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Alexander von Humboldt: „M. de Humboldt“, in: ders., Sämtliche Schriften digital, herausgegeben von Oliver Lubrich und Thomas Nehrlich, Universität Bern 2021. URL: <https://humboldt.unibe.ch/text/1807-Ueber_die_erdefressenden-19-neu> [abgerufen am 16.04.2024].

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Titel M. de Humboldt
Jahr 1823
Ort Paris
Nachweis
in: Dictionnaire des découvertes en France, de 1789 a la fin de 1820, 17 Bände, Paris: Louis Colas 1821–1824, Band 8 (März 1823), S. 265–269.
Sprache Französisch
Typografischer Befund Antiqua; Auszeichnung: Kursivierung; Schmuck: Absatzmarken.
Identifikation
Textnummer Druckausgabe: II.58
Dateiname: 1807-Ueber_die_erdefressenden-19-neu
Statistiken
Seitenanzahl: 5
Zeichenanzahl: 7957

Weitere Fassungen
Ueber die erdefressenden Otomaken (Stuttgart; Tübingen, 1807, Deutsch)
Ueber die erdefressenden Otomaken (München, 1807, Deutsch)
Sur les peuples qui mangent de la terre (Paris, 1808, Französisch)
Dei Popoli che mangiano terra (Mailand, 1808, Italienisch)
Berigt Aangaande Zekere Volken, die Aarde Eten (Haarlem, 1808, Niederländisch)
Sur les Peuples qui mangent de la Terre (London, 1808, Französisch)
Sur les peuples qui mangent de la terre (Brüssel, 1808, Französisch)
Die Gewohnheit der Indianer Erde zu essen (Hamburg, 1808, Deutsch)
Die Gewohnheit der Indianer, Erde zu essen (Berlin, 1808, Deutsch)
Gummi und Erde genießende Völker (Basel, 1809, Deutsch)
Sur les peuples qui mangent de la terre (Paris, 1809, Französisch)
Account of the Ottomacs, a People who eat Clay (Edinburgh, 1810, Englisch)
Sur les peuples qui mangent de la terre (Köln, 1810, Französisch)
An Account of The Ottomans, who eat clay (Lancaster, 1810, Englisch)
An Account of the Ottomacs, who eat clay (London, 1810, Englisch)
Отрывокъ изъ Обозрѣнiя степей, соч. славнаго Путешественника Гумбольдта [Otryvok iz Obozrěnija stepej, soč. slavnago Putešestvennika Gumbolʹdta] (Moskau, 1818, Russisch)
Die Otomaken oder Erde fressenden Menschen in Cumana und Caraccas (Brünn, 1818, Deutsch)
Die Otomaken oder erdefressenden Menschen in Cumana und Caraccas (Wien, 1818, Deutsch)
M. de Humboldt (Paris, 1823, Französisch)
Отомаки, питающiеся землею и камедью [Otomaki, pitajuščiesja zemleju i kamedʹju] (Sankt Petersburg, 1834, Russisch)
Feeding upon Earth (Manchester, 1849, Englisch)
Aard-Eters (Amsterdam, 1849, Niederländisch)
Das Erdessen der Indianer (Stuttgart, 1852, Deutsch)
Aard-eters (Zierikzee, 1850, Niederländisch)
Earth-eating Indians (Ennis, 1850, Englisch)
Earth-eating Indians (Hereford, 1850, Englisch)
Des populations se nourrissant de terre glaise (Paris, 1851, Französisch)
Clay-Eaters of South America (Boston, Massachusetts, 1851, Englisch)
Delle genti che si nutriscono d’argilla (Mailand, 1851, Italienisch)
Erdeessende Menschen (Hildburghausen; New York City, New York, 1853, Deutsch)
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M. de Humboldt.

1808. — Sur les côtes de Cumana, de la nouvelle Barcelonne et de Caracas, on trouve une tradition sur une nation quise nourrit de terre; tradition généralement répandue parles moines franciscains de la Guiane, qui, à leur retourdes missions, visitent ces provinces. Le village ou plutôtle hameau où la mission est établie parmi les Otomaques,peuplade qui mange de la terre, s’appelle conception diUruana, et s’appuie d’une manière très-pittoresque à unrocher de granit. Sa position géographique est à 7 degrés8 minutes 3 secondes, latitude nord; et 4 degrés 38 mi-nutes 38 secondes, longitude ouest de Paris. La terre que |266| mangent les Otomaques est une véritable argile glaise outerre à potier, grasse, douce et colorée en jaune gris, aumoyen d’une petite quantité d’oxide de fer. Ils la choisis-sent avec soin, et la cherchent dans des bancs à part surles bords de l’Orénoque et de la Méta. Ils distinguent uneespèce de terre de l’autre par la dégustation, et ne man-gent pas indifféremment toutes sortes d’argiles. Ils pétris-sent cette terre en boules de 4 à 6 pouces de diamètre, etles brûlent extérieurement à petit feu, jusqu’à ce que lacroûte devienne rougeâtre. Avant de manger ces boules,ils les humectent de nouveau. Ces Indiens sont, générale-ment parlant, très-sauvages, et ont en horreur la culturedes végétaux. Les peuplades les plus éloignées sur l’Oré-noque, lorsqu’elles veulent désigner quelque chose demalpropre, disent en forme de proverbe: C’est si sale qu’unOtomaque le mangerait. Aussi long-temps que durent lesbasses eaux de l’Orénoque et de la Méta, les Otomaquesse nourrissent de poissons et de tortues: les poissons sonttués à coups de flèches au moment où ils s’élèvent à la sur-face de l’eau; espèce de chasse dans laquelle on a souventadmiré l’adresse des Indiens. Les rivières éprouvent-ellesleur crue périodique, aussitôt la pêche cesse. Dans cettesaison, qui dure deux ou trois mois, les Otomaques dévo-rent une quantité incroyable de terre glaise. On en trouvede grandes provisions dans leurs cabanes; on y voit lesboules d’argiles rangées en tas pyramidaux. Selon le té-moignage d’une moine très-intelligent nommé Fray-Ra-mon Buéno, qui a vécu douze ans parmi ces peuples, unIndien en dévore par jour de trois quarts de livre à unelivre et un quart. Les Otomaques eux-mêmes disent quecette argile est leur principale nourriture pendant la sai-son pluvieuse; cependant si l’occasion se présente, ils yajoutent de temps à autre un lézard, un petit poisson et uneracine de fougère. Ils trouvent cette nourriture si déli-cieuse, que même dans la saison sèche, ayant assez de pois-sons, ils mangent en guise de dessert quelques boules d’ar-gile. Ces hommes sont d’un teint cuivré brunâtre; leurs |267| traits difformes ressemblent à ceux des Tartares; ils ont dela corpulence sans être ventrus. Le missionnaire francis-cain qui a vécu parmi eux assure que pendant l’époque où ilsmangent de la terre, leur santé n’éprouve aucune altéra-tion: voilà sans doute des faits. Ces Indiens, nous dit-on,mangent une grande quantité d’argile sans nuire à leursanté; ils considèrent cette terre comme une excellentenourriture; ils en font leur provision pour l’hiver ou lasaison pluvieuse. Mais ces simples faits suffisent-ils pourprouver que l’argile peut offrir une substance alimentaire;que les terres peuvent s’assimiler aux sucs de notre esto-mac, ou qu’elles ne lui servent que comme lest? Leur effetse borne-t-il à étendre les parois du ventre, et faire par-làdisparaître le besoin de nourriture? On n’ose décider au-cune de ces questions. Il est remarquable que le père Gun-cilla, auteur d’ailleurs si crédule et si dépourvu de cri-tique, a jugé à propos de nier que les Otomaques man-gent de la terre pure. (Histoire de l’Orénoque, tome 1,page 283.) Il prétend que les boules d’argile sont mêléesde farine de maïs et pénétrées de graisse de crocodile. Maisle missionnaire Fray-Ramon Buéno, ainsi que le frère laiFray-Juan Gonzalez, ont tous les deux assuré que les Oto-maques ne mettaient jamais de graisse de crocodile sur cesboules; quant au mélange de la farine de maïs, on n’en ajamais entendu parler à Uruana. Les boules d’argile appor-tées de ces contrées, et dont M. Vauquelin a fait l’analysechimique, n’étaient composées que de terre sans aucunmélange. Peut-être le père Guncilla, en confondant deuxfaits d’une nature différente, a-t-il fait allusion à la manièredont les Indiens préparent du pain avec les cosses d’uneespèce d’inga. Ils ensevelissent ce fruit dans la terre, afind’accélérer le moment où sa décomposition le rend propreà leur usage. Peut-être les Otomaques, en mangeant unesi grande quantité de terre sans en éprouver aucune incom-modité, s’en sont-ils, pendant une longue série de généra-tion, formé une seconde nature. Il est vrai que, dans tousles pays entre les tropiques, l’homme éprouve un désir |268| merveilleux et presque irrésistible de dévorer de la terre,et non pas de la terre alcaline ou calcaire qui pourrait ser-vir à neutraliser des acides, mais des bols gros et d’uneodeur forte. On est souvent obligé, après une pluie, derenfermer les enfans pour empêcher qu’ils n’aillent man-ger de la terre. Les femmes indiennes du village de Banco,sur les bords de la Madeleina, qui s’occupent à tourner despots de terre, mettent souvent un morceau de terre dansleur bouche; mais, à l’exception des Otomaques, tous lesindividus des autres tribus deviennent malades dès qu’ilscèdent à ce singulier penchant pour l’argile. Dans la missionde San Boria, on a trouvé un enfant indien qui, au dire de sa mère, ne voulait prendre d’autre nourriture que dela terre, mais aussi il était desséché comme un squelette.Pourquoi dans les climats tempérés et froids, ce penchantirrégulier à manger de la terre est-il si rare et presque cir-conscrit dans la classe des enfans et dans celle des femmesgrosses? On peut, en quelque sorte, considérer l’usage demanger de la terre comme généralement adopté dans tousles pays situés entre les tropiques. Les nègres de Guinéemangent habituellement une terre jaunâtre qu’ils appellent cahouac. Ceux d’entre eux qui sont amenés comme esclavesdans les Indes-Occidentales, cherchent à s’y procurer uneterre semblable. Ils assurent que l’usage de cette nourri-ture n’est accompagné enAfriqued’aucun danger. Dansles îles, le cahouac rend les esclaves malades. Aussi il yétait défendu de manger de la terre, quoiqu’à la Marti-nique, en 1751, on vendît secrètement, dans les marchés,une espèce de tuf rouge jaunâtre. «Les nègres, dit un au-»teur français (Thibault de Chanvalon, page 85), en sont»si friands, qu’il n’y a aucun châtiment qui puisse les em-»pêcher d’en dévorer.» Dans l’île de Java, entre Soura-baya et Samarag, M. Labardillière vit vendre, dans lesvillages, de petits gâteaux carrés et rougeâtres; les indi-gènes les nommaient tanaampo. En les examinant, il trouvaque c’étaient des gâteaux d’argile qu’on mangeait. (Voyageà la recherche de La Pérouse, tome 2, page 342.) Les ha- |269| bitans de la Nouvelle-Calédonie apaisent la faim en dé-vorant des morceaux, gros comme le poing, d’une espècede tale friable, dans laquelle M. Vauquelin a trouvé ducuivre en assez grande proportion. (Même voyage, ibid., page 205.) A Popayan et dans plusieurs parties du Pérou,la terre calcaire se vend dans les marchés comme une den-rée à l’usage des Indiens, qui la mangent avec le coca oules feuilles de l’erythroxylon peruvianum. Ainsi l’usage dese nourrir de terre, usage auquel la nature semblait n’in-viter que les habitans du Nord stérile, règne dans toute lazone torride, chez les races paresseuses qui occupent lesplus belles et les plus fertiles contrées de l’univers. An-nales des voyages, de la géographie et de l’histoire, publiéespar M. Malte-Brun; Moniteur, 1808, page 415; etAnnales de chimie et de physique, 1816, tome 2, page 422.