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Alexander von Humboldt: „A Letter from Mr. de Humboldt, &c. Lettre de Mr. de Humboldt à Mr. Pictet sur la polarité magnétique d’une Montagne de Serpentine“, in: ders., Sämtliche Schriften digital, herausgegeben von Oliver Lubrich und Thomas Nehrlich, Universität Bern 2021. URL: <https://humboldt.unibe.ch/text/1797-A_letter_from-2> [abgerufen am 29.03.2024].

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Titel A Letter from Mr. de Humboldt, &c. Lettre de Mr. de Humboldt à Mr. Pictet sur la polarité magnétique d’une Montagne de Serpentine
Jahr 1797
Ort Genf
Nachweis
in: Bibliothèque britannique 5:4 (August 1797), S. 376–385.
Sprache Französisch
Typografischer Befund Antiqua (mit lang-s); Auszeichnung: Kursivierung, Kapitälchen; Fußnoten mit Ziffern; Schmuck: Initialen.
Identifikation
Textnummer Druckausgabe: I.51
Dateiname: 1797-A_letter_from-2
Statistiken
Seitenanzahl: 10
Zeichenanzahl: 13403

Weitere Fassungen
A Letter from M. de Humboldt to M. Pictet, on the Magnetic Polarity of a Mountain of Serpentine (London, 1797, Englisch)
A Letter from Mr. de Humboldt, &c. Lettre de Mr. de Humboldt à Mr. Pictet sur la polarité magnétique d’une Montagne de Serpentine (Genf, 1797, Französisch)
Lettre de Humboldt à Pictet, sur les Polarités magnétiques d’une Montagne de Serpentine (Paris, 1794, Französisch)
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A Letter from Mr. de Humboldt, &c.Lettre de Mr. de Humboldt à Mr. Pictet ſur la polarité magnétique d’une Montagnede Serpentine. (Tirée du Journal de Phy-ſique, de Chimie & des Arts de Nicholson N°. III, Juin 1797.) (1)


Monſieur,

AU commencement du dix-huitieme ſieclel’attention des Phyſiciens ſe portoit excluſive-ment ſur les phénomenes du magnétiſme. Lesprogrès qu’on a fait dès lors dans la théoriede l’électricité, & la prépondérance qu’a ac-quiſe enſuite la Chimie ſur les autres branchesdes études naturelles, ont diminué l’intérêtqu’on auroit dû mettre aux recherches ſur le
(1) Note du Rédacteur du Journal Anglais. «J’ai reçucette communication en manuſcrit, de Sir Joſeph Banks, Préſident de la Société Royale. Ce Mémoireétoit en français, ſous le titre de Quatrieme Lettre, &c.Ce même Protecteur, libéral des Sciences, a joint à ſonenvoi un échantillon du rocher en queſtion, en mepermettant de le ſoumettre à des eſſais. On trouveraà la fin du Mémoire quelques obſervations ſur ce fragment.» (N)
|377| fluide magnétique. Vos célebres compatriotes,MM. De Sauſſure & Prevoſt, ont remis, ileſt vrai, les Phyſiciens ſur la voie, par desdécouvertes telles qu’on pouvoit les attendrede leur ſagacité; le premier, en inventant uninſtrument capable de meſurer l’intenſité com-parative des forces magnétiques dans diverſesrégions du globe; le ſecond, en réduiſant leslois de la polarité magnétique à celles de l’at-traction ſimple. Mais ces découvertes n’ontpoint ſuffi pour ramener les Phyſiciens dansla carriere que ces auteurs avoient par-courue avec ſuccès, & on a perdu de vuel’ouvrage précieux ſur l’Origine des forces Ma-gnétiques, ainſi que les calculs de l’ingénieux Coulomb, & les expériences qu’il a faites avecla balance de torſion (1).
J’ai traverſé, la bouſſole à la main, unegrande partie des montagnes de l’Europe, & jeme ſuis convaincu que les déviations cauſéespar des maſſes ferrugineuſes, en couches ou enveines, ſont infiniment moins fréquentes queles Naturaliſtes ne le préſument. Les obſerva-tions faites par MM. De Sauſſure & Trembley,
(1) On doit à Mr. Coulomb l’heureuſe idée d’em-ployer la très-petite réſiſtance qu’oppoſe un fil d’unelongueur donnée, à ſe laiſſer tordre, pour meſurercertaines petites forces de la Nature, qui avoientéchappé aux Phyſiciens, & pour étudier les lois deleur action. (R)
|378| au ſommet de Cramont (1), me paroiſſentd’autant plus curieuſes, qu’elles ſont ſeules dansleur eſpèce, & étendent beaucoup nos idéesſur les dimenſions des ſphères magnétiques:c’eſt parmi les Alpes de Suede & de Norwege,ces régions Septentrionales, que la Nature aenrichies de dépôts énormes de fer, moins oxidéqu’il ne l’eſt dans nos latitudes, que nous pou-vons nous attendre à rencontrer des phéno-menes analogues.
Je m’empreſſe de vous communiquer unedécouverte que j’ai faite au mois de Novembredernier, & qui me paroît pouvoir contribueraux progrès de la Géologie. Vous connoiſſezles lois & la régularité que j’ai obſervées dansla direction & l’inclinaiſon des couches primi-tives, depuis les bords de la Méditerranée àceux de la mer Baltique; & vous avez témoi-gné, ainſi que Mr. Dolomieu, notre ami, del’intérêt aux pénibles recherches que j’ai faitesſur ce ſujet, & qui pourroient, en d’autresmains, jeter beaucoup de jour ſur la conſtruc-tion du globe. C’eſt dans la traverſée de la chainede montagnes du haut Palatinat & du Mar-graviat de Bareuth, que je rencontrai au fonddu Fichtel-Gebirge, entre Munichberg & Gold-cronach, un côteau iſolé qui s’éleve d’environ
(1) Voyages dans les Alpes, tom. I, pag. 375,tom. II, pag. 343.
|379| 50 toiſes au-deſſus de la plaine. Sa hauteur ſurle niveau de la mer peut être eſtimée à 250ou 300 toiſes: il court de l’oueſt à l’eſt, &forme une pyramide très-obtuſe. Les rochersqui couronnent ſon ſommet ſont d’une ſer-pentine très-pure (1), qui par ſa couleur & ſafracture feuilletée approche, dans pluſieursfragmens, du chlorith-ſchiefer de Werner,(chlorite ſchiſteuſe). Cette ſerpentine ſe diviſeen couches aſſez diſtinctes, inclinées au Nord-Oueſt, ſous un angle de 60 à 65 degrés. Ellerepoſe ſur un granit veiné, mêlé de hornblende;mêlange que nous déſignons par le nom deſyenite. J’approchai ma bouſſole du rocher pourreconnoître plus exactement ſa direction rela-tivement au Méridien; l’aiguille parut auſſitôtdans une vive agitation. Je fis deux pas en merapprochant du rocher, & je vis que le pôleNord paſſa du côté du Sud. J’appelai deux amis,MM. Godeking & Killinger, compagnons demes courſes géologiques, & ils éprouverent,comme moi, ce ſentiment vif de plaiſir, que
(1) La ſerpentine eſt une pierre d’un vert plus oumoins foncé, ordinairement veinée ou tachetée,aſſez dure, ou plutôt tenace, & ſuſceptible d’un beaupoli qui ne s’altere point, comme celui du marbre,par l’action des acides. On la trouve roulée en blocsplus ou moins gros & arrondis, parmi les caillouxroulés de nos environs. (R)
|380| procure la vue d’un phénomene nouveau lorſ-qu’on a le goût de l’obſervation. J’abrégeraile détail de toutes celles que nous fîmes; jeme bornerai pour le préſent aux ſeuls réſultats,auxquels je pourrai par la ſuite faire quelquesadditions, ſi mes occupations ne m’éloignentpas de cette partie de l’Allemagne.
L’action de cette montagne de ſerpentine ſemontre d’une maniere très-remarquable: lesrocs à nud dans la pente Septentrionale, &ceux de la pente au Midi ont leurs pôles direc-tement contraires. On ne trouve dans les pre-miers que des pôles Sud & dans les derniersque des pôles Nord. La maſſe entiere de cetteſerpentine feuilletée n’eſt donc pas douée d’unaxe magnétique ſeul, mais d’une infinité d’axesdifférens, parfaitement paralleles entr’eux. Ceparalléliſme coincide auſſi avec l’axe magnétiquedu globe, quoique ſes pôles ſoient renverſés;enſorte que le pôle Nord de la colline répondau pôle Sud de la terre. Les pentes orientale& occidentale préſentent ce qu’on appéleroit,dans la théorie du magnétiſme, des points d’in-différence; l’aiman n’y eſt point affecté, quoi-que le roc y offre la même apparence qu’ail-leurs. J’ai obſervé non-ſeulement que les axesmagnétiques ne ſont pas diſpoſés dans le mêmeplan horiſontal, mais que deux points dontl’action eſt très-forte, ſont joints par des rocsqui n’exercent pas la moindre attraction. L’ana- |381| lyſe de ces compoſés donne les mêmes réſultats,& il ne ſeroit pas moins difficile de découvrirquelque différence d’aggrégation entr’eux, qu’ilne l’eſt de diſtinguer, à l’œil, du fer qui areçu la touche magnétique, de celui qui n’eſtpas aimanté. Il ſe préſente ici une queſtion qui ne peutétre réſolue que dans un demi ſiecle. Les tablesfondées ſur les obſervations de Picard, La Hire, Maraldi, Caſſini & Le Monnier, montrent quel’aiguille a décliné à l’Oueſt depuis 1660, &que cette déclinaiſon continue à augmenter,quoique les oſcillations cauſées par les tempé-ratures des ſaiſons & les chaleurs du Midi, oc-caſionnent ſouvent une marche rétrograde. Ilfaudroit déterminer aſtronomiquement, par laculmination des étoiles, la direction préciſe del’axe magnétique de notre montagne & voir ſielle ſeroit stationnaire juſqu’en 1850, ou ſielle accompagneroit les variations de l’aiguilleà l’Oueſt? Notre ignorance profonde ſur lescauſes de ces variations, ainſi que ſur la plupartdes phénomenes géologiques ne nous permetpas de réſoudre un problême auſſi compliqué. On peut faire d’autres obſervations égale-ment intéreſſantes ſur l’identité des forces ma-gnétiques. J’ai découvert une maſſe de rochersqui agiſſent ſur l’aiguille à la diſtance de vingt-deux pieds; un appareil ſemblable au magné-tometre de Mr. De Sauſſure, indiqueroit ſi l’in- |382| tenſité abſolue de cette attraction eſt ſujette àvarier avec les ſaiſons, avec les heures du jour;ſi elle eſt influencée par l’aurore boréale, parune atmoſphere chargée d’électricité? Les mê-mes rocs agiroient peut-être ſur l’aiguille, tantôtà ſeize, tantôt à vingt-huit pieds de diſtance. On a obſervé que les métaux ferrugineuxexpoſés à l’air ſe pénetrent graduellement defluide magnétique: une légere oxidation du ferſemble favoriſer cet effet. J’ai obſervé moi-mêmeque dans un banc de fer magnétique les partiesſeules qui étoient en contact avec l’air, affectoientl’aiguille. On conſidere ce phénomene commeprovenant de l’électricité atmoſphérique. Je ſaisbien que l’éclair rend magnétique une barre defer; qu’une batterie électrique produit ſouventle même effet; mais je ne vois pas pourquoil’électricité atmoſphérique agiroit ſimplementſur la ſurface extérieure d’une couche de fermagnétique, qui eſt un bon conducteur d’élec-tricité. L’oxygene de l’atmoſphere n’auroit ilaucune influence dans cette opération? — Maisſans m’égarer dans les probabilités, je préferem’attacher aux faits. J’ai obſervé des rochersqui, couverts de gazon, n’avoient pas été encontact avec l’air, & j’ai trouvé que leur ma-gnétiſme étoit le même. On voit dans les montagnes du Hartz un rocde granit, nommé le Schnarcher ; il s’éleve enforme de tour ou de pyramide tronquée. Ce |383| granit affecte auſſi l’aiguille, mais il agit ſeule-ment en maſſe & dans une ſeule couche verti-cale. Ses morceaux détachés n’ont aucune ac-tion magnétique. C’eſt à Mr. de Trebra, cé-lebre par ſes recherches ſur l’intérieur des mon-tagnes, que nous devons cette découverteimportante. Quelques Naturaliſtes prétendent que le Schnarcher contient dans ſon intérieur unemaſſe de fer magnétique; d’autres préſumentqu’un coup de tonnerre a produit le phénomeneen queſtion & aimanté une couche particulieredu rocher. La nature du roc dont j’ai l’honneur de vousentretenir n’admet pas d’explication ſemblable.Non-ſeulement la ſerpentine agit en maſſe, dansſa ſituation naturelle, mais tous ſes fragmens,juſqu’aux dernieres ſubdiviſions, ont auſſi leurspôles diſtincts. Des morceaux de cinq poucesde diamêtre agiſſent ſur l’aiguille à la diſtanced’un demi pied. L’examen des axes magnéti-ques pourroit faire l’objet d’une recherche cu-rieuſe. Ils ſont, pour l’ordinaire, paralleles àla direction des feuillets de la pierre; mais j’enai trouvé qui la coupoient à angles droits. Detrès-petits fragmens, de la groſſeur de \( \frac{1}{100} \) deligne cube, montrent une polarité très-forte enproportion de leurs maſſes. Vous les voyez ſeretourner bruſquement lorſqu’on leur préſente,l’un après l’autre, les pôles de l’aiman le plus |384| foible. C’eſt un phénomene très-frappant, quede voir une pierre qui poſſede une auſſi fortepolarité, ne montrer aucune attraction pour lefer non-aimanté. Je n’ai jamais vû les plus pe-tites particules de limailles s’attacher à la ſer-pentine, mais celle-ci, réduite en poudre, eſttrès-promptement attirée par l’aiman. Vous me demanderez, avec impatience, s’ileſt bien prouvé que ma ſerpentine ne contiennepas de fer magnétique; ſi ce mêlange ne ſeroitpoint aſſez intime pour entrer dans la compo-ſition de chaque particule de la pierre? Je puisvous aſſurer que j’ai fait, à cet égard, les recher-ches les plus exactes; Mr. Godeking dont lesconnoiſſances & les talens ne permettent pasde ſuppoſer qu’il ſe trompe aiſément, m’a aidédans ce travail, & nous nous ſommes convain-cus que, ſi la force magnétique ne peut appar-tenir aux ſubſtances terreuſes qui forment labaſe de la ſerpentine, on ne peut l’attibuerqu’au fer, dans l’état d’oxide, qui la colore.Voici nos raiſons: on n’obſérve dans cettepierre aucun mêlange de ſubſtances métalliques;on y voit ſeulement çà & là quelques fragmensde talc ou d’amianthe, mais ni pyrites, niſchorl, ni fer octaëdre magnétique. Réduite enpoudre fine, elle reſſemble à de la craie. Onn’y voit à la loupe que des particules terreuſesd’un vert clair, tirant ſur le blanc. La peſan-teur ſpécifique de la pierre eſt très-peu con- |385| ſidérable; elle eſt entre 1901 & 2040, (l’eauétant 1000). Il n’y a donc guères que la pierreponce, le liége ou cuir de montagne, & quel-ques variétés d’opale qui lui ſoyent inférieu-res en denſité. Les expériences chimiques parleſquelles nous en avons commencé l’analyſe,prouvent qu’elle contient, comme le jade, oucomme la pierre ollaire, du fer oxidé, maisnon attirable. Les ſolutions dans l’acide nitro-muriatique (eau régale) ſont jaunes & non pasvertes comme le ſont celles faites avec le fermicacé & avec les mines qui contiennent lefer pur ou dans l’état métallique. Il y a donc ici un phénomene remarquable,ſavoir la polarité du fer ſur-oxygéné. Les ſavan-tes recherches de mes célebres compatriotes Klaproth & Wenzel nous apprennent que lenickel pur, & le cobalt, ſont attirables à l’ai-man: nous ſavons que le fer légèrement oxidé(l’oxide noir) l’eſt auſſi; mais quelle différencen’y a-t-il pas entre cet état d’oxidation & celuidu fer qui colore la ſerpentine, diverſes pier-res calcaires, & peut-être même certains végé-taux! Quelle différence entre une ſubſtance quiagit de la même maniere ſur les deux extrémi-tés de l’aiguille, & une pierre dont les pluspetites portions jouiſſent d’une polarité ſpon-tanée! — Obſervons; recueillons des faits indu-bitables; c’eſt ſeulement ainſi que les théoriesphyſiques s’établiront ſur des baſes ſolides.