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Alexander von Humboldt: „Copie d’une lettre lue à la classe des sciences physiques et mathématiques de l’Institut national. Alexandre Humboldt au citoyen Delambre, secrétaire perpétuel de l’Institut national“, in: ders., Sämtliche Schriften digital, herausgegeben von Oliver Lubrich und Thomas Nehrlich, Universität Bern 2021. URL: <https://humboldt.unibe.ch/text/1803-Copie_d_une-04> [abgerufen am 25.04.2024].

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https://humboldt.unibe.ch/text/1803-Copie_d_une-04
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Titel Copie d’une lettre lue à la classe des sciences physiques et mathématiques de l’Institut national. Alexandre Humboldt au citoyen Delambre, secrétaire perpétuel de l’Institut national
Jahr 1803
Ort Paris
Nachweis
in: Gazette nationale ou le moniteur universel 326 (26 Thermidor an 11, 14. August 1803), S. [1445]–1447.
Postumer Nachdruck
Alexander von Humboldt, Briefe aus Amerika 1799–1804, herausgegeben von Ulrike Moheit, Berlin: Akademie 1993, S. 199–207 [nach Briefmanuskript].
Sprache Französisch
Typografischer Befund Antiqua; Spaltensatz; Auszeichnung: Kursivierung, Kapitälchen; Tabellensatz.
Identifikation
Textnummer Druckausgabe: II.17
Dateiname: 1803-Copie_d_une-04
Statistiken
Seitenanzahl: 3
Spaltenanzahl: 7
Zeichenanzahl: 19598

Weitere Fassungen
Copie d’une lettre de M. Humboldt, adressée au C. Delambre, l’un des secrétaires perpétuels de l’Institut national (datée de Lima le 25 novembre 1802) (Paris, 1803, Französisch)
Auszug aus einem Briefe des Hrn. Alexander von Humboldt an Hrn. Delambre (Weimar, 1803, Deutsch)
Letter from M. Humboldt to C. Delambres, one of the perpetual Secretaries of the National Institute (London, 1803, Englisch)
Copie d’une lettre lue à la classe des sciences physiques et mathématiques de l’Institut national. Alexandre Humboldt au citoyen Delambre, secrétaire perpétuel de l’Institut national (Paris, 1803, Französisch)
Copie d’une lettre lue à la Classe des Sciences physiques et mathématiques de l’Institut national. Alexandre Humboldt, au cit. Delambre, Secrétaire perpétuel de l’Institut national (Paris, 1803, Französisch)
Alexandre Humboldt au Citoyen Delambre, Secrétaire perpétuel de l’Institut National (London, 1803, Französisch)
Kurzer Auszug aus Hrn. Alexand. v. Humboldt’s Brief (aus Lima vom 25 Nov. 1802) an B. Delambre zu Paris (Weimar, 1803, Deutsch)
Schreiben Alexanders v. Humbold, an den B. Delambre, immerwährenden Sekretär des National-Instituts, Lima, vom 25 Nov. 1802 (Ulm, 1803, Deutsch)
Copy of a letter read in the class of physical and mathematical sciences. Alexander Humboldt to Citizen Delambre, Perpetual Secretary of the National Institute. From Lima, the 25th November, 1802 (London, 1803, Englisch)
Extrait d’une lettre d’Alexandre Humboldt au C. Delambre, secrétaire-perpétuel de l’institut national (Brüssel, 1803, Französisch)
Letter from M. Humboldt to M. Delambre, relative to his Travels in South America (London, 1803, Englisch)
Copie d’une lettre de M. Humboldt, adressée au citoyen Delambre, l’un des secrétaires perpétuels de l’Institut national (datée de Lima le 25 novembre 1802) (Paris, 1803, Französisch)
Brief van Alexander v. Humbold aan den B. Delambre, Aanhoudenden Geheimschryver van het Nat. Institut te Parys (Haarlem, 1803, Niederländisch)
Briefe des Herrn Oberbergraths von Humboldt (Berlin; Stettin, 1803, Deutsch)
Brief des Herrn von Humboldt an Delambre, beständigen Secretär des Instituts (Leipzig, 1803, Deutsch)
A letter from Baron Humboldt to a member of the National Institute at Paris (Philadelphia, Pennsylvania, 1804, Englisch)
[Copie d’une lettre de M. Humboldt, adressée au citoyen Delambre, l’un des secrétaires perpétuels de l’Institut national (datée de Lima le 25 novembre 1802)] (London, 1805, Englisch)
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Copie d’une lettre lue à la classe des sciences physiqueset mathématiques de l’Institut national. Alexandre Humboldt au citoyen Delambre, secrétaireperpétuel de l’Institut national. — De Lima, le 25 novembre 1802.

Mon respectable ami, je viens de l’intérieur desTerres, où, dans une grande plaine, j’ai fait desexpériences sur les variations horaires de l’aiguilleaimantée, et j’apprends avec regret que la frégate Astigarraga, qui ne devait partir que dans quinzejours, a accéléré son départ pour Cadix, et qu’ellemet cette nuit même à la voile. C’est, depuiscinq mois, la premiere occasion que nous ayonseue pour l’Europe dans les solitudes de la Merdu Sud; et le défaut de tems me met dans l’im-possibilité d’écrire, comme je le devrais, à l’Institutnational, qui vient de me donner la marque laplus touchante de l’intérêt et des bontés dont ilm’honore. C’est peu de jours avant mon departde Quito pour Jaen et l’Amazone, que j’ai reçula lettre en date du 2 pluviôse an 9, que cettesociété illustre m’a adressée par votre organe. Cettelettre a mis deux ans à venir me trouver dans laCordilliere des Andes. Je la reçus le lendemaind’une seconde expédition que je fis au cratere duvolcan de Pichincha, pour y porter un électro-metre de Volta et pour en mesurer le diametre,que je trouve de 752 toises, tandis que celui duVésuve n’en a que 312. Cela me rappelle qu’ausommet de Guaguapichincha, où j’ai été souvant(et que j’aime comme sol classique), la Condamine et Bouguer reçurent leur premiere lettre de la ci-devant Académie, et je me figure que Pichincha, si magna licet componere parvis, porte bonheuraux physiciens. Comment vous exprimer, citoyen, la jouissanceavec laquelle j’ai lu cette lettre de l’Institut, et lesassurances réitérées de votre souvenir! Qu’il estdoux de savoir que l’on vit dans la mémoire deceux dont les travaux avancent sans cesse les pro-grès de l’esprit humain! Dans les déserts des plainesde l’Apure, dans les bois épais du Casiguian et del’Orénoque, par-tout vos noms m’ont été présens;et parcourant les différentes époques de ma vie er-rante, je me suis arrêté avec jouissance à celle desans 6 et 7 où je vivais au milien de vous, et oùles Laplace, Fourcroy, Vanquelin, Guyton, Chap-tal, Jussieu, Desfontaines, Hallé, Lalande, Prony, et vous sur-tout, ame généreuse et sensible,me comblâtes de bontés dans les plaines de Lieur-saint: recevez tous ensemble l’hommage de montendre attachement et de ma reconnaissance cons-tante. Long-tems avant de recevoir votre lettre en qua-lité de secrétaire de l’Institut, j’ai adressé successi-vement trois lettres à la classe de physique et demathématiques; deux de Santa-Fé de Bogota, accom-pagnées d’un travail sur le genre chincona (c’est-à-dire, des échantillons d’écorces de sept especes,des dessins coloriés qui représentaient ces végétauxavec l’anatomie de la fleur si différente par la lon-gueur des étamines, et les squelettes seches avecsoin.) Le docteur Mutis qui m’a fait mille amitiés,et pour l’amour duquel j’ai remonté la riviere dela Madelaine en 40 jours, le docteur Mutis m’afait cadeau de plus de cent dessins magnifiques engrand in-folio, figurant de nouveaux genres et denouvelles especes de sa Flore de Bogota manus-crite: j’ai pensé que cette collection, aussi inté-ressante pour la botanique que remarquable à causede la beauté du coloris, ne pourrait être en demeilleures mains qu’entre celles des Jussieu, de Lamarck et Desfontaines, et je l’ai offerte à l’Ins-titut national comme une laible marque de mon |1446| |Spaltenumbruch| attachement. Cette collection et les chincona sontpartis pour Carthagene des Indes, vers le mois dejuin de cette année, et c’est M. Mutis lui-même quis’est chargé de les faire passer à Paris. Une troisiemelettre pour l’Institut est partie de Quito avec unecollection géologique des productions de Pichincha,Cotopaxi et Chimborazo. Qu’il est affligeant de res-ter dans une si triste incertitude sur l’arrivée de cesobjets, comme sur celle des collections de grainesrares que, depuis trois ans, nous avons adresséesau Jardin des Plantes de Paris! Le peu de loisir qui me reste aujourd’hui, ne mepermet pas de vous tracer le tableau de mes voyageset de mes occupations depuis notre retour de Rio-Negro; vous savez que c’est à la Havane que nousavons reçu la fausse nouvelle du départ du capitaine Baudin pour Buenos-Ayres. Fidele à la promesse quej’avais faite de le rejoindre où je le pourrais, etpersuadé que je serais plus utile aux sciences enjoignant mes travaux à ceux des naturalistes quisuivent le capitaine Baudin, je n’ai pas hésitéun moment à sacrifier la petite gloire de finirma propre expédition, et j’ai frété à l’instantun petit bâtiment au Batabano pour me rendreà Carthagene des Indes. Les tempêtes ont allongéce court trajet de plus d’un mois, les brises ayantcessé dans la Mer du Sud, où je comptais cher-cher le citoyen Baudin, et je me suis engagédans la pénible route de Honda, d’Ibagué, dupassage de la montagne de Quindiù, de Popayan,de Pasta à Quito. Ma santé a continué de résistermerveilleusement au changement de températureauquel on est exposé dans cette route en descen-dant chaque jour des neiges de 2460 toises à desvallées ardentes, où le thermometre de Réaumur n’est jamais au-dessous de 24 ou 26 degrés. Moncompagnon, dont les lumieres, le courage et l’im-mense activité m’ont été du plus grand secoursdans les recherches botaniques et d’anatomie com-parée, le citoyen Bompland a souffert des fievrestierces pendant deux mois. Le tems des grandespluies nous a pris dans le passage le plus critique,le haut plateau des Pastas, et, après un voyagede huit mois, nous sommes arrivés à Quito, poury apprendre que le citoyen Baudin avait pris laroute de l’ouest à l’est par le Cap-de-Bonne-Espé-rance. Accoutumés aux revers, nous nous sommesconsolés par l’idée d’avoir fait de si grands sacri-fices pour avoir voulu le bien. En jetant les yeuxsur nos herbiers, nos mesures barométriques etgéodésiques, nos dessins, nos expériences surl’air de la Cordilliere, nous n’avons pas regrettéd’avoir parcouru des pays dont la majeure par-tie n’a jamais été visitée par aucun naturaliste.Nous avons senti que l’homme ne doit comptersur rien que sur ce qu’il produit par sa propreénergie. La province de Quito, le plateau le plusélevé du Monde, et déchiré par la grande catas-trophe du 4 février 1797, nous a fourni un vastechamp d’observations physiques. De si énormesvolcans dont les flammes s’élevent souvent à 1000metres de hauteur, n’ont jamais pu produire unegoute de lave coulante, elles vomissent de l’eau,du gaz hydrogene sulfuré, de la boue, et del’argile carboné. Depuis 1797 toute cette partiedu Monde est en agitation. Nous éprouvons àchaque instant des secousses affreuses, et dans lesplaines de Riobomba, le bruit souterrain ressembleà celui d’une montagne qui s’écroule sous nospieds. L’air atmosphérique et les terres humectées(tous ces volcans se trouvent dans un porphyredécomposé), paraissent les grands agens de cescombustions, de ces fermentations souterraines...On a cru jusqu’ici à Quito que 2470 t. était la plusgrande hauteur à laquelle les hommes pussentrésister à la rareté de l’air. Au mois de mars 1802,nous passâmes quelques jours dans les grandesplaines qui entourent le volcan d’Antisana à 2107 t.,où les bœufs, quand on les chasse, vomissent sou-vent du sang. Le 16 mars, nous reconnûmes unchemin sur la neige, une pente douce sur laquellenous montâmes à 2773 toises de hauteur. L’air ycontenait 0,008 d’acide carbonique, 0,218 d’oxi-gene, et 0,774 d’azote. Le thermometre de Réau-mur n’était qu’à 15°, il ne fit pas froid du tout;mais le sang nous sortait des levres et des yeux.Le local ne permit de faire l’expérience de la bous-sole de Borda que dans une grotte plus basse à2467 toises. L’intensité des forces magnétiques étaitplus grande à cette hauteur qu’à Quito dans le rap-port de 230::218; mais il ne faut pas oublier quesouvent le nombre des oscillations augmente quandl’inclinaison diminue, et que cette intensité au-gmente par la masse de la montagne dont les por-phyres affectent l’aimant. Dans l’expédition que jefis, le 23 juin 1802, au Chimborazo, nous avonsprouvé qu’avec de la patience on peut soutenir uneplus grande rareté de l’air; nous parvînmes 500 toisesplus haut que la Condamine (au Corazon), etnous portâmes au Chimborazo des instrumens à3031 toises; voyant descendre le mercure dans lebarometre à 13 pouces 11,2 lignes; le thermometreétant de 1° 3′ au-dessous de zéro, nous saignâmesencore des levres. Nos Indiens nous abandonne-rent comme de coutume; le cit. Bompland etM. Montuson, fils du marquis de Selvalegre deQuito, furent les seuls qui résisterent; nous sen-tîmes tous un malaise, une débilité, une envie devomir, qui certainement provient du manque |Spaltenumbruch| d’oxigene de ces régions, plus que de la rareté del’air. Je n’ai trouvé que 0,20 d’oxigene à cette im-mense hauteur. Une crévasse affreuse nous empê-cha de parvenir à la cime du Chimborazo même,pour laquelle il ne nous manquait que 206 toises.Vous savez qu’il y a encore une grande incer-titude sur la hauteur de ce colosse, que la Con-damine ne mesura que de très-loin, lui donnantà-peu-près 3220 toises, tandis que don GeorgesJuan le met de 3380 toises, sans que la différenceprovienne de la différente hauteur qu’adoptent cesastronomes pour le signal de Carabourou. J’aimesuré dans la plaine de Tapia une base de 1702metres, (pardonnez-moi de parler tantôt de toiseset tantôt de metres, selon la nature de mes instru-mens; vous sentez bien qu’en publiant mes opé-rations, je réduirai tout au metre et au thermo-metre centigrade), deux opérations géodésiquesme donnent Chimborazo de 3267 toises au-dessusde la mer; mais il faut rectifier les calculs par ladistance du sectant à l’horison artificiel, et d’autrescirconstances. Le volcan Tongouragoa a diminuébeaucoup depuis le tems de la Condamine; au lieude 2620 toises, je ne le trouve plus que de 2531,et j’ose croire que cette différence ne provientpas d’une erreur d’opérations, parce que dansmes mesures de Cayambo, d’Antisana, de Coto-paxi, d’Iliniga, je ne differe souvent pas de 10ou 15 toises des résultats de la Condamine et de Bouguer. Aussi tous les habitans de ces malheu-reuses contrées, disent que Tongouragoa a baisséà vue d’œil; au contraire Cotopaxi, qui a eu desi fortes explosions, est de la même hauteur qu’en1744, et même de quelque chose de plus, cequi provient peut-être d’une erreur de ma part;mais aussi la cime pierreuse de Cotopaxi indiqueque c’est une cheminée qui résiste et conservesa figure. Les opérations que nous avons faitesde janvier à juillet, dans les Andes de Quito,ont donné à ces habitans la triste nouvelle quele cratere de Pichincha que la Condamine vit pleinde neige, brûle de nouveau, et que Chimbo-razo, que l’on croyait être si paisible, et inno-cent, a été un volcan, et peut-être le sera unjour de nouveau. Nous avons des roches brûléeset de la pierre ponce à 3031 toises de haut.Malheur au genre-humain si le feu volcanique,(car on peut dire que tout le haut plateau deQuito est un seul volcan à plusieurs cîmes), sefait jour à travers le Chimborazo. On a souventimprimé que cette montagne est de granit, maison n’en trouve pas un atôme; c’est un porphyrepar-ci par-là, en colonnes, enchâssant du Feld-Spath vitreux, de la cornéenne et de l’olivin.Cette couche de porphyre a 1900 toises d’épaisseur.Je pourrais vous parler à ce sujet d’un porphyrepolarisant que nous avons découvert à Vaisaco,près de Pasta; porphyre qui, analogue à la ser-pentine que j’ai décrite dans le Journal de Phy-sique, a des pôles sans attraction: je pourrais vousciter d’autres faits relatifs à la grande loi des coucheset à leur énorme épaisseur près l’équateur, maisce serait trop pour une lettre qui peut-être se per-dra, et j’y reviendrai une autre fois. J’ajoute seule-ment qu’en outre des dents d’éléphant que nousavons envoyées au citoyen Cuvier, du plateau deSanta-Fé, de 1350 toises de hauteur, nous lui enconservons d’autres plus belles, les unes de l’élé-phant carnivore, les autres d’une espece un peudifférente de celle d’Afrique, du val de Timana,de la ville d’Ibarra et du Chili. Voilà donc l’exis-tence de ce monstre carnivore constatée, depuisl’Ohio à 50 degrés latitude boréale jusqu’au 35e degréde latitude australe. J’ai passé des momens fort agréables à Quito;le président de l’Audience, le baron de Corondeles,nous a comblé de bontés; et depuis trois ans, jen’ai pas eu à me plaindre un seul jour des agens dugouvernement espagnol, qui m’a traité par-toutavec une délicatesse et une distinction qui m’obli-gent à une reconnaissance éternelle. Je me suisbeaucoup occupé des pyramides et de leurs fon-demens (que je ne crois pas du tout dérangésquant aux pierres molaires.) Un particulier géné-reux, ami des sciences, et des hommes qui les ontillustrées, tels que la Condamine, Godin et Bouguer,le marquis de Selvalegre, à Quito, pense à les fairereconstruire. Mais cela me mene trop loin. Après avoir passé l’Assouay et Cuença (où l’ona donné des fêtes de taureau), nous avons pris laroute de Loxa pour completter nos travaux sur leCinchona. De là, nous passâmes un mois dans la pro-vince de Taen, de Bracamoros et dans les Pongos de l’Amazone, dont les rivages sont ornés d’andira etde bougainvillea, de Jussieu. Il me parut intéres-sant de fixer la longitude de Tomependa et deChuchanga, où commence la carte de la Conda-mine, et de lier ces points à la côte. La Conda-mine n’a pu fixer que la longitude de la bouchede Napo, les gardes-tems n’existaient pas, de sorteque les longitudes de ces contiées ont besoin debeaucoup de changemens. Mon chronometre de Louis Berthoud fait merveilles, ainsi que je m’enassure, en m’orientant de tems en tems, par le pre-mier satellite de Jupiter, et en comparant, pointpour point, mes différences de méridiens à cellesqu’à trouvées l’expédition de M. Fidalga, qui, parordre du roi, a fait des opérations trigonométriquesde Cumana à Carthagene. Depuis l’Amazone. |Spaltenumbruch| nous avons passé les Andes par les mines deHaalgayac (qui donnent un million de piastres paran, et où la mine de cuivre grise argentifere se trouveà 2065 toises.) Nous descendîmes à Truxilla, parCascamarca (où, dans le palais d’Atatualpa, j’aidessiné des arcs de voûtes péruviennes); suivant delà par les déserts de la côte de la mer du Sud àLima, où la moitié de l’année le ciel est couvertde vapeurs épaisses, je me hâtais d’arriver à Limapour y observer le passage de Mercure, du 9 no-vembre 1802. Par un heureux hasard j’en ai vu, etje crois bien vu, la sortie au Callas .... (Suiventdeux pages de calculs et de détáils purement astrono-miques.....) Nos collections de plantes et les dessins que j’aifaits sur l’anatomie des genres, conformément auxidées que le citoyen Jussieu m’avait communiquéesdans des conversations à la société d’histoire natu-relle, ont augmenté beaucoup par les richesses quenous avons trouvées dans la province de Quito, àLoxa, à l’Amazone et dans la Cordilliere du Pérou.Nous avons retrouvé beaucoup de plantes vuespar Joseph Jussieu, telles que le Llogue affinisquillajac, et d’autres. Nous avons une nouvelleespece de julienne qui est charmante; des collatix,plusieurs passiflores et loranthus en arbre de soixantepieds de haut; sur-tout nous sommes très-riches enpalmes et en graminées, sur lesquelles le citoyen Bompland a fait un travail très-étendu. Nous avonsaujourd’hui 3784 descriptions très-complettes enlatin, et près d’un tiers de plantes dans les her-biers que, faute de tems, nous n’avons pu décrire.Il n’y a pas de végétal dont nous ne puissionsindiquer la roche qu’il habite, et la hauteur, entoises, à laquelle il s’éleve; de sorte que la géogra-phie des plantes trouvera dans nos manuscrits desmatériaux très-exacts. Pour mieux faire, le citoyen Bompland et moi, nous avons souvent décrit lamême plante séparément. Mais deux tiers et plusdes descriptions appartiennent à l’assiduité seuledu citoyen Bompland, dont on ne pourrait tropadmirer le zele et le dévouement pour le progrèsdes sciences. Les Jussieu, les Desfontaines, les Lamarck ont formé en lui un disciple qui ira bienloin. Nous avons comparé nos herbiers à ceux deM. Mutis; nous avons consulté beaucoup de livresdans l’immense bibliotheque de ce grand-homme,nous sommes persuadés que nous avons beaucoupde nouveaux genres et de nouvelles especes; maisil faudra bien du tems et du travail pour décider cequi est réellement neuf. Nous rapportons aussi unesubstance siliceuse analogue au tabaschin des Indes-Orientales, que M. Mutis a analysée. Elle existedans les nœuds d’un graminée gigantesque qu’onconfond avec le bambou, mais dont la fleur dif-fere du bambusa de Schreber. Je ne sais si le cit. Fourcroy a recu le lait de la vache végétale (commeles Indiens nomment l’arbre); c’est un lait qui,traité avec l’acide nitrique, ma donné un caoutchoucà odeur balsamique, mais qui, loin d’être caustiqueet nuisible comme tous les laits végétaux, est nour-rissant et agréable à boire; nous l’avons découvertdans le chemin de l’Orénoque, dans une plantationoù les negres en boivent beaucoup. J’ai aussi en-voyé au citoyen Fourcroy, par la voie de la Guade-loupe, comme à sir Joseph Bancks, par la Trinité,notre dapiché ou le caoutchouc blanc oxigené quetransude par ses racines un arbre dans les forêtsde Pimichin, dans le coin du Monde le plus reculé,vers les sources de Rio-Negro. Enfin, après trois ans d’attente, la mécaniquecéleste de Laplace (novembre 1802) nous est arri-vée; je me suis jetté dessus avec une avidité sansbornes ..... Ce livre m’a ranimé à continuer les recherchessur les marées atmosphériques sur lesquelles j’aifait nombre d’observations, en 1799, à Cumana;recherches dont j’ai parlé dans une lettre au citoyen Lalande. Godin en a sçu quelque chose sans enindiquer la cause. Mosely, dans un ouvrage sur lesmaladies des Tropiques, dit faussement que lebarometre est au maximum quand le soleil est auméridien; mais cela est très-faux. Le maximum alieu à 21 h. et à 11 h.; le minimum à 4 h. et 15 h. \( \frac{1}{2} \).La lune ne paraît pas autant altérer les époques quela quantité des élévations. J’observe à présent sur-tout les jours d’opposition et de conjonction; etcomme mon barometre donne les 20mes de ligne,je ne doute pas que le citoyen Laplace, dont legénie a dompté les marées de la mer, ne découvreles lois des marées de l’air, lorsque je lui auraifourni quelques milliers d’observations. Voyez comme le phénomene est frappant:
p. lig.
24 novembre 10 h. du matin 27 5 75
———— 12 45 m ...... 5 45
———— 2 0 ...... 5 25
———— 3 30 ...... 5 10
———— 4 45 ...... 5 0
———— 5 30 ...... 5 10
———— 7 0 ...... 5 40
———— 8 0 ...... 5 60
———— 9 0 ...... 5 65
———— 10 30 ...... 5 65
|1447| |Spaltenumbruch| J’observe en même-tems l’hygrometre et le ther-mometre. Mon barometre est anglais. Je me suis engagé trop loin. Je voulais écrire àmon cher ami Pommard. Je n’en ai plus le tems; ilm’aime, il m’excusera. Je ne vais pas aux Philippines; je passe par Acapulco, le Mexique, la Havane, en Europe,et je vous embrasserai, à ce que j’espere,en septembre ou octobre 1803, à Paris. Jeserai en février au Mexique, en juin à la Havane;car je ne pense à rien qu’à conserver les manuscritsque je possede et à les publier. Que je desire êtreà Paris!!

Salut et respect, Signé, Humboldt.