Fragmens du Voyage en Norvege et en Laponie, par Mr. Leopold De Buch. Nous ne pouvons pas mieux introduire les fragmens de cet ouvrage, qu'en empruntant quelques lignes du morceau que Mr. de Humboldt a mis en tete de la traduction de Mr. Eyries. "Ce voyage annonce un observateur accoutume a etudier la nature et les hommes, distingue par la variete de ses connoissances, doue de cette finesse de reflexion, et de cette liberte d'esprit, qui fait envisager les objets sous leur veritable point de vue. Les travaux de Mr. de Buch embrassent, outre la Laponie, les parties meridionales de la Norvege et de la Suede. Le barometre a la main, il en a nivele le sol: il a examine les differences de temperatures, egalement decroissantes vers le pole et la cime des montagnes; etudie les grands phenomenes de la geographie des plantes; determine la limite des neiges perpetuelles, tant dans l'interieur du continent, que sur les cotes du nord, ou des hivers peu rigoureux succedent a des etes moins chauds que les hivers ne le sont a Marseille." .................. "Dans le voyage en Norvege et en Laponie, les recherches purement scientifiques, se trouvent liees, d'une maniere naturelle, a des vues politiques et morales. En effet plus les peuples sont agrestes, plus ils vivent pres de cet etat que l'on se plaeit a nommer un etat de nature, et plus est puissante l'influence qu'exerce sur eux le sol, les alimens, le climat, l'aspect du ciel et du paysage. Pour bien concevoir l'existence de peuples montagnards, nomades ou pasteurs, il faut connoeitre tous les rapports dans lesquels ils se trouvent avec la nature environnante." "C'est l'indication de ces rapports, qui me paroeit donner un interet particulier a ce Voyage." "Le style de l'original est concis, anime, et souvent remarquable par une piquante originalite. Il ne m'appartient pas de donner des eloges au litterateur estimable et instruit, qui a bien voulu se charger de la traduction de cet ouvrage. C'est au talent de Mr. Eyries, qu'est dei, pour la plus grande partie, l'interet dont le public a honore mes Tableaux de la nature." En parlant avantageusement de cette nouvelle traduction, j'aurois l'air de ceder moins a la conviction, qu'a un sentiment de reconnoissance. Je me bornerai done ici a rendre temoignage a la fidelite scrupuleuse, et a la justesse d'expressions avec laquelle Mr. Eyries a rendu tout ce qui a rapport a la geologie et aux sciences physiques en general." "Parmi les impressions diverses que fait naeitre le tableau des regions septentrionales, aucune n'est plus douce que cet aspect d'une prosperite croissante, de ce perfectionnement dans les institutions sociales, de cet adoucissement dans les moeurs, et de cette culture de l'esprit dont l'influence s'etend aujourd'hui aussi loin que le continent de l'Europe. Un demi siecle ne s'est point encore ecoule, depuis l'epoque ou l'on forma a Drontheim, un etablissement pour les Missionnaires de Laponie, comme l'Espagne et le Portugal en ont depuis long-temps pour les tribus sauvages de l'Amerique. L'etat des Lapons meme a eprouve peu de changemens; mais la civilisation a penetre vers les cotes, a travers ces peuples grossiers et agrestes. Mr. de Buch nous apprend qu'a Rebvog, quatre degres au-dela du cercle polaire, on trouve et Corneille, et Racine, et les chefsd'oeuvres de la poesie danoise. Heureux privilege du genie, qui, a travers les siecles et la difference des langues, fait entendre sa voix jusqu'aux confins du monde habite."