Isothermes (Lignes). Lignes où l’on ſuppoſe qu’il exiſte une égalité de chaleur ſur la ſurface de la terre. Nous devons à M. Humboldt la recherche des lignes iſothermes. Un extrait du Mémoire qu’il a publié ſur cet objet, ſe trouve dans les Annales de Chimie & de Phyſique, tom. V, pag. 102. M. Humboldt examine d’abord les diverſes méthodes que les phyſiciens ont ſucceſſivement ſuivies dans la détermination des températures moyennes. Par la température moyenne des jours. Dans l’acception mathématique, la température moyenne d’un jour eſt la moyenne des températures correſpondantes à tous les inſtans dont le jour ſe compoſe. Si l’on fixoit à une minute la durée de ces inſtans, on diviſeroit par 1440 = 24 × 60 la ſomme des 1440 obſervations thermometriques faites d’un minuit au minuit ſuivant, & l’on obtiendroit ainſi le nombre cherché. La ſomme de tous ces réſultats partiels, diviſée par 365, donneroit la température moyenne de l’année. Les expériences des variations thermométriques, en un jour; étant, en général, fort rapprochées, on conçoit que les mêmes degrés de chaleur appartiendront à un grand nombre d’inſtans; en ſorte que chacune influera ſur la moyenne définitive en raiſon de ſa valeur & de ſa durée. En ſe conformant à cette remarque, dans le calcul des moyennes, on peut les obſerver avec préciſion, alors même que les intervalles des obſervations partielles ſont beaucoup plus grandes que nous ne venons de le ſuppoſer. M. de Humboldt a diſcuté, ſous ce point de vue, quelques ſuites d’obſervations faites d’heure en heure, & dans différentes ſaiſons, ſous l’équateur & à Paris. Il compare les moyennes calculées ſuivant la méthode précédente, c’eſt-à-dire, en tenant compte de la durée de chaque température partielle, à celle que fourniſſent les procédés les plus généralement uſités. Il en eſt réſulté que, la demi-ſomme des températures, maximum & minimum de chaque jour, c’eſt-à-dire, celle de deux heures après midi & celle du lever du ſoleil, ne diffère généralement que de quelques dixièmes de degré de la moyenne rigoureuſe, & peut la remplacer. En calculant un grand nombre d’obſervations, faites entre les parallèles de 46 à 48 degrés, M. de Humboldt a trouvé que la ſeule époque du coucher du ſoleil, donne une température moyenne qui ne diffère que de quelques dixièmes de degré de celle qui a été conclue des obſervations du lever du ſoleil & de deux heures. Comme il eſt rare que les voyageurs aient les moyens de réunir, dans chaque lieu, des obſervations en nombre ſuffiſant pour donner la température moyenne de l’année, il étoit curieux de rechercher quels mois peuvent la fournir immédiatement. Le tableau ſuivant montre que, juſqu’à des latitudes tres-élevées, les mois d’avril & d’octobre, mais ſurtout ce dernier, jouiſſent de cette propriété. Lieux. Temperature moyenne de l’année. d’octobre d’avril. Caire.......... 22,4 22,4 25,5 Alger.......... 21,0 22,3 17,0 Natchez........ 18,0 20,2 19,1 Rome.......... 15,8 16,7 13,0 Milan.......... 13,2 14,5 13,1 Cincinati....... 12,0 12,7 13,8 Philadelphie.... 11,9 12,2 12,0 New-Yorck..... 12,1 12,5 9,5 Pékin.......... 12,6 13,0 13,9 Bude.......... 10,6 11,3 9,5 Londres........ 11,6 11,3 9,9 Paris........... 10,6 10,7 9,0 Genève........ 9,6 9,6 7,6 Dublin......... 9,2 9,3 7,4 Edimbourg..... 8,8 9,0 8,3 Gottingue...... 8,3 8,4 6,9 Franeker...... 11,3 12,7 10,0 Copenhague.... 7,6 9,3 5,0 Stockholm...... 5,7 5,8 3,6 Chriſtiania...... 5,9 4,0 5,9 Upſal.......... 5,4 6,3 4,3 Quebec........ 5,5 6,0 4,2 Pétersbourg..... 3,8 3,9 2,8 Abo........... 5,2 5,0 4,9 Drontheim...... 4,4 4,0 1,3 Uleo.......... 0,6 3,3 1,2 Umeo.......... 0,7 3,2 1,1 Cap-Nord...... 0,0 0,0 1,0 Enontekies..... —2,8 —2,5 —3,0 Nain........... —3,1 —0,6 —2,5 Après avoir indiqué avec préciſion le ſens que l’on doit attacher à l’expreſſion de température moyenne, nous allons nous occuper du tracement des lignes iſothermes ou d’égale chaleur. L’emploi des moyens graphiques jettera beaucoup de jour ſur des phénomènes qui ſont du plus haut intérêt pour l’agriculture & pour l’état ſocial des habitans. Pour tracer ces lignes iſothermes, il faut chercher les points du globe dont les températures moyennes ſe rapprochent de 0, 5, 10, 15°, &c. Comme il eſt difficile d’avoir des obſervations faites ſur les lieux où la température moyenne eſt exactement de 0, 5, 10, 15°, &c., & que les obſervations peuvent être faites à des diſtances plus ou moins éloignées de ces températures moyennes, une donnée néceſſaire, pour déterminer ces points, eſt la connoiſſance de la décroiſſance de la température moyenne annuelle, en s’avançant du ſud au nord. M. Humboldt a trouvé que, pour 1° de variation dans la température moyenne annuelle, correſpondent, dans différentes zônes, les changemens de latitude ſuivans: Dans le nouveau Continent, pour les longitudes de 70 à 80° oueſt. Dans l’ancien Continent, pour les latitudes de 2 à 17° eſt. Entre 30 & 40° latitude nord.. 1°,24′ 2°,30′ — 40 & 50... 1°,6′ 1°,24′ — 50 & 60... 1°,18′ 1° 48′ D’après ces données & les moyennes les plus préciſes qu’il ait pu recueillir, en ayant égard à la hauteur des lieux où les obſervations ont été faites, M. Humboldt trouve que: La bande iſotherme de 0° paſſe par 3° 54′ au ſud de Nain, dans le Labrador; par le centre de la Laponie, & 5° au nord d’Uleo par Soliskamsky. La bande iſotherme de 5° paſſe par 0°,5 au nord de Quebec; 1° au nord de Chriſtiania; 0°,5 au nord d’Upſal; par Pétersbourg & par Moſcou. La bande iſotherme de 10° paſſe par 42° [Formel] dans les États-Unis; 1° au ſud de Dublin; 0°,5 au nord de Paris; 1°,5 au ſud de Franeker; 0°,5 au ſud de Prague; 1°,5 au nord de Bude; 2° [Formel] au nord de Pekin. La bande iſotherme de 15° paſſe par 4°,5 au nord de Natchez; par Montpellier; à 1° au nord de Rome & 1°,5 au nord de Nanagaſacki. La bande iſotherme de 20° paſſe par 2°,5 au ſud de Natchez; 50° au ſud de Funchal, & autant qu’on en peut juger, ſous la méridienne de Chypre. En jetant un coup d’œil ſur la fig. 936, qui repréſente les lignes iſothermes de l’hémiſphère ſeptentrional, on voit que ces lignes diffèrent des parallèles terreſtres. Leurs ſommets convexes, en Europe, ſont preſque ſitués ſur le même méridien. A partir de ces points, & en marchant vers l’oueſt, ces lignes deſcendent vers l’équateur, auquel elles reſtent à peu près parallèles, depuis les côtes atlantiques du Nouveau-Monde juſqu’à l’eſt du Miſſiſſipi & du Miſſouri; il n’eſt pas douteux qu’elles ne ſe relèvent enſuite au-delà des montagnes rocheuſes ſur la côte oppoſée de l’Aſie, entre les 35 & 55° de latitude. On ſait, en effet, qu’on cultive avec ſuccès l’olivier le long du canal de Santa-Barbara, dans la Nouvelle-Californie; & qu’à Noutka, preſque dans la latitude du Labrador, les plus petites rivières ne gèlent pas dans le mois de janvier. Comme les températures varient, dans chaque pays, en raiſon des hauteurs auxquelles on s’élève, il eſt néceſſaire que les lignes iſothermes que l’on vient de tracer ſe rapportent à un niveau conſtant, ou mieux, à une hauteur fixe, priſe du bord de la mer, ſous chaque latitude; mais pour réduire la température moyenne, priſe dans un lieu, à celle qu’elle auroit à la hauteur au-deſſus du niveau de la mer, à laquelle on veut la rapporter, il eſt eſſentiel de connoître les bandes iſothermes ſous chaque climat, en raiſon des hauteurs. Nous devons encore à M. Humboldt le tracé graphique des variations des hauteurs des bandes iſothermes, repréſenté fig. 936 (a). Leurs points de départ, à l équateur; leurs hauteurs pour d’autres latitudes, ſe fondent ſur la diſcuſſion d’un grand nombre d’obſervations faites, tant ſur le dos des Cordillières, entre 10° de latitude auſtrale & 10° de latitude boréale, que dans nos climats. M. Humboldt en a déduit les réſultats ſuivans: Hauteur. Zône équator., de 0 à 10° de latitude. Zône tempérée, de 45 à 47° de latit. à 0, mètre. + 27°,5 + 12°,0 974 + 21,8 + 5,0 1,949 + 18,4 — 0,2 2,925 + 14,3 — 4,8 3,900 + 7,0 » » 4,872 + 1,5 » » A l’aide de ces deux tracés des lignes iſothermes horizontale & verticale, il eſt facile de trouver la température moyenne d’un point quelconque de l’hémiſphère ſeptentrional. Nous devons obſerver que ces lignes, tracées à l’aide d’obſervations priſes à de grande diſtances les unes des autres, doivent préſenter quelques anomalies; c’eſt ainſi, par exemple, qu’elles devroient éprouver quelques inflexions ſur les côtes de la Méditérannée, entre Marſeille, Gênes, Lucques & Rome; mais les obſervations n’étant pas encore aſſez multipliées pour comprendre toutes ces inflexions partielles, on attendra que l’on en ait ſuffiſamment pour le comprendre, d’abord, dans des cartes particulières, puis dans des cartes générales. M. Humboldt ayant diſcuté les températures moyennes de chaque ſaiſon ſur la ligne iſotherme de 12°, a trouvé que ces températures moyennes étoient: Hiver Printemps Été. Automne. Au ſommet concave en Amérique, 77° de longitude oueſt de Paris.............................. 0′ + 11°,3 + 24 + 12°,5 Près du ſommet concave, en Europe, dans le méridien de Paris............................... + 4,5 + 11,0 + 20 + 12,3 Au ſommet concave, en Aſie, 114° de longitude orientale de Paris............................ — 4° + 12,6 + 27 + 12,4 A l’aide de ces obſervations, il a tracé, ſur chaque ligne iſotherme, l’indication des températures moyennes de l’été & de l’hiver, priſe dans différens points, ſous la forme d’une fraction. Ainſi, la fraction [Formel] , qui correſpond à la Laponie, — 11°,5 pour la température moyenne de l’hiver, + 10° pour celle de l’été; la température moyenne de l’année étant zéro.