EXPERIENCES Sur le Gaz nitreux, et ses combinaisons avec l'Oxigene; Par Alexandre-Frederic HUMBOLDT. §. I. Les experiences, que je vais rapporter dans ce Memoire, ont ete faites pour connoeitre la nature du gaz nitreux, et les fluides aeriformes avec lesquels il se trouve constamment mele. C'est a la nouvelle chimie que l'on doit la decouverte importante des elemens de l'acide nitreux; c'est elle qui nous a prouve que cet acide et le gaz nitreux ne different que par la proportion des quantites d'azote et d'oxigene qu'ils contiennent. Mais, quelque belle et fondee que soit cette theorie, les chimistes les plus celebres se contredisent encore actuellement en determinant la quantite de gaz nitreux requise pour saturer une partie d'oxigene; determination qui cependant est du plus grand interet pour l'analyse exacte de l'atmosphere. Divisez une somme z en deux parties, d'apres la proportion donnee m : n, voila a quoi revient toute la solution du probleme eudiometrique. Soit m le volume du gaz nitreux necessaire pour saturer une partie d'oxigene n; soit z la quantite des gaz atmospheriques et nitreux absorbes (aneantis) dans le tube de Fontana, et cette somme z sera composee de x = au gaz nitreux, et de y = a l'oxigene absorbe par x; donc z = x + y m : n = x : y m + n : n = x + y : y y = [Formel] En mettant n = 1 y = [Formel] m = [Formel] -- 1. §. II. Connoissant donc un moyen certain de determiner directement la quantite d'oxigene y qu'un gaz atmospherique contient, il seroit facile de trouver la valeur de m. On melera 100 parties de ce gaz atmospherique a 100 parties de gaz nitreux, et le quotient du volume absorbe, divise par y, donnera m + 1. Il suffit, pour le moment, d'indiquer, en general, le chemin qu'il faudra suivre pour trouver la valeur de m. Avant d'entrer dans le detail des experiences memes, jetons les yeux sur les nombres que l'illustre Lavoisier, Priestley, Ingenhouss, Scherer (de Vienne) et d'autres chimistes nous ont presentes pour determiner la proportion fondamentale m : n. Ces nombres variant de 1.7 jusqu'a 4.5; incertitude a laquelle on ne devroit pas s'attendre dans un temps ou la chimie pneumatique repose sur des bases aussi solides. §. III. Lavoisier annonce que, par un grand nombre d'experiences faites avec un gaz oxigene tres-pur et du gaz nitreux degage du sucre et du mercure par le moyen de l'acide nitrique, il trouva m entre 1.725 et 1.830. Cette meme proportion est indiquee dans la plupart de nos meilleurs manuels de chimie, dans celui de Chaptal, Girtanner, Jacquin, Gren et Scheele. Priestley raconte que 100 parties d'air vital ont ete absorbees jusqu'a 0.03 par 200 parties de gaz nitreux; ce qui donne m = 1.970. Des experiences faites sur l'air vital ne paroissent, a la verite, pas les plus propres pour determiner combien de parties de gaz nitreux se combinent a une partie d'oxigene atmospherique. Il n'est pas douteux que ce dernier ne differe en rien de l'oxigene le plus pur, degage du muriate oxigene de potasse; mais cette identite de proprietes n'eloigne pas la crainte que la meme substance ne suive des lois d'affinites differentes, agissant seule ou combinee avec l'azote. Il se pourroit tres-bien que les deux bases constituantes de notre atmosphere, se rapprochant deja de l'etat d'une combinaison chimique, l'oxigene atmospherique, retenu par les liens de l'azote, s'uneit en moindre quantite a une partie de gaz nitreux, que l'oxigene pur contenu dans l'air vital. Il se pourroit qu'un melange artificiel d'oxigene et d'azote nous presentat une autre valeur de m que l'air atmospherique, et qu'il se format des acides, tantot plus, tantot moins oxigenes. Les faits, que nous allons exposer dans la suite, nous prouveront combien cette crainte a ete fondee. Nous verrons que, pour avoir des resultats propres a servir de base au calcul eudiometrique, il faut chercher a determiner la proportion m : n par des experiences faites dans les memes conditions que celles que nous offre l'analyse de l'atmosphere dans le tube de Fontana. Mais, avant d'entreprendre ce travail, arretons-nous encore a examiner l'experience fondamentale de Lavoisier. C'est honorer la memoire de ce grand homme que de rectifier les plus petites erreurs eparses dans les ouvrages qu'il a laisses a la posterite. §. IV. En melant 300 parties de gaz nitreux a 100 parties de gaz oxigene, Lavoisier trouva un residu de 128 parties; ce qui donna pour m 1.72. Il faut supposer que cet illustre chimiste ait travaille sur un gaz oxigene qui paut etre totalement absorbe par le phosphore. Une azotation de 0.10 (impurete que l'on trouve beaucoup plus souvent que l'on ne s'imagine vulgairement) changeroit la valeur de m en [Formel] = 1.91. Il n'en est pas de meme avec l'impurete du gaz nitreux. Lavoisier, ne connoissant pas les moyens de l'essayer, il est tresprobable (comme nous allons le prouver tantot) qu'il n'existe pas de gaz nitreux qui ne contienne au moins 0.10 a 0.14 d'azote. Mais ce melange n'altere pas le calcul de Lavoisier. Soit son gaz nitreux a 0.10 d'azote; alors le residu du gaz nitreux sera 128-30=98, et m = [Formel] encore = 1.72. M. Mayer d'Erlangen, le geometre qui a donne un excellent traite sur le calorique, vit des residus de 123 , 118 et 122 parties de gaz nitreux. Mais toutes ces experiences furent faites dans le tube eudiometrique, qui n'a jamais au-dela de 3 centimetres en diametre. En combinant dans ce meme tube 300 parties de gaz nitreux, et 100 parties de gaz oxigene, j'eus aussi 130, 132, 134 et 130 parties non absorbees. Mais, en repetant la meme experience dans un cylindre de 11 centimetres en diametre, les residus ne furent que de 51, 53, 49, 58, 61, 59, 52, 53, 62, 49, 51 parties en onze experiences. L'absorption dans le vaisseau large fut donc de 68 a 85 parties plus forte que dans le tube eudiometrique. Le gaz nitreux que j'employai contenoit 0.13, le gaz oxigene 0.06 d'azote; par consequent m etoit egal a 2.64. (Ces 300 -- 39 -- 13 = 228, divisees par 100 - 6, les 39 sont 3 x 13 d'azote, et les 13 proviennent d'un residu de 58 parties -- 39 et 6 d'azote). Voila deux valeurs de m, une de 1.72, et l'autre de 2.64. La premiere est le resultat d'une experience, dans laquelle le gaz oxigene ne presente pas assez de contact au gaz nitreux. §. V. Mais, sans recourir aux experiences directes que je viens d'exposer, et a d'autres circonstancs qui, depuis long-temps, auroient dau nous porter a croire que la proportion de m : n ne peut pas etre evaluee ni comme 66:40, ni comme 69 : 40. Si l'on fixe les yeux sur les nombres eudiometriques, presentes par les physiciens les plus celebres; si l'on considere la parfaite harmonie qui regne entre ces nombres, on s'etonne qu'en convertissant les degres de l'eudiometre de Fontana en centiemes, d'apres le calcul fondamental de Lavoisier, l'atmosphere s'eleve a un degre de purete qu'elle n'atteint jamais dans nos climats. Jacquin et Scherer ont trouve la purete moyenne de l'air atmospherique a Vienne de 107°, c'esta-dire, en melant 100 parties de gaz nitreux a 100 parties d'air atmospherique, il y eut une absorption de 93 parties dans le tube eudiometrique. D'apres la formule donnee au §. I; et mettant m = 1.7, ces 107° indiquent [Formel] d'oxigene. D'apres ces memes donnees, la plus grande impurete de l'atmosphere ayant ete observee a 116°, et l'air le plus pur (de mer) a 90°, le maximum d'oxigene seroit a 0.40, le minimum a 0.31, nombres qui certainement n'inspirent pas de la confiance en la justesse du calcul. §. VI. Si, d'un cote, l'illustre Lavoisier rabaisse la valeur de m a 1.7 ou 1.8, de l'autre, Ingenhouss et Scherer (de Vienne) l'elevent a 3.5 et jusqu'a 5. Ingenhouss (experiences sur les vegetaux. A Paris, 1787, pag. 205, 296) dit tres-positivement que 6, 7, et meme quelquefois plus de mesures d'air nitreux sont necessaires pour saturer 2 mesures d'air vital. En d'autres passages il repete que 100 parties d'air vital aneantissent 450 parties de gaz nitreux avant que le volume de la colonne d'air commence a s'agrandir. Scherer, dans son manuel d'eudiometrie, met m = 4 ou 5. Mais, dans toutes les experiences dont sont tires ces resultats, l'impurete du gaz oxigene ne fut pas connue; et le gaz nitreux, n'entrant pas dans le tube peu-a-peu, (par un robinet a bulles d'air) mais par mesures entieres, il faut soigneusement observer que, dans le moment ou l'on fit monter la 4e. mesure, tout l'air vital peut-etre avoit deja ete absorbe jusqu'a [Formel] , et que, de cette derniere et 4e. mesure, il n'y a, en ce cas, que 0.02, ou 0.03 qui agissent. Cependant toutefois la valeur de m seroit encore au-dela de 3, proportion qui differe enormement des calculs de Lavoisier, et qui feroit evaluer le maximum et le minimum de la purete atmospherique a 0.27 et 0.21 d'oxigene. La salubrite moyenne de l'air de Vienne seroit, d'apres ces memes donnees, egale a 0.23 d'oxigene; impurete de l'air qui est en contradiction directe avec un grand nombre d'autres experiences que j'ai faites en cette ville au moyen du phosphore et du sulfure de potasse. Si, au contraire, on admet la purete moyenne de Vienne ou de Paris a 0.27 d'oxigene, la formule m = [Formel] - 1 donne (z etant = 93°) la valeur de m a z; nombre qui se rapproche presque de [Formel] de celui que j'annoncerai dans la suite comme le resultat de mes propres recherches. §. VII. Ayant vu combien les calculs eudiometriques des chimistes les plus celebres s'eloignent de la verite, j'ai cru devoir recommencer un travail qui n'a point encore ete entrepris avec toute l'exactitude dont il est susceptible. Mes experiences ont ete dirigees a connoeitre, 1°. la nature du gaz nitreux, et les degres de son azotation trouves au moyen du sulfate de fer et du gaz acide muriatique oxigene; 2°. la formation de l'acide nitrique en faisant le melange du gaz nitreux et de l'air atmospherique sur du mercure; 3°. la decomposition de l'eau et la composition de l'ammoniaque en secouant du gaz nitreux avec de l'eau distillee; 4°. la valeur de m en melant du gaz nitreux avec de l'air vital dans les proportions de 1 : 1, ou de 3 : 1, et dans des vaisseaux plus ou moins larges; 5°. les differences entre un melange artificiel d'oxigene et d'azote et l'air atmospherique naturel; 6°. la valeur de m en decomposant de l'air atmospherique par le gaz nitreux, et en analysant le residu. La plus grande partie de ces experiences ont ete faites dans les mois de ventose et de germinal, durant mon sejour a Salzbourg en Allemagne. Ce sont celles dont j'ai rendu compte a la premiere classe de l'institut national, dans deux memoires lus dans les seances des 6 et 11 prairial. D'autres, et les plus concluantes, ont ete faites et repetees pendant 2 mois a Paris au laboratoire de l'agence des mines, conjointement avec le cit. Tassaert, chimiste habile, dont les lumieres et la grande exactitude m'ont ete infiniment utiles dans des recherches d'une nature aussi delicate. §. VIII. Tous les physiciens, qui travaillent avec l'eudiometre de Fontana, ont observe, depuis long-tems, que, se servant d'un acide nitrique tantot plus, tantot moins etendu d'eau, les resultats de leurs experiences varient de 10 a 15 degres de l'echelle centigrade. Le meme air atmospherique, combine avec deux especes de gaz nitreux, est reduit a des volumes tres-differens. De 200 parties, il en reste tantot 109, tantot 124, et ce seroit a tort que l'on croiroit l'air essaye, plus ou moins azote selon le volume du residu. Si, au contraire, on a soin de se servir toujours du meme fil de cuivre tres-pur, et du meme acide etendu de 4 a 5 parties d'eau distillee, on degagera un gaz nitreux aussi uniforme, aussi egal en ces proprietes, qu'en analysant le meme air atmospherique avec 12 portions de gaz nitreux, obtenu par les memes substances en 12 cornues differentes, les resultats de ces analyses ne differeront pas au-dela de 1 jusqu'a 1 degre [Formel] de l'echelle eudiometrique. Ce fait important, annonce deja par Ingenhouss, Scherer, Vanbreda, Priestley et Jacquin, est conforme aux phenomenes que j'ai observes dans un travail de plusieurs annees. Mais quelles sont les causes qui quelquefois rendent le gaz nitreux aussi inegal dans sa propriete absorbante? Est-il mele de quelques substances heterogenes, qui, n'agissant point sur l'air vital, ne servent qu'a dilater les volumes des residus? Voila une question qui doit etre resolue la premiere. Il faut connoeitre la nature du gaz nitreux avant que d'examiner ses combinaisons avec l'oxigene. §. IX. Les substances gazeuses, que nous devons supposer comme melees au gaz nitreux, se reduisent a trois; savoir, a l'oxigene, l'hydrogene et l'azote. L'oxigene peut provenir des interstices des substances employees; l'azote de la meme source, mais sur-tout d'une decomposition d'acide nitrique; l'hydrogene d'une decomposition d'eau, peu vraisemblable cependant dans des conditions ou le metal est a meme de s'emparer de l'oxi - gene de l'acide. Commencons par l'oxigene. Si le gaz nitreux se degage au moyen d'un acide tres-fort; si l'on emploie une grande quantite de ce dernier a-la-fois, on obtiendra (quoique l'on se serve d'une cornue tres-petite, et que l'on laisse s'echapper soigneusement l'air atmospherique qu'elle contient) un gaz nitreux, dans lequel le phosphore repand une foible lueur. L'oxigene atmospherique, sur-tout des interstices de l'acide, ne paroeit pas avoir le tems de se combiner avec le gaz nitreux; il est entraeine, et quelques atomes en restent mecaniquement meles a ce fluide aeriforme. L'azote, dont nous verrons bientot l'existence prouvee dans ce melange aeriforme, paroeit servir a cacher cet oxigene, et a le preserver, pour ainsi dire, du contact des bases acidifiables. J'ai vu luire quelquefois le phosphore dans le gaz nitreux pendant 4 a 5 minutes; cette epoque passee, la lueur disparoeit, sans que le volume du gaz se trouve sensiblement altere. Ce dernier phenomene n'a pas de quoi nous etonner. Nous savons, par d'autres experiences, qu'il faut un minimum d'acide pour rougir des couleurs vegetales; qu'un minimum d'oxigene suffit pour faire repandre de la lueur au phosphore, comme un bois luisant. La combustion de cet atome d'oxigene peut d'autant moins s'annoncer par un changement de volume, qu'elle n'est pas necessairement suivie d'une absorption, mais qu'il se forme une nouvelle combinaison gazeuse de phosphore, d'oxigene et d'azote. Le gaz nitreux, degage lentement par un acide foible, et employe en petite quantite, eteint le phosphore lors de son premier contact. Il paroeit que pas un atome d'oxigene libre n'y est mele; car cette substance, ne trouvant que peu d'azote (a peine 0.12) pour le cacher, se consume en formant un peu d'acide nitrique. Tous ces phenomenes nous annoncent que l'oxigene, dont le gaz nitreux est quelquefois mele, n'a pas de quoi fixer notre attention. Il n'est interessant qu'en nous presentant un nouvel exemple et de la forte attraction qui regne entre l'oxigene et l'azote, et de la maniere dont souvent les substances gazeuses se melent sans se combiner. §. X. La presence de l'azote est plus difficile a reconnoeitre dans le gaz nitreux que celle de l'oxigene. Je me suis servi a cet egard de deux moyens qui presentent chacun leurs avantages, de la solution du sulfate de fer, et de l'acide muriatique oxigene. Ces deux substances, dont la premiere a ete trop peu employee jusqu'ici dans l'analyse du gaz, absorbent egalement le gaz nitreux, et en separent l'azote. Priestley a le premier observe "la decomposition du gaz nitreux par une dissolution du vitriol vert." Il en fait mention dans la preface du 4e. volume de ses experiences sur l'air (1780, pag. 45.) Il ajoute que la dissolution du sulfate de fer en devient obscure; qu'elle redevient verte lorsqu'elle reste exposee a l'air libre, et que cette experience peut mener a d'autres plus utiles. Preparant (depuis l'hiver dernier) tres-souvent de l'azote, en decomposant l'air atmospherique par le gaz nitreux, et en lavant le residu avec la dissolution du sulfate de fer, fondant meme une partie de mes calculs eudiometriques sur l'action de ce sulfate, il me devint indispensable d'examiner les lois d'affinites sur lesquelles s'opere cette absorption du gaz nitreux. Je crus d'abord (et d'autres chimistes furent du meme avis) que le sulfate de fer agissoit en se desoxidant. J'attribuois la couleur noire de la dissolution a la formation d'un oxide de fer noir, qui avoit perdu une partie de son oxigene, attire par la base acidifiable du gaz nitreux. Cependant d'autres considerations s'opposerent a cette hypothese, et rendirent probable que ce singulier phenomene (trop neglige jusqu'a ce jour) se fondoit sur une decomposition d'eau, occasionnee par un jeu de doubles affinites. Des experiences, faites sur de grands volumes, pouvoient seules eloigner ces doutes. Le travail, que j'ai entrepris a cet egard, conjointement avec le cit. Vauquelin, a donne lieu a un memoire que ce grand chimiste prepare en ce moment. Nous veimes absorbes 43 centimetres cubes de gaz nitreux, 12 decagrammes de sulfate de fer dissous dans l'eau distillee. Il suffit d'annoncer ici que nous avons decouvert qu'il se forme, en cette experience, du nitrate de fer et du sulfate d'ammoniaque, l'eau se decomposant par la double affinite de l'hydrogene pour l'azote, et de l'oxigene pour le gaz nitreux. §. XI. Pour determiner la quantite de substances gazeuses heterogenes, melees au gaz nitreux, il faut se servir d'une dissolution de sulfate de fer chaude et tres-saturee. En secouant un volume de 100 parties avec cette solution pendant 4-5 minutes, on le verra diminue tantot jusqu'a 0.09, tantot jusqu'a 0.45. Il s'agit de savoir si ces derniers 0.09 de residu, par exemple, ne contiennent pas plus de gaz nitreux. Pour repondre a cette question, on n'a qu'a les meler a 100 parties de gaz oxigene. On ne les verra pas diminuer d'un centieme, mais conserver le volume de 109 parties. Ils annoncent, au contraire, toutes les proprietes que nous reconnoissons dans le gaz azote. Si, au lieu de secouer le gaz nitreux avec le sulfate, on le met simplement en contact avec le dernier, l'absorption se fait tres-lentement; il faut souvent 8-9 heures pour en attendre la fin. On observera alors, en operant bien soigneusement, que le meme gaz nitreux, qui, secoue, laissa un residu de 0.090, n'en doit laisser, d'apres la derniere methode, que 0.065 ou 0.070. Mon tube d'absorption , (le meme dont j'ai fait mention dans le memoire sur les combinaisons ternaires) est trespropre pour evaluer exactement cette difference. Elle provient de l'air contenu dans les interstices de la dissolution du sulfate de fer; air qui ne sort point en laissant le tube en repos, mais qui s'echappe et se mele au residu par les secousses de la premiere operation. Deux observations viennent a l'appui de ce raisonnement. 100 parties d'air atmospherique, secouees avec le sulfate, augmentent aussi de 0.020 a 0.025 en volume. Un gaz nitreux, dans lequel le phosphore ne repand aucune lueur, laisse souvent, apres le lavage, un azote qui entretient foiblement la phosphorescence. Or d'autres experiences, dont le recit seroit trop long ici, prouvent que l'air atmospherique, contenu dans les interstices du sulfate, est plus azote encore que celui qui est mele a l'eau de puits, qu'il ne montre que 0.12 d'oxigene, sur 0.88 d'azote. Ce meme air donc, en augmentant le volume des residus, y fait entrer quelques atomes d'oxigene, qui n'y existoient pas auparavant, et auxquels il seroit difficile d'assigner une autre source. Ces considerations doivent nous prouver, qu'en secouant le gaz nitreux avec le sulfate, il faut diminuer le residu de 0.02 a 0.03, pour le regarder comme le volume de l'azote preexistant. Un grand nombre d'experiences, faites avec le cit. Tassaert; nous ont prouve que ce degagement d'air des interstices du sulfate de fer se fait tres-uniformement. Le meme gaz nitreux, essaye 3 a 4 fois, a constamment donne un residu de 0.090 a 0.095, pourvu que l'on se serveit d'un flacon de la meme capacite, du meme volume de gaz, et d'une dissolution chauffee a la meme temperature. Les personnes qui desireront se procurer cet instrument qui sert principalement pour l'acide carbonique, comme anthracometre, ou mon nouveau barometre, s'adresseront au cit. Dumotiez, rue du Jardinet, n°. 12. Les descriptions de ces instrumens et de plusieurs autres auxquels j'ai travaille depuis quelques annees, vont paroeitre, pendant le cours du grand voyage auquel je me prepare, dans un ouvrage separe. §. XII. On pourroit etre tente de croire que l'azote, obtenu de cette maniere, n'est pas preexistant dans le gaz nitreux, mais qu'il doit son existence a une decomposition partielle de ce dernier. On pourroit admettre que le sulfate de fer enleve au gaz nitreux une partie de son oxigene, en agissant sur lui comme la limaille de fer ou le sulfure de potasse qui (d'apres les experiences ingenieuses des cit. Deiman et Troostwyck) le convertissent en oxide d'azote, ou azote dephlogistique de Priestley. Le travail que j'ai fait, conjointement avec le cit. Vauquelin, sur l'action du sulfate de fer, prouve combien cette supposition seroit mal fondee. Le gaz nitreux est absorbe parce qu'il se combine a l'oxigene de l'eau, tandis que l'hydrogene de cette meme eau decomposee se mele a l'azote pour former de l'ammoniaque. Le nitrate de fer, trouve dans le residu du sulfate, annonce que le gaz nitreux s'oxide, au lieu de se desoxider dans cette operation. Or il seroit contre toute analogie chimique, que les memes substances suivissent en meme tems des lois d'affinites diametralement opposees. Il n'est pas probable que quelques molecules d'un gaz gagnent de l'oxigene, tandis que d'autres en perdent. Aussi ne sauroit-on resoudre le probleme, pourquoi un gaz nitreux laisse constamment (en 6 ou 8 experiences) un residu de 0.12 ou 0.13 d'azote, tandis qu'un autre en presente 0.35 ou 0.34. Ces differences constantes prouvent assez que la nature du gaz n'est pas toujours la meme. Long-tems avant que les bases de la nouvelle chimie fussent posees, le cit. Fourcroy avoit deja observe que presque toujours le gaz phlogistique etoit melange avec le gaz nitreux. §. XIII. La meme quantite d'azote, que la solution du sulfate de fer annonce dans le gaz nitreux, s'y retrouve au moyen du gaz acide muriatique oxigene. Des experiences, faites avec cette derniere substance, ne servent pas seulement a constater le calcul; elles me paroissoient meme indispensables pour le rectifier. Le sulfate d'ammoniaque, qui se trouve dans le residu du sulfate de fer, secoue avec le gaz nitreux, nous annonce que quelques centiemes d'azote ont perdu leur forme gazeuse pour se combiner a l'hydrogene de l'eau decomposee. L'analyse du gaz nitreux, faite au moyen du sulfate de fer, nous annonce, par consequent, par-tout l'azote preexistant. Il falloit evaluer le maximum de cette erreur, en analysant le meme gaz par les deux moyens du sulfate de fer et du gaz acide muriatique oxigene. Pour connoeitre la quantite d'air atmospherique contenue dans ce dernier, nous la meimes en contact avec l'eau: il avoit ete degage du muriate oxigene de potasse, et s'absorboit dans l'eau jusqu'a 0.10. Ce residu ne contenoit que 0.07 ou 0.06 d'azote. Or 100 parties de gaz nitreux tres-pur, mises en contact avec 100 parties de cet acide muriatique oxigene, (que nous venons d'analyser) laisserent un residu de 0.20, qui avoit toutes les proprietes de l'azote. Le gaz nitreux ayant detruit les 0.03 ou 0.04 d'oxigene contenu dans l'air atmospherique de l'acide muriatique oxigene, nous deduiseimes du residu de 0.20, les 0.06 d'azote atmospherique, et trouvames, par consequent, 0.14 d'azote preexistant dans le gaz nitreux essaye. Ce meme gaz nitreux, analyse avec le sulfate de fer, donnoit un residu de 0.11 d'azote. Or en deduisant (§. XI) environ 0.02 pour l'air sorti des interstices, ce residu de 0.09 prouve que 14--9, ou cinq centiemes parties d'azote sont entrees dans la formation de l'ammoniaque. D'autres experiences, faites avec les memes substances, donnerent constamment des differences de 0.05 ou 0.06. La justesse de cette evaluation fut meme constatee par un acide muriatique oxigene tres-impur, qui contenoit 0.55 d'air atmospherique. Nous trouvames ces 55 parties assez impures. Elles etoient composees de 43 d'azote et de 12 d'oxigene. En melant 100 parties de cet acide muriatique oxigene a 100 parties de gaz nitreux, il y eut un residu de 57 parties, qui (analyse par le gaz nitreux) furent reconnues pour de l'azote pur. Or 43 parties etant preexistantes dans l'acide muriatique oxigene, il faut compter 0.14 pour le gaz nitreux. Ce meme gaz, essaye par le sulfate de fer, laissa un residu de 0.09 et de 0.08. Il resulte de ces experiences, repetees plusieurs fois avec le cit. Tassaert, qu'en secouant du gaz nitreux avec le sulfate de fer, il faut, pour evaluer la quantite d'azote preexistant, augmenter le residu d'environ 3 centiemes; car, en deduisant 0.02 pour les interstices, on doit ajouter 0.05 a cause de la formation de l'ammoniaque. Il est superflu d'observer que cette regle ne peut servir que pour les gaz d'une purete mediocre, que les chimistes preparent communement. En travaillant sur du gaz nitreux a 0.30 ou 0.40 d'azote, les resultats, obtenus par le sulfate de fer et l'acide muriatique oxigene, doivent necessairement differer davantage. Il ne s'agit ici que d'indiquer la voie par laquelle cette difficulte peut etre levee. §. XIV. Nous avons vu jusqu'ici que le gaz nitreux contient (§. IX) quelques atomes d'oxigene; mais que l'azote est la seule substance qui en change le volume. Il ne resteroit qu'a examiner la presence de l'hydrogene, formee peut-etre par une decomposition de l'eau qui sert de base a l'acide nitrique, si la chimie analytique donnoit les moyens de reconnoeitre un peu d'hydrogene mele a l'azote. Les poids, la combustion et la formation d'ammoniaque, seroient les trois methodes que l'on pourroit tenter a cet egard. Un azote pur doit certainement avoir plus de pesanteur specifique que de l'azote combine a de l'hydrogene: mais l'eau, contenue dans le gaz, et qui ne peut en etre enlevee totalement, nous empeche de bien juger sur le poids d'une substance gazeuse, melee avec quelques atomes heterogenes. Le phosphore se dissout certainement dans l'azote. Qui voudroit entreprendre d'annoncer le changement de poids que cette dissolution doit causer? Beaucoup d'hydrogene, mele a de l'azote, s'annonce par la combustion, dont le melange devient susceptible en le combinant avec de l'oxigene. Mais un peu d'hydrogene se cache tellement dans une grande masse d'azote, en est retenu par des affinites si puissantes, que ni la combustion, ni la formation d'eau ne deviennent sensibles. Les moffettes des mines de houilles presentent des exemples frappans de ce dernier phenomene. On pourroit encore essayer l'eudiometre de Volta, dans lequel, au moyen de l'etincelle electrique, un melange d'hydrogene et d'azote donnent de l'ammoniaque. Mais l'electricite decomposant en meme tems l'humidite contenue dans les gaz et tout l'appareil, on ne seroit jamais certain si l'hydrogene preexistoit dans l'azote ou dans l'eau decomposee. J'ai cru necessaire d'examiner les difficultes de ces methodes, pour fixer l'attention des chimistes sur un probleme aussi interessant que celui de la separation de l'hydrogene de l'azote. Je suppose que l'azote atmospherique, dans les couches d'air les plus basses, est constamment mele d'un peu d'hydrogene. Il seroit tres-important pour la meteorologie (particulierement pour l'hygrometrie) de constater, ou de refuter cette supposition par des faits. §. XV. Lorsqu'on verse de l'acide nitrique sur du fil de cuivre le plus pur, une partie de cet acide se decompose totalement, et degage de l'azote, tandis qu'une autre se desoxide simplement en formant du gaz nitreux. J'ignore s'il est possible de faire du gaz nitreux tout pur. Dans un travail d'un an, pendant lequel j'ai travaille journellement avec ce gaz, je n'en ai jamais obtenu qui ne faut pas mele d'azote. Le minimum d'azotation que j'ai vu etoit a 0.10; le maximum a 0.68. Priestley, en melant 200 parties de gaz nitreux a 100 parties de gaz vital tout pur, n'eut qu'un residu de 0.03. On pourroit regarder comme prouve par-la que ce physicien ingenieux a travaille sur un gaz nitreux beaucoup plus pur que le mien. Mais nous verrons dans la suite de ce memoire, par quelles causes une partie de l'azote disparut dans les experiences eudiometriques faites sur le gaz oxigene. Le gaz nitreux, que les chimistes doivent preparer pour l'analyse exacte de l'atmosphere, s'obtient avec un acide nitrique, etendu d'autant de parties d'eau distillee, que sa gravite specifique ne monte qu'a environ 17 ou 21 degres de l'areometre de Baume. A cette densite, 3 decagrammes de cuivre, et 30 decagrammes d'acide donnent 5227 centimetres cubes de gaz nitreux, qui contient 0.13 a 0.14 d'azote. Des acides, tres-forts ou tres-foibles, degagent des gaz non seulement infiniment impurs, mais aussi tres-differens dans le degre de leur azotation. Il seroit assez difficile d'expliquer les causes de ces petits phenomenes, qui tiennent a des jeux d'affinites dont nous ne connoissons pas les modifications. Mais il est tres-certain, et prouve par un grand nombre d'experiences, qu'il n'y a qu'un certain degre de delaiement de l'acide nitrique, auquel il donne constamment des gaz a 0.10 ou 0.13 d'azote; quoique ce degre soit assez marque par le nombre aerometrique, indique ci-dessus, il paroeit cependant beaucoup plus saur de ne pas se borner a cette mesure, mais de recourir plutot a l'experience avec le sulfate de fer; experience qui est tres-simple et peu embarrassante en ellememe. Une petite quantite d'acide une fois preparee, il est facile d'en faire une quantite quelconque, qui degage un gaz de la meme purete. On n'a qu'a faire des experiences comparatives sur le meme air atmospherique. Si le gaz nitreux qu'on a obtenu par le nouvel acide donne exactement le meme degre de l'echelle eudiometrique, que le gaz nitreux dont on connoeit l'azotation, on peut se passer de l'analyse du premier par le sulfate de fer, ou l'acide muriatique oxigene. §. XVI. Les acides forts donnent, en general, un gaz nitreux plus azote que les acides foibles; cependant j'ai observe des exceptions tres-marquantes. Un acide nitrique, qui avoit degage un gaz nitreux a 0.35 d'azote, fut mele de 9 parties d'eau distillee. Plusieurs heures s'ecoulerent avant qu'une bulle d'eau apparaut dans l'appareil pneumatique. Pendant toute une nuit, il se forma peu-a-peu 17 centimetres cubes de gaz nitreux, qui, essaye par le sulfate de fer, contenoit 0.47 d'azote. Si, au contraire, l'acide est tres-fort, et qu'il se forme un gaz nitreux tres-azote, on peut etre saur que le degre de cette azotation diminue a mesure que plus de gaz se degage, et qu'il paroeit avec plus de lenteur. En separant des volumes egaux, selon l'epoque de leur formation, on obtiendra le plus souvent des fluides elastiques, dans lesquels l'azote diminue en progression arithmetique. J'ai recueilli successivement 40 centimetres cubes de gaz nitreux, qui contenoient 0.62-0.51-0.43--0.30 d'azote. La solution d'ammoniaque decouvre constamment des vapeurs d'acide nitreux dans ces melanges aeriformes. La purete du metal employe a aussi une influence tres-prononcee sur la purete du gaz nitreux. Le meme acide, verse sur du fil de laiton et du fil de cuivre, en degage des gaz nitreux tres-differens dans le degre de leur azotation. Le premier contiendra 0.25 d'azote, quand le dernier n'en aura que 0.12. C'est la grande affinite du zinc pour l'oxigene, qui paroeit causer cette difference dans la decomposition (desoxidation) de l'acide nitrique. Toutes ces modifications du gaz nitreux rendroient cette substance trespeu propre aux travaux analytiques, si nous ne connoissions pas des moyens certains et directs (§. XI-XIII.) pour en trouver le degre d'impurete. §. XVII. Apres avoir examine la nature du gaz nitreux, il s'agit de le voir entrer en contact avec l'oxigene. L'eau decomposant (§. XIX.) par elle-meme le gaz nitreux, il seroit naturel de commencer ce travail dans un appareil a mercure. On pourroit esperer de trouver, par ce moyen, et par les experiences comparatives faites par l'eau, ce qui est dau aux gaz oxigene et nitreux, ou aux liquides a travers lesquels on les transvase. Mais le travail, que j'ai entrepris, a cet egard, au laberatoire de l'ecole polytechnique, a prouve combien cette esperance est mal fondee. En melant 100 parties de gaz nitreux (a 0.12 d'azote) a 100 parties d'air atmospherique (a 0.274 d'oxigene), l'air rougit sur-le-champ; mais tout l'acide qui se forma resta aeriforme. Il n'y eut, apres 18 heures, que quelques gouttes d'acide de forme, qui nageoient sur le mercure. Depuis le 14 jusqu'au 16 thermidor, aucune cloche ne montra une absorption au-dela de 0.36; tandis qu'on devoit s'attendre au moins a 0.94, ou 0.96 d'absorbes. Pour enlever au residu d'azote la grande quantite d'acide nitreux, qu'on devoit y presumer suspendue, je le mis en contact avec de la potasse caustique: elle ne diminua, en 36 heures, le volume que de 0.02. Ce phenomene n'a pas de quoi nous etonner. Nous voyons, dans un grand nombre d'experiences analogues, qu'il faut de l'eau pour faire passer un acide, de l'etat gazeux, a l'etat liquide. Il ne peut donc, (lors du contact des airs atmospherique et nitreux sur le mercure) se former d'acide nitrique qu'autant qu'il se trouve de l'humidite dans l'appareil et les gaz. Lorsque je fis passer 100 parties de gaz ammoniacal sous les cloches, qui contenoient encore un residu de 164 parties, il y eut une absorption de 53 et 55 parties: or il y avoit eu 0.36 absorbes par le contact des airs memes, 0.02 -- par la potasse, 0.54 -- par le gaz ammoniacal. 0.92 Il y eut par consequent [Formel] de moins en volume; diminution qui s'approche assez de celle a laquelle on devoit s'attendre par l'analogie des experiences faites sur l'eau. Le gaz ammoniacal n'etant jamais tout pur, et la quantite de ce gaz, requise pour saturer une partie d'acide gazeux, n'etant pas connue, on ne sauroit se fier a la rigueur d'un calcul aussi complique. §. XVIII. Pour examiner la combinaison du gaz nitreux avec l'oxigene, il faut abandonner le travail au mercure. Il faut en revenir a celui fait a l'eau, et cette recherche sera d'autant plus utile, que l'illustre Lavoisier s'est servi constamment de la meme methode. C'est en comparant ses resultats avec les notres, que nous parviendrons a dissiper, en partie, les doutes qui embarrassent les chimistes dans le calcul eudiometrique. On a observe, (depuis qu'on travaille sur la purete de l'air) que le gaz nitreux, secoue avec l'eau, en souffre une diminution de volume. Quelques physiciens attribuent ce changement a une vraie absorption, a une dissolution du gaz nitreux dans l'eau, d'autres a l'air contenu dans les interstices de tous les fluides. Le cit. Vanbreda, a Delft, a fait des recherches tres-exactes sur l'influence des eaux de pluie et de puits, sur les nombres eudiometriques; et les belles experiences du cit. Hassenfratz, sur l'abondance d'oxigene, contenue dans les eaux de neige et de pluie, font supposer que l'air des interstices de l'eau joue un role important dans l'absorption du gaz nitreux. En comparant ces effets avec les phenomenes observes dans la decomposition du sulfate de fer, nous supposames, le cit. Tassaert et moi, que le simple contact du gaz nitreux avec l'eau distillee pourroit bien causer une decomposition de ce dernier. Nous examinames soigneusement une petite quantite d'eau distillee, secouee avec beaucoup de gaz nitreux tres-pur, et nous trouvames, au moyen de la terre calcaire et de l'acide muriatique, qu'il s'y forme du nitrate d'ammoniaque. L'eau se decompose, en cette operation, par une double affinite de l'oxigene pour le gaz nitreux, et de l'hydrogene pour l'azote; il se forme de l'acide nitrique et de l'ammoniaque; et, quoique la quantite du dernier paroisse trop petite pour en evaluer exactement la quantite, son existence cependant se manifeste, (a ne pas en douter) par le degagement des vapeurs, qui blanchissent dans la proximite de l'acide muriatique. Voila un fait bien frappant que la composition d'une substance alcaline par le contact d'un acide et de l'eau. C'est a la nouvelle theorie chimique, et principalement aux grands travaux du cit. Berthollet, que nous devons la facilite avec laquelle nous pouvons expliquer ce phenomene curieux. §. XIX. 100 parties de gaz nitreux, (a 0.14 d'azote) secouees avec de l'eau distillee, recemment cuite, diminuent en volume de 0.11, ou 0.12. Ce meme gaz, en contact avec l'eau de puits, ne perd que 0.02. La cause de cette difference de 0.09, ou 0.10, ne doit pas etre attribuee ni a l'impurete de l'air atmospherique, contenu dans les interstices de l'eau, ni a la decomposition de cette eau meme. Elle n'est qu'apparente; car l'acide nitrique, qui se forme par le contact du gaz nitreux avec l'eau de puits, en decompose le carbonate de chaux. Il se degage de l'acide carbonique, qui, en augmentant le volume du residu, rend l'absorption du gaz nitreux moins sensible. Pour determiner la quantite de cet acide carbonique, je lavai le residu avec de l'eau de chaux. Dans un grand nombre d'experiences, le volume diminua de 0.09, ou 0.07. Il faut en conclure que l'eau de puits absorbe reellement 9 + 2, ou 7 + 2 parties de gaz nitreux, c'est-a-dire, a-peu-pres la meme quantite que l'eau distillee. Les memes differences apparentes, que presentent les eaux mises en contact avec le gaz nitreux seul, se manifestent aussi en faisant l'analyse de l'air atmospherique dans deux tubes, dont l'un est rempli d'eau distillee, l'autre d'eau de puits. 8 experiences donnerent, pour la premiere, un residu de 101, ou 102; pour le second, un residu de 112, ou 113. Je preparai, au moyen de l'air atmospherique et d'un azote pur, (obtenu par l'humus ou la terre argileuse) un melange gazeux de 0.12 d'oxigene, et de 0.8 d'azote. Ce melange, essaye sur l'eau distillee, ne laissa qu'un residu de 156, 155, 155 [Formel] ; essaye sur l'eau de puits, il resta 165, 166, 164 [Formel] . Les differences furent donc constamment de 0.10 a 0.11; resultat qui est aussi important que consolant pour l'analyse des gaz. Le physicien, pour rendre comparables les nombres eudiometriques qu'il presente au public, n'a pas besoin de travailler toujours dans de l'eau distillee ou cuite. Il suffit qu'une fois pour toutes il determine la propriete absorbante de l'eau, dont il se sert par rapport a l'eau distillee. Cette propriete etant indiquee par la difference des volumes absorbes, on peut aisement se former une petite table de correction, pour reduire tous les nombres eudiometriques a l'etat des experiences faites a l'eau distillee. §. XX. En reflechissant sur les moyens de trouver la valeur de m: n, ou (§. I.) la quantite de gaz nitreux, requise pour saturer une partie d'oxigene, deux voies se presentent a notre esprit, parmi lesquelles une a ete tentee par le celebre Lavoisier. On peut (comme lui) meler 300 parties de gaz nitreux a 100 parties de gaz oxigene, et noter la diminution du volume, ou l'on peut combiner les parties egales d'air atmospherique et de gaz nitreux, et analyser le residu pour determiner la quantite d'oxigene par le volume de l'azote atmospherique. Mais, avant d'entrer dans le detail de ces methodes, il faut observer que toutes deux sont sujettes a une petite erreur, dont heureusement nous pouvons indiquer les limites. Sachant evaluer la quantite d'azote contenue dans le gaz nitreux, sur lequel nous travaillons, nous determinerons le volume de gaz absorbe plus exactement que l'on ne pouvoit le faire du tems de Lavoisier. Mais nous devons (comme ce grand chimiste) operer sur de l'eau; et ce liquide, (§. XVIII.-XIX.) absorbant et decomposant une partie du gaz nitreux, on ne peut pas admettre que tout le volume, qui ne se retrouve pas dans le residu, se soit combine avec le gaz atmospherique. Il est tres-probable que les bases acidifiables du gaz nitreux, etant en contact avec l'air atmospherique, agissent moins sur l'eau qu'en les secouant seuls avec ce liquide; mais toujours cette action doit avoir lieu, sans que nous soyons en etat d'en determiner exactement l'effet. Nous verrons, dans la suite de ce memoire (§. XXIX.) que le maximum de cette erreur ne peut changer la valeur de m que de 0.3. Il se peut que m : n soit au lieu de 2.6 : 1 comme 2.3 : 1. Mais cette petite incertitude meme ne concerne qu'une speculation theoretique. Elle n'influe presque en rien sur le calcul eudiometrique de l'air. Si l'eau enlevoit une fois 0.07, une autre fois 0.05 de gaz nitreux; alors ce calcul seroit sujet aux erreurs les plus graves. On ne sauroit pas si l'on devroit attribuer la difference des volumes absorbes a la purete de l'air, ou a l'effet de l'eau contenue dans le tube eudiometrique . Heureusement que les travaux exacts de Ingenhouss et de plusieurs autres physiciens ont leve ces doutes. Le meme air atmospherique, analyse sur la meme eau, donne constamment les memes nombres de l'echelle eudiometrique. En travaillant, les differences ne vont pas au-dela d'un degre. Un air atmospherique, essaye sur deux eaux de puits differentes, laissera un residu de 108 et 105 parties. Melez quelques bulles d'azote a cet air, et la seconde analyse donnera sur les memes causes 112 et 109, ou 108.5. On doit conclure de-la que ce que l'eau absorbe en la secouant avec des parties egales de gaz nitreux et d'air atmospherique, est d'une valeur constante. En le mettant = l, il est aise de voir, rigoureusement parlant, que nos experiences ne nous indiquent pas la valeur de z = y + x, mais = y + x + l; de meme la formule [Formel] -- 1 ne donne pas exactement la valeur de m, mais celle de m -- [Formel] Il suffit d'avoir indique ce point d'incertitude apparente. Des experiences comparatives, et des considerations exposees a la fin de ce memoire, nous prouveront que toute correction est presque superflue a cet egard. §. XXI. Des deux methodes indiquees (§. XX.) pour evaluer la valeur de m : n, celle qui a ete suivie par Lavoisier doit la premiere fixer notre attention. Les experiences que j'ai faites seront rapportees en forme de tableau. Le gaz oxigene, avec lequel je melai des parties egales de gaz nitreux, etoit degage tantot du nitrate, tantot (pour l'avoir plus pur) du muriate oxigene de potasse. Les mots, absorption apparente et reelle, indiquent une correction que les chimistes ont negligee jusqu'ici. En melant 100 parties de gaz nitreux a 0.10 d'azote, et 100 parties de gaz oxigene, il y aura une diminution de volume de 0.28. Mais cette diminution n'est qu'apparente; le residu ayant ete augmente de 0.10 d'azote, il faut ajouter ce nombre pour evaluer la quantite d'oxigene reellement absorbee par le gaz nitreux. L'absorption se faisant tres-rapidement, et le tube eudiometrique n'ayant presque pas du tout ete secoue, je n'ai pas cru necessaire de rien compter de l'air qui pourroit etre sorti des interstices de l'eau. La valeur de m est le quotient de 100, divise par l'absorption reelle. Experiences faites avec des parties egales de gaz oxigene et nitreux. Volume d'Azote contenu dans le gaz nitreux. Absorption apparente. Absorption reelle. Valeur de m n. 0.10 0.29 1.39 2.5:1 0.10 0.28 0.38 2.6:1 0.12 0.26 0.38 2.6:1 0.14 0.26 0.40 2.5:1 0.18 0.18 0.36 2.7:1 0.18 0.19 0.37 2.7:1 0.18 0.20 0.38 2.6:1 0.20 0.10 0.30 3.3:1 0.20 0.11 0.31 3.2:1 0.21 0.08 0.29 3.4:1 0.21 0.15 0.36 2.7:1 0.23 0.14 0.37 2.7:1 0.25 0.06 0.31 3.2:1 Le terme moyen pour la valeur de m est par consequent = 2.82; ce qui differe beaucoup du nombre de 1.72, adopte jusqu'ici par les chimistes modernes. J'ai cru appercevoir, dans un grand nombre d'experiences faites sur des gaz oxigenes tres-impurs, et dont le detail fatigueroit le lecteur, que l'absorption des gaz est d'autant plus petite, et par consequent la valeur de m d'autant plus grande, que l'air vital est d'autant plus pur. L'oxigene se trouvant moins libre dans un gaz plus impur ou plus azote, il paroeit qu'alors la combinaison du gaz nitreux est plus lente, et que moins de parties du dernier tendent a se joindre a lui. Il se forme un acide nitrique, miscible a l'eau, mais moins oxigene, se rapprochant davantage de l'etat d'acide nitreux. En general, j'ai observe, dans le cours de ces experiences, que celles faites sur le gaz oxigene ne presenteront de longtems cette belle harmonie qui se manifeste dans l'analyse de l'air atmospherique. Un melange gazeux, forme par la nature, est plus homogene, plus uniforme dans ces affinites, que des gaz artificiels, degages de differentes substances, et a des temperatures tres-eloignees les unes des autres. §. XXII. Si, au lieu de meler des parties egales de gaz nitreux et oxigene, on fait entrer 300 parties de gaz nitreux, et 100 parties de gaz oxigene dans le tube eudiometrique, la valeur de m (au lieu de rester a 2.8 jusqu'a 3.1) descend jusqu'a 1.8. L'absorption du gaz paroeit alors infiniment petite, non que moins de gaz nitreux soit alors requis pour saturer 0.02 d'oxigene, mais parce que, dans un tube de 25 millimetres en diametre, l'acide nitrique conserve, en grande partie, son etat gazeux, etant trop eloigne de la petite surface de l'eau, qui pourroit le faire passer a l'etat liquide. Je crois qu'il se presente la meme difficulte qui s'opposa a nos travaux dans l'appareil au mercure; car, en faisant (comme nous venons de l'indiquer plus haut §. IV) le meme melange de gaz oxigene et nitreux dans un vase de 10 ou 15 centimetres en diametre, l'absorption est tres-grande, et la valeur de m remonte a 2.6 ou 2.7. En analysant l'air vital eminemment pur, que le cit. Guyton avoit destine pour la combustion d'un diamant, je melai 3 mesures de gaz nitreux a 0.10 d'azote, a 1 mesure de gaz oxigene dans une cloche tres-large, et sans secouer l'appareil. Le residu ne fut que de 0.31, preuve certaine qu'il ne resta que l'azote preexistant dans le gaz nitreux. Cette experience donne [Formel] . §. XXIII. Avant de passer a la seconde methode d'evaluer la valeur de m : n, aux experiences faites sur l'air atmospherique, je dois m'arreter a une observation tres-importante pour la meteorologie. Travaillant sur le gaz vital pur, il nous vint dans l'idee d'imiter la nature en composant de 0.25 d'oxigene, et de 0.75 d'azote, un melange semblable a l'air atmospherique. Si ce melange eaut donne les resultats analogues a celles faites sur l'air naturel, la valeur de y etant connue, on auroit determine facilement celle de m. Nous preparames de l'azote au moyen du gaz nitreux et du sulfate de fer; 400 parties en furent melees a 100 parties de gaz vital tout pur, degage du muriate oxigene de potasse. Ce melange, analyse a parties egales dans le tube de Fontana, donna une absorption de 0.98; tandis que l'air atmospherique (a 0.27 d'oxigene) n'en donna que 0.93. Un second melange artificiel, qui contenoit 0.20 d'oxigene, et 0.80 d'azote, ne laissa, dans le tube eudiometrique, qu'un residu de 121 parties. Ces experiences, repetees plus souvent, donnerent la valeur de m = 2.9. Un air artificiel, moins pur, absorbant plus de gaz nitreux qu'un air naturel, on peut juger de-la (ce qui est appuye par un grand nombre d'autres phenomenes) que l'etat de combinaison, dans lequel se trouvent l'azote et l'oxigene, influe sur la valeur de m. L'air atmospherique artificiel conserve encore la propriete du gaz vital d'absorber beaucoup de gaz nitreux; c'est un melange physique d'azote et d'oxigene, tandis que l'air que nous respirons s'approche de l'etat d'une combinaison chimique. L'oxigene dans ce dernier etant fortement attire par l'azote, il tend moins a se joindre au gaz nitreux, et en absorbe une quantite plus petite. §. XXIV. Toutes ces considerations doivent nous porter a ne pas vouloir chercher la solution du probleme eudiometrique dans les experiences faites ou sur le gaz oxigene, ou sur des melanges artificiels d'oxigene et d'azote. Les premieres presentent meme quelquefois une difficulte qui est assez curieuse par rapport a la theorie des affinites. Nous avons observe des cas particuliers dans lesquels de 300 parties de gaz nitreux (a 0.10 d'azote) et de 100 parties de gaz oxigene pur, il ne resta qu'un residu de 0.19, ou de 0.22 d'azote. Une ou deux fois cette diminution monta meme jusqu'a 0.16. Il n'est pas probable que tout cet azote se soit combine a l'hydrogene de l'eau decomposee pour former de l'ammoniaque. Pourquoi cette formation seroit-elle si abondante, lorsque la petite surface de l'eau est couverte d'une couche d'acide? On doit supposer plutot qu'il existe des circonstances sous lesquelles, dans une formation tres-rapide d'acide nitrique, cet acide meme absorbe de l'azote. §. XXV. Si l 'analyse du gaz vital ne nous presente que des difficultes a vaincre, celui de l'air atmospherique donne des resultats plus surs et plus uniformes. Connoissant des moyens de separer l'azote et le gaz nitreux, on peut determiner la quantite d'oxigene contenue dans l'air essaye, en analysant le residu qui resulte du melange des deux airs. Ce residu est l'azote atmospherique + le gaz nitreux qui n'a pas trouve de l'oxigene pour se convertir en acide nitrique + l'azote contenu dans ce gaz nitreux. En enlevant le second par le sulfate de fer, et en evaluant le dernier par une experience comparative, on saura determiner l'azote de l'atmosphere. Ce calcul sera d'autant plus juste que l'on tiendra compte des volumes d'air sortis des interstices de l'eau et du sulfate de fer, employes dans ces differentes operations. Ayant presente une partie de mes experiences sous la forme d'un tableau, il sera necessaire d'exposer le mode de calcul que j'ai suivi, dans un seul exemple: 100 parties d'air atmospherique, melees a 100 parties de gaz nitreux, (a 0.14 d'azote) laissent, le tout fortement secoue dans le tube eudiometrique, un residu de 100 parties. Dans cette operation, 0.04 d'air sortent des interstices de l'eau, dont 0.01 d'oxigene est absorbe par le gaz nitreux avec l'oxigene de l'atmosphere. Il faut compter, par consequent, que le volume du residu = 100 a ete augmente de 0.03. Ce residu, lave et fortement secoue avec le sulfate de fer, ne perd que 0.08. Il reste donc 92 parties, augmentees de nouveau de 0.03 d'azote, sortis des interstices du sulfate de fer. Ce calcul donne: 3 des interstices de l'eau, 3 -- du sulfate de fer, 14 preexistans dans le gaz nitreux. 20. ou 92 -- 20 = 72 d'azote atmospherique. Or 100 parties de gaz nitreux n'etoient vraiment que 100 -- 14 = 86, et comme 0.08 + 0.03 en furent retrouves dans le residu, les 0.28 d'oxigene atmospherique + 0.01 des interstices de l'eau ont ete absorbes par 86 -- 11 = 75 ou [Formel] . Il paroeit superflu de tenir compte dans ce calcul de l'acide carbonique; son volume se trouvant souvent au-dessous d'un centieme, la valeur de m : n ne sera pas sensiblement alteree. Experiences faites avec des parties egales du gaz nitreux et d'air atmospherique. Valeur des deux gaz absorbes Residu apres l'abs. par le sulf. de fer. Azote cont. dans le gaz nit. employe. Azote cont. dans l'air atmospherique. Valeur de m n. 1.00 0.92 0.14 0.72 2.59:1 0.98 0.95 0.16 0.73 2.64:1 0.95 0.93 0.14 0.73 2.53:1 0.98 0.94 0.16 0.72 2.51:1 0.97 0.91 0.11 0.74 2.74:1 0.87 0.92 0.10 0.76 2.60:1 0.97 0.90 0.12 0.72 2.47:1 0.90 0.96 0.14 0.76 2.76:1 0.99 0.92 0.14 0.72 2.55:1 0.99 0.92 0.15 0.71 2.43:1 0.92 0.94 0.14 0.74 2.55:1 0.90 0.95 0.14 0.75 2.61:1 0.88 0.96 0.14 0.76 2.68:1 0.95 0.91 0.11 0.74 2.64:1 0.94 0.93 0.14 0.73 2.50:1 0.95 0.92 0.14 0.72 2.41:1 0.90 0.95 0.14 0.75 2.62:1 0.81 0.93 0.12 0.75 2.65:1 0.97 0.90 0.12 0.72 2.48:1 §. XXVI. Voila un grand nombre d'experiences dans lesquelles les valeurs de m ne different que de 0.02. La plupart donnent un resultat qui tombe entre 2.5 et 2.6; et, pour la justesse du calcul eudiometrique, on pourra admettre, avec beaucoup d'assurance, qu'en secouant des volumes egaux de gaz nitreux et d'air atmospherique sur de l'eau distillee, il faut 2.55 du premier pour absorber 0.01 d'oxigene; il suit de-la, 1°, que si l'acide nitrique est compose de 3.9 d'oxigene et 1 d'azote, le gaz nitreux ne peut pas (comme l'illustre Lavoisier l'indique) contenir 2.1 d'oxigene sur 1 d'azote, mais que les elemens du dernier doivent etre en rapport de 1.4 : 1; et 2°. qu'en travaillant sur des gaz nitreux tres-charges d'azote, (par exemple a 0.50 d'azote) 100 parties de ce gaz impur ne suffiront pas pour saturer tout l'oxigene contenu dans un volume d'air atmospherique: car, 67.8 parties de gaz nitreux etant requis pour aneantir 0.27 d'oxigene, un gaz nitreux, a 0.50 d'azote, doit laisser un residu de 0.07 d'oxigene, qui ne trouve pas de quoi se saturer. Les experiences faites pour examiner la nature de ces gaz impurs, n'ont pas toutes presente l'harmonie des nombres auxquels on avoit droit de s'attendre. Il se presenta des cas ou il paroissoit impossible de retrouver l'oxigene non absorbe dans le residu. Un nombre d'experiences sembloient indiquer que la valeur de m diminuoit a proportion que le gaz nitreux employe etoit plus charge d'azote. Je crus qu'il se formoit alors (tel qu'en travaillant sur l'air vital §. XXI) des acides plus ou moins oxigenes. Mais l'absence de l'oxigene dans les residus ayant ete moins prouvee directement que par la presence de quelques centiemes de gaz nitreux, annoncee par le sulfate de fer, je n'osai me fier a ce changement de la valeur de m. Une diminution de volume, causee par la formation d'ammoniaque, (diminution que je n'ai appris a connoeitre que depuis le mois de thermidor) peut m'avoir induit en erreur; et des experiences, faites avec le cit. Tassaert sur des melanges artificiels d'azote et de gaz nitreux, ont prouve indubitablement qu'il falloit pres de 2 centiemes et [Formel] du dernier pour saturer un 100e. d'oxigene. Nous preparames un gaz nitreux a 0.60 d'azote. Mele a des parties egales d'air atmospherique, il n'y eut que 0.52 parties d'absorbees. En supposant donc qu'il y eaut 0.27 d'oxigene dans l'air essaye, et que m soit egal a 2.5, le residu du tube devoit encore contenir 0.12 d'oxigene. En effet, en joignant 100 parties de gaz nitreux tres-pur a ce residu, il y eut encore pres de 0.40 d'absorbes; ce qui prouve assez que la valeur de m n'avoit pas change. D'autres experiences, faites sur des gaz nitreux, a 0.35, 0.38, 0.45, 0.52 et 0.68 d'azote, donnerent des resultats tres-analogues. Tout gaz nitreux, qui contient beaucoup au-dela de 0.32 d'azote, ne peut pas saturer l'oxigene de l'atmosphere. Ces gaz impurs presentent des nombres eudiometriques tres-differens les uns des autres; mais, connoissant des moyens certains d'examiner le degre de leur azotation, on n'a plus a craindre des erreurs dont on sait evaluer les limites. Nous avons trouve qu'en general l'air atmospherique requiert pres de 0.85 de gaz nitreux, pour le convertir en azote. Car 0.85, contenant environ 0.13 d'azote, les 0.72 de gaz nitreux tout pur suffiront pour saturer les 0.28 d'oxigene atmospherique + 0.01 d'oxigene qui sort des interstices de l'eau. Cette proportion gardee, on ne trouvera que peu de gaz nitreux mele avec l'azote qui reste dans le tube eudiometrique. Il est utile de designer ces nombres pour ceux qui voudront se preparer une grande masse d'azote a-peu-pres pur, sans recourir au sulfate de fer. §. XXVII. Un phenomene, assez curieux et analogue a celui que nous avons observe en travaillant sur le mercure, se presente lorsque, dans le tube eudiometrique, on mele 300 parties de gaz nitreux a 100 parties d'air atmospherique. Le dernier se trouvant en contact immediat avec l'eau, il y a la meme absorption, comme si le tube ne contenoit que des parties egales de gaz nitreux et d'air atmospherique. Si, au contraire, ce dernier (au lieu d'etre dans la partie inferieure du tube) occupe la partie superieure, alors l'absorption paroeit de [Formel] plus petite. La premiere methode donne, par exemple, un residu de 112 parties, lorsque la seconde en laisse audela de 140. On a beau secouer l'instrument, le volume n'en diminue pas plus. Tout l'oxigene a certainement trouve de quoi se combiner, et la valeur de m paroeit avoir baisse dans cette experience jusqu'a 1.3. Mais ce manque d'absorption n'est qu'apparent; car, en lavant le residu de 140 parties avec de l'eau, dans un vase de 12 centimetres en diametre, il diminue jusqu'a 116 parties. On voit par-la qu'il s'etoit forme de l'acide dans la partie superieure du tube, qui, etant trop eloigne de la surface de l'eau, reste en etat gazeux. On seroit singulierement frappe de ce phenomene, s'il ne s'accordoit pas parfaitement aux experiences rapportees au commencement de ce memoire (§. IV.-XVII.-XXII.) §. XXVIII. Si les bases acidifiables du sulfure de potasse, ou du phosphore, absorboient tout l'oxigene contenu dans l'air atmospherique, nous aurions un excellent moyen de constater la valeur de m. En analysant le meme air par le gaz nitreux et le sulfure de potasse, on compareroit la quantite d'oxigene trouvee a l'absorption eudiometrique dans le tube de Fontana; on diroit que 97 degres absorbes sont egaux a 0.276 d'oxigene, ou 104° = 0.292; on rectifieroit l'analyse faite au moyen du gaz nitreux, du sulfate de fer et de l'acide muriatique oxigene, avec celle faite au phosphore; et, la valeur de y bien constatee, on trouveroit m par z. Mais le phosphore, le sulfure de potasse n'enleve presque jamais tout l'oxigene a l'azote atmospherique. Il se forme ou des oxides gazeux a doubles bases de phosphore et d'azote, ou de l'oxigene qui dilate le volume des residus. Le gaz nitreux enleve presque constamment jusqu'a 0.04 d'oxigene a ce residu; mais il y en a d'autres qui y restent caches; phenomenes que j'ai expose dans un memoire sur les combinaisons ternaires du phosphore, de l'oxi - gene et de l'azote. On n'ose donc pas compter sur une longue serie d'experiences comparatives faites pour verifier la valeur de m. Dans quelques centaines, on n'en rencontre que 2 ou 3 dans lesquelles le phosphore absorbe jusqu'a 0.28 d'oxigene. Le 28 brumaire de l'an 6, en braulant du phosphore tres-rapidement dans un vase tres-exactement calibre, le meme air atmospherique, analyse dans le tube de Fontana avec un gaz nitreux a 0.14 d'azote, donna 101 parties d'absorbees; ce qui fait evaluer m = 2.6. §. XXIX. Ces diverses methodes de determiner la quantite de gaz nitreux, requise pour saturer 0.01 d'oxigene contenu dans l'air atmospherique, nous mettent en etat de convertir les degres de l'eudiometre de Fontana en milliemes d'oxigene. Tous ceux qui s'occupent de la chimie pneumatique reconnoeitront sans doute la grande utilite de cette operation. La petite table ci-jointe est construite d'apres un calcul d'approximation. Elle est fondee sur un grand nombre d'experiences faites a l'eau distillee et avec un gaz nitreux de 0.10 a 0.15 d'azote. Un physicien habile ne pouvant se tromper au-dela d'un degre ou de 1.5, il est aise de voir que nous pouvons determiner avec certitude jusqu'a trois milliemes d'oxigene. L'erreur d'un centieme presumeroit une incertitude de 4 degres: consideration qui est tres-consolante pour ceux qui suivent les variations de l'atmosphere. J'ai observe moi-meme ces variations depuis 99° jusqu'a 116° de l'echelle eudiometrique; ce qui prouve que l'air, bien loin d'etre constamment entre 0.27 ou 0.28 d'oxigene, balance dans nos climats temperes, sur le continent, entre 0.284 et 0.236 d'oxigene. D'apres des experiences faites par d'autres physiciens sur mer et a l'eile de Malte, il paroeit que la purete de l'atmosphere peut encore augmenter de 0.02 ou 0.03 d'oxigene de plus. Il est certain qu'une difference de 7° de l'echelle eudiometrique indique une difference de 0.02 en oxigene; mais il est tres-probable que je me trompe dans les nombres absolus, et que 92 degres sont egaux a 0.264, au lieu de 0.259. Nous ne pouvons fonder notre calcul que sur les methodes d'analyse que nous possedons jusqu'a ce jour. Ce sera a la posterite de verifier les erreurs qui s'y sont glissees, et il sera prudent de ne regarder les nombres presentes dans la table ci-jointe, que comme evalues par un calcul approximatif. VOLUME absorbe. OXIGENE. VOLUME du residu. 109° 0.307. 91° 108 0.304. 92 107 0.301. 93 106 0.298. 94 105 0.295. 95 104 0.293. 96 103 0.290. 97 102 0.287. 98 101 0.284. 99 100 0.281. 100 99 0.278. 101 98 0.276. 102 97 0.274. 103 96 0.270. 104 95 0.267. 105 94 0.264. 106 93 0.261. 107 92 0.259. 108 91 0.256. 109 90 0.253. 110 89 0.250. 111 88 0.247. 112 87 0.245. 112 86 0.242. 114 85 0.239. 115 84 0.236. 116 Je dois ajouter pour ceux que la theorie du calcul interesse plus particulierement, que cette table est construite d'apres la simple formule y = [Formel] en negligeant la petite quantite [Formel] de laquelle (§. XX) la valeur de m sera trop grande a cause de l'action de l'eau sur le gaz nitreux, Nous avons vu plus haut qu'il n'existe pas de moyen pour determiner la valeur de l; mais il nous reste au moins a examiner les limites de cette erreur. En melant 100 parties de gaz nitreux a 100 parties d'azote tout pur, et en les secouant comme d'ordinaire, le volume des deux gaz ne paroeit pas altere. Or d'autres experiences prouvent que, dans cette operation, pres de 0.03 d'azote sortent des interstices de l'eau: il est par consequent certain que cette meme eau a absorbe 0.03 de gaz nitreux, parce que, sans cette operation, au lieu de 200 parties, il en resteroit 203. Si le gaz nitreux agit si peu sur l'eau en le melant a l'azote, il est probable que cette action est bien moindre encore lorsque, dans l'essai de l'air atmospherique, il trouve de l'oxigene libre, et que la surface de l'eau dans le tube se couvre d'acide nitrique recemment forme. Supposons (§. XIX) que l'absorption du gaz nitreux par l'eau soit a son maximum a 0.11, alors m -- [Formel] balanceroit entre 2.18 et 2.08, et la table indiqueroit, au lieu de 0.307 et de 0.236, les nombres 0.308 et 0.237; difference qui merite d'autant moins d'attention, qu'elle ne changeroit que la valeur absolue des degres eudiometriques. Il paroeit suivre des experiences contenues dans ce memoire; 1°. Que la quantite de gaz nitreux, requise pour saturer une partie d'oxigene, differe beaucoup de la valeur de 1.8, et que si les elemens constituans de l'acide nitrique sont = 3.9 : 1, ceux du gaz nitreux ne peuvent pas etre (tels que l'illustre Lavoisier l'indique) = 2.1 : 1; 2°. Que la solution du sulfate de fer absorbe totalement le gaz nitreux, en separant l'azote qu'il contient mele, et que, pendant cette absorption, il se forme du nitrate de fer et du sulfate d'ammoniaque; 3°. Que le gaz acide muriatique oxigene decouvre constamment plus d'azote dans le gaz nitreux que le sulfate de fer, et que cette disserence de 0.05 provient de l'azote qui se combine a l'hydrogene de l'eau pour former de l'ammoniaque; 4°. Que pendant le contact d'un metal avec l'acide nitrique, une partie de cet acide se desoxide, tandis qu'une autre se decompose totalement, et que, pour cela, tout gaz nitreux est mele d'azote de 0.10 jusqu'a 0.68; 5°. Que le gaz nitreux, le plus propre aux experiences chimiques, et obtenu par un acide delaye a 17-20 degres de l'areometre de Baume, contient de 0.10 a 0.15 d'azote; 6°. Qu'en melant du gaz nitreux avec de l'oxigene dans l'appareil au mercure, il ne se forme qu'autant d'acide nitrique liquide qu'il y a de l'eau contenue dans les gaz. L'absorption paroeit tres-petite, parce que (tel que le gaz ammoniacal le prouve) il reste dilate dans un etat gazeux; 7°. Qu'en secouant du gaz nitreux avec de l'eau distillee, il se forme du nitrate d'ammoniaque par une decomposition de l'eau, et un jeu de double affinite; 8°. Que la largeur des vaisseaux, dans lesquels on mele les gaz nitreux et oxigene, influe sensiblement sur le volume absorbe. Dans des tubes, la valeur de m paroeit diminuer jusqu'a 1.8, parce que l'acide nitrique qui se forme est trop eloigne de la surface de l'eau pour en etre absorbe; 9°. Que des melanges de gaz nitreux et d'air vital ne presentent pas des resultats aussi uniformes que les experiences faites sur l'air atmospherique, la valeur de m variant de 3.2 a 2.8, selon que l'oxigene tend plus a se combiner avec le gaz nitreux, et qu'il se forme des acides plus ou moins oxigenes; 10°. Qu'un melange artificiel de 0.27 d'oxigene, et de 0.73 d'azote, differe de l'air atmospherique, en ce que l'azote du dernier, par une attraction chimique, empeche l'oxigene de se combiner aussi librement au gaz nitreux, qu'il paroeit le faire dans l'air vital; 11°. Qu'en analysant par le sulfate de fer le residu que laissent, dans le tube eudiometrique, des melanges de gaz nitreux et d'air atmospherique, on peut determiner tres-exactement la quantite d'oxigene contenue dans l'air essaye. La valeur de m, trouvee par ces experiences fondamentales, et par celles faites comparativement avec du phosphore, est entre 2.6 et 2.5; 12°. Que, connoissant la valeur de m, et une methode certaine pour examiner la nature du gaz nitreux, on peut, par les moyens combines du sulfate de fer, de l'acide muriatique oxigene et du gaz nitreux, analyser l'air atmospherique jusqu'a pouvoir indiquer des differences de 0.003 d'oxigene; 13°. Qu'en divisant le volume absorbe de parties egales de gaz nitreux (a 0.10-0.15 d'azote) et d'air atmospherique par 3.55, le quotient trouve indiquera, par un calcul approximatif, la quantite d'oxigene contenu dans l'air analyse.