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Alexander von Humboldt: „Essai Sur les Réfractions astronomiques dans la zone torride, correspondantes à des angles de hauteurs plus petits que dix degrés, et considérées comme effet du décroissement du calorique“, in: ders., Sämtliche Schriften digital, herausgegeben von Oliver Lubrich und Thomas Nehrlich, Universität Bern 2021. URL: <https://humboldt.unibe.ch/text/1808-Essai_sur_les-2-neu> [abgerufen am 20.04.2024].

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Titel Essai Sur les Réfractions astronomiques dans la zone torride, correspondantes à des angles de hauteurs plus petits que dix degrés, et considérées comme effet du décroissement du calorique
Jahr 1808
Ort Paris
Nachweis
in: Journal des mines 24:141 (September 1808), S. 169–218.
Sprache Französisch
Typografischer Befund Antiqua; Auszeichnung: Kursivierung; Fußnoten mit Ziffern; Schmuck: Initialen; Tabellensatz; Formelsatz; Besonderes: mathematische Sonderzeichen.
Identifikation
Textnummer Druckausgabe: II.67
Dateiname: 1808-Essai_sur_les-2-neu
Statistiken
Seitenanzahl: 50
Zeichenanzahl: 73291

Weitere Fassungen
Essai sur les réfractions astronomiques dans la zone torride, correspondantes à des angles de hauteurs plus petits que dix degrés, et considérées comme effet du décroissement du calorique. Extrait (Paris, 1808, Französisch)
Essai Sur les Réfractions astronomiques dans la zone torride, correspondantes à des angles de hauteurs plus petits que dix degrés, et considérées comme effet du décroissement du calorique (Paris, 1808, Französisch)
Mémoire Sur les Réfractions astronomiques dans la zone torride, correspondantes à des angles de hauteur plus petite que 10° (Paris, 1808, Französisch)
Mémoire sur les réfractions astronomiques dans la zône torride, correspondantes à des angles de hauteur plus petite que 10° (Paris, 1808, Französisch)
Versuch über die astronomische Strahlenbrechung in der heißen Zone für Höhenwinkel unter 10°, insofern sie von der Wärmeabnahme abhängt. (Vorgelesen in der ersten Klasse des Instituts am 29sten Februar 1808.) Frei übersetzt von Gilbert (Leipzig, 1809, Deutsch)
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ESSAI Sur les Réfractions astronomiques dans lazone torride, correspondantes à des anglesde hauteurs plus petits que dix degrés, etconsidérées comme effet du décroissementdu calorique. Par M. de Humboldt. Lu à la première Chambre de l’Institut le 29 février 1808.

Nous avons déjà parlé, dans le n°. 137 dece Journal, des recherches que M. de Humboldt a communiquées à la première Classe de l’Ins-titut. Ces recherches tendent, comme on l’a vu,à résoudre ce problème, si les réfractions astro-nomiques sont les mêmes sous l’équateur quecelles qu’on observe dans la zone tempérée? «Larésolution de ce problème pouvait, dit l’au-teur, paraître moins importante à une époqueoù de bons observateurs, munis d’instrumensimparfaits, quoique d’un rayon très considé-rable, se trouvaient exposés à commettre deserreurs de douze ou quinze secondes sexagési-males. Il importait peu alors qu’un voyageurréduisît ses observations d’après la table deréfraction de La Caille, ou d’après celle que Bouguer a dressée pendant son séjour à Quito.Il paraît même (j’en ai trouvé plusieurs exem-ples dans mes recherches géographiques) quela grande harmonie que l’on observe quelque-fois entre les latitudes déterminées de nos jours, |170| et celles qui sont indiquées dans des relationsde voyages anciens, se fonde sur une compen-sation accidentelle de l’erreur de l’instrument,et de la déviation trop grande ou trop petiteque l’observateur avait attribuée au rayon delumière pendant son passage dans l’atmosphère.Mais on ne doit plus compter sur des compen-sations accidentelles dans un tems où presquetous les élémens peuvent être soumis au calculle plus rigoureux. La grande perfection des ins-trumens, la méthode ingénieuse de diminuerà l’infini ou de faire disparaître les erreursd’observations en prenant des multiples del’angle à mesurer, la réunion de ces avantagesfait parvenir les astronomes à l’exactitude d’uneseconde centésimale. Plus ces progrès de l’as-tronomie pratique sont admirables, plus il im-porte que dans la réduction de la hauteur ap-parente de l’astre à la hauteur vraie, le calcula-teur ne soit pas exposé à commettre des erreursquadruples de celles que l’on peut supposer aurésultat de l’observation. Ces mêmes considé-rations, depuis l’usage plus fréquent des cer-cles répétiteurs, ont engagé les astronomes etles géomètres à soumettre à de nouveaux exa-mens, ce que Simpson, Mayer et Bradley nousont transmis sur la théorie des réfractions. Ilsuffit de citer les observations nombreuses faitespar M. Delambre pour déterminer la réfractioncorrespondante à 49° de hauteur, et l’analysecomplète des phénomènes de réfraction de lalumière contenue dans le quatrième volumede la Mécanique céleste. C’est en suivant lesidées énoncées dans ce dernier ouvrage, queje développerai mes recherches sur la consti- |171| tution de l’atmosphère dans la zone torride,et sur l’influence que cette constitution exercesur l’inflexion des rayons dans les couches d’airatmosphérique». Au moment de la publication de notre n°. 137,le travail de M. de Humboldt ne nous était pasencore parvenu; nous avons alors été forcés,pour ne pas différer de faire connaître le ré-sultat de ce beau travail, de nous borner à in-sérer dans ce recueil une courte Notice quivenait de paraître dans le Nouveau Bulletindes Sciences. Mais actuellement nous noustrouvons à portée de fixer, d’une manière plusparticulière, l’attention de nos lecteurs sur lesdifférentes recherches auxquelles M. de Hum-boldt s’est livré, ce savant ayant eu la com-plaisance de faire remettre un exemplaire deson ouvrage à M. Gillet-Laumont, Membre duConseil des Mines. L’ouvrage de M. de Humboldt est divisé entrois parties. L’auteur, dans la première (la partie histo-rique), développe les opinions diverses qu’onteues les astronomes sur les réfractions de lazone torride. Dans la seconde partie (la partie physique),il examine la constitution physique de l’atmos-phère équinoxiale, et les causes qui, d’aprèsl’état actuel de nos connaissances, peuventmodifier la déviation des rayons lumineux. Enfin la troisième partie (la partie astrono-mique) présente les observations astronomi-ques que M. de Humboldt a faites à des hau-teurs auxquelles la loi du décroissement de latempérature détermine le pouvoir réfringent |172| des couches, ou, ce qui est identique, la vi-tesse de la lumière. La Notice qui a déjà été publiée dans ceJournal, peut suffire pour donner une idéegénérale de la première et de la troisièmepartie de l’ouvrage de M. de Humboldt: quantà la seconde partie, nous avons pensé qu’onnous saurait gré de l’avoir fait ici imprimeren entier, attendu que cette partie est consa-crée à des objets qui sont étroitement liés àceux auxquels ce recueil est destiné.

partie physique.

La réfraction est l’effet de l’action qu’exer-cent les couches d’air atmosphérique sur laroute du rayon de lumière. Cette action dé-pend des propriétés chimiques et physiques dumélange gazeux, propriétés que l’on pourraitréunir dans une équation de condition, et quiprésentent autant de quantités variables dontil importe d’examiner l’influence sur la dévia-tion de la lumière.

Oxygène et Azote.

L’oxygène, d’après les expériences deMM. Biot et Arrago, étant de tous les flui-des, et même de tous les corps de la nature,celui qui réfracte le moins, et le pouvoir ré-fringent de l’oxygène à l’azote étant dans lerapport de 86 à 103, les réfractions devraientvarier à la même température et à la mêmepression barométrique d’une époque et d’une |173| zone à l’autre, si, comme on le supposait au-trefois, la constitution chimique de l’atmos-phère était variable selon la différence des sai-sons et des lieux. D’après les hypothèses reçuesalors, l’air de mer et celui de la zone torride,plus riches en oxygène, l’air des hautes mon-tagnes plus abondant en azote et en hydrogène,devraient altérer le jeu des réfractions atmos-phériques. Mais des observations exactes ontconstaté que le rapport des parties constituantesde l’atmosphère n’est pas variable; que, favo-risé par les vents et par l’effet du courant as-cendant, le mélange gazeux est uniforme de-puis le niveau de l’Océan jusqu’au-delà de 6000mètres de hauteur; que si toutefois il existeune légère variation, elle ne peut pas aller au-delà d’un ou de deux millièmes d’oxygène. Ces résultats importans sont conformes auxexpériences et aux calculs faits par MM. Biot et Arrago. Le prisme et le cercle répétiteur ontconduit ces astronomes à une analyse de l’airpresqu’aussi exacte que celle que l’on obtientpar le moyen de l’eudiomètre à gaz hydrogène.En effet, tel est l’admirable enchaînement desphénomènes de la nature, que depuis long-tems, par la mesure seule d’un angle de ré-fraction, le géomètre aurait pu prouver au chi-miste que l’air atmosphérique ne contient pasvingt-sept ou vingt-huit centièmes d’oxygène. Mais cette identité constante de compositionchimique, cette quantité absolue de gaz vitalreconnue dans l’air atmosphérique, ont-ellestoujours été les mêmes, ou seraient-elles, dansla suite des siècles, variables avec l’intensité desforces magnétiques, avec la hauteur moyenne |174| du baromètre qui indique la hauteur de l’at-mosphère, et avec la température moyennedes lieux? Les sciences naturelles et l’art debien observer sont trop neufs encore pour quel’histoire physique du globe puisse se prononcersur des problèmes aussi délicats. La mer, quioccupe trois cinquièmes de la surface de notreplanète, et qui est remplie de débris de mollus-ques et d’autres matières animales propres à sedécomposer; le terreau humecté, les argilesmêlés d’oxyde de fer et d’hydrures de carbone,peut-être même le roc schisteux ou amphibo-lique, ces cimes pierreuses qui s’élancent au-dessus de la région des nuages, agissent surl’atmosphère qui les entoure. Ils paraissent fixerplus d’oxygène qu’ils ne dégagent d’acide car-bonique. La décomposition de ce dernier acideest le travail diurne et bienfaisant des végé-taux; mais la culture de l’homme, en substi-tuant aux forêts des plantes herbacées et descéréales, parvient à altérer peu à peu l’équilibreprimitif de l’océan aérien. Il se pourrait que,par des procédés lents et presqu’impercepti-bles, la croûte de notre planète enlevât, envieillissant, plus d’oxygène à l’atmosphèrequ’elle ne lui en rend annuellement. Par con-séquent, il serait possible encore que du temsd’Hipparque, la lumière des astres eût éprouvédans sa route une déviation différente de celleque l’on observera quelques milliers d’annéesaprès nous. On reconnaîtrait dès-lors que laréfraction n’est pas toujours fonction de la den-sité seule des couches d’air atmosphérique.Mais ne nous perdons pas dans des idées pu-rement hypothétiques, lorsqu’il ne s’agit que |175| de l’ordre actuel des choses et des faits capa-bles d’être exactement observés!

Hydrogène et Acide carbonique.

De toutes les substances gazeuses, l’hydro-gène est celle dont le pouvoir réfringent est leplus fort. Il est frappant que ce même gaz,comme l’a découvert M. Gay-Lussac, est aussicelui dont la capacité pour le calorique est laplus grande. Son pouvoir réfringent surpassehuit fois celui de l’oxygène; il est à celui del’air atmosphérique comme 661 : 100. Maisl’hydrogène mêlé à l’air atmosphérique en di-minue le pouvoir réfringent; car il s’en fautde beaucoup que la légèreté spécifique de l’hy-drogène soit compensée par l’excès de sa forceréfractive. Dans un Mémoire lu à l’Institut enventôse an XIII, nous avons déterminé, M. Gay-Lussac et moi, le minimum de gaz hydrogèneque l’on peut découvrir avec certitude dans unmélange d’azote et d’oxygène. Nous avons in-diqué un moyen précis par lequel on peut éva-luer jusqu’à \( \frac{2}{1000} \) d’hydrogène. Ce moyen, in-connu lors de mon expédition à l’équateur, n’apoint encore été employé sur l’air des tropiques;mais ayant constaté qu’en Europe, quelle quesoit la région d’où souffle le vent le plus impé-tueux, l’atmosphère ne contient pas d’hydro-gène, et que l’air recueilli, soit à 6000 mètresde hauteur, soit au milieu d’un nuage, commeau Mont-Cenis, ne diffère pas sensiblement del’air des plaines, on peut supposer que ce man-que d’hydrogène est général dans toutes leszones et à toutes les hauteurs. Je n’ignore pas |176| que la considération de la grande légèreté spé-cifique de l’air inflammable, jointe à des hy-pothèses météorologiques, a fait supposer àquelques physiciens que la dernière couche del’océan aérien est une couche d’hydrogène,site inabordable des phénomènes lumineux,de l’aurore boréale, des étoiles filantes, etpeut-être des bolides mêmes. Cette couche s’é-tendrait jusqu’aux dernières limites de l’atmos-phère, jusqu’au point où la force centrifugeest balancée par la pesanteur. Mais pourquoi,en s’éloignant perpendiculairement de la sur-face de la terre de plus d’un demi-myriamètre,ne voit-on pas augmenter la quantité d’hydro-gène atmosphérique? Comment cet hydrogèneserait-il parvenu à se réunir dans une coucheséparée? et une fois réuni, comment se serait-ilconservé dans cet état d’isolement? Les con-naissances que nous avons acquises, depuisquelques années, sur la manière suivant laquellese comportent au contact deux gaz d’une gra-vité spécifique différente, rendent peu proba-ble que l’hydrogène qui s’élève de la surfacede la terre puisse se réunir dans une coucheparticulière placée à la limite supérieure del’atmosphère. L’expérience nous prouve qu’aumoindre mouvement les fluides aériformes sepénètrent, et que les molécules du gaz pluspesant s’insinuent entre les molécules du gazplus léger, sans se placer d’après la loi de leurpesanteur spécifique. Lorsqu’on mêle 21 d’oxy-gène à 79 d’hydrogène, cet air atmosphériqueà base d’hydrogène reste uniforme dans sacomposition, quelle que soit la durée du reposauquel on abandonne le mélange. L’analyse |177| chimique m’a offert les mêmes résultats, quej’aie éprouvé l’air contenu dans la partie su-périeure ou celui de la partie inférieure duvase. L’analogie nous conduit à croire que l’hy-drogène, dégagé par les marais, par plusieurssources, par les mines et par les volcans, semêle uniformément à l’air atmosphérique. Ils’y mêle d’autant plus facilement, que l’atmos-phère est perpétuellement agitée par de petitesvariations de température et de pression baro-métrique. L’effet de cette agitation est si frap-pant, que malgré l’abondance des sources d’hy-drogène sulfuré que l’on trouve, par exemple,dans la Campagne de Rome, le chimiste nedécouvre dans l’atmosphère ambiante pas plusde cet hydrogène que dans l’air de mer ou dansles vents qui soufflent du large. L’idée de cetteuniformité dans la composition chimique del’atmosphère rassure l’astronome, lorsqu’il sedéfie du fluide aériforme à travers lequel luiparvient la lumière des astres. Mais cette mêmeuniformité fait aussi le désespoir du physiologis-te. Réfléchissant sur la salubrité des climats, ilcroit en appeler en vain au tribunal de l’eudiomé-trie moderne. Le chimiste lui répond que, d’aprèsles expériences intéressantes de MM. Thénard et Dupuytren, des quantités d’hydrogène sul-furé, beaucoup trop petites pour être appré-ciées dans nos instrumens, trop petites pourproduire des changemens dans les réfractions,exercent encore une influence destructive surla vie animale. L’ensemble de ces considérations physiquesnous prouve qu’il n’y a aucune raison d’ad- |178| mettre une couche de gaz hydrogène aux limitesde notre atmosphère. Il est même difficile deconcevoir l’existence de cette couche à l’épo-que reculée où se formait le noyau de notreplanète. Dès-lors l’hydrogène se serait mêlé aureste de l’atmosphère qui était agitée par lescourans. La quantité moyenne d’hydrogènerépandue dans l’air ne peut être qu’infinimentpetite. Ce résultat d’expériences directes a étéconfirmé par l’harmonie frappante que trou-vent MM. Biot et Arrago, entre le pouvoirréfringent de l’air atmosphérique observé, etentre le pouvoir réfringent calculé dans l’hypo-thèse, que l’atmosphère est un simple mélanged’azote et d’oxygène. De plus, en considérantles produits de la putréfaction des matières or-ganiques, en réfléchissant sur la réunion peucommune des circonstances sous lesquelles, parune simple décomposition de l’eau, il s’élèvede la surface du globe du gaz inflammable pur,nous trouvons que le minimum d’hydrogèneatmosphérique dont nous admettons l’exis-tence, devient par là même moins redoutablepour les astronomes; que cet hydrogène, pourla plus grande partie, est un mélange d’hy-drogène carburé, oxy-carburé, phosphuré etsulfuré. Le phosphore se combinant avec lesoufre et avec le carbone, comme l’ont fait voir Pelletier et M. Proust; le soufre hydrogénédissolvant aisément le phosphore, comme l’ontprouvé MM. Clément et Desormes, il est plusque probable que les miasmes mêlés à l’atmos-phère, contiennent des variétés particulièresde gaz hydrogène dans lesquelles deux ou trois |179| substances oxygénables sont dissoutes à la fois.Il est probable aussi que sous les tropiques, oùune chaleur constante et une grande humiditéfavorisent le développement des êtres orga-nisés, ces émanations gazeuses sont plus com-munes que dans les climats tempérés; elles ycauseraient un jeu de réfractions extraordinai-res, si elles parvenaient à s’accumuler momenta-nément. Mais cette crainte s’évanouit, lors-qu’on considère, 1°. les circonstances qui s’op-posent à cette accumulation dans une régionoù le mouvement perpétuel de l’air, depuisl’équateur aux pôles, cause l’apparence desvents alisés; 2°. les quantités extrêmement pe-tites de ces émanations, que des expérienceseudiométriques les plus exactes nous permettentde supposer dans l’air; 3°. le fait remarquableet rassurant que l’hydrogène, qui contient d’au-tres substances oxygénales en dissolution, a unpouvoir réfringent qui n’est pas le tiers du pou-voir réfringent de l’hydrogène pur, et qui n’estque le double de celui de l’air atmosphérique.Il résulte aussi de ces mêmes considérations,que les phénomènes singuliers de réfraction, etsur-tout ceux de réflexion aérienne que l’onn’observe que dans certaines régions de la terre,par exemple, à Reggio et dans la partie méri-dionale de la Calabre, ne peuvent guère s’ex-pliquer par l’hypothèse d’une constitution par-ticulière et locale de l’atmosphère. Ces phéno-mènes n’ont été qu’imparfaitement observésjusqu’ici; ils se présentent à des hauteursconsidérables au-dessus de l’horizon. Il ne fautpas les confondre avec les effets du mirage |180| commun. La Fata Morgana paraît être l’effetcatoptrique d’une aggregation de vapeurs vési-culaires. Il n’est plus permis d’en chercher lacause dans l’abondance du gaz hydrogènequ’autrefois des physiciens voyageurs suppo-saient exister dans les pays agités par des vol-cans et par des tremblemens de terre. Ce que nous venons d’exposer sur le mini-mum d’hydrogène contenu dans l’atmosphère,s’applique aussi à l’acide carbonique, dont laquantité, d’après mes expériences, peut êtreévaluée sous l’équateur de trois à huit millièmes.D’ailleurs ce fluide, quoique plus dense, estmoins propre à modifier les réfractions atmos-phériques. D’après MM. Biot et Arrago, sonpouvoir réfringent est à peu près le même quecelui de l’air atmosphérique; il ne le surpasseque de \( \frac{4}{1000} \). Les belles expériences faites parM. Malus, sur le charbon, n’altèrent pas cerésultat; elles indiquent seulement un pouvoirréfringent du carbone plus grand que celuiqu’admet M. Biot, observation qui diminuela quantité d’hydrogène que l’on se croyaitforcé d’admettre dans le diamant. C’est à tortqu’un célèbre astronome italien a récemmentattribué à une accumulation momentanée d’a-cide carbonique, les petites variations de ré-fractions observées à Malte et en Sicile aussilong-tems que souffle le sirocco. Cette abon-dance d’acide carbonique sur les bords de laMéditerranée n’a été constatée par aucune ex-périence directe. D’après le rapport trouvéentre le pouvoir réfringent de l’acide carbo-nique et celui de l’air commun, il faudrait que |181| l’atmosphère devînt énormément méphitiséeavant que l’effet des réfractions fût d’une oude deux secondes sexagésimales.

Condensation.

Mais la déviation de la lumière ne dépendpas uniquement de la quantité d’oxygène,d’azote, d’hydrogène ou d’acide carbonique;elle ne dépend pas uniquement du rapport danslequel se trouvent les parties constituantes del’atmosphère. Le pouvoir réfringent des fluidesest modifié par l’état de condensation plus oumoins grand que présentent les élémens aéri-formes. L’inflexion du rayon lumineux n’estpas la même dans l’oxyde d’azote et dans unmélange physique d’oxygène et d’azote. Or,malgré le principe d’identité de compositionque nous venons d’établir, les réfractions dela zone torride pourraient être différentes decelles des zones tempérées, si, par l’effet d’unetempérature plus ou moins élevée, l’oxygèneexerçait une action chimique plus ou moinsgrande sur l’azote. D’après cette opinion ré-pandue dans plusieurs ouvrages de physiolo-gie, la respiration ou plutôt la décompositionde l’air dans les poumons dépendrait, outre laquantité d’oxygène inspiré, du degré d’affinitépar lequel cette base est liée à l’azote atmos-phérique. Quelques phénomènes chimiques quin’ont pas encore été rigoureusement analysés,par exemple, l’observation qu’un mélange de0,25 d’oxygène et 0,75 d’acide carbonique n’est |182| pas propre à entretenir la flamme, ont paru fa-voriser cette idée. Mais nous pourrions citerun grand nombre d’expériences précises quirendent probable que, dans l’état aériforme,ces bases n’exercent aucune ou du moins unetrès-faible action chimique les unes sur les au-tres. La condensation ne commence à influerd’une manière sensible sur le pouvoir réfrin-gent, que lorsque les élémens gazeux entrentdans une union très-intime. Le gaz ammoniacalnous en offre un exemple frappant. MM. Biot et Arrago ont trouvé que ce gaz agit sur la lu-mière comme un simple mélange physique de0,80 d’azote et de 0,20 d’hydrogène, en éva-luant les élémens d’après le poids. C’étaient,en effet, les nombres qui résultaient de l’a-nalyse de M. Davy. Le même chimiste ayantannoncé depuis, à l’occasion de ses décou-vertes sur les substances alcalines, que l’am-moniaque contenait 0,20 d’oxygène, M. Ber-thollet fils reprit le beau travail de son père,publié dans les Mémoires de l’Académie del’année 1785. Des expériences très-exactes,qui ne diffèrent pas entre elles d’un centième,lui ont appris qu’un volume de 100 partiesd’ammoniaque est composé de 75,5 d’hydro-gène et de 24,5 d’azote, ce qui donne en poids,d’après les densités de la Table de Biot, 18,83d’hydrogène et 81,17 d’azote. En calculant,d’après ces données de M. Berthollet fils, lepouvoir réfringent pour le gaz ammoniacal,on trouve 2,08471, tandis que par observationon trouve 2,168. Le gaz ammoniacal contenantun peu plus d’hydrogène que n’en admettait |183| autrefois M. Berthollet le père (1), et 0,02 demoins qu’en supposait M. Biot, d’après Davy,l’effet de la condensation devient sensible; carle pouvoir réfringent du composé est de 2,168,au lieu de 2,08471. Nous avons vu jusqu’ici que la constitutionchimique de l’atmosphère, sous l’équateur, neprésente aucune modification particulière pro-pre à favoriser l’opinion de l’influence des cli-mats sur les réfractions moyennes, influencequi fut indépendante de la température et dela pression barométrique de l’air. En supposantsous les tropiques, comme quelques physiciensl’ont fait arbitrairement, plus d’acide carboni-que ou (à composition égale) plus de conden-sation de bases, ces différences, bien loin d’ex-pliquer, comme le feraient des accumulationsd’hydrogène et d’oxygène, une diminutiondans le pouvoir réfringent du mélange, ten-draient plutôt à en augmenter les effets.

Humidité. Brume. Nuages.

Il en est de même d’une quatrième et der-nière cause qu’il nous reste à examiner, de
(1) M. Berthollet le père (Mém. de l’Acad., 1785,p. 324), trouva en volume 72,50 d’hydrogène, 27,50 d’a-zote, ce qui lui donna, en supposant la pesanteur spéci-fique de l’hydrogène à celle de l’azote, = 1 : 11 en poids,19,33 d’hydrogène et 80,67 d’azote. Mais, d’après la tabledes densités de MM. Biot et Arrago, il résulte de l’expé-rience de M. Berthollet 16,6 d’hydrogène et 83,4 d’azote.
|184| l’humidité. Si l’influence de cette cause estsensible, elle doit augmenter l’inflexion desrayons lumineux sous l’équateur, quelle quesoit la grandeur de l’angle apparent que l’onobserve. En effet, dans ces climats brûlans,le sol couvert d’épaisses forêts, et humectépar des pluies presque continuelles, répanddes masses d’eau énormes dans un air dont latempérature varie de 22 à 36°. L’humiditéextrême de ces régions équinoxiales contrasteavec la sécheresse à laquelle l’atmosphère po-laire se trouve réduite par le froid.
La gravité spécifique de la vapeur d’eauétant, à forces élastiques égales, à la gravitéspécifique de l’air comme 10 : 14, celui-cipèse d’autant moins, qu’il est plus près dudegré extrême de sa saturation. Or, l’air hu-mide n’est qu’un mélange d’eau et de vapeurs;par conséquent, sa densité est aussi moinsgrande que celle d’un air plus sec. On peutconcevoir par là comment, sous l’équateur,une source constante de chaleur et d’humiditéproduit une diminution dans les hauteursmoyennes du baromètre, l’air dilaté dans descolonnes plus élevées refluant sans cesse surles colonnes voisines, et pesant moins à causede son mouvement ascensionnel. On peut enconclure de même que, si la vapeur d’eauavait exactement le même pouvoir réfringentque l’air, les réfractions devraient être moin-dres dans l’air humide que dans l’air sec. Maisdes expériences précises, faites par les deuxsavans distingués que l’Institut en avait char-gés, ont confirmé ce que le génie du géo- |185| mètre avait prédit depuis long-tems. M. La-place avait prouvé que l’état hygroscopique del’air ne pouvait avoir qu’un effet presqu’im-perceptible sur les réfractions, l’excès de laforce réfringente de la vapeur aqueuse surcelle de l’air étant compensé, en grande partie,par sa densité plus petite. Les formules déve-loppées dans le dixième livre du quatrièmevolume de la Mécanique céleste, annoncentmême que, si la compensation n’est pas tout-à-fait complète, ce manque d’équilibre entrela dilatabilité et le pouvoir réfringent doit plu-tôt renforcer que diminuer l’effet des réfrac-tions équatoriales. Aussi MM. Delambre et Biot, dans une suite d’observations très-exac-tes faites au cercle répétiteur, n’ont pas vuvarier sensiblement les réfractions pendant quel’hygromètre indiquait de fortes variations d’hu-midité. Tels sont les effets de l’eau dissoute dans l’at-mosphère d’une manière à ne pas en altérer latransparence. Mais la vapeur qu’on appelle vési-culaire ne paraît pas toujours suivre les mêmeslois. Il ne s’agit point ici de déterminer si le brouil-lard et les nuages sont des amas de globules so-lides, comme M. Monge a tâché de le prouverdans son Mémoire sur la Météorologie, ou si,comme j’incline à croire avec beaucoup d’au-tres physiciens, les nuages sont composés desphères creuses dans lesquelles, probablement,un air extrêmement humide est enveloppé d’unepellicule plus ou moins mince d’eau. Il suffitici d’examiner les circonstances qui peuventinfluer sur la différence de réfractions qu’of- |186| frent les nuages et le brouillard. Les brouil-lards sont des couches de vapeurs qui, repo-sant sur le sol, environnent l’observateur. Lesnuages, au contraire, sont des couches pluslégères suspendues dans un air parfaitementtransparent. Cet état de choses doit contribuerà modifier les réfractions dans ces amas devapeurs vésiculaires. L’expérience nous offredes exemples de ces contradictions apparentes.M. Arrago, à l’invitation de M. Laplace, a prisquelques hauteurs méridiennes du soleil vu àtravers des nuages qui en laissaient apercevoirdistinctement les bords. Cet astronome n’a pasobservé que les réfractions fussent changéespar le passage du rayon à travers un groupede vapeurs vésiculaires. Pendant mon séjourdans le royaume de Quito, j’ai pris des anglesd’élévation de la cime de plusieurs volcans,nommément de ceux d’Ilinissa et de Cotopaxi,au moment que des flocons de nuages blancs ettransparens couvraient la crête de la Cordil-lère. J’étais sûr d’évaluer, je ne dis pas unequantité absolue, mais bien une différence decinq ou six secondes sexagésimales. Cependant,je ne trouvai pas que l’angle apparent fût sen-siblement variable avant et au moment de laformation du nuage. Le brouillard ne produit pas constammentle même effet. Dans une matière aussi déli-cate, il importe de réunir tous les faits quiont été bien constatés. En parcourant le grandtravail de M. Delambre, sur les réfractions at-mosphériques, contenu dans le second volumede la Base du système métrique, on y trouve |187| des observations très-curieuses faites à Bois-commun pendant un tems de brouillard épais.La vapeur vésiculaire augmenta tellement lejeu des réfractions terrestres, que neuf résul-tats donnèrent à M. Delambre le facteur n entre 0,146 et 0,175, tandis que des mesuresprises par un air transparent présentent ce fac-teur de la moitié plus petit, égal à 0,078.Mais cette contradiction apparente entre l’ac-tion qu’exerce le nuage sur le rayon lumineuxet l’action qu’on attribue au brouillard, n’apas de quoi nous étonner. Les nuages, selondes observations directes que j’ai eu occasionde faire sur la pente de la Cordillère des Andes,ont souvent 12 à 1600 mètres d’épaisseur per-pendiculaire. On conçoit comment, malgré cevolume, malgré cet agroupement énorme devapeurs vésiculaires, le rayon lumineux peutpasser à travers le nuage, comme s’il passaità travers un verre parfaitement plan. Si lesglobules de vapeurs sont solides, l’observateurvoit le disque solaire par des rayons qui passentpar le centre, ou par des rayons qui traversentl’air humide dans lequel nagent les globules:si, au contraire, les petites sphères sont creu-ses, la lumière, en pénétrant dans l’intérieurà travers une pellicule d’eau très-mince,éprouve, en entrant, la même inflexion qu’ellesubit en sortant. L’extinction de la lumièredoit être presque nulle, si (comme le rendprobable M. Laplace, dans son Supplément àla Théorie de l’action capillaire) l’enveloppeest une lame d’eau dont l’épaisseur est pluspetite que le rayon d’activité sensible de ses |188| molécules. L’air dans lequel se trouvent les va-peurs vésiculaires est saturé d’eau, et, commenous venons de le voir tantôt par les expérien-ces du prisme de M. Biot, l’eau dissoute n’al-tère aucunement le jeu des réfractions. Il paraît donc que les expériences de M. Ar-rago et les miennes, sur le pouvoir réfringentdes nuages, sont conformes à la théorie. Lesphénomènes extraordinaires observés par M. De-lambre pendant un mois entier à Boiscommun,peuvent avoir été causés, non par l’état hygro-métrique de l’atmosphère, mais par les ano-malies dans la loi du décroissement du calori-que dans les couches d’air superposées. C’étaientdes observations de réfractions terrestres, mêmedes angles de dépression; par conséquent, lesréfractions atmosphériques observées à Bois-commun, étaient modifiées par la différencede densité entre la couche d’air qui forme lebrouillard, et entre les couches qui agissentsur ce dernier. L’observateur, enveloppé dansle brouillard, se trouve dans l’air humide quiremplit les interstices de la vapeur vésiculaire;il est environné d’un air condensé par un re-froidissement subit et local. En effet, d’autresobservations prouvent qu’à des angles de hau-teur auxquels l’influence du décroissement ducalorique est imperceptible, le brouillardn’exerce pas d’influence sur les réfractions.Dans le grand nombre d’observations d’An-tarès, faites avec le plus grand soin à l’Obser-vatoire Impérial, on n’a pas remarqué qu’aprèsavoir employé les corrections nécessaires pourle baromètre et le thermomètre, les passages |189| d’Antarès, par le méridien, aient donné desangles sensiblement différens, selon qu’on lesa pris par un tems sec et dans une brume assezépaisse. Il serait important d’examiner si lesmêmes brouillards, qui altèrent la réfractionterrestre, affectent aussi la déviation des rayonsqui nous arrivent sous des angles au-dessus de12 ou 14°. Ces observations décideraient si lesbrouillards agissent par une autre voie qu’endiminuant le jeu du calorique rayonnant à lasurface du globe, et en ralentissant le décrois-sement du calorique. Il résulte de ces considérations développéesdans la seconde partie de mon Mémoire, quela constitution chimique de l’atmosphère, nonplus que son état hygrométrique, ne présententaucune cause qui puisse expliquer une dimi-nution dans les réfractions sous l’équateur. L’in-flexion du rayon lumineux, supposé qu’il nousparvienne sous un angle plus grand que 10°,est simplement fonction de la pression et de latempérature de la couche inférieure de l’airqui entoure l’observateur. Quelques astronomesont jeté des doutes sur la correction thermo-métrique appliquée à des extrêmes de chaleuret de froid; mais en se rappelant que, d’aprèsles expériences de M. Gay-Lussac, les dilata-tions des gaz sont proportionnelles à leur tem-pérature, et que depuis le point de la glacefondante jusqu’à 100°, la marche du thermo-mètre à air est la même que celle du thermo-mètre à mercure, on se voit forcé d’admettreque la correction thermométrique est croissanteuniformément avec les degrés du thermomètre |190| à mercure observé à l’air libre au moment quel’angle est pris à l’instrument. Cette uniformitése manifeste d’une manière frappante dansdeux observations de M. Swanberg, que nousallons développer plus bas, et qui présententla plus grande harmonie, quoique l’une eûtété faite à 29° et l’autre à 13° au-dessous dezéro, le baromètre n’ayant varié que de douzemillimètres.

Décroissement du Calorique.

Il nous reste à examiner la constitution del’atmosphère des tropiques, sous le rapport quiinflue le plus sur les réfractions horizontaleset presque horizontales: je parle de la loi dudécroissement du calorique dans les couchesd’air superposées les unes aux autres. Si cetteloi fut trouvée différente dans les zones di-verses, les réfractions au-dessous de 10° de-vraient l’être aussi, malgré l’identité dans lacomposition chimique de l’atmosphère, et mal-gré l’influence nulle de la sécheresse et del’humidité. En effet, un astronome distingué,séduit par la comparaison des réfractions ob-servées par Piazzi et Masklyne, a tenté deprouver récemment, a priori, que le dé-croissement du calorique doit être plus rapidedans les climats chauds, et que par consé-quent la réfraction horizontale doit augmenteren raison inverse de la température moyennedes lieux. Cette assertion, si elle embrasse lesobservations faites pendant l’été, est démentiepar un grand nombre d’expériences que j’ai |191| eu occasion de faire pendant le cours de monexpédition à l’équateur. Aucun autre voyageurne s’étant occupé de ces recherches sur le dé-croissement du calorique dans l’atmosphère dela zone torride, je réunirai dans une table lesrésultats de mes observations faites dans lesdeux hémisphères. Je m’arrêterai aux seulsnombres. Le détail des localités sur lesquellesse fonde le choix des observations, et la pro-babilité des résultats qu’elles présentent, setrouvent discuté dans un Mémoire qui va pa-raître dans ceux de l’Académie de Berlin pourl’année 1807. Si, au lieu d’un noyau solide enveloppéd’un fluide aériforme, nous nous figurons unsphéroïde gazeux transparent, et tournant surlui-même autour du soleil, nous concevons queles rayons solaires n’y produiraient de la cha-leur, qu’autant que la lumière serait affaiblie enpassant par des couches d’air plus ou moinsdenses. L’extinction de la lumière y serait laseule cause de la chaleur. Par conséquent, latempérature serait moindre vers la surface quedans les couches intérieures. La températureaugmenterait d’abord avec la densité croissantedes couches; mais, à cause de l’affaiblissementmême des rayons lumineux, cette températureparviendrait probablement à son maximum dansun point éloigné du centre et de la surface. Jus-qu’ici notre sphéroïde gazeux ressemblerait àces corps célestes que Herschel a nommés des Nébuleuses planétaires. Imaginons maintenant un noyau solide aumilieu de ce fluide aériforme: dès ce moment, |192| nous voyons naître deux autres causes de tem-pérature; le faible effet de l’extinction de lalumière se perd auprès de l’effet du caloriquerayonnant et du courant ascendant. Il est inu-tile de discuter ici la possibilité d’une qua-trième cause. Nous n’agiterons pas la question,si les fluides aériformes peuvent conduire lecalorique sans mouvement de translation dansles molécules. Un physicien célèbre, M. deRumford, s’est occupé de la résolution de ceproblème. Il ne nous intéresserait que dans lecas où des vents chauds souffleraient dans leshautes régions seules de l’atmosphère. Cepen-dant l’agitation de l’air mêlerait bientôt lesmolécules voisines; il serait même alors im-possible de faire abstraction du mouvement detranslation. L’effet du courant ascendant, comme celuidu calorique rayonnant, n’avait pas échappéà la sagacité d’Aristote et de ses disciples. J’aidéveloppé, dans un autre endroit, que dansle premier livre des Meteorologica, et dans lavingt-cinquième section des Problèmes attri-bués à Aristote, la hauteur des nuages et leurdensité sont considérées comme des phénomènesqui dépendent de l’ascension de la chaleur, etqui contribuent à en modifier l’action (1). Le décroissement du calorique étant l’effetsimultané de trois causes générales, de l’ex-
(1) Aristotelis opera omnia, t. II, ed. Casaub., p. 458.327.
|193| tinction de la lumière pendant son passage àtravers les couches d’air plus ou moins den-ses, de la chaleur rayonnante et du courantascendant, tout ce qui modifie ces causes doitaussi modifier la loi du décroissement. Ce der-nier doit être plus lent au-dessus de la sur-face de la mer ou au-dessus d’une campagnecouverte de neige, qu’au-dessus d’un désertdénué de végétaux ou au-dessus d’une couchehorizontale de schiste micacé. Il doit être plusrapide sur la pente d’une montagne conique,qu’au-dessus d’une cordillère qui présente degrands plateaux élevés par étages les uns au-dessus des autres. Mais en discutant la réfrac-tion moyenne correspondante à de petits an-gles de hauteurs entre 6 et 10°, il ne s’agitaussi que de la loi du décroissement moyen.Nous verrons tantôt que cette loi est plus cons-tante qu’on devrait le supposer, à cause desvariations de température produites par lescourans d’air horizontaux et verticaux; noustrouverons qu’elle est aisée à reconnaître àtravers un grand nombre de petites perturba-tions locales.
La progression selon laquelle les couchesd’air superposées sont plus froides selon qu’ons’éloigne de la surface du globe, peut être re-connue par cinq voies différentes, dont lesdeux premières seules paraissent mener à desrésultats certains. Ces moyens sont des ascen-sions aérostatiques, des voyages vers la cimede montagnes isolées et à pente rapide, la com-paraison des températures moyennes observéespendant plusieurs années dans deux endroitsqui auraient une élévation très-différente, et |194| qui seraient peu éloignés l’un de l’autre, latempérature des sources et celle des cavernes,que quelques physiciens osent nommer la tem-pérature de l’intérieur du globe. On pourraity ajouter la connaissance des réfractions hori-zontales, et un septième moyen, peu exact,celui de déduire le décroissement du caloriquede la hauteur à laquelle se maintiennent lesneiges éternelles dans les différentes zones duglobe.

Voyages dans les Andes.

Des excursions faites à la cime d’un pic élevéet très-escarpé, offrent presque les mêmesavantages que les ascensions aérostatiques,l’observateur au pied du pic se trouvant, pourainsi dire, dans la même verticale que l’ob-servateur placé au sommet. Dans le tableausuivant de mes expériences, on peut distinguer,sous ce rapport, comme plus exactes, les ex-cursions que nous avons faites, M. Bonpland et moi, au Mexique, à la cime du Naucampa-tepetel, appelé aujourd’hui le Cofre de Pe-rote, et au Nevado de Toluca; sur les bordsde la mer du Sud, à la cime de Rucu-Pichin-cha; sur la côte de Venezuela, à la Sille deCaraccas; à l’île de Ténériffe, au sommet dupic de Teyde. Je nomme ce volcan le dernier,parce que, rapproché des côtes du continentde l’Afrique, il a le désavantage d’être baignéquelquefois par des courans d’air chaud quisoufflent de l’Est et du Sud-Est. En effet,M. Labillardière, qui est parvenu huit ansavant moi, le 17 octobre 1791, à la cime dupic de Ténériffe, et qui y a fait un nombre |195| d’observations importantes, rapporte, dans larelation de son voyage, qu’à 3700 mètres dehauteur, en automne, l’air y avait une tem-pérature de 18°,7 du thermomètre centigrade.Aussi le vent, comme l’indique l’observateurlui-même, était Sud-Sud-Est. Par conséquent,la différence de température entre la cime etl’air de la côte ne dépassait pas 9°, au lieuqu’avec un vent Ouest qui ne souffle pas ducontinent de l’Afrique, je trouvai une diffé-rence de 20°. Lamanon, lors de l’expéditionde Laperouse, en trouva 19°. Cette harmo-nie, entre les résultats obtenus sous des cir-constances favorables, est d’autant plus frap-pante, que j’observai au bord du cratère,mais à l’ombre et très-éloigné du sol, + 2°,7,tandis que le thermomètre de Lamanon mar-quait + 11°,6. L’une de ces observations donneun décroissement de chaleur de 184 mètres,l’autre de 195 mètres par degré centigrade,décroissemens qui ne diffèrent entre eux quede 11 mètres. Le tableau suivant indique l’époque de l’ob-servation; la latitude des lieux, fondée surmes propres déterminations astronomiques;la hauteur de la colonne d’air parcourue,calculée d’après la formule barométrique deM. Laplace, en y appliquant le nouveaucoëfficient de M. Ramond; la différence detempérature entre la couche inférieure et su-périeure, et la loi du décroissement pour 1°du thermomètre centigrade. Les hauteurs des colonnes d’air que j’ai tra-versées sont, la plupart, entre 3000 et 5800 mè-tres: j’y ai ajouté les résultats du décroisse- |196| ment du calorique relatif à 1° du thermomètrede Réanmur.
LIEUX ET ÉPOQUESde l’observation. latitude deslieux. hauteur de lacolonned’airparcourue. différ. de tem-pératureentre lacoucheinfér. etsupér.(Therm.centig.) LOI du décroissement.
Pour 1 deg.centigrade. Pour 1 deg. du therm. R.
Coffre de Perotte...(février 1804.) 19° 29′ bor. 4047m. 22°,1 183,m.1 117,t.3
Nevado de Toluca ..(septembre 1803.) 10° 6′ bor. 4619m. 23°,2 198,m.7 128,t.1
Silla de Caraccas...(janvier 1800.) 10°37′ bor. 2603m. 13°,7 189,m.8 121,t.4
Fuerte de la Cuchilla.(décembre 1799.) 10°33′ bor. 1512m. 8°,5 177,m.8 114,t.1
Guadalupe......(juillet 1801.) 4°36′ bor. 3287m. 16°,9 194,m.4 124,t.3
Pichincha......(mai 1802.) 0° 14′austr. 4679m. 23°,7 197,m.8 126,t.3
Chimborazo.....(juin 1802.) 1°28′austr. 5876m. 29°,1 201,m.9 129,t.4
Pico de Teneriffa...(juin 1799.) 28° 17′ bor. 3704m. 20°,1 184,m.2 118,t.3
19°,0 194, 9 125, 3
Terme moyen.... 191,m.4 122,t.6
|197| Les extrêmes des résultats obtenus ne dif-fèrent du résultat moyen, pour les minimum et les maximum, que de 10 et de 14 mètres.D’après cette harmonie frappante, on pour-rait supposer que les observations contenuesdans le tableau, ont été choisies parmi ungrand nombre, et que le choix n’a pas étéfait avec toute l’impartialité requise. Nouséloignerons ce soupçon, en observant que toutle journal de mon voyage, n’offre d’autresexpériences que celles rapportées dans le ta-bleau, à l’exception de deux seulement faitesdans des circonstances peu favorables. Cepen-dant, ces deux observations rejetées, offrentencore un résultat qui ne diffère que de 21et 25 mètres du résultat moyen. En ne les re-jetant pas, on aurait pour la loi du décroisse-ment 193 mètres, au lieu de 191 mètres.

Température moyenne de toute l’année.Effet des plateaux.

S’il existait à la cime de l’Etna, du pic deTénériffe ou de Pichincha, des observatoiresdans lesquels on fît des expériences diurnessur la température de l’air, sur son humiditéet sa tension électrique, sur les réfractions ho-rizontales, sur les variations horaires de ladéclinaison magnétique, expériences compa-rables à d’autres qu’à la même époque onferait dans les plaines voisines, l’ensemblede ces travaux importans répandrait un grandjour sur la connaissance physique du globe etde l’atmosphère qui l’enveloppe. La comparai-son des températures moyennes d’une année |198| entière donnerait, sans doute, sur le décroisse-ment du calorique, un résultat plus exact quedes ascensions aérostatiques ou des excursionsfaites à la cime des montagnes les plus élevées.Mais (par malheur pour le progrès des scien-ces physiques) dans la zone qui est le centrede la culture intellectuelle, les villes considé-rables situées sur les plateaux les plus élevésen Europe (Madrid et Inspruck), n’ont pas600 mètres d’élévation au-dessus du niveaude l’Océan. Il est vrai que dans les Pyrénéeset dans les Alpes, deux villages, Heas et Saint-Remy, sont placés à 1400 et 1600 mètres dehauteur. Le couvent du Saint-Bernard est l’en-droit le plus élevé qui soit perpétuellementhabité en Europe: sa hauteur perpendiculaireest de deux mille mètres. Mais nous ne con-naissons point la température moyenne decet endroit; nous l’ignorons dans la zone tem-pérée pour toute couche d’air plus élevée quecelle dans laquelle se trouve le couvent duSaint-Gothard. Au contraire, dans la partieéquinoxiale du nouveau continent, l’hommehabite des plateaux dont la hauteur est bienau-delà de 4000 mètres. Je ne parle pas dequelques hameaux épars; nombre de villesconsidérables, comme Huancavelica et Micui-pampa au Pérou, sont construites sur le dosdes Andes à 3700 mètres d’élévation au-dessusdu niveau de la mer du Sud. Cette positionextraordinaire facilitera singulièrement le pro-grès des sciences physiques, quand la civili-sation du monde, accélérant la marche qu’ellea tenue depuis long-tems de l’Est à l’Ouest,arrivera des côtes orientales de l’Océan Atlan- |199| tique aux rives du Missoury et du Marañon.Jusqu’ici le peu d’observations que l’on a purecueillir sur la température moyenne des gran-des villes de Quito, de Santa-Fe de Bogota, deMexico et de Popayan, ne saurait conduire àun résultat exact sur la loi du décroissementdu calorique. La position de ces villes s’y op-pose; elles ont été fondées au milieu de vastesplaines élevées de 1800 à 3000 mètres au-dessusdes côtes voisines. On peut considérer ces pla-teaux comme des bancs ou des bas-fonds del’océan aérien; fixant les rayons solaires, ilsélèvent la température des courans d’air froidet raréfié qui baignent leur surface. A la cimedu Chimborazo, l’air est généralement de 34°plus froid que celui des côtes, parce que lacouche d’air qui enveloppe le sommet est éloi-gnée de 6550 mètres de la surface du globe quiabsorbe et fixe les rayons. Si tout le diamètrede la terre augmentait de 6500 mètres, lacouche d’air dont nous venons de désigner latempérature, serait rapprochée de la croûtede notre planète et aurait le climat des plainesactuelles. Par un effet analogue, les plateauxdans lesquels sont situées les grandes capitalesde l’Amérique espagnole, donnent à ces villesune température beaucoup plus élevée qu’ellesne devraient avoir à cause de leur hauteur. Cetteinfluence des plateaux, sur l’air des hautes ré-gions de l’atmosphère, se manifeste dans letableau suivant, dans lequel j’ai réuni mesobservations sur la température moyenne dequatre villes principales du Nouveau-Conti-nent. Sur le dos prolongé de la Cordillère,dans les hautes plaines des Andes, on trouve |200| à 1600 mèt. de hauteur la température moyenned’Alger, à 2700 mètres celle de Florence et deRome; mais sur la pente rapide, partout oùil n’y a point de plateaux, il faut descendrebeaucoup plus bas pour trouver des climatsanalogues à ceux de l’Italie et de l’Afriqueseptentrionale.
lieux d’observation. latitude des lieux. élévation au–dessusdu niveau dela mer. Températuremoyenneobservée surle therm.centigr. décroissement du calorique.
Pour 1°centigrade. Pour 1°dutherm. R.
Quito..... 0° 13′ 17″ austr. 2907.m. 15°,0 244m.,4 157t
Popayan.... 2° 26′ 17″ bor. 1769.m. 20°,6 283m.,1 181t,6
S. Fe de Bogota. 4° 35′ bor. 2660.m. 16°,5 256m.,1 164t,5
Mexico.... 19° 25′ 55″ bor. 2277.m. 16°,9 249m.,3 160t,6
Terme moyen..... 258m.,4 165t,7
Ces expériences, faites dans des plateauxpropres à échauffer l’air ambiant, donnent,conformément à la théorie développée plushaut, un décroissement plus lent que celuiqui résulte des ascensions aérostatiques ou desexcursions entreprises vers la cime de pics iso-lés. Au lieu de 191 mètres, on trouve pour termemoyen 258 mètres. Il est aussi intéressant d’ob-server que l’influence des plateaux sur la tem-pérature est si uniforme, que trois observationss’accordent entre elles à 12 mètres près, et quela seule observation faite dans un plateau beau-coup moins élevé et abrité contre les vents |201| froids, ne diffère que de 25 mètres du termemoyen des autres.

Température des Sources.

La troisième méthode indiquée pour déter-miner la loi du décroissement du calorique,est la température décroissante des sources quisont plus ou moins élevées au-dessus du niveaude l’Océan. Ce phénomène curieux a été l’objetdes recherches de plusieurs savans distingués,de Saussure, de Cavendish, et récemment d’unphysicien minéralogiste, M. de Buch, qu’unenoble ardeur pour les sciences a guidé au Cap-Nord, pour y étudier les phénomènes que pré-sente la nuit polaire. Les sources indiquent leplus souvent la température moyenne des lieux.Elles l’indiqueraient toujours, si les petits cou-rans d’eau qui filtrent dans l’intérieur des ro-ches venaient de la même hauteur, et si, parconséquent, ces eaux ne réunissaient pas ausein de la terre des températures moyennesqui appartiennent à des élévations différentes.M. Hunter, à l’invitation de Cavendish, a me-suré la chaleur des sources qui arrosent à laJamaïque la pente des montagnes Bleues. De-puis le niveau de la mer jusqu’à la hauteur de1272 mètres, M. Hunter trouva que la tempé-rature de ces sources diminuait peu à peu de26°,5 à 16°,5 du thermomètre centigrade. Cedécroissement est beaucoup trop rapide pour nepas croire que la source la plus élevée, et parconséquent la plus froide, celle de Wallen-House, ne reçoive ses eaux de la cime desmontagnes Bleues, qui ont 2218 mètres d’élé- |202| vation au-dessus des côtes de la Jamaïque. Pen-dant le cours de mes voyages, j’ai eu occasionde faire un grand nombre d’observations ana-logues. Dans la province de Caraccas, j’aitrouvé constamment (comme je l’ai exposédans un autre endroit) que les sources étaientde 4—5° plus froides que la chaleur moyennedu lieu où elles venaient au jour. De même,dans la plaine de Rome, les sources ont 11—12°,tandis que la chaleur moyenne de l’air y estde 16°.

Cavernes.

La température des cavernes, ou celle desgaleries creusées par la main de l’homme, in-diquerait aussi le décroissement du calorique,s’il était possible d’observer cette températuresous des conditions qui excluraient l’influenced’une multitude de causes locales et même va-riables dans les mines les plus voisines. Je nedoute pas qu’on ne pût obtenir des résultatsintéressans sur ce que l’on désigne du nompompeux de la température de l’intérieur duglobe, si sur la pente de la Cordillère des Andes, on creusait des galeries (dans une rochesèche qui ne contiendrait ni partie métallique,ni fentes ouvertes à la circulation de l’air) de1000 mètres environ, depuis le niveau de la merdu Sud, jusqu’à 4800 mètres de hauteur. Lesexpériences faites depuis tant d’années dansles caves de l’Observatoire Impérial, et dansquelques autres endroits de l’Europe, prouventque l’on trouverait dans ces galeries une cha-leur identique avec la température moyennedes couches d’air qui sont placées à la même |203| hauteur que la bouche de la mine. Mais levoyageur, qui n’a à sa disposition que les creuxouverts par la main de la nature ou par l’in-dustrie de l’homme, est bien éloigné de pou-voir fournir des résultats satisfaisans; il me-sure la température de la croûte du globe, mo-difiée par la décomposition des substances mé-talliques, par la formation des fluides aéri-formes, par la force conductrice qu’ont lesdifférentes roches pour le calorique, et pardes courans d’eau et d’air dont il ignore l’ori-gine et la longueur du chemin tortueux. Jeme suis trouvé aux Andes, dans l’hémisphèreaustral, dans les mines dont le fond était élevéde 3700 mètres au-dessus du niveau des mers;l’air y était constamment de 13°,7 à 14°,2, tandisque l’atmosphère extérieure variait de — 2 \( \frac{1}{2} \) à+ 8°. Deux mille sept cents mètres plus basque cette mine péruvienne de Micuipampa,dans la caverne du Guacharo, dans la provincede Cumana, le thermomètre centigrade indi-quait 18°,7. Sur les côtes de l’île de Cuba, latempérature des cavernes calcaires voisines dela Havane, est de 22 \( \frac{1}{2} \). Ces résultats sont d’au-tant plus curieux, qu’on ne peut les obtenirqu’à la pente du groupe colossal des Andes.On n’y méconnaît pas l’influence de l’élévationdes sites sur la température des cavernes et desmines; mais ces observations, que j’ai tâché demultiplier aussi souvent que les circonstancesl’ont permis, ne sont pas d’une nature à pou-voir mener à la connaissance exacte de la loique nous cherchons.
|204|

Limite des Neiges perpétuelles.

La différence de hauteur à laquelle se trou-vent les neiges perpétuelles, depuis le pôle jus-qu’à l’équateur, présente un sixième et derniermoyen par lequel on pourrait être tenté devouloir résoudre le problème du décroissementde la chaleur. Si, conformément à la supposi-tion de Bouguer, cette limite inférieure se trou-vait exactement à la hauteur d’une couche d’airdont la température moyenne est zéro, lasimple détermination de cette hauteur, com-parée à la température moyenne de la plainevoisine, offrirait dans chaque zone le décrois-sement du calorique. Or, d’après les mesuresfaites dans les différentes parties du globe par Saussure, Ramond, Ohlsen, M. de Buch etpar moi, les neiges éternelles commencent:
Sous l’équateur à 4800 m. de hauteur.
20° de lat. à 4600
45°.... 2550
62°.... 1750
65°.... 950
Les températures moyennes correspondantesà ces latitudes indiquées, sont, d’après les ob-servations les plus exactes:
Pour 0° latitude 27°
20° 26°
45° 12,7°
62°
65°
Il suit de la comparaison de ces deux sériesde nombres, un décroissement moyen de cha-leur, qui ne s’accorde guère avec le résultat des |205| voies plus directes. Le manque d’harmonie sefait peu sentir depuis l’équateur jusqu’au pa-rallèle de 45°, où l’on trouve, au lieu de 191mètres par degré du thermomètre centigrade,177, 176 et 200 mètres. Mais plus on approchedu pôle, et plus on s’aperçoit que la méthodeest défectueuse; on trouverait 437 mètres et950 mètres pour la Norwège et pour l’Islande.Cependant la cause de ces irrégularités est fa-cile à entrevoir. Nous prouverons plus bas quele décroissement de la chaleur dans l’air estfonction de la température moyenne des plai-nes; et que par conséquent le décroissement,dans la même zone, est plus lent en hiverqu’en été. En considérant le décroissementmoyen de toute l’année, on le trouve aussiplus rapide dans les régions équinoxiales quedans la zone plus voisine du pôle. Des obser-vations de réfractions horizontales faites ré-cemment à Torneo, fixent même les limitesde ces variations; elles prouvent que le dé-croissement correspondant à 62° de latitude,bien loin d’être la moitié de celui observé sousl’équateur, n’est encore que d’un cinquièmeplus lent. Si l’on parcourt les différentes zonesdepuis les tropiques jusqu’au cercle polaire; sil’on jette les yeux sur les dernières mesurestrès-exactes faites par MM. de Buch, Ohlsen et Vetlafsen, on est frappé de la grande hau-teur à laquelle commencent les neiges perpé-tuelles au-delà du 58° de latitude boréale. Onvoit diminuer la température moyenne, depuisParis jusqu’en Norwège, en raison de 3 : 1,tandis que les limites des neiges perpétuellessont en rapport de 5 : 3. Mais la cause de ce |206| phénomène n’est pas l’effet seul de la lenteurdu décroissement du calorique; des expériencesdirectes prouvent (et ce point n’a pas encoreété discuté par les physiciens) que la couched’air par laquelle passe la courbe des neigeséternelles, n’a pas la même températuremoyenne dans les différentes zones du globe;que bien loin d’être à zéro, comme Bouguer et après lui tous les physiciens l’ont supposé,elle est au-dessus de zéro sous l’équateur etau-dessous dans les régions boréales. M. Cotte a déduit soigneusement la température moyennedu couvent du Saint-Gothard, des observationsqui y ont été faites à l’invitation de la Sociétémétéorologique de Manheim: cette températuremoyenne est d’un degré au-dessous du point dela congélation. Cependant, le couvent est bai-gné par des vents chauds venant des plaines dela Lombardie, et le passage du Saint-Gothardest de près de 600 mètres plus bas que la limitedes neiges perpétuelles. Les frères Moraves,qui observent assidûment le thermomètre àNain, situé sur la côte orientale du Labrador,sous les 56° 55′ de latitude, y trouvent la tem-pérature moyenne de 3° au-dessous de zéro, etcependant Nain est encore éloigné de 9° ducercle polaire, et peut-être de plus de 20° dupoint où la courbe des neiges éternelles coïn-cide avec la surface du globe. M. Pictet, quinous a fourni des observations curieuses sur lahauteur des neiges à la pente du Buet, penseaussi que ces neiges commencent dans unecouche d’air, dont la température moyennepeut être évaluée à 4° \( \frac{1}{2} \) au-dessous du pointde la congélation. Plus au Nord, cette couche |207| d’air est plus froide encore; car, plus les neigesdescendent, et plus elles sont exposées à la cha-leur que pendant l’été communique la surfacedu globe aux couches d’air supérieures. Cesvariations de température, dont l’influence esten rapport inverse avec la hauteur à laquellecommencent les glaces, se manifestent aussidans le phénomène que l’on peut appeler l’os-cillation de la limite inférieure; oscillation quisous l’équateur est de 50 mètres, sous le tro-pique du Cancer de plus de 600 mètres, sousles 45° de plus de 2000 mètres. Dans la zone torride, où l’influence des sai-sons est nulle, on trouve les neiges perpé-tuelles à une élévation dont la températuremoyenne est à peu près 1° \( \frac{1}{2} \) au-dessus de zéro.Il est infiniment rare, dans la Cordillère des Andes, de voir entre 4000 et 5300 mètresde hauteur le thermomètre à zéro, sur-toutdepuis sept heures du matin jusqu’à huit heuresdu soir: à cette époque, la température de l’airreste généralement entre 3° et 9°; quelquefoiselle monte, et c’est très-remarquable, jusqu’à15° ou 19°. A la pente du Chimborazo, à 5550mètres d’élévation, par un tems froid et bru-meux, le soleil ayant été caché pendant vingt-deux heures de suite, il se soutint encore à2°,8 au-dessus de zéro. Le plus grand froid queles académiciens français observèrent, en 1737,dans leur cabane de Pichincha, située prèsde la limite des neiges perpétuelles, était aulever du soleil de — 6°. Or, la températuredu jour était entre 3 et 9°: il s’ensuit quela moyenne est aussi au-dessus de zéro. Cerésultat est conforme à la théorie; car à ces |208| hauteurs il tombe presque journellement de laneige, le thermomètre étant à 1° ou 2° au-dessus du point de la congélation. Ce qui enfond pendant quelques heures est compensépar une nouvelle précipitation. La couche in-térieure est défendue par la couche exté-rieure; l’équilibre se maintient dans un airdont la température moyenne est celle à la-quelle il tombe de la neige dans tous les cli-mats. Il suit de ces recherches, que la con-naissance de la limite des glaces éternelles,ne peut pas conduire à la connaissance de laloi du décroissement, cette limite n’étant passeulement fonction du décroissement, maisaussi d’une autre quantité qui est variable se-lon les latitudes, et que nous ne pouvons dé-terminer qu’imparfaitement. Nous venons de discuter les six méthodespar lesquelles on pouvait espérer de fixer laloi du refroidissement des couches d’air su-perposées. Nous avons vu que les ascensionsaérostatiques et les voyages faits à la cime demontagnes escarpées, sont les seuls moyensqui mènent à la résolution complète d’un pro-blème, dont dépend l’inflexion des rayons lu-mineux au-dessous de dix degrés de hauteurapparente. Le résultat d’une série d’expérien-ces, dont les extrêmes s’accordent à 14 mètresprès, est que dans la région équinoxiale, oùla température moyenne de la plaine est de22° à 26°, le décroissement moyen est de191 mètres pour 1° du thermomètre centi-grade. Il nous reste à comparer ce décroisse-ment avec celui observé dans la zone tem-pérée; car, comme nous l’avons développé |209| plus haut, si les réfractions horizontales ou presque horizontales étaient aussi petites sousl’équateur que Bouguer les indique, la causede ce phénomène ne pourrait être fondée quesur un décroissement qui serait plus rapidesous les tropiques et plus lent en Europe.

Expériences faites en Europe sur le décroisse-ment du calorique.

Mais nous verrons bientôt que cette diffé-rence n’est qu’imaginaire. Je ne parlerai pasdes rêves d’un grand homme, qui crut quela température de l’air pouvait augmenter àmesure que l’on s’éloignait de la surface duglobe. Daniel Bernouilli, dans son Traitéd’Hydrodynamique, attribue le froid que l’onsent sur les montagnes à quelque influencesecrète du sol. Séduit par de fausses obser-vations du P. Feuillée, il ajoute: Non putoabsurdum esse si dicamus calorem aeris me-dium eo majorem esse, quo magis a superficiemaris distat. Je ne citerai pas les nombres aux-quels s’arrête Lambert dans sa Pyrométrie etdans les Mémoires de l’Académie de Berlin pour l’année 1772. Des spéculations théoriquesconduisirent ce géomètre à admettre que le dé-croissement du calorique, depuis le niveau dela mer jusqu’à 1000 mètres de hauteur, est de80 mètres; depuis 1000 jusqu’à 3000 mètres,de 100 mètres; et au-delà de la cime de l’Etna,de 129 mètres. Saussure, guidé par des expé-riences directes, suppose le décroissement pen-dant l’été de 160 mètres, pendant l’hiver de230 mètres. Son voyage à la cime de l’Etna lui |210| donne 177 mètres, celui au Mont-Blanc 142mètres; mais Saussure même regarde le der-nier résultat comme peu exact, à cause descirconstances particulières qui ont accompagnél’observation. Le résultat le plus précis que nous ayonsjusqu’à ce jour, sur le refroidissement des cou-ches d’air atmosphérique, est celui fourni parla seconde ascension aérostatique que M. Gay-Lussac a faite à l’invitation de l’Institut: lethermomètre indiquait à terre + 27°,7 à 3700mètres au-dessus de Paris 8°,5 à 6980 mètres —9°,5. Il en résulte, pour la première colonned’air de 1900 toises, un décroissement de 193mètres; pour la région de l’atmosphère, situéeentre la hauteur du pic de Ténériffe et celle duChimborazo, 182 mètres; pour toute la hau-teur de 7000 mètres, 187 mètres. Si l’on admetque le petit changement de température de 3°qui a eu lieu à la surface de la terre pendantla durée de l’ascension, s’est fait sentir instan-tanément à l’énorme hauteur à laquelle se trou-vait le voyageur (supposition qui ne paraît pastout-à-fait exacte), on aura 173 mètres au lieude 193 mètres. Il suit de cette observation pré-cieuse, qu’à une époque où, sous les 49° delatitude, la température de la plaine était égaleà la température moyenne des tropiques, la loidu décroissement du calorique était la mêmedans les deux zones. Le résultat que je trouvepour l’équateur, ne diffère de celui obtenu au-dessus de Paris, que de 2 mètres, et dans lecas d’une supposition moins fondée, de 18 mè-tres sur 191 mètres. Cette distribution égaledu calorique, cet équilibre de température |211| dans lequel se placent des couches d’air hori-zontalement éloignées les unes des autres deplus de 2000 lieues, ont de quoi exciter notreadmiration. Au-dessus de la hauteur du Mont-Blanc, nous avons, M. Gay-Lussac et moi,l’un sous les 49° de latitude, l’autre sur lapente du Chimborazo, observé à un demi-de-gré près, aux mêmes hauteurs, les mêmes tem-pératures.

Effet du froid des plaines sur la loi dudécroissement du calorique.

Nous pourrions nous arrêter aux résultatsque nous venons d’obtenir; ils suffisent pourprouver que la loi que suit le décroissementdu calorique sous l’équateur, n’y peut pas pro-duire une différence de réfractions horizon-tales avec celles qui ont été observées pendantl’été dans le Nord de l’Europe. Mais pour com-pléter ces recherches sur la constitution phy-sique de l’atmosphère, il est important de dis-cuter un autre point sur lequel nous manquonsd’observations précises. Si la température descouches d’air superposées décroît au-dessusd’une plaine dont l’air ambiant est entre 22°et 30°, à raison de 191 mètres par degré duthermomètre centigrade, il ne s’en suit pasde-là que cette loi soit la même, lorsque l’airde la plaine s’éloigne de cette température nor-male à laquelle ont été faites les observationssous l’équateur et en Europe. Les habitans desmontagnes savent, et la théorie de l’échauffe-ment du globe par les rayons solaires l’expliquefacilement, qu’en hiver il fait beaucoup moins |212| froid sur les grandes hauteurs qu’on ne de-vrait le supposer, d’après la différence detempérature observée en été entre les mon-tagnes et les plaines. Saussure crut (commeje l’ai rapporté plus haut) que si le décrois-sement en été était de 160 mètres, il devraitêtre de 230 mètres pendant les hivers de l’Eu-rope. Aucune observation directe n’a été faitejusqu’ici pour confirmer cette supposition. Leshauteurs des trois couvens du Saint-Gothard,du Saint-Bernard et du Mont-Cenis, sont beau-coup trop petites pour donner des résultatsexacts. Des excursions vers la cime de mon-tagnes considérablement élevées, des ascen-sions aérostatiques, sont des entreprises éga-lement dangereuses à exécuter par un froidtrès-rigoureux. Afin de résoudre cependant unproblème si intéressant pour la théorie desréfractions et des mesures barométriques, jeme suis servi de la voie indirecte qu’a indi-quée, le premier, M. Laplace, dans le qua-trième volume de sa Mécanique céleste. Levoyage aérien de M. Gay-Lussac a engagé cegrand géomètre à donner des formules par les-quelles on détermine le décroissement de lachaleur par l’observation des réfractions ho-rizontales. M. Svanberg, un des savans sué-dois envoyés au cercle polaire pour vérifierla mesure de Maupertuis, nous a transmisdeux observations de réfractions presque ho-rizontales faites par un froid excessif de 13°et 29° centigrade au-dessous du point de lacongélation. J’ai invité M. Matthieu, secré-taire au Bureau des longitudes, de vouloirbien calculer ces observations d’après les for- |213| mules de la Mécanique céleste. Cet astro-nome, dont la grande exactitude est connuedes savans, a trouvé un résultat extrême-ment curieux. Un des angles de M. Svan-berg donne 243m,8, l’autre 243m par degré duthermomètre centigrade, ou 156t,5 pour undegré du thermomètre de Réaumur. Ces nom-bres, qui ne s’écartent entre eux que de huitdécimètres, prouvent encore cette admirableuniformité avec laquelle la chaleur se répanddans l’atmosphère pendant deux jours, dontla température diffère de 16°. Des deux ob-servations de M. Svanberg, l’une a été faiteà 0° 55′, l’autre à 0° 16′ de hauteur appa-rente. M. Matthieu, pour les réduire à l’ho-rizon, s’est servi de la supposition plus queprobable, que les réfractions sous les 45° delatitude et au pôle, sont proportionnelles pourdes hauteurs égales et très-petites.

Variations des réfractions horizontales.

Nous ignorons encore, pour les zones tem-pérées, la réfraction horizontale de toute l’an-née. Pour la déterminer, il faudrait un grandnombre d’observations précises faites à diffé-rentes températures; il faudrait qu’on les ré-duisît toutes à la même pression barométriqueet au même degré du thermomètre. La bellesérie d’observations faites par M. Delambre à Bourges, à 230 mètres au-dessus du niveaude la mer, prouve que le thermomètre de-meurant entre 12° et 25°, les réfractions ho-rizontales varient de 30′ 20″ à 35′. La moyen-ne, à cette température, était de 32′ 24″, |214| qui font 34′ 14″ du point de la congélation.Dans la table de Mayer, cette réfraction ho-rizontale est d’une minute plus petite; danscelle de M. Laplace, elle est de 1′ 22″ plusgrande. Ces différences de 4′ 40″ observéespar M. Delambre, semblaient indiquer unevariation considérable dans le décroissementdu calorique. Il me paraissait indispensabled’en déterminer la quantité absolue. Voici ceque donne le calcul, en réduisant la réfractionà zéro de température:
Nouvelledivision. Anciennedivision. Décroissem.calculépour 1° R. Décroissem.calculé pour1° centigrade.
7447″ 40′ 13″ 156 t. 244 m.
7000″ 37′ 48″ 139 217
6500″ 35′ 6″ 110 172
6000″ 32′ 24″ 68 106
On pourrait être frappé de ne pas voir cor-respondre dans ce tableau, à la réfractionmoyenne de 34′ 14″, réfraction qui est l’effetde la constitution moyenne de l’atmosphèreen été, le même décroissement du caloriqueque nous ont donné des expériences directes.Le calcul n’offre que 151 mètres au lieu de191. Mais il ne faut pas oublier que le soleillevant ou couchant ne sert pas seulement àmesurer la réfraction horizontale; il influeaussi lui-même sur la constitution de l’atmos-phère. Il est probable qu’à ces deux époques |215| du jour, des couches d’air les plus voisinesont la densité la plus différente. Cette irrégu-larité, causée par les premiers ou par les der-niers rayons du soleil, doit rendre plus rapidele décroissement de la chaleur, et sur-toutsous les tropiques. On conçoit que la réfrac-tion horizontale du disque solaire ne donnepas rigoureusement le décroissement moyendu jour, mais qu’elle indique ce décroisse-ment modifié par le lever ou le coucher del’astre. Cependant, ces variations correspon-dantes à 4′ 40″ (quantité dont varient, selonM. Delambre, les réfractions horizontales d’unjour à l’autre en été), ne sont encore que de48 mètres par degré du thermomètre centigrade.Il est aisé de conclure de ce maximum, com-bien doit être constante la loi du décroissementpendant le milieu du jour, lorsque les petitescauses d’irrégularité cessent de troubler l’équi-libre général de l’atmosphère. Nous venons d’établir, par l’ensemble de cesdiscussions, 1°. que le refroidissement des cou-ches d’air superposées, suit la même loi sousles tropiques que dans la zone tempérée pen-dant l’été, et que cette loi est à peu près de200 mètres par degré du thermomètre centi-grade; 2°. que le décroissement varie avec latempérature plus ou moins élevée de la coucheinférieure de l’air; mais que ce ralentissement,pendant le froid le plus rigoureux, ne paraîtpas dépasser 244 mètres, c’est-à-dire, que ledécroissement diminue d’un cinquième, de-puis 25° au-dessus, jusqu’à 29° au-dessous dupoint de la congélation; 3° que le décroisse-ment moyen de toute l’année, est fonction de |216| la température moyenne des différentes zones,et que par conséquent il se ralentit depuis l’é-quateur au pôle. Nous terminerons la secondepartie de ce Mémoire, par une remarque surla nature de la progression que suit le refroi-dissement des couches d’air atmosphérique. L’expression généralement reçue, qu’unecolonne d’air de telle ou telle hauteur appar-tient à un décroissement d’une quantité cons-tante de chaleur, n’est pas rigoureusementexacte: elle l’est tout aussi peu que celle qu’unmillimètre d’abaissement barométrique équi-vaut à tant et tant de mètres de hauteur. Lesobservations d’hiver tendent à prouver que ledécroissement ne suit plus une progression arith-métique, lorsqu’on s’éloigne beaucoup de latempérature normale de 25°, à laquelle laplus grande partie des mesures ont été prises.Soient T et T′ les températures de deux cou-ches d’air, h la hauteur de la colonne, et f unfacteur constant, alors les observations peuventêtre représentées ou par T — T′ = hf, ou enadmettant constant le rapport de T à T′. Si,par exemple, la température de Milan est enété de 15°, lorsqu’à la cime du Saint-Gothardelle est de 5°, l’expérience prouve que cettedifférence sera moindre lorsque la chaleur di-minue à Milan. Il est probable que la diffé-rence serait plus grande si la chaleur de laplaine pouvait augmenter de 15 ou 20°. Uneprogression géométrique exprime à peu prèscet état de variation du décroissement au-dessus ou au-dessous de la température nor-male de la plaine. Aussi Euler, en 1754, dansun Mémoire célèbre sur les réfractions de la |217| lumière en passant par l’atmosphère, s’arrêteà l’hypothèse d’une progression géométrique.En nommant h la différence de hauteur dedeux couches d’air, dans lesquelles un ther-momètre à air marque 1 + T et 1 + T′, Euler trouve: \( \frac{1}{f} = \frac{T-{T}'}{h(1 + {T}')} \) M. Oltmanns a réduit le thermomètre à airau thermomètre à mercure, en supposantque, depuis le terme de la glace fondante,jusqu’au terme de l’eau bouillante, un volumed’air augmente de 1,375. Il trouve pour six demes observations les valeurs suivantes du coëffi-cient \( \frac{1}{f} \):
  • Pour le Pic de Ténériffe... = 0,000036563.
  • —— le Nevado de Toluca .. = 0,000039633.
  • —— la Sille de Caraccas... = 0,000035506.
  • —— Pichincha ..... = 0,000036579.
  • —— le Fuerte de la Cuchilla . = 0,000038344.
  • —— le Chimborazo .... = 0,000036447.
Ces nombres résultant d’observations danslesquelles les températures inférieures étaientpeu différentes entre elles, offrent une har-monie très-grande. Cependant, les écarts de-viennent considérables à mesure que la tempé-rature de la couche inférieure diminue beau-coup. Ainsi ces considérations confirment leprincipe établi par l’auteur de la Mécaniquecéleste, que le décroissement du calorique estcompris entre les limites d’une densité décrois-sante en progression géométrique et d’une den-sité décroissante en progression arithmétique. |218| Mais ce n’est qu’après avoir recueilli un grandnombre d’observations précises, faites à destempératures très-basses, que l’on parviendraà la connaissance complète d’une loi aussi im-portante. Jusqu’à cette époque, il sera pru-dent de considérer les résultats obtenus, commedépendans des températures normales des plai-nes au-dessus desquelles le décroissement a étéobservé.