poissons. (Humboldt, Recueil d'obs. de zoologie et d'anatomie comparee, T. I, p. 22, et T. II, p. 150.) La dolerite du terrain basaltique ( D'Aubuisson, Journ. des mines, T. XVIII, p. 197; Leonhard et Gmelin, vom Dolerit, p. 17 -- 35) est tres-rare dans les Cordilleres, qui abondent plutot en roches trachytiques dans lesquelles le feldspath predomine sur le pyroxene. Je pense cependant qu'une dolerite que j'ai trouvee dans le chemin d'Ovexeras aux sources chaudes de Comangillo pres de Guanaxuato, appartient aux basaltes de la Caldera et d'Aguas buenas, et non a de veritables trachytes. Il y a de meme quelque incertitude sur le gisement des phonolithes, lorsqu'elles se trouvent isolees ou eloignees de montagnes basaltiques et trachytiques. Cet isolement caracterise les phonolithes du Pennon, qui forment un ecueil dans le Rio Magdalena, et qui paroissent immediatement superposees au granite de Banco; les phonolithes que j'ai vues percer la couche de sel gemme de Huaura (Bas- Perou, pres des cotes de la mer du Sud); enfin celles qui s'elevent au bord septentrional des steppes de Calabozo (Cerro de Flores). Les dernieres sont geognostiquement liees a de l'amygdaloide pyroxenique, alternant avec un grünstein de transition (Humboldt, Rel. hist., T. I, p. 154). Les amygdaloides celluleuses (tezontli), renfermant du feldspath vitreux, des pyroxenes et de la lithomarge, sont le plus repandues sur le plateau central de la Nouvelle-Espagne. Elles sont tantot recouvertes par des basaltes, tantot elles forment (Cuesta de Capulalpan) des boules de deux a trois pieds d'epaisseur, reunies en cones ou buttes hemispheriques et superposees a des porphyres de transition. III. Laves sorties d'un cratere sous forme de courans. Laves lithoides feldspathiques, semblables aux trachytes. Laves basaltiques. Obsidiennes des laves. Ponces vitreuses des obsidiennes. Nous avons deja rappele plus haut combien les veritables courans de laves sont rares dans les Cordilleres. Celles que j'ai vues sont dues a des eruptions laterales d'Antisana, du Popocatepetl et du Jorullo. Beaucoup de courans ( Mal-pais ) sont sortis de bouches volcaniques qui se sont refermees depuis et qu'il est impossible de reconnoeitre aujourd'hui. D'autres courans diriges sur un meme point, se confondent les uns avec les autres: ils se presentent en larges nappes, semblables a des roches pyroxeniques beaucoup plus anciennes. Dans les laves de la vallee de Tenochtitlan (entre San Augustin de las Cuevas et Coyoacan) l'amphibole est beaucoup moins rare que dans les laves d'Europe. Un mineralogiste mexicain tres-instruit, M. Bustamante, les a soumises recemment avec succes a l'analyse mecanique, d'apres la methode ingenieuse exposee par M. Cordier. ( Semanario de Mexico, 1820, n.° XX, p. 80--90.) IV. Tufs des volcans, souvent petris de coquilles. V. Formations locales calcaires et gypseuses superposees aux tufs volcaniques, au terrain basaltique (mandelstein) ou aux trachytes. Je compte parmi ces formations tres-modernes, dans le plateau de Quito, les gypses feuilletes de Pululagua, le gypse argileux et fibreux de Yaruquies, les argiles schisteuses carburees et vitrioliques de San-Antonio, les argiles saliferes (?) de la Villa de Ibarra, les sables avec lignites du Llano de Tapia (au pied du Cerro del Altar), et les tufs calcaires (caleras) de Agua santa. Dans les eiles Canaries, des formations calcaires oolithiques et gypseuses sont aussi subordonnees aux tufs volcaniques (Lancerote et Fortaventura). On ne peut indiquer l'age relatif de ces petits depots en les comparant a la craie ou aux formations tertiaires les plus modernes (§§. 37 -- 39): nous les avons places ici selon l'ordre de leur gisement au-dessus des roches volcaniques. En Hongrie, d'apres l'interessante observation de M. Beudant, un gres a lignite (§. 35), superpose au conglomerat trachytique (Dregely), au conglomerat ponceux (Palojta) et meme au trachyte (Tokai), est recouvert, a son tour, ou de calcaire grossier (§. 36) du terrain tertiaire, ou de calcaire d'eau douce, ou enfin de coulees basaltiques. Telles sont les formations principales du terrain pyrogene, dues a des soulevemens, ou a un epanchement lateral, ou a de simples ejections. Nous nous bornons a l'indication des faits, sans aborder des problemes dont les donnees sont encore trop imparfaitement connues. Nous craindrions qu'on n'appliquat avec raison a la geognosie ce que Montaigne dit d'un certain genre de philosophie: "elle vient de ce que nous avons l'esprit curieux et de mauvais yeux." TABLEAU DES FORMATIONS OBSERVEES DANS LES DEUX HEMISPHERES (1822). [Des chiffres romains precedent les noms des formations qui, rarement supprimees et par consequent le plus generalement repandues, peuvent servir d'horizon geognostique. On a indique en meme temps les §§. et les pages ou se trouvent les descriptions.] Introduction renfermant quelques principes de philosophie geognostique, pag. 56 -- 113. Terrains primitifs. Vues generales, p. 113. I. Granite primitif, §. 1, pag. 113--115. Granite et Gneis primitifs, §. 2, p. 115. Granite stannifere, §. 3, p. 115--116. Weisstein avec Serpentine, §. 4, p. 116. II. Gneis primitif, §. 5, p. 117--120. Gneis et Micaschiste, §. 6, p. 120--121. Granites posterieurs au Gneis, anterieurs au Micaschiste primitif, §. 7, p. 122--124. Syenite primitive? §. 8, p. 124--125. [Les cinq dernieres formations, placees entre le gneis et le micaschiste primitifs, sont des formations paralleles.] Serpentine primitive? §. 9, p. 125. Calcaire primitif? §. 10, p. 126. III. Micaschiste primitif, §. 11, p. 126--130. Granite posterieur au Micaschiste, anterieur au Thonschiefer, §. 12, p. 131. Gneis posterieur au Micaschiste, §. 13, p. 131. Grünstein-Schiefer? §. 14, p. 131--132. IV. Thonschiefer primitif, §. 15, p. 132--134. Roche de Quarz primitive (avec masses de fer oligiste metalloide), §. 16, p. 134--138. Granite et Gneis posterieur au Thonschiefer, §. 17, p. 139. Porphyre primitif? §. 18, p. 139--140. V. Euphotide primitive, posterieure au Thonschiefer, §. 19, p. 140--142. [Les quatre dernieres formations sont des formations paralleles entre elles, quelquefois meme au Thonschiefer primitif.] Terrains de transition. Vues generales, p. 142, 146 et 149--153. Types de superpositions locales, p. 146--149. I. Calcaire grenu talqueux, Micaschiste de transition, et Grauwacke avec Anthracite, §. 20, p. 153--158. II. Porphyres et Syenites de transition, recouvrant immediatement les roches primitives, calcaire noir et Grünstein, §. 21, p. 158--181. III. Thonschiefer de transition, renfermant des Grauwackes, des Grünstein, des Calcaires noirs, des Syenites et des Porphyres, §. 22, p. 182--200. IV et V. Porphyres, Syenites et Grünstein posterieurs au Thonschiefer de transition, quelquefois meme au Calcaire a orthoceratites, §§. 23, 24, p. 200--229. VI. Euphotide de transition, §. 25, p. 229. Terrains secondaires. Vues generales, p. 234. I. Grand depot de Houille, Gres rouge et Porphyre secondaire (avec Amygdaloide, Grünstein et Calcaires intercales), §. 26, p. 235--257. Roche de Quarz secondaire, §. 27, p. 257--260. [Cette derniere formation est parallele au gres houiller.] II. Zechstein ou Calcaire alpin (Magnesian limestone); Gypse hydrate; Sel gemme, §. 28, p. 260--290. Les cinq formations suivantes, tres-inegalement developpees, peuvent etre comprises sous le nom general de III. Depots arenaces et calcaires (marneux et oolithiques), places entre le zechstein et la craie, et lies a ces deux terrains, p. 290. Argile et Gres bigarre (Gres a oolithes; Gres de Nebra; New red sandstone et red marl) avec Gypse et sel gemme, §. 29, p. 291--295. Muschelkalk (Calcaire coquillier; Calcaire de Goettingue), §. 30, p. 295--298. Quadersandstein (Gres de Koenigstein), §. 31, p. 298--300. Calcaire du Jura (Lias, Marnes et grands depots oolithiques, §. 32, p. 300--311. Terrains (exclusivement) volcaniques. Vues generales, p. 332--345. I. Formations trachytiques, p. 345--358. Trachytes granitoides et syenitiques. Trachytes porphyriques (feldspathiques et pyroxeniques). Phonolithes des Trachytes. Trachytes semi-vitreux. Perlites avec obsidienne. Trachytes meulieres, celluleuses avec nids siliceux. (Conglomerats trachytiques et ponceux, avec alunites, soufre, opale et bois opalise). II. Formations basaltiques, p. 358--368. Basaltes avec olivine, pyroxene et un peu d'amphibole. Phonolithes des basaltes. Dolerites. Mandelstein celluleux. Argile avec grenats-pyropes. (Cette petite formation semble liee a l'argile avec lignites du terrain tertiaire sur lequel se sont souvent repandues des coulees de basalte.) Gres et Sables ferrugineux, et Gres et Sables verts, Gres secondaire a lignites (Ironsand et Greensand), §. 33, p. 311-- 313. IV. Craie, §. 34, p. 314--316. Terrains tertiaires. Vues generales, p. 316--320. I. Argiles et Gres tertiaire a lignites (Argile plastique, Molasse, et Nagelfluhe d'Argovie), §. 35, p. 320--325. II. Calcaire de Paris (Calcaire grossier ou Calcaire a cerites, formation parallele a l'argile de Londres et au Calcaire arenace de Bognor), §. 36, p. 325 --329. III. Calcaire siliceux, Gypse a ossemens, alternant avec des marnes (Gypse de Montmartre), §. 37, p. 329--331. IV. Gres et sables superieurs au gypse a ossemens (Gres de Fontainebleau), §. 38, p. 331. V. Terrain lacustre avec meulieres poreuses, superieur au gres de Fontainebleau (Calcaire a lymnees), §. 39, p. 331. Conglomerats et scories basaltiques. III. Laves sorties d'un cratere volcanique (Laves anciennes, larges nappes, generalement abondantes en feldspath. Laves modernes a courans distincts et de peu de largeur. Obsidiennes des laves et Ponces des obsidiennes), p. 369. IV. Tufs des volcans avec coquilles, p. 369. (Depots de calcaire compacte, de marne, d'argiles avec lignites, de gypse et d'oolithes, superposes aux tufs volcaniques les plus modernes. Ces petites formations locales appartiennent peut-etre aux terrains tertiaires. Plateau de Riobamba; eiles de Fortaventura et Lancerote). Pour s'elever a des idees plus generales, et pour mieux comprendre les rapports de superposition indiques dans le tableau des roches, on peut se servir d'une methode pasigraphique, dont il sera utile de rappeler ici les principes fondamentaux. Cette methode est double: elle est ou figurative (graphique, imitative), representant les couches superposees par des parallelogrammes places les uns sur les autres; ou algorithmique, indiquant la superposition des roches et l'age de leur formation, comme des termes d'une serie. La premiere methode est celle que j'ai suivie dans les Tables de pasigrafia geognostica, que je tracai, en 1804, pour l'usage de l'ecole des mines de Mexico; c'est celle que l'on designe assez generalement sous le nom de coupes des terrains. Elle offre l'avantage de parler plus vivement aux yeux, et d'exprimer simultanement dans l'espace deux series ou systemes de roches qui couvrent une meme formation. Elle offre des moyens faciles pour indiquer les equivalens geognostiques ou roches paralleles, de meme que le cas ou, par la suppression locale de la formation b, la formation a supporte immediatement g. Deux roches paralleles, par exemple, le thonschiefer et la roche de quarz (page 137), superposees toutes les deux a du micaschiste primitif, sont representees dans la methode figurative par deux parallelogrammes de meme hauteur places sur un troisieme. Les noms des roches sont inscrits dans les parallelogrammes, ou, comme on le verra plus bas, on caracterise ceux-ci, en les couvrant de hachures ou d'une espece de reseau differemment modifie, selon que les roches representees graphiquement passent ou ne passent pas les unes aux autres. Par la suppression locale du gres de Nebra (gres bigarre) et du calcaire de Goettingue (muschelkalk), le calcaire du Jura peut reposer d'une part immediatement (pages 300 et 310) sur le calcaire alpin (zechstein), tandis que d'un autre cote on voit suivre, de bas en haut, le calcaire alpin, le muschelkalk, le gres bigarre et le calcaire du Jura. Ces rapports de gisement seront exprimes dans une coupe ideale, en retranchant de la partie inferieure du parallelogramme qui represente le calcaire jurassique, d'un seul cote, un quadrilatere representant les deux formations du muschelkalk et du gres bigarre. La seconde methode, qui procede par series et qu'on pourroit appeler algorithmique, indique les roches, non d'une maniere imitative, non par l'etendue figuree, mais par une notation speciale. Toute la geognosie de gisemens etant un probleme de series ou de succession, simple ou periodique, de certains termes, les diverses formations superposees peuvent etre exprimees par des caracteres generaux, par exemple, par les lettres de l'alphabet. Ces notations, appliquees a differentes parties de la physique generale dans lesquelles on examine la juxtaposition des choses, ne sont pas des jeux de l'esprit. Dans la geognosie positive, elles ont le grand avantage de fixer l'attention sur les rapports les plus generaux de position relative, d'alternance et de suppression de certains termes de la serie. Plus on fera abstraction de la valeur des signes (de la composition et de la structure des roches), mieux on saisira, par la concision d'un langage pour ainsi dire algebrique, les rapports les plus compliques du gisement et du retour periodique des formations. Les signes a, b, g, ne seront plus pour nous du granite, du gneis et du micaschiste; du gres rouge, du zechstein et du gres bigarre; de la craie, du gres tertiaire a lignites, et du calcaire parisien: ce ne seront que des termes d'une serie, de simples abstractions de l'entendement. Nous sommes loin de pretendre que le geognoste ne doive pas etudier, jusque dans ses rapports les plus intimes, la composition mineralogique et chimique des roches, la nature de leur tissu cristallin ou de leurs masses; nous voulons seulement qu'on fasse abstraction de ces phenomenes lorsqu'il ne s'agit que de la succession et de l'age relatif. Avant la grande decouverte de la pile de Volta, j'avois, dans mon ouvrage sur l' Irritation de la fibre nerveuse, indique par une notation particuliere quels etoient les cas ou, dans une chaeine de metaux heterogenes et de parties humides interposees, l'excitation musculaire avoit lieu, quels etoient les cas ou le courant galvanique etoit arrete. La simple inspection des series et de la position respective des termes (elemens de la pile) pouvoit faire juger du resultat de l'experience. (Humboldt, Versuche über die gereizte Muskel- und Nervenfaser, T. I. p. 236.) Si les lettres de l'alphabet representent ces roches superposees, des deux series, a, b, g, d ..... a, ab, b, bg, g, d ...., la premiere indique la succession des formations simples et independantes: granite, gneis, micaschiste, thonschiefer ou muschelkalk, gres de Königsstein (quadersandstein), calcaire jurassique et gres vert a lignites (sous la craie). La seconde indique l'alternance de formations simples avec des formations complexes: granite, granite-gneis, gneis, gneismicaschiste, micaschiste, thonschiefer (pag. 113, 115); ou, pour donner un exemple tire de terrains de transition (p. 120 et 145), calcaire a orthoceratites, calcaire alternant avec du schiste, schiste de transition seul, schiste et grauwacke, grauwacke seul, porphyre de transition..... Dans les formations complexes, c'est-a-dire, dans celles qui offrent l'alternance periodique de plusieurs couches, on distingue quelquefois trois roches differentes, qui ne passent pas les unes aux autres dans le meme groupe, ou a, b, abg, g .... abg, abd, bae ....., selon que dans le terrain de transition des couches alternantes de granite, de gneis et de micaschiste; dans le terrain de transition, des couches alternantes de grauwacke, de schiste et de calcaire, ou de grauwacke, de schiste et de porphyre, ou de schiste, de grauwacke et de grünstein, constituent une meme formation. Dans le terrain de transition, comme nous l'avons expose plus haut, le thonschiefer ou le grauwacke seuls ne sont pas les termes de la serie. Ces termes sont tous complexes; ce sont des groupes, et le grauwacke appartient a la fois a plusieurs de ces groupes. Il en resulte, que le terme formation de grauwacke n'a rapport qu'a la predominance de cette roche dans son association avec d'autres roches. Tous les terrains offrent l'exemple de formations independantes qui preludent comme couches subordonnes. Si abg, ou ab, bg indiquent des formations complexes de granite, gneis et micaschistes, ou de granite et gneis, de thonschiefer et porphyre, de porphyre et syenite, de marnes et de gypse, c'est-a-dire, des formations dans lesquelles des couches de deux et meme de trois roches alternent indefiniment; a+b, b+g, indiqueront que le gneis fait simplement une couche dans le granite, le porphyre dans le schiste, etc. Alors a, a+b, b, b+g, g .... exprime le phenomene curieux de formations qui preludent, qui s'annoncent d'avance comme des bancs subordonnes. Ces bancs rappellent tantot des termes qui precedent (roches de dessous), tantot les termes qui suivent (roches de dessus). Ainsi nous aurons: a, b, b+a, b, b+g, g .... Les porphyres et syenites grenues du terrain de transition penetrent dans le gres rouge et y forment des couches subordonnees. Si le gisement des formations de la vallee de Fassa est tel qu'on l'a recemment annonce (pag. 288), un terme precedent (la syenite) deborde jusque dans le calcaire alpin ou zechstein; c'est le cas dans la serie: a, b+a, g+a, d .... Lorsqu'on veut appliquer la notation pasigraphique jusqu'aux elemens des roches composees, cette notation peut indiquer aussi comment, par l'augmentation progressive d'un des elemens de la masse, surtout par l'isolement des cristaux, il se forme des couches par une espece de developpement interieur: abc, abc2, abc3 .... abc+b. Nous avons prefere, dans ce cas particulier (bancs de feldspath dans le granite, bancs de quarz dans le micaschiste ou dans le gneis, bancs d'amphibole dans la syenite, bancs de pyroxene dans une dolerite de transition), les lettres de l'alphabet romain a celles de l'alphabet grec, pour ne pas confondre les elemens d'une roche (feldspath, quarz, mica, amphibole, pyroxene) avec les roches qui entrent dans la composition des formations complexes. Jusqu'ici nous avons montre comment, en faisant entierement abstraction de la composition et des proprietes physiques des roches, la notation pasigraphique peut reduire a une grande simplicite les problemes de gisement les plus compliques. Cette notation indique comment les memes couches subordonnees (le sel gemme dans le zechstein et dans le red marl, §§. 28 et 29; les houilles dans le gres rouge, le zechstein et le muschelkalk) passent a travers plusieurs formations superposees les unes aux autres: a+m, b+m, g, d+m .... Elle rappelle aussi le retour des formations feldspathiques et cristallines dans les terrains de transition et de gres rouge (Norwege, Ecosse); retour qui est analogue a celui du granite apres le gneis et apres le micaschiste primitif: a, b, a, g, d ..... k, l, a, b ... Les premiers termes de la serie reparoissent, meme apres un long intervalle, apres le grauwacke et le calcaire a orthoceratites, c'est-a-dire, apres les roches fragmentaires et coquillieres. En terminant cet ouvrage, je vais montrer que, si l'on donne moins de generalite a la notation et si on la modifie d'apres quelques considerations physiques (de structure et de composition), on peut, par le moyen de douze signes geognostiques, presenter les phenomenes de gisemens les plus importans des terrains primitifs, intermediaires, secondaires et tertiaires. Ces douze signes embrassent sept series de roches, savoir: les micaschistes (et leurs modifications d'un cote en granite et gneis, de l'autre en thonschiefer), les euphotides, les amphiboliques (grünstein, syenites), les porphyres, les calcaires et les roches fragmentaires. On y a ajoute des caracteres pour les grands depots de houilles et de sel gemme, qui servent a orienter les geognostes, leur position indiquant celle du gres rouge et du calcaire alpin. Tableau et valeur des signes. a, Granite. b, Gneis. g, Micaschiste. d, Thonschiefer. On a employe les quatre premieres lettres de l'alphabet pour designer les quatre formations primitives les plus anciennes. Comme ces formations passent graduellement les unes aux autres, on a choisi des lettres qui se succedent immediatement dans l'ordre alphabetique. Le granite passe au gneis, le gneis au micaschiste, celui-ci au thonschiefer. D'autres formations (porphyre, grünstein, euphotide) paroissent pour ainsi dire isolees, souvent comme surajoutees aux terrains plus anciens; aussi les a-t-on representees par des lettres qui ne se succedent pas immediatement entre elles, et qui ne font pas suite aux lettres a, b, g, d. C'est par ce moyen que les formations qui se lient moins aux autres que quelquefois (euphotide et grünstein) elles se lient entre elles, se distinguent dans l'ecriture pasigraphique d'une maniere aussi tranchee que dans la nature. o, Ophiolithes, euphotide, gabbro et serpentine; en general toutes les formations abondantes en diallage. s, syenite, grünstein; en general toutes les formations abondantes en amphibole. p, Porphyre. On voit quelquefois p passer a s, et s passer a o. t, Formations calcaires et gypseuses (titanos). Si l'on veut individualiser davantage les formations calcaires, on peut distinguer les primitives (t), et celles qui renferment des debris organiques (t'); on peut meme, par des exposans, indiquer separement le calcaire de transition (tt), le calcaire alpin ou zechstein (ta), le calcaire de Goettingue ou muschelkalk (tm), le calcaire du Jura ou la grande formation oolithique (to), la craye (tc), le calcaire grossier parisien (tp) etc. k, Roches fragmentaires, arenacees, agregees, conglomerats, grauwacke, gres, breches, roches clastiques de M. Brongniart (klasma). L'accentuation (k') indique comme dans t, que le gres est coquillier. On peut distinguer les grauwackes ou roches fragmentaires de transition (kg); le gres rouge (ka), renfermant le grand depot de houille (anthrax); le gres bigarre ou gres de Nebra (kn); le gres de Königstein ou quadersandstein (kq); le gres vert ou gres tertiaire a lignites sous la craie (kl); le gres plus abondant en lignites au-dessus de la craie (k2l); le gres de Fontainebleau (kf), etc. Une bonne notation doit avoir l'avantage de pouvoir modifier la valeur des signes selon que l'on s'arrete a des divisions diversement graduees. Les exposans font allusion aux noms des roches. x, Houille, dont le plus grand depot se trouve a l'entree du terrain secondaire: le meme signe accentue (x') indique les lignites, dont le grand depot est place a l'entree du terrain tertiaire et qui sont quelquefois des houilles coquillieres. (xulon). th, Sel gemme, dont la formation principale se trouve tantot dans le calcaire alpin, tantot dans le red marl ou gres bigarre. Ne pouvant employer la premiere lettre du mot grec als (elle indique deja le granite), j'ai fait allusion a thalassa. ||, La division des formations, anciennement recue, en terrain primitif, intermediaire, secondaire, etc., est indiquee par deux barres perpendiculaires. Lorsque les series geognostiques ont des termes tres-nombreux, ce signe offre comme des points de repos. Le geognoste experimente sait d'avance ou est placee la premiere roche de transition, le gres houiller, ou la craie. L'accentuation d'un caractere (d', t', k') rappelle en general qu'une roche renferme des debris de coquilles, qu'elle n'est pas primitive. Voici quelques exemples de l'emploi de ces douze signes pasigraphiques des roches: a, g+p, dt', k', p, s, a. Le terrain de transition commence apres g+p (le micaschiste avec des bancs de porphyre primitif). C'est presque la suite des formations de Norwege (page 148). On voit suivre une formation complexe de thonschiefer et de calcaire (noir) avec debris de coquilles, du grauwacke, un porphyre, de la syenite et da granite. Les termes dt' et k', qui precedent p, s, a, caracterisent ces trois roches comme des roches de transition. En Angleterre, ou le terrain intermediaire offre deux formations calcaires bien distinctes (celle de Dudley et du Derbyshire), on voit se succeder: b, sp, d', kg, t', kg, t', x, ka, ta, kn+th, to, kl. tc, k2l .... Le terrain de transition commence avec la formation de syenite et porphyre (Snowdon) placee sur un gneis qu'on croit primitif; puis se suivent: un thonschiefer avec trilobites, le grauwacke de May-Hill, le calcaire de transition de Longhope, le old red sandstone de Mitchel Dean, le mountain limestone du Derbyshire, la grande formation de houille, le new red conglomerate qui represente le gres rouge, le calcaire magnesifere, le red marl avec sel gemme, le calcaire oolithique, le gres secondaire a lignites (greensand), la craie, le gres tertiaire a lignites ou argile plastique, etc. Sur le continent, les formations secondaires, si elles s'etoient toutes developpees, se succederoient de la maniere suivante: t', kg || pka + x, ta+th, kn, tm, kq, to, kl, tc || k2l.... En comparant ce type avec celui de l'Angleterre, x, ka, ta, kn+th, to, kl, tc..... on voit qu'entre les oolithes (to) et le red marl ou gres de Nebra (kn) il y a, en Angleterre, deux formations supprimees, savoir, le muschelkalk et le quadersandstein; les houilles (x), le sel gemme (th) et les oolithes (ko) servent de termes de comparaison, d'horizon geognostique. Mais, sur le continent, x et th sont lies au gres rouge et au calcaire alpin, tandis qu'en Angleterre ces depots sont plutot lies aux roches de transition et au red marl. Quelquefois ta est subordonne (pag. 259), intercale a ka: ces deux termes de la serie (le calcaire alpin et le gres rouge) n'en forment alors qu'un seul. L'incertitude de savoir si un calcaire est alpin (zechstein) ou de transition, naeit generalement de la suppression du gres rouge et du depot de houille que renferme ce gres. Des deux series, t, k+x, t ..., t, k, t ..., la premiere seule offre la certitude que le dernier t est du calcaire alpin. Dans la seconde serie, les deux calcaires et la roche fragmentaire qui les separe pourroient etre de transition. La liaison intime de la craie avec le calcaire du Jura est evidente, d'apres l'alternance des couches (to, kl, tc, k2l,), et d'apres l'analogie des gres a lignites au-dessous et au-dessus de la craie. Pour reunir les principaux phenomenes de gisement des roches dans les terrains primitifs, intermediaires, secondaires et tertiaires, j'offre la serie suivante: a, ab, b+p, bg, g+t, a, g, d, a, b, d, o || kg, t', dt', d', d' + p, g, t', sp, s + a, sp, o || pka + x, ta+th, kn, tm, kq, to, kl, tc || k2l, tp .... Il seroit inutile de donner l'explication de ces caracteres; elle resulte de leur comparaison avec le tableau de formation. Je me borne a fixer l'attention du lecteur sur l'accumulation des porphyres (p), sur les limites des terrains de transition et secondaires, sur la position des formations d'euphotide (o), sur les grands depots de houille et des lignites (x), et sur le retour (presque periodique) des formations feldspathiques, des granites, gneis et micaschistes (a, b, g) de transition. Comme la notation que je presente ici peut etre diversement graduee, en accentuant les caracteres, en les reunissant comme des coefficiens dans les formations complexes, ou en ajoutant des exposans, je doute que les noms des roches rangees par series les unes a cote des autres puissent parler aussi vivement aux yeux que la notation algorithmique. Dans la methode figurative ou graphique, celle qui represente les formations par des parallelogrammes superposes les uns aux autres, on peut aussi indiquer les rapports de composition et de structure par des caracteres qui couvrent, comme un reseau, toute la surface des parallelogrammes. En alongeant les parties grenues du granite et en divisant le parallelogramme en couches assez epaisses, on obtient le caractere du gneis. En rendant le tissu feuillete onduleux et en l'interrompant par des noeuds (de quarz), le caractere du gneis se change en celui de micaschiste. De la meme maniere, la syenite sera representee par le signe de granite auquel on ajoute des points noirs (l'amphibole). Ces caracteres passent les uns aux autres, comme les roches qu'ils indiquent. En les reunissant dans des coupes, j'ai forme sur les lieux des dessins tres-detailles des vallees de Mexico et de Totonilco, des environs de Guanaxuato, et du chemin de Cuernavaca a la mer du Sud; dessins qui ont l'avantage de ne pas exiger l'emploi des couleurs. Je n'entrerai pas dans un plus grand detail sur les caracteres que l'on peut employer. Ces caracteres peuvent etre diversement modifies: il n'y a d'essentiel que la concision de la notation et l'esprit des methodes pasigraphiques. NOTES. §. 1. Leopold de Buch, Geogn. Beobacht., Tome I, page 16, 23; Id., Reise nach Norwegen, II, p. 188; Id., dans Gilbert's Annalen, 1820, Avril, p. 130. Leonhard, Taschenbuch, 1814, p. 17. Freiesleben, Bemerkungen über den Harz, I, p. 142. Leonhard, Kopp et Gaertner, Propaedeutik, p. 159. Bonnard, Essai geogn. sur l'Erzgebirge, p. 18, 48; Id., Apercu geogn. des terrains, p. 32. D'Aubuisson, Traite de geogn., II, 12. Jameson, Syst. of Miner., III, 107. Goldfuss et Bischof, Beschreibung des Fichtelgebirges, I, 145; II, 38. Boue, Geologie d'Ecosse, p. 16, 348; Geol. Trans., II, 158. Edinb. Phil. Trans., VII, 350. Beudant, Voyage miner. et geol. en Hongrie, III, 19, 27. Humboldt. Essai sur la geogr. des plantes, p. 122; Id., Relat. histor. de voy. aux reg. equin., II, 100, 299, 507. §. 2. Raumer, Geb. von Nieder-Schlesien, p. 10. §. 3. Bonnard, Erzgeb., p. 62, 118. Goldfuss, Fichtelg., I, 145, 148, 172; II, 32. §. 4. Pusch, dans Leonh., Taschenb., 1812, p. 42. Raumer, Fragm., p. 33, 36, 70. Bonnard, Erzgeb., p. 104, 121. Maineke et Keferstein, dans Leonh., Taschenb., 1820, p. 103. §. 5. Buch, Beob., I, 33, Id., Norw., I, 197, 358, II, 240; Id. dans Mag. naturf. Freunde, 1809, p. 46. D'Aubuisson, Geogn., II, 60--66; II, 183, 187. Blöde, dans Leonh. Taschenb., 1812, p. 17. Humboldt, Nivell. geogn. des Andes, dans son Recueil d'observ. astron., I, 310. §. 6. Bonnard, Erzgeb., p. 72. Humboldt, Rel. hist., I, 556, II, 139. §. 7. Goldfuss, Fichtelgeb., I, 172 -- 174. Bonnard, Terrains, p. 34, 40, 82, 66; Id. Roches, p. 34. Humboldt, Rel. hist., I, 610; II, 142, 233, 491, 569, 715. §. 8. Burckhardt, Travels in Syria, p. 142. D'Aubuisson, Geogn., II, 19. §. 9. Steffens , Oryktognosie, I, 270. Boue, Ecosse, p. 55. Humboldt, Rel. hist., II, 40. §. 10. Beudant, Hongrie, II, 213. Bonnard, Terrains, p. 79. §. 11. Buch, Geogn. Beob., I, 45, 51, 124, 257; Id., Norwegen, I, 191, 209, 219; Id., dans Nat. Mag., 1809, p. 115. Cordier, dans Journ. des mines, XVI, 254. Bonnard, Terrains, p. 46. D'Aubuisson, Geogn., II, 78 -- 93; Id. dans Journal de physique, 1807, p. 402. Eschwege, Journal von Brasilien, II, 14. Freiesleben, Geogn. Beytrag zur Kenntniss des Kupfersch., V, 257. Goldfuss, Fichtelg., p. 9. §. 12. Buch, Norwegen, I, 272, 413. §. 13. Buch, Geogn. Beobacht., I, 30; Id., Norwegen, II, 27, 31. Raumer, Geogn. Versuche, p. 50. §. 14. Freiesleben, Harz, II, 66. Bonnard, Erzgeb., p. 109 -- 133. §. 15. Beudant, Hongrie, II, 84, III, 30, 40. Buch, Norwegen, II, 83, 87; Id., dans Mag. naturf. Fr., 1810, p. 147. Boue, Ecosse, p. 386. §. 16. Eschwege, Journ. von Brasilien, I, 25, 34, 36, 38. §. 17. Eschwege, Bras., II, 241. §. 18. Bonnard, Terrains, p. 56. §. 19. Buch, dans Mag. nat. Fr., 1810, p. 137; Id. Geogn. Beob., I, 68, 71: Id., Norwegen, I, 479, II, 29, 84, 87, 135. Esmark, dans Pfaff, Nord. Arch., III, 199. Saussure, Voyages dans les Alpes, §. 1362. Journ. de phys., XXXV, 298. Targieni Tozzetti, Viaggi, II , 433. Brocchi, Bibl. ital., IX, 76, 356. Beudant, Hongrie, III, 49. §. 20. Brochant, Observ. geol. sur les terrains de transition de la Tarantaise, p. 16, 19, 31, 33, 37, 39, 44, 50, 53; Id., Memoire sur les gypses anciens, p. 12 -- 46. Buch, dans Mag. nat. Fr., 1809, p. 181; Id. dans Leonhard's Taschenb., 1811, p. 335. Raumer, Fragmente, p. 10, 24. D'Aubuisson, Journ. des mines, n.° 128, p. 161. §. 21. Beudant, Hongrie, III, 96, 133, 199. Raumer, Nieder-Schlesien, p. 72. §. 22. Charpentier, Description geogn. des Pyrenees (manuscrit); §§. 35, 66, 89, 100, 105, 141 -- 167; Id., Mem. sur le gisement des gypses de Bex, dans Naturw. Anzeiger der Schweiz. Gesellsch., 1819, n.° 9, p. 65. Raumer, Fragmente, p. 10, 32, 74; Id., Versuche, p. 41. Buch, Norwegen, II, 281; Id. dans Mag. nat. Fr., 1809, p. 175. Meinecke et Keferstein, Taschenb., p. 63. Haussmann, Nord. Beytr., II, 77, IV, 653; Id., Reise durch Scandinavien, II, 239. Engelhardt, Felsgebäude Russlands, I, 37. Keferstein, Teutschland geognostisch dargestellt, I, 136. Eschwege, Brasil., II, 258. Maclure, Geol. des Etats- Unis, p. 24. Brongniart, Notice sur l'histoire geogn. du Cotentin, p. 17; Id. Crustaces fossiles, p. 46 -- 63. Beudant, Hongrie, III, 76, 578. Saussure, Alpes, §. 501. Wahlenberg, dans Acta Soc. Upsal., VIII, p. 19. Link, Urwelt, p. 2. Castelazo, de la riqueza de la Veta Biscaina (Mexico, 1820), p. 9. Humboldt, Essai polit. sur la Nouvelle-Espagne, II, 534, 537, 519--526. §§. 23 et 24. Del Rio dans la Gazeta de Mexico, XI, 416. Humboldt, Essai polit., II, 494, 521, 581, 583. Beudant, Hongrie, II, 157, III, 67 -- 124, 148. Boue, Ecosse, p. 147. Burckhardt, Travels in Syria, 1822, p. 493, 567. Raumer, Fragm., p. 24 -- 26, 37, 48. Haussmann, dans Moll's Neuem Jahrb., I, 34. Buch, Norw., I, 96--144. §. 25. Boue, Ecosse, p. 94, 358. Palassou, Supplement aux Memoires pour servir a l'hist. nat. des Pyrenees, p. 139 -- 153. Brongniart, sur les Ophiolithes, p. 26, 46, 56, 59, 61. §. 26. Beudant, Hongrie, II, 575 -- 580, 584--594, III, 171, 184, 194, 204. Geol. Trans., IV, p. 9. Annales des mines, III, p. 45 et 568. Steffens, Geogn. Aufsätze, p. 11. Buch, Beob., I, p. 104, 157. Heim, Geogn. Beytr. zur Kenntn. des Thüring. Waldes, II, 5te Abth., 236. Conybeare and Philipps Geol. of England, I, 298, 312, 324--370. §. 27. Humboldt, Geogr. des plantes, p. 128; Id., Essai politique, II, 589. §. 28. Escher, dans Leonh. Taschenb., 1804, p. 347; Id. dans Neue Zürcher Zeitung, 1821, n.° 60, p. 237. Uttinger, dans Leonh. Taschenb., 1819, p. 42. Keferstein, Teutschland, III, 259, 263, 273, 340, 372, 390, 407. Mohs, dans Moll's Ephem., 1807, p. 161. Lupin, ib., 1809, p. 359. Ramond, Voy. au sommet du Mont-perdu, p. 15, 26. Traill, dans Geol. Trans., III, 138. Bibl. univ., XIX, 38. Buckland, On the structure of the Alps, p. 9. Buch, Geog. Beob., I, 153 -- 171, 194, 216, 256. Freiesleben, Kupfersch., IV, 284. Tondi, dans Lucas, Tabl. meth. des esp. min., II, 243. Haussmann, Nord. Beytr., IV, 88. Jenaer litter. Zeit., 1813, p. 100. Steffens Geogn. Aufs., p. 49. Beudant, Hongrie, III, 231--237. Conybeare and Philipps, England, I, 301. Marzari Pencati, Cenni geologici, p. 21. Breislak, Sulla giacitura di alcune rocce porfiritiche e granitose, p. 25 -- 35. §. 29. Conybeare and Philipps, Engl., I, 61, 269. Freiesleben, Kupfersch., I, 90 -- 188, IV, 276 -- 284. §. 30. Freiesleben, Kupfersch., I, 65, 89, IV, 295--317. Raumer, Versuche, p. 112-- 115. §. 31. Haussmann, Nord. Beytr., 1806, St. 1, p. 73, 98. Freiesleben, Kupfersch., I, 102--107, IV, 283, 293. Conybeare and Philipps, Engl., I, 122. Raumer, Nieder-Schlesien, p. 121, 123, 153. §. 32. Humboldt, über die unterird. Gasarten, p. 39. Karsten, Min. Tab. p. 63 -- 65. Buch, Landek., p. 7; Id., dans Helvet. Alm., 1818, p. 42. Gilb. Annalen, 1806, St. 5, p. 35. Escher, Naturw. Anzeiger der Schweiz. Ges., Jahrg. IV, p. 29. Charbaut, Mem. sur la geologie des environs de Lons-le-Saunier, p. 7, 9, 24, 27. Merian, Beschaffenheit der Gebirgsbild. von Basel, p. 23, 36, 46, 88. §. 33. Conybeare and Philipps, Engl., I, 127 -- 164. §. 34. Brongniart et Cuvier, Descr. geol. des environs de Paris, 1821, p. 10--17, 68--101. Steffens, Geogn. Aufs., p. 121. Raumer, Vers., p. 85, 116. Conybeare and Philipps, Engl., I, 60 -- 126. §. 35. Bonnard, Terrains, p. 226. Brongniart, Descr. geol., p. 17--28, 102--122. Conybeare and Philipps, Engl., I, 37 -- 57. Raumer, Vers., p. 120 -- 122. Beudant, Hongrie, III, 242 -- 264. Lardy, dans la Bibl. univ., Mars 1822, p. 180, 183. Keferstein, Teutschland, I, 46. Freiesleben, Kupfersch., V, 255. Adolphe Brongniart, Classific. des vegetaux fossiles, p. 54. §. 36. Beudant, Hongrie, III, 264 -- 282. Brongniart, Descr. geol., p. 29 -- 38, 123 -- 203. §. 37. Raumer, Vers., p. 123 -- 125. Brongniart, Descr. geol., p. 38 -- 50, 203 -- 263. §. 38. Raumer, Vers., p. 125. D'Aubuisson, Geognosie, II, 414, 417. Brongniart, Descr. geol., p. 50 -- 56, 264 -- 274. Bonnard, Terrains, p. 217. §. 39. Brongniart, Descr. geol., p. 57 -- 60, 275 -- 320. Beudant, Hongrie, III, 282 -- 288. §. 40. Buch, Geogn. Beob., II, 172 -- 190. Id., dans Mag. nat. Fr., 1809, p. 299 -- 303; Id., dans Mem. de Berlin, 1812, p. 129 -- 154. Fleuriau de Bellevue, Journ. de phys., LI et LX. Cordier, Mem. sur les substances minerales, dites en masse, qui entrent dans la composition des roches volcaniques, p. 17 -- 69. Bustamente sobre las lavas del Padregul de San Augustin de la Cuevas, dans le Seman. de Mexico, 1820, p. 80. Leonhard, Propaedeutik, p. 168 -- 175. Ramond, Nivellement barometrique et geognostique de l'Auvergne, p. 32--45. Breislak, Introd. a la geologie, I, 234, 261, 316. Heim, Thüringer-Wald, p. 229. Singer, dans Karsten's Archiv für Bergbaukunde, III, 88. Robiquet, dans Annales de physique et de chimie, XI, 206. Nose, Niederrheinische Reise, II, p. 428. Boue, Ecosse, p. 219 -- 287. Beudant, Hongrie, III, 298--644. Humboldt, Essai sur la geographie des plantes, et tableau physique des regions equinoxiales, p. 129; Id., Essai polit., I, 249--254; Id., Nivellem. geogn. des Cordilleres, dans le Recueil d'obs. astron., I, 309--311, 327 , 332; Id., Recueil d'obs. de zool. et d'anat. comparee, I, 21; Id., Relat. hist., I, 91, 116, 129, 133, 136, 148, 151, 153 -- 155, 171, 176, 180, 308, 312, 394, 640; II, 4, 14, 16, 20, 25, 27, 39, 452, 515, 565, 719.