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Alexander von Humboldt: „Des volcans de Jorullo“, in: ders., Sämtliche Schriften digital, herausgegeben von Oliver Lubrich und Thomas Nehrlich, Universität Bern 2021. URL: <https://humboldt.unibe.ch/text/1809-Description_du_volcan-03> [abgerufen am 20.04.2024].

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https://humboldt.unibe.ch/text/1809-Description_du_volcan-03
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Titel Des volcans de Jorullo
Jahr 1809
Ort Paris
Nachweis
in: Journal de physique, de chimie, d’histoire naturelle et des arts 26:2 [= 69:2] (Juli 1809), S. 149–155.
Sprache Französisch
Typografischer Befund Antiqua; Auszeichnung: Kursivierung; Fußnoten mit Ziffern; Schmuck: Kapitälchen.
Identifikation
Textnummer Druckausgabe: II.71
Dateiname: 1809-Description_du_volcan-03
Statistiken
Seitenanzahl: 7
Zeichenanzahl: 14057

Weitere Fassungen
Description du volcan de Jorullo, tirée de l’Essai politique sur le Royaume du Mexique, formant la troisième partie des Voyages d’Alexandre de Humboldt et Aimé Bompland. Troisième livraison (Genf, 1809, Französisch)
Des eaux chargées d’acide muriatique (Paris, 1809, Französisch)
Des volcans de Jorullo (Paris, 1809, Französisch)
Sur l’Acide muriatique natif (Paris, 1809, Französisch)
Sur les Volcans de Jorullo (Paris, 1809, Französisch)
On the Volcanoes of Jorullo (London, 1810, Englisch)
On the volcanos of Jorullo (Philadelphia, Pennsylvania, 1810, Englisch)
Des eaux chargées d’acide muriatique (Paris, 1810, Französisch)
On the Volcanoes of Jorullo (London, 1811, Englisch)
[Description du volcan de Jorullo, tirée de l’Essai politique sur le Royaume du Mexique, formant la troisième partie des Voyages d’Alexandre de Humboldt et Aimé Bompland. Troisième livraison] (Frankfurt am Main, 1814, Deutsch)
Account of the Eruption of the Volcano of Jorullo in Mexico (Edinburgh; London, 1826, Englisch)
Beschreibung eines Ausbruches des Vulkanes Jorullo in Mexico (Erfurt; Weimar; Leipzig, 1826, Deutsch)
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DES VOLCANSDE JORULLO; Par Alex. HUMBOLDT.


EXTRAIT de son Essai sur la Nouvelle-Espagne, pag. 249.

La grande catastrophe dans laquelle cette montagnevolcanique est sortie de terre, et par laquelle un terraind’une étendue considérable a totalement changé de face,est peut-être une des révolutions physiques les plus consi-dérables que nous présente l’histoire de notre planète. LaGéologie désigne les parages de l’Océan, où, à des époquesrécentes, depuis deux mille ans, près des Açores (1), dansla mer Egée (2) et au sud de l’Islande (3), des îlots volca-niques se sont élevés au-dessus de la surface des eaux;mais elle ne nous offre aucun exemple où, dans l’intérieur
(1) En 1721, il sortit auprès de Tercère une île du milieu du sein de lamer. Note du Rédacteur. (2) Platon rapporte que dans la mer Egée, Rhodes, Délos et onze autresîles sortirent du sein des mers. Pythagore et Pline, livre ii, chapitre lxxxix, citent un grand nombred’îles qui ont été soulevées par les feux souterrains, telles que Délos,Rhodes. Sénèque rapporte que de son temps l’île de Thérasine, aujourd’hui San-torin, parut au milieu des flots, après de violens tremblemens de terre.Depuis cette époque cette île a été agrandie par de nouvelles agitations desfeux soumarins. Note du Rédacteur. (3) En 1784, il sortit du sein de la mer une île auprès de l’Islande.Pennant dit que le lieu d’où elle s’éleva avoit 500 pieds de profondeur. Note du Rédacteur.
|150| d’un continent, à 36 lieues de distance des côtes, à plusde 42 lieues d’éloignement de tout autre volcan actif, ilse soit formé soudainement, au centre d’un millier de petitscônes enflammés, une montagne de scories et de cendres,haute de 517 pieds, en ne la comparant qu’au niveau an-cien des plaines voisines. Ce phénomène est resté inconnuaux minéralogistes et aux physiciens de l’Europe, quoiqu’iln’ait encore que cinquante années de date, et qu’il ait eulieu à six journées de distance de la capitale de Mexico,en descendant du plateau central vers les côtes de la merdu Sud.
Une vaste plaine se prolonge depuis les collines d’Augua-satco jusque vers les villages de Toipa et Pétatlan, égale-ment célèbres par leurs belles cultures de coton. Entre les Picachos del Mortero, les Cerros de las Cuevas et de Cui-che, cette plaine n’a que 750 à 800 mètres de hauteur au-dessus du niveau de l’Océan. Des collines basaltiques s’élè-vent au milieu d’un terrain dans lequel domine le porphyreà base de grünstein. Leurs cimes sont couronnées de chênestoujours verts, à feuillage de lauriers et d’oliviers, entre-mêlés parmi de petits palmiers flabelliformes. Cette bellevégétation contraste singulièrement avec l’aridité de la plainequi a été dévastée par l’effet du feu volcanique. Jusqu’au milieu du dix-huitième siècle, des champs cul-tivés en cannes à sucre et en indigo, s’étendoient entre deuxruisseaux appelés Cuitimba et San-Pedro. Ils étoientbordés par des montagnes basaltiques dont la structure sembleindiquer que tout ce pays, à une époque très-reculée, avoitdéjà été bouleversé plusieurs fois par des volcans. Ces champsarrosés avec art, appartenoient à l’habitation (Hacienda) deSan-Pedro de Jorullo (Xorullo, ou Juvriso), une des plusgrandes et des plus riches du pays. Au mois de juin 1759,un bruit souterrain se fit entendre; des mugissemens épou-vantables (bromidos) furent accompagnés de fréquens trem-blemens de terre; ils se succédèrent pendant 50 à 60 jours,et plongèrent les habitans de l’Hacienda dans la plus grandeconsternation. Depuis le commencement du mois de sep-tembre tout sembloit annoncer une tranquillité parfaite,lorsque, dans la nuit du 28 au 29 du méme mois, un hor-rible fracas souterrain se manifesta de nouveau. Les Indiensépouvantés se sauvèrent sur les montagnes d’Aguasarco. Unterrain de 3 à 4 milles carrés, que l’on désigne par le nom |151| de Malpays, se souleva en forme de vessie. On distingueencore aujourd’hui, dans des couches fracturées, les limitesde ce soulèvement. Le Malpays, vers ses bords, n’a que12 mètres de hauteur au-dessus du niveau ancien de la plaineappelée las Playas de Jorullo; mais la convexité du terrainaugmente progressivement vers le centre jusqu’à 160 mètresd’élévation. Ceux qui, de la cime d’Aguasarco, ont été témoins decette grande catastrophe, assurent que l’on vit sortir desflammes sur l’étendue de plus d’une demi-lieue carrée; quedes fragmens de roche incandescente furent lancés à deshauteurs prodigieuses, et qu’à travers une nuée épaisse decendres, éclairée par le feu volcanique, semblable à unemer agitée, on crut voir se gonfler la croûte ramollie dela terre. Dès-lors les rivières de Cuitimba et San-Pedro seprécipitèrent dans les crevasses enflammées. La décomposi-tion de l’eau contribuoit à ranimer les flammes: on les dis-tingua à la ville de Pascuoro, quoique située sur un plateautrès-large et élevée de 1400 mètres au-dessus des plaines de las Playas de Jorullo. Des éruptions boueuses, surtout descouches d’argile qui enveloppent des boules de basalte dé-composées à couches concentriques, semblent indiquer quedes eaux souterraines ont joué un rôle très-important danscette révolution extraordinaire. Des milliers de petits cônesqui n’ont que deux ou trois mètres de hauteur, et que lesIndiens appellent des fours (hornitos), sortirent de la voûtesoulevée du Malpays. Quoique depuis 15 ans, d après letémoignage des Indiens, la chaleur de ces fours volcaniquesait beaucoup diminué, j’y ai encore vu monter le thermo-mètre à 95°, en le plongeant dans des crevasses qui exhalentune vapeur aqueuse. Chaque petit cône est une fumarole de laquelle s’élève une fumée épaisse jusqu’à dix ou quinzemètres de hauteur. Dans plusieurs on entend un bruit sou-terrain qui paroît annoncer la proximité d’un fluide enébullition. Au milieu des fours, sur une crevasse qui se dirige dunord-nord est au sud-sud-est, sont sorties de terre six grandesbuttes toutes élevées de quatre à cinq cents mètres au-dessus de l’ancien niveau des plaines. C’est le phénomène Monte Novo de Naples, répété plusieurs fois dans une rangéede collines volcaniques. La plus élevée de ces buttes énormesqui rappellent le pays de l’Auvergne, est le grand volcan de |152| Jorullo. Il est constamment enflammé, et il a vomi, du côtédu nord, une immense quantité de laves scorifiées et ba-saltiques, qui renferment des fragmens de roches primitives.Ces grandes éruptions du volcan central ont continué jus-qu’au mois de février 1760. Dans les années suivantes ellessont devenues progressivement plus rares. Les Indiens, épou-vantés du fracas horrible causé par le nouveau volcan, avoientd’abord abandonné les villages situés à sept ou huit lieuesde distance des Playas de Jorullo. Ils s’accoutumèrent enpeu de mois à ce spectacle effrayant. Retournés dans leurschaumières, ils descendirent vers les montagnes d’Aguarsacoet de Santa-Inès pour admirer les gerbes de feu lancées parune infinité de grandes et de petites bouches volcaniques.Les cendres alors couvroient les maisons de Queretoro à plusde 48 lieues de distance, en ligne droite, du lieu de l’ex-plosion. Quoique le feu souterrain paroisse peu actif (1) ence moment, et que le Malpays et le grand volcan commen-cent à se couvrir de végétaux, nous trouvâmes pourtantl’air ambiant tellement échauffé par l’action des petits fours(hornitos), que, très-éloigné du sol et à l’ombre, le ther-momètre monta à 43°. Ce fait paroît prouver qu’il n’y apas d’exagération dans le témoignage de quelques vieuxIndiens qui rapportent que plusieurs années après la pre-mière éruption, même à de grandes distances du terrainsoulevé, les plaines de Jorullo étoient inhabitables à causede l’excessive chaleur qui y régnoit.
(1) Nous trouvâmes dans le fond du cratère l’air à 47°, en quelques en-droits, à 58 et 60. Nous eûmes à passer sur des crevasses qui exhaloientdes vapeurs sulfureuses, et dans lesquelles le thermomètre montoit à 85°.Le passage de ces crevasses, et les amas de scories qui couvrent des creuxconsidérables, rendent la descente dans le cratère assez dangereuse. Je ré-serve le détail de mes recherches géologiques sur le volcan de Jorullo, pourla relation historique de mon voyage. L’Atlas qui accompagnera cette re-lation, contiendra trois planches; 1° la vue pittoresque du nouveau volcanqui est trois fois plus élevé que le Monte Novo de Pouzzole, sorti de terreen 1538, presque sur les bords de la Méditerranée; 2° la coupe verticale,ou le profil du Malpays et de toute la partie soulevée; 3° la carte géogra-phique des plaines de Jorullo, dressée au moyen du sextant, et en employantla méthode des bases perpendiculaires et des angles de hauteur. Les pro-ductions volcaniques de ce terrain bouleversé se trouvent dans le Cabinet del’Ecole des Mines à Berlin. Les plantes cueillies dans les environs fontpartie des herbiers que j’ai déposés au Muséum d’Histoire naturelle à Paris.
|153| On montre encore au voyageur, auprès du Cerro de Santa-Inès, les rivières de Cuitimba et de San-Pedro, dont les eauxlimpides arrosoient jadis la canne à sucre cultivée dans l’habi-tation de Dom André Pimantel. Ces sources se sont perduesdans la nuit du 29 septembre 1759; mais plus à l’ouest àune distance de 2000 mètres, dans le terrain soulevé même,on voit aujourd’hui deux rivières qui brisent la voûte ar-gileuse des hornitos, et se présentent comme des eaux ther-males dans lesquelles le thermomètre monte à 52°,7. LesIndiens leur ont conservé les noms de San-Pedro et Cui-timba, parce que dans plusieurs parties du Malpays, oncroit entendre couler de grandes masses d’eau dans la di-rection de l’est à l’ouest, depuis les montagnes de Santa-Inèsvers l’Hiacienda de la Présentacion. Près de cette habita-tion il y a un ruisseau qui dégage de l’hydrogène sulfu-reux; il a plus de sept mètres de large, et c’est la sourcehydro-sulfureuse la plus abondante que j’aie jamais ob-servée. Selon l’opinion des indigènes, ces changemens extraor-dinaires que nous venons de décrire, cette croûte de la terresoulevée et crevassée par le feu volcanique, ces montagnesde scories et de cendres amoncelées sont l’ouvrage desmoines, le plus grand sans doute qu’ils aient produit dansles deux hémisphères. Aux Playas de Jorullo, dans la chau-mière que nous habitions, notre hôte indien nous racontaqu’en 1759, des Capucins en mission prêchèrent à l’habi-tation de San Pedro, mais que n’ayant pas trouvé un accueilfavorable (ayant dîné peut-être moins bien qu’ils ne s’y at-tendoient), ils chargèrent cette plaine, alors si belle et sifertile, des imprécations les plus horribles et les plus com-pliquées. Ils prophétisèrent que d’abord l’habitation seroitengloutie par des flammes qui sortiroient de la terre, et queplus tard l’air ambiant se refroidiroit à tel point, que lesmontagnes voisines resteroient éternellement couvertes deneige et de glace. La première de ces malédictions ayanteu des suites si funestes, le bas-peuple indien voit déjà, dansle refroidissement progressif du volcan, le présage sinistred’un hiver perpétuel. J’ai cru devoir citer cette tradition vul-gaire, digne de figurer dans le poëme épique du jésuite Landivar, parce qu’elle ajoute un trait assez piquant au ta-bleau des mœurs et des préjugés de ces pays éloignés. Elleprouve l’industrie active d’une classe d’hommes, qui, abu- |154| sant trop souvent de la crédulité du peuple, et feignantde suspendre, par leur influence, les lois immuables de lanature, savent profiter de tout pour fonder leur empire parla crainte des maux physiques. La position du nouveau volcan de Jorullo donne lieu àune observation géologique très-curieuse. Nous avons déjàremarqué plus haut dans le troisième chapitre, qu’il existeà la Nouvelle-Espagne un parallèle des grandes élévations,ou une zône étroite contenue entre les 18° 59′ et les 19° 12′de latitude, dans laquelle sont situées toutes les cimes d’A-nahuac qui s’élèvent au-dessus de la région des neiges per-pétuelles. Ces cimes sont, ou des volcans encore actuellementenflammés, ou des montagnes dont la forme, ainsi que lanature de leurs roches, rendent infiniment probable qu’ellesont recelé jadis un feu souterrain. En partant des côtes de la mer des Antilles, nous trouvons, de l’est à l’ouest, le picd’Oribaza, les deux volcans de la Puebla, le Nevado deToluca, le pic de Tancitaro et le volcan de Colima. Cesgrandes hauteurs, au lieu de former la crête de la Cordi-lière d’Anahuac, et de suivre sa direction, qui est du sud-est au nord-ouest, sont au contraire placées sur une lignequi est perpendiculaire à l’axe de la grande chaîne de mon-tagnes. Il est sans doute très-digne d’être observé, que l’année1759, le nouveau volcan de Jorullo se soit formé dans leprolongement de cette ligne sur ce même parallèle des an-ciens volcans mexicains. Un coup-d’œil jeté sur mon plan des environs de Jorullo,prouve que les six grandes buttes sont sorties de terre surun filon qui traverse la plaine depuis le Cerro de las Cuevasau Pichaco del Montero. Les boche nove du Vésuve se trou-vent aussi rangées sur le prolongement d’une crevasse. Cesanalogies ne nous donnent-elles pas le droit de supposerqu’il existe dans cette partie du Mexique, à une grandeprofondeur dans l’intérieur de la terre, une crevasse dirigéede l’est à l’ouest sur une longueur de 137 lieues, et à tra-vers laquelle, en rompant la croûte extérieure des rochesporphyriques, le feu volcanique s’est fait jour, à différentesépoques, depuis les côtes du golfe du Mexique jusqu’à lamer du Sud? Cette crevasse se prolongeroit-elle jusqu’aupetit groupe d’îles appelées par Collnet , l’ Archipel de Re- gigedo, et autour desquelles, sur le même parallèle des |155| volcans mexicains, on a vu nager de la pierre-ponce? Desnaturalistes qui distinguent les faits qu’offre la Minéralogiedescriptive, des rêveries théoriques sur l’état primitif denotre planète, nous pardonneront d’avoir consigné ces ob-servations sur la Carte générale de la Nouvelle-Espagne, con-tenue dans l’Atlas mexicain.